Lamort n'est rien, je suis simplement passé dans la piÚce d'à cÎté. Ce que j'étais pour vous, je le suis toujours. Donnez-moi le nom que vous m'avez toujours donné, parlez-moi comme vous l'avez toujours fait. N'employez pas un ton différent, ne prenez pas un air solennel ou triste. Continuez à rire de ce qui nous faisait rire ensemble.

Avers Effigie, de trois quart Ă  gauche, du poĂšte, en uniforme d’officier du 276e RĂ©giment d’ Des Ă©pis de blĂ© disposĂ©s en ogive de cathĂ©drale ou bien comme des mains jointes pour la lĂ©gende HEUREUX LES EPIS MURS ET LES BLES l’exergue 5 SEPTEMBRE 1914, jour de la mort de PĂ©guy. Historique Charles Peguy. Il y Ă  quelque chose de pire que d’avoir une mauvaise pensĂ©e. C’est d’avoir une pensĂ©e toute faite ». Charles Peguy 1873-1914. PoĂšte et penseur engagĂ© de son Ă©poque, il est un des auteurs majeurs du XXĂšme siĂšcle. Pourtant, son hĂ©ritage intellectuel est aujourd’hui souvent mĂ©connu. Charles PĂ©guy est nĂ© le 7 janvier 1873 Ă  OrlĂ©ans. Il est le premier et l’unique enfant d’une famille d’artisans modestes. L’ardeur Ă  l’ouvrage et l’amour du travail bien fait sont tout le patrimoine de Charles PĂ©guy. Certes il est d’humble origine, mais ce n’est pas un dĂ©shĂ©ritĂ© ». Lorsqu’il se penche sur sa lignĂ©e, c’est pour tirer gloire d’une ascendance qui ne comprend ni grand nom, ni fortune, et qui pourtant recueille toute la richesse d’un peuple. L’anonyme est son patronyme » par cette formule de la Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartĂ©sienne, il rend hommage Ă  la foule de ceux qui ont existĂ© avant lui, analphabĂštes comme sa grand-mĂšre, intelligents et braves comme elle, capables de durer et de crĂ©er en dĂ©pit des Ă©preuves. Dans L’Argent, ouvrage paru en 1913, un an avant la mort de PĂ©guy, l’homme de quarante ans » nous dĂ©peint le monde de son enfance. C’est un monde idĂ©alisĂ©, parĂ© de toutes les vertus que le prĂ©sent n’a plus De mon temps, tout le monde chantait. » Le culte du travail, la sobriĂ©tĂ© des mƓurs sont la marque de ce monde rĂ©volu. Pourtant, PĂ©guy n’a pas toujours eu ce regard sur son passĂ©. Un autre texte, Ă©crit bien plus tĂŽt et restĂ© inachevĂ©, ajoute une touche d’ironie Ă  la nostalgie des souvenirs. Son titre, Ă  lui seul, est rĂ©vĂ©lateur Pierre, commencement d’une vie bourgeoise. Le jeune homme qui se penche alors sur son enfance ne la considĂšre pas avec la mĂȘme indulgence que l’auteur de L’Argent
 En dĂ©pit de son parcours personnel, s’élever dans la sociĂ©tĂ©, ne sera jamais pour lui un objectif. Bien au contraire, ce qu’il souhaite, c’est que soit rendu Ă  chacun la dignitĂ© de son Ă©tat Tous ensemble et chacun sĂ©parĂ©ment premiers. » Telle est sa conception de la dĂ©mocratie. Aussi ne voit-il qu’une perversion de l’esprit dĂ©mocratique » dans la fiertĂ© que sa mĂšre tire de sa rĂ©ussite, et qu’il raille en ces termes Que le fils d’un ouvrier mĂ©canicien fĂ»t reçu Ă  Saint-Cyr 
 c’était tout Ă  fait bien. Qu’un fils d’instituteur fĂ»t reçu Ă  Polytechnique, c’était mieux encore. Et que le fils d’une rempailleuse de chaises fĂ»t reçu Ă  l’Ecole normale supĂ©rieure, c’était la gloire mĂȘme. » Premiers engagements le socialisme et l’affaire Dreyfus. Jean JaurĂšs, normalien, professeur de philosophie, est un intellectuel qui a dĂ©cidĂ© d’entrer dans l’action politique pour promouvoir son idĂ©al de justice sociale. D’abord dĂ©putĂ© de centre gauche, il adhĂšre au socialisme Ă  l’époque oĂč ce courant de pensĂ©e, nourri des utopies de la premiĂšre moitiĂ© du dix-neuviĂšme siĂšcle, n’a pas encore subi l’attraction du marxisme. A l’Ecole normale supĂ©rieure, PĂ©guy subit l’influence de ce grand aĂźnĂ©, relayĂ©e par celle de Lucien Herr, le bibliothĂ©caire de l’Ecole. Avec quelques camarades, il se livre Ă  de grands dĂ©bats d’idĂ©es dans sa chambre, baptisĂ©e la thurne Utopie ». DĂšs 1895, PĂ©guy devient membre du Parti socialiste. Avant de s’engager politiquement, l’étudiant milite Ă  la Mie de Pain, une association caritative qui distribue de la nourriture aux indigents de la capitale. Pour PĂ©guy, supprimer la misĂšre est le premier devoir, parce que la misĂšre prive l’homme de son humanitĂ©. Il ne la confond pas avec la pauvretĂ©, qu’il a connue dans son enfance, et dont il ferait presque un idĂ©al de vie. La pauvretĂ© engendre la solidaritĂ©. La misĂšre est synonyme d’exclusion. Le misĂ©reux est mis au ban de la sociĂ©tĂ©, mais, plus radicalement, n’ayant pas les moyens de penser Ă  autre chose qu’à sa survie, il est rejetĂ© hors de l’humanitĂ©. Or toute la pensĂ©e de PĂ©guy et tous ses engagements reposent sur le refus de l’exclusion. Penseur dans la citĂ©, PĂ©guy est d’abord un penseur de la citĂ©, qui ne peut admettre qu’aucune crĂ©ature, humaine ou animale, demeure en marge, soit Ă©trangĂšre ». En mĂȘme temps, il est hostile Ă  toute forme d’asservissement du singulier au collectif. La sociĂ©tĂ© socialiste de PĂ©guy ne cherche aucunement Ă  transformer les hommes en leur inculquant des principes ou une idĂ©ologie. Au contraire, elle s’efforce, par son organisation Ă©conomique, de leur donner la possibilitĂ© d’exister tels qu’ils sont, dans leur diversitĂ©. Cette vision que PĂ©guy dĂ©ploie dĂšs 1896 dans un texte de jeunesse intitulĂ© Marcel, Premiers Dialogues de la citĂ© harmonieuse, exprime l’essence de son socialisme. Elle permet de comprendre tout ce qui devait l’opposer au socialisme historique qui se met en place avec la crĂ©ation de la unifiĂ©e sur les bases du marxisme, et se dĂ©veloppe tout au long du XXe siĂšcle pour culminer dans le communisme totalitaire. L’unitĂ© fait horreur Ă  PĂ©guy, car elle suppose l’uniformitĂ©. Pour lui, il n’y a pas de rĂ©volution sociale lĂ©gitime sans respect de la personne et de sa singularitĂ©. A OrlĂ©ans, il fonde un groupe d’étudiants socialistes, au grand dam de sa mĂšre, qui redoute les ennuis que pourraient lui valoir ses activitĂ©s politiques. Il a demandĂ© une annĂ©e de congĂ© afin de pouvoir se consacrer Ă  sa premiĂšre grande Ɠuvre une vie de Jeanne d’Arc, qu’il rĂ©dige de fin 1895 Ă  fin 1896. L’hĂ©roĂŻne, qui n’a pas encore Ă©tĂ© canonisĂ©e ni accaparĂ©e par la droite nationaliste, est alors cĂ©lĂ©brĂ©e par les rĂ©publicains comme une figure patriotique, sortie du peuple et sauvant le peuple. Ce qui fascine en elle le jeune PĂ©guy, c’est son engagement solitaire au cƓur de la mĂȘlĂ©e. Cet enthousiasme des premiers temps conduit PĂ©guy Ă  des initiatives audacieuses. EncouragĂ© par Lucien Herr, il s’associe Ă  d’autres camarades, parmi lesquels LĂ©on Blum, le futur dirigeant de la pour fonder une maison d’édition socialiste, la SociĂ©tĂ© Nouvelle de Librairie et d’Edition. Bien qu’il se soit inscrit Ă  l’AgrĂ©gation de philosophie, PĂ©guy est prĂȘt Ă  renoncer Ă  l’enseignement et Ă  la carriĂšre universitaire pour une existence plus risquĂ©e, toute entiĂšre vouĂ©e Ă  la transmission de ses convictions. Le mĂ©tier de libraire ainsi entendu lui convient Ă  merveille, et il adresse finalement sa dĂ©mission au directeur de l’Ecole normale supĂ©rieure afin d’avoir les mains libres pour se lancer dans la carriĂšre de son choix. L’annĂ©e 1898 a vu les passions se dĂ©chaĂźner autour de l’affaire Dreyfus dans le sillage de JaurĂšs et de Zola, PĂ©guy s’engage, signant des pĂ©titions, manifestant Ă  la tĂȘte de groupes d’étudiants en faveur du capitaine injustement accusĂ©. Alors, il combat en chef militaire » de l’Ecole normale supĂ©rieure. Avec JaurĂšs, il est convaincu que le devoir des socialistes est de s’élever contre la raison d’Etat quand elle fait cause commune avec l’injustice, mĂȘme si la victime de cette injustice est un bourgeois ». PĂ©guy dissident. En dĂ©cembre 1899 se tient un congrĂšs lors duquel est adoptĂ©, au nom de l’unitĂ© du Parti, le principe de la censure dans les journaux et publications socialistes. DĂ©sormais, il y aura une vĂ©ritĂ© socialiste, Ă  laquelle tous devront se conformer. Parce qu’il n’accepte pas ce tournant, PĂ©guy se trouve en opposition avec les membres de la SociĂ©tĂ© nouvelle de librairie et d’édition, qui, eux, suivent le Parti. La rupture est consommĂ©e. DĂšs lors, PĂ©guy est seul. Seul contre ses amis d’hier, seul contre le mouvement de l’histoire. Mais il n’a renoncĂ© Ă  rien. Son socialisme, celui de ses premiers Ă©lans, il le fera vivre Ă  travers une revue qui se confond avec la vie et l’Ɠuvre de l’écrivain qu’il devient Les Cahiers de la Quinzaine. Quelques citations de Charles Peguy – Quarante ans est un Ăąge terrible. Car c’est l’ñge oĂč nous devenons ce que nous sommes. – Il y a des larmes d’amour qui dureront plus longtemps que les Ă©toiles du ciel. – Aimer c’est donner raison Ă  l’ĂȘtre aimĂ© qui a tort. – On reconnaĂźt les honnĂȘtes gens Ă  ce qu’ils font leurs mauvais coups avec plus de maladresse que les autres. – Le vieillissement est essentiellement une opĂ©ration de mĂ©moire. Or c’est la mĂ©moire qui fait toute la profondeur de l’homme. – Une Ăąme morte est une Ăąme complĂštement habituĂ©e. – Je me permets quelquefois de rĂ©flĂ©chir entre mes repas, ce qui me fait perdre Ă©normĂ©ment de temps.

Cetexte de Charles Péguy, extrait de L'Argent, a été écrit en 1917. Il demeure d'une étonnante actualité : "Pour la premiÚre fois dans l'histoire du monde, les puissances spirituelles
LA MORT N’EST RIEN La mort n’est rien Je suis simplement passĂ© dans la piĂšce Ă  cotĂ©. Je suis moi. Tu es toi. Ce que nous Ă©tions l’un pour l’autre, Nous le sommes toujours. Donne moi le nom que tu m’as toujours donnĂ©. Parle moi comme tu l’as toujours fait. N’emploie pas un ton diffĂ©rent. Ne prends pas un air solennel ou triste. Continue Ă  rire De ce qui nous faisait rire ensemble. Prie Souris. Pense Ă  moi Prie pour moi . Que mon nom soit prononcĂ© Ă  la maison Comme il l’a toujours Ă©tĂ© ; Sans emphase d’aucune sorte Et sans trace d’ombre La vie signifie Ce qu’elle a toujours signifiĂ©. Elle reste ce qu’elle a toujours Ă©tĂ©. Le fil n’est pas coupĂ©. Pourquoi serais-je hors de la pensĂ©e , Simplement parce que je suis hors de la vue ? Je t’attends. Je ne suis pas loin. Juste de l’autre cotĂ© du chemin. Tu vois, tout est bien. Charles PĂ©guy A bientĂŽt Papa ; A bientĂŽt Maman ; le temps n'est rien ; ce n'est qu'une question d'annĂ©es ; mais il me semblera bien long ce temps pour nous retrouver ... Votre fille qui vous aime. Voiciun magnifique texte de Charles Peguy  « La mort n'est rien » de Charles Peguy. « La mort n'est rien : je suis seulement passĂ©, dans la piĂšce Ă  cĂŽtĂ©. Je suis moi. Vous ĂȘtes vous. Ce que 19 septembre 2014 5 19 /09 /septembre /2014 2222 L'amour ne disparaĂźt jamais, la mort n'est rien. Je suis seulement passĂ© dans la piĂšce Ă  cĂŽtĂ©. Je suis moi, tu es toi. Ce que nous Ă©tions l'un pour l'autre nous le sommes toujours. Offre-moi ton nom pour toujours Parle-moi comme tu l'as toujours fait. N'emploie pas un ton diffĂ©rent, ne prends pas un air solennel ou triste. Poursuit ton sourire qui nous faisait rire ensemble. Prie, souris, pense Ă  moi. Prie pour moi. Que mon nom soit prononcĂ© Ă  la maison comme il l'a toujours Ă©tĂ©, L'existence dans la vie signifie tout Elle est ce qu'elle a toujours Ă©tĂ©. Le fil n'est pas coupĂ©. Pourquoi serais-je hors de ta pensĂ©e simplement parce que je suis hors de ta vie... Je t'attends, je ne suis pas loin, juste de l'autre cĂŽtĂ© du chemin. Tu vois, tout est bien. Charles PĂ©guy ___________________________________________________________________________________________ Published by Marc-Elie - dans PoĂšmes
Centans aprÚs sa mort,Charles Péguy est toujours d'actualité. Sa pensée continue à oeuvrer et à s'exercer aujourd'hui sur les esprits les plus divers. Cette penséedéborde de toutes parts et bouleverse nos catégories académiques, puisqu'ellefut ensemble et tour à tour celle d'un révolutionnaire, d'un socialiste, d'un historien,d'un journaliste, d'
lun 28 Nov 2011ven 6 Mar 2020 La mort n’est rien, je suis seulement passĂ©, dans la piĂšce Ă  cĂŽtĂ©. Je suis moi. Vous ĂȘtes vous. Ce que j’étais pour vous, je le suis toujours. Donnez-moi le nom que vous m’avez toujours donnĂ©, parlez-moi comme vous l’avez toujours fait. N’employez pas un ton diffĂ©rent, ne prenez pas un air solennel ou triste. Continuez Ă  rire de ce qui nous faisait rire ensemble. Priez, souriez, pensez Ă  moi, priez pour moi. Que mon nom soit prononcĂ© Ă  la maison comme il l’a toujours Ă©tĂ©, sans emphase d’aucune sorte, sans une trace d’ombre. La vie signifie tout ce qu’elle a toujours Ă©tĂ©. Le fil n’est pas coupĂ©. Pourquoi serais-je hors de vos pensĂ©es, simplement parce que je suis hors de votre vue ? Je ne suis pas loin, juste de l’autre cĂŽtĂ© du chemin. Canon Henry Scott-Holland 1847-1918, traduction d’un extrait de “The King of Terrors”, sermon sur la mort 1910 Quelquefois attribuĂ© Ă  Charles PĂ©guy, d’aprĂšs un texte de Saint Augustin Lamort n’est rien Je suis simplement passĂ© dans la piĂšce Ă  cĂŽtĂ©. Je suis moi. Tu es toi. Ce que nous Ă©tions l’un pour l’autre, nous le sommes toujours. Donne-moi le nom que tu
Bonjour mes anges ! Voici un joli poĂšme que j'ai trouvĂ© en me baladant sur le net... L'auteur l'a Ă©crit de son vivant, et je souhaitais vous le faire partager... En cliquant sur la photo, vous pourrez lire sa biographie sur WikipĂ©dia...La mort n’est rien La mort n’est rien, je suis simplement passĂ© dans la piĂšce Ă  cĂŽtĂ©. Je suis moi, vous ĂȘtes vous. Ce que nous Ă©tions les uns pour les autres, Nous le sommes toujours. Donnez-moi le nom que vous m’avez toujours donnĂ©, Parlez-moi comme vous l’avez toujours fait, N’employez pas un ton solennel ou triste, Continuez Ă  rire de ce qui nous faisait rire ensemble, Priez, souriez, pensez Ă  moi, Que mon nom soit prononcĂ© comme il l’a toujours Ă©tĂ©, Sans emphase d’aucune sorte, sans trace d’ombre, La vie signifie tout ce qu’elle a toujours signifiĂ©, Elle est ce qu’elle a toujours Ă©tĂ©. Le fil n’est pas coupĂ©, Simplement parce que je suis hors de votre vue. Je vous attends. Je ne suis pas loin. Juste de l’autre cĂŽtĂ© du chemin. Vous voyez tout est bien. [Charles PĂ©guy] bientĂŽt quelque part mes anges ;
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Lamort n'est rien - Charles PĂ©guy - Dominique Piat by Jean-Pierre HanĂ© , "Mon petit théùtre sonore" published on 2021-02-11T07:18:49Z. Recommended tracks L'homme n'est pas une chĂšvre - de GĂ©rard Mordillat - par Jean-Pierre HanĂ© by Jean-Pierre HanĂ© , "Mon petit théùtre sonore" published on 2021-05-15T07:27:06Z. Users who like La mort n'est rien - Charles PĂ©guy FIDELI FIDELIS JĂ©sus parle. Ô mĂšre ensevelie hors du premier jardin, Vous n’avez plus connu ce climat de la grĂące, Et la vasque et la source et la haute terrasse, Et le premier soleil sur le premier matin. Et les bondissements de la biche et du daim Nouant et dĂ©nouant leur course fraternelle Et courant et sautant et s’arrĂȘtant soudain Pour mieux commĂ©morer leur vigueur Ă©ternelle, Et pour bien mesurer leur force originelle Et pour poser leurs pas sur ces moelleux tapis, Et ces deux beaux coureurs sur soi-mĂȘme tapis Afin de saluer leur lenteur solennelle. Et les ravissements de la jeune gazelle Laçant et dĂ©laçant sa course vagabonde, Galopant et trottant et suspendant sa ronde Afin de saluer sa race intemporelle. Et les dĂ©passements du bouc et du chevreuil MĂȘlant et dĂ©mĂȘlant leur course audacieuse Et dressĂ©s tout Ă  coup sur quelque immense seuil Afin de saluer la terre spacieuse. Et tous ces filateurs et toutes ces fileuses MĂȘlant et dĂ©mĂȘlant l’écheveau de leur course, Et dans le sable d’or des vagues nĂ©buleuses Sept clous articulĂ©s dĂ©coupaient la Grande Ourse. Et tous ces inventeurs et toutes ces brodeuses Du lacis de leurs pas dĂ©coupaient des dentelles. Et ces beaux arpenteurs parmi ces ravaudeuses Dessinaient des glacis devant des citadelles. Une crĂ©ation naissante et sans mĂ©moire Tournante et retournante aux courbes d’un mĂȘme orbe. Et la faĂźne et le gland et le coing et la sorbe Plus juteux sous les dents que la prune et la poire. Vous n’avez plus connu la terre maternelle Fomentant sur son sein les faciles Ă©pis, Et la race pendue aux innombrables pis D’une nature chaste ensemble que charnelle. Vous n’avez plus connu ni la glĂšbe facile, Ni le silence et l’ombre et cette lourde grappe, Ni l’ocĂ©an des blĂ©s et cette lourde nappe, Et les jours de bonheur se suivant Ă  la file. Vous n’avez plus connu ni cette plaine grasse, Ni l’avoine et le seigle et leurs dĂ©bordements, Ni la vigne et la treille et leurs festonnements, Et les jours de bonheur se suivant Ă  la trace. Vous n’avez plus connu ce limon qui s’encrasse À force d’ĂȘtre Ă©pais et d’ĂȘtre nourrissant ; Vous n’avez plus connu le pampre florissant, Et la race des blĂ©s jaillis pour votre race. Vous n’avez plus connu l’arbre chargĂ© de pommes Et pliant sous le faix dans la mĂ»re saison ; Vous n’avez plus connu devant votre maison Les blĂ©s enfants jaillis pour les enfants des hommes. Ce qui depuis ce jour est devenu la fange N’était encor qu’un lourd et plastique limon ; Et la Sagesse mĂȘme et le roi Salomon N’eĂ»t point dĂ©partagĂ© l’homme d’avecque l’ange. Ce qui depuis ce jour est devenu la somme S’obtenait sans total et sans addition ; Et la Sagesse assise au coteau de Sion N’eĂ»t point dĂ©pareillĂ© l’ange d’avecque l’homme. Vous n’avez plus connu ni cette plaine rase, Ni le secret ravin aux pentes inclinĂ©es, Ni le mouvant tableau des ombres dĂ©clinĂ©es. Ni ces vallons plus pleins que le flanc d’un beau vase. Vous n’avez plus connu les saisons couronnĂ©es Dansant le mĂȘme pas devant le mĂȘme temps ; Vous n’avez plus connu vers le mĂȘme printemps Le long balancement des saisons prosternĂ©es. Vous n’avez plus connu les fleurs nouvelles-nĂ©es Jaillissant des sommets en Ă©normes cascades ; Vous n’avez plus connu les profondes arcades, Et du haut des cyprĂšs les ombres dĂ©cernĂ©es. Vous n’avez plus connu les naissantes annĂ©es Jaillissant comme un chƓur du haut du jeune temps ; Vous n’avez plus connu vers un jeune printemps Le chaste enlacement des saisons alternĂ©es. Vous n’avez plus connu les saisons discernĂ©es Par un Ă©gal bonheur au creux d’un mĂȘme temps ; Vous n’avez plus connu vers un Ă©gal printemps L’égal dĂ©roulement des saisons gouvernĂ©es. Vous n’avez plus connu les saisons retournĂ©es Vers un Ă©gal bonheur et vers le mĂȘme temps ; Vous n’avez plus connu vers le mĂȘme printemps Le souple enroulement des saisons dĂ©tournĂ©es. Vous n’avez plus connu de l’un Ă  l’autre pĂŽle La terre balancĂ©e ainsi qu’une nacelle ; Et le dĂ©sistement et le retrait d’épaule D’une saison pĂ©rie encor que jouvencelle. Vous n’avez plus connu de l’un Ă  l’autre pĂŽle La terre balancĂ©e ainsi qu’un beau trois-mĂąts ; Et le renoncement, l’effacement d’épaule De la saison qui meurt au retour des frimas. Vous n’avez plus connu de l’un Ă  l’autre pĂŽle La terre balancĂ©e ainsi qu’un bĂątiment ; Et le dĂ©tournement et la blancheur d’épaule D’une saison qui meurt pour Ă©ternellement. Ce qui depuis ce jour est devenu la boue Était alors le suc de la fĂ©conde terre. Et nul ne connaissait la peine hĂ©rĂ©ditaire. Et nul ne connaissait la houlette et la houe. Ce qui depuis ce jour est devenu la mort N’était qu’un naturel et tranquille dĂ©part. Le bonheur Ă©crasait l’homme de toute part. Le jour de s’en aller Ă©tait comme un beau port. Les bonheurs qui tombaient faisaient un dĂ©versoir, Le silence de l’ñme Ă©tait comme un Ă©tang. Le soleil qui montait faisait un ostensoir Et se rĂ©percutait dans un ciel Ă©clatant. Les vapeurs qui montaient faisaient un encensoir. Et les cĂšdres faisaient de hautes barricades. Et les jours de bonheur Ă©taient des colonnades. Et tout se reposait dans le calme du soir. Et la terre n’était qu’un vaste reposoir. Et les fruits toujours prĂȘts sur les rameaux de l’arbre, Et les jours toujours prĂȘts sur les tombeaux de marbre Ne faisaient qu’un immense et temporel dressoir. Et la terre n’était qu’un jardin bocager. Et les fruits alignĂ©s aux Ă©tages de l’arbre, Et les jours alignĂ©s sur les Ăąges de marbre Ne faisaient qu’un immense et temporel verger. Et la terre n’était qu’un vaste potager. Et l’homme accoutumĂ© parmi ces plates-bandes, RespectĂ© de la bĂȘte administrait ces bandes Ainsi qu’un amiable et naturel berger. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Se reposait penchĂ© sur sa crĂ©ation. Et l’amour filial et l’amour paternel Se nourrissaient d’hommage et de libation. Et Dieu lui-mĂȘme juste ensemble qu’éternel Avait pesĂ© le monde au grĂ© de sa balance. Et il considĂ©rait d’un regard paternel L’homme de son image et de sa ressemblance. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que la fleur d’un jeune Ăąge. Et pĂšre il regardait d’un regard paternel Le monde rassemblĂ© comme un humble village. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que la nuit et le jour. Et pĂšre il contemplait d’un regard paternel Le monde au coin d’un bois jetĂ© comme un gros bourg. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que le temps et que l’ñge ; PĂšre il considĂ©rait d’un regard paternel Le monde circonscrit ainsi qu’un beau village. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est qu’un tour et qu’un retour. Et pĂšre il contemplait d’un regard paternel Le monde rassemblĂ© comme un Ă©norme bourg. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que le temps de l’annĂ©e. Immuable il voyait d’un regard paternel Passer parmi ses sƓurs la saison couronnĂ©e. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que le temps et le lieu. Calme et laissant descendre un regard paternel, Il voyait ce que c’est que le reflet de Dieu. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que le temps et le lieu. Calme et laissant tomber un regard paternel, Il voyait ce que c’est que l’image de Dieu. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que le temps et l’espace. PĂšre il considĂ©rait d’un regard paternel Ce que c’est que d’un monde Ă©phĂ©mĂšre et qui passe. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est qu’un monde qui dit oui. Fleuriste il regardait d’un regard paternel L’épanouissement d’un monde Ă©panoui. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est qu’un espace Ă©tendu. Fixe il considĂ©rait d’un regard paternel L’évanouissement d’un monde dĂ©tendu. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que les jeux du jeune Ăąge. Calme et laissant poser son regard paternel Il se considĂ©rait dans l’homme son image. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que les vƓux du jeune Ăąge. Provident il voyait d’un regard paternel Le monde se dresser pour cet appareillage. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est qu’enfants du premier Ăąge. IntĂšgre il regardait d’un regard paternel Le monde appareiller le long d’un beau rivage. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que jeunes nourrissons. PĂšre il considĂ©rait d’un regard paternel La plus jeune gamine et les derniers bessons. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que jeunes jouvenceaux. PĂšre il considĂ©rait d’un regard paternel Une mĂšre penchĂ©e au bord de deux berceaux. Dieu lui-mĂȘme penchĂ© sur l’amour Ă©ternelle La revoyait fleurir dans de pauvres hameaux. PĂšre il considĂ©rait une amour maternelle Doublement partagĂ©e entre deux beaux jumeaux. Dieu lui-mĂȘme penchĂ© sur l’amour solennelle La regardait fleurir au fin fond des hameaux. PĂšre il considĂ©rait une amour fraternelle DĂ©jĂ  communiquĂ©e entre deux beaux jumeaux. Dieu lui-mĂȘme penchĂ© sur la fleur Ă©ternelle La regardait fleurir aux pointes des rameaux. Dieu lui-mĂȘme penchĂ© sur l’amour fraternelle La regardait germer dans le cƓur des GĂ©meaux. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que les ris du jeune Ăąge. IntĂšgre il regardait d’un regard paternel Le monde se grouper comme un beau voisinage. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que les pleurs du jeune Ăąge. IntĂšgre il regardait d’un regard paternel Le monde commencer son long pĂšlerinage. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que les cris du jeune Ăąge. IntĂšgre il regardait d’un regard paternel Le monde appareiller le long de ce rivage. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que baisers du jeune Ăąge. IntĂšgre il regardait d’un regard paternel Le monde lever l’ancre au bord de ce voyage. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que les soins du jeune Ăąge. Anxieux il voyait d’un regard paternel Le monde appareiller au seuil de ce naufrage. Et Dieu lui-mĂȘme jeune ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que le progrĂšs de l’ñge. D’un regard toujours jeune et toujours paternel Il regardait vieillir un monde jeune et sage. Et Dieu lui-mĂȘme sage ensemble qu’éternel ConsidĂ©rait son Ɠuvre et trouvait qu’il est bon. Du premier diamant jusqu’au dernier charbon, Il enveloppait tout d’un regard paternel. Et Dieu lui-mĂȘme bon ensemble qu’éternel ConsidĂ©rait son Ɠuvre et trouvait qu’il est bien Et qu’il Ă©tait parfait et qu’il n’y manquait rien Et que tout dĂ©roulait un ordre solennel. Et la crĂ©ation Ă©tait comme une tour Qui s’élĂšve au-dessus d’un immense palais. Et le temps et l’espace assuraient les relais. Et les jours de bonheur Ă©taient comme un seul jour. Et les fidĂ©litĂ©s Ă©taient comme une tour. Et le temps et l’espace en Ă©taient les valets. Et le temps et l’espace assuraient les dĂ©lais. Et les fidĂ©litĂ©s Ă©taient un seul amour. Un Dieu lui-mĂȘme auteur ensemble qu’éternel ConsidĂ©rait son Ɠuvre et disait qu’il est bon. De la fleur de pommier jusqu’au dernier chardon, Il enveloppait tout d’un regard paternel. Un Dieu lui-mĂȘme auguste ensemble qu’éternel Ne voyait que dĂ©cence et qu’amour filial. Et le monde d’esprit et le monde charnel N’étaient devant ses yeux qu’un temple lilial. Un Dieu lui-mĂȘme pĂšre ensemble qu’éternel Voyait partout ses fils et les fils de ses fils. Et les champs de mĂ©teil et les champs de maĂŻs Étaient devant ses yeux une nappe d’autel. Un Dieu lui-mĂȘme neuf ensemble qu’éternel Regardait l’univers comme un immense don. Un monde sans offense, un monde sans pardon DĂ©veloppait les plis d’un ordre solennel. Un Dieu nouveau lui-mĂȘme ensemble qu’éternel Regardait ce que c’est que jeune nouveautĂ©. PĂšre et laissant tomber un regard paternel, Il voyait ce que c’est que naissante beautĂ©. Un bon Dieu bienveillant ensemble qu’éternel ConsidĂ©rait son Ɠuvre et trouvait qu’il est pur. Un Dieu cultivateur, Ă©conome et rĂ©el Voyait jaunir le seigle et trouvait qu’il est mĂ»r. Un beau Dieu statuaire ensemble qu’éternel ConsidĂ©rait son Ɠuvre et trouvait qu’il est beau. Et le premier bercail et le dernier tombeau N’étaient qu’un mĂȘme asile Ă©gal et fraternel. Vous n’avez plus connu ce manteau de bonheur JetĂ© sur tout un monde et de bĂ©atitude, Et ce fleuve et ce flot et cette plĂ©nitude, Et ce consentement aux rĂšgles de l’honneur. Vous n’avez plus connu ce manteau de tendresse JetĂ© sur l’ñme mĂȘme et ce manteau d’honneur. Vous n’avez plus connu cette chaste caresse Et ce consentement aux rĂšgles du bonheur. Vous n’avez plus connu ce manteau de bontĂ© JetĂ© sur tout un monde et cette bienveillance, Et cette multitude et l’antique vaillance, Et cette solitude et cette fermetĂ©. Vous n’avez plus connu ce manteau de satin JetĂ© sur tout un peuple et dans cette allĂ©gresse Tout un monde gonflĂ© de la mĂȘme tendresse Depuis le ras du sol jusqu’au dernier gradin. Vous n’avez plus connu cet auguste festin, Et la sĂšve et le sang plus purs qu’une rosĂ©e. La jeune Ăąme avait mis sa robe d’épousĂ©e, Et la terre fleurait la lavande et le thym. Et le jeune homme corps Ă©tait alors si chaste Que le regard de l’homme Ă©tait un lac profond. Et le bonheur de l’homme Ă©tait alors si vaste Que la bontĂ© de l’homme Ă©tait un puits sans fond. Vous n’avez plus connu l’innocence du monde Et les greniers bondĂ©s jusque sur le portail. Vous n’avez plus connu cette race fĂ©conde Et les prĂ©s dĂ©bordant d’un immense bĂ©tail. Vous n’avez plus connu qu’un sĂ©vĂšre destin. Vous n’avez plus connu la terre reposĂ©e. Vous n’avez plus connu qu’un amour clandestin. Vous n’avez plus connu la terre dĂ©posĂ©e. Vous n’avez plus connu les blĂ©s inĂ©puisables Et les gerbes montant Ă  l’assaut des greniers. Vous n’avez plus connu les vignes inlassables Et les grappes montant Ă  l’assaut des paniers. Vous n’avez plus connu les pas ineffaçables, Et les moissons montant sous le vol des abeilles. Les vendanges montant Ă  l’assaut des corbeilles. Les pas des vendangeurs dans les chemins de sables. Vous n’avez plus connu les puits intarissables, Et les moissons montant Ă  l’assaut de la meule. Vous n’avez plus connu qu’une Ăąme errante et seule Et des pas soupçonneux sur des chemins de sables. Vous n’avez plus connu les jours impĂ©rissables, Et les raisins montant Ă  l’assaut du pressoir. Et les treilles montant Ă  l’assaut du dressoir. Et des pas fastueux sur des chemins de sables. Vous n’avez plus connu les blĂ©s involontaires, Vous n’avez plus connu que de pauvres labours. Vous n’avez plus connu que de pauvres amours. Vous n’avez plus connu que des blĂ©s rĂ©fractaires. Vous n’avez plus connu les blĂ©s inoubliables. Vous n’avez plus connu que des jours moissonnĂ©s. Et du haut du coteau des pins dĂ©couronnĂ©s. Et le commencement des jours inexpiables. Vous n’avez plus connu que des puits tarissables, Et sur de maigres champs de plus maigres labours. Et sur de maigres ans de plus maigres amours. Et du haut du plateau des cĂšdres pourrissables. Et du haut du pĂ©chĂ© des Ăąmes corruptibles. Et du haut de la treille un pampre pĂ©rissable. Et du haut de l’orgueil l’envie impĂ©rissable. Et du haut de l’amour des haines putrescibles. Et du haut du bonheur la mort et l’épouvante, Et du haut de l’honneur le travail et la peine. Et du haut de l’amour l’amertume et la haine. Et la honte maĂźtresse et la honte servante. Et du haut de la mort la borne infranchissable, Et la foi toujours pleine et toujours dĂ©cevante. Et du haut du destin le sort inconnaissable. Et du haut de l’amour une pitiĂ© fervente. Vous n’avez plus connu que le temps dans le lieu. Vous n’avez plus connu la jeunesse du monde, Et cette paix du cƓur plus lourde et plus profonde Que l’énorme OcĂ©an sous le regard de Dieu, Vous n’avez plus connu que des biens pĂ©rissables, Et la succession et le vieillissement. Et la procession des maux ineffaçables. Et le regard voilĂ© d’un appauvrissement. Et le regard meurtri d’un affaiblissement, Et sous le mĂȘme front des yeux mĂ©connaissables, Et dans les mĂȘmes yeux des pleurs intarissables, Et les marques de mort et d’amortissement. Et dans les mĂȘmes yeux un tout autre regard, Un regard de dĂ©tresse et d’amoindrissement. Et sous les mĂȘmes cieux un tout autre hasard. Un hasard de tendresse et d’avilissement. Vous n’avez plus connu ce long dĂ©sarmement Et le cƓur inondĂ© d’une haute splendeur. Et dans cette amplitude et ce contentement Tout un monde noyĂ© dans sa propre candeur. Et ce repos d’un cƓur qui ne manque de rien, Et qui se sait servi de toute Ă©ternitĂ©. Et qui reçoit son maĂźtre et possĂšde son bien Dans une solennelle et tremblante unitĂ©. Et je vous aime tant, mĂšre de notre mĂšre, Vous avez tant pleurĂ© les larmes de vos yeux. Vous avez tant levĂ© vers de plus pauvres cieux Un regard inventĂ© pour une autre lumiĂšre. Vous avez tant pleurĂ© votre force premiĂšre. Vous avez tant voilĂ© le regard de vos yeux. Vous avez tant levĂ© vers de plus pauvres cieux Votre voix hĂ©sitante au seuil de la priĂšre. Et je vous aime tant, aĂŻeule roturiĂšre. Vous avez tant lavĂ© le regard de vos yeux. Vous avez tant courbĂ© sous le courroux des cieux Votre nuque et vos reins frissonnants de misĂšre. Vous avez tant levĂ© vers une autre tempĂȘte Une voix dĂ©faillante et tremblante d’amour. Vous avez tant levĂ© vers une pauvre fĂȘte Un regard inventĂ© pour un tout autre jour. Vous avez tant levĂ© le front de votre tĂȘte Vers le repensement d’un plus noble sĂ©jour. Vous avez tant levĂ© vers le haut de la tour Vos esprits Ă©puisĂ©s d’une Ă©ternelle quĂȘte. Et moi je vous salue ĂŽ la premiĂšre femme Et la plus malheureuse et la plus dĂ©cevante Et la plus immobile et la plus Ă©mouvante, AĂŻeule aux longs cheveux, mĂšre de Notre Dame. Et moi je vous salue ĂŽ pleine d’épouvante Et pleine de terreur au seuil des nouveaux jours Et pleine de retraite au fond des nouveaux bourgs Et moi je vous salue ĂŽ vainement fervente. Et moi je vous salue ĂŽ premiĂšre servante, AĂŻeule des bergers et des bons serviteurs, AĂŻeule des bouviers et des premiers pasteurs. Et moi je vous salue ĂŽ premiĂšre suivante. Et moi je vous salue ĂŽ vainement vivante Et vainement offerte Ă  de pauvres malheurs. Et la plus soucieuse et vainement savante Et la plus douloureuse aprĂšs les sept douleurs. Et je vous aime tant, premiĂšre soucieuse, Et vainement assise aux jardins de la peur. Et moi je vous salue ĂŽ la plus anxieuse Et la plus Ă©crasĂ©e aux rĂȘves de torpeur. Et la plus immuable aux robes de stupeur Et la plus enfoncĂ©e en des chemins vaseux Et la plus embourbĂ©e en des sentiers glaiseux Et la plus capturĂ©e en un cercle trompeur. Vous n’avez plus connu les flots tumultueux Jaillis de la fontaine Ă  nulle autre pareille. Vous n’avez plus connu les manteaux somptueux JetĂ©s sur le muguet et la salsepareille. Vous n’avez plus connu les bois silencieux GonflĂ©s de la beautĂ© d’une auguste prĂ©sence. Vous n’avez plus connu dans la clartĂ© des cieux L’image et le reflet d’une auguste innocence. Vous n’avez plus connu que des pas tortueux, Vous n’avez plus connu qu’une Ă©ternelle absence. Vous n’avez plus connu qu’une pauvre dĂ©cence Et la sĂ©vĂ©ritĂ© des chemins montueux. Vous n’avez plus connu ces palais fastueux. Vous n’avez plus connu qu’une pauvre chaumiĂšre. Et vous ĂȘtes la seule et vous ĂȘtes premiĂšre Qui n’ayez plus connu ces blĂ©s tumultueux. Vous n’avez plus connu les flots impĂ©tueux Jaillis de la fontaine Ă  nulle autre seconde. Vous n’avez plus connu dans la clartĂ© d’un monde L’image et le reflet d’un soleil fastueux. Vous n’avez plus connu les blĂ©s impĂ©tueux Se mouvant Ă  l’assaut des plaines infinies. Et le blĂ© sur son socle et les moissons bĂ©nies. Et le recensement des blĂ©s respectueux. Vous n’avez plus connu les blĂ©s prĂ©somptueux Gouvernant les saisons comme une Ă©ternitĂ©, Anticipant le temps en toute impunitĂ©, Vous n’avez plus connu les blĂ©s torrentueux. Vous n’avez plus connu les blĂ©s majestueux Et le manteau royal au seuil de votre cour. Vous n’avez plus connu les enfants fructueux Et le manteau royal au seuil de votre amour. Vous n’avez plus connu les blĂ©s tempĂ©tueux Soulevant tout un monde en leur Ă©norme vague, Et l’homme sur son sol, et la senne, et la drague, Et le dĂ©nombrement des blĂ©s affectueux. Vous n’avez plus connu les blĂ©s tumultueux Se bousculant pour naĂźtre et monter jusqu’à vous. Sur la face de l’ĂȘtre et devant vos genoux Vous n’avez plus connu que des blĂ©s vertueux. Vous n’avez plus connu que des laborieux. Vous n’avez plus connu les blĂ©s par grandes ondes. Vous n’avez plus connu sur la face des mondes La race des puissants et des victorieux. Vous n’avez plus connu ces fontaines profondes. Vous n’avez plus connu que des dĂ©fectueux, Et des gagne-petits et des dĂ©lictueux, Vous n’avez plus connu ces largesses fĂ©condes. Et ces flancs plus ombreux que le flanc d’un beau vase Contenant une race Ă©ternelle et profonde. Et ces regards noyĂ©s d’une profonde extase Et tout Ă©merveillĂ©s de la beautĂ© d’un monde. Vous n’avez plus connu la prodigalitĂ© D’un monde qui savait se refaire Ă  mesure. Vous n’avez plus connu cette impudente usure D’un monde ivre de sĂšve et de vitalitĂ©. Vous n’avez plus connu que de l’eau d’un canal. Et le mĂ©nagement, et l’écluse, et le bief. Et le gouvernement sous un si pauvre chef. Et le lanternement sous un maigre fanal. Vous n’avez plus connu que la parcimonie. Et les Ă©pargnateurs et les conservateurs, Et la petite Ă©pargne et cette ignominie, — AĂŻeule des bouviers et des premiers pasteurs. Vous n’avez plus connu que des blĂ©s vertueux, Et les fausses moissons et les imitateurs. Et les contrefaçons et les contrefacteurs. Et les fausses maisons chez les infructueux. Et les fausses raisons chez les talentueux Et la soumission sous le lĂ©gislateur. Et la dissension chez le pauvre amateur. Et la fausse oraison dans le voluptueux. Vous n’avez plus connu qu’une lente agonie Et les collusions dans les mains des docteurs. Et le faisceau liĂ© dans la main des licteurs. Et toute mauvaise herbe et toute zizanie. Et moi je vous salue, ĂŽ bonne mĂ©nagĂšre. Mais quand on avait tout on ne mĂ©nageait pas. Et je vous vois marcher, vigilante bergĂšre. Mais quand on avait tout nul ne comptait ses pas. Et je vous vois veiller, vieille femme Ă©conome. Mais quand on avait tout on ne mĂ©nageait rien. Vous ĂȘtes la servante et le conseil de l’homme. Mais quand on avait tout nul ne comptait son bien. Je vous vois aujourd’hui fidĂšle et scrupuleuse, Attentive et sĂ©vĂšre et sage dĂ©sormais. Mais quand on avait tout, ĂŽ grande audacieuse, Quand on avait toujours on ne comptait jamais. Quand on avait la source et la lourde fontaine Et le dĂ©versement nul ne canalisait. Quand on avait la grĂące et cette lourde plaine Et le contentement nul n’économisait. Quand on avait l’honneur en ces premiers moments, Nul ne courbait le front devant le donateur. Et le bonheur, promis aux plus graves tourments. Ne baissait pas les yeux devant le spectateur. Une foi sans symbole et sans inscription Remontait toute seule aux pieds du crĂ©ateur, Comme une loi sans table et sans description Se courbait sous les pieds de son lĂ©gislateur. Quand on avait la foi dans ces premiers moments On ne demandait pas des formules astreintes. Quand on avait la loi sous ces premiers serments On ne demandait pas des rĂšgles de contraintes. Et quand on avait Dieu dans ces premiers moments. On ne demandait pas des formules restreintes. Quand on vivait heureux sous ces premiers tourments, On ne demandait pas des rĂšgles et des craintes. Et quand on avait tout rien ne se querellait Et le dĂ©versement de la crĂ©ation Se poursuivait sans hĂąte et sans dispersion. Et quand on avait tout rien ne se morcelait. Et quand on avait tout rien ne se harcelait. On ne regardait pas alors Ă  la dĂ©pense. Et tout foisonnement portait sa rĂ©compense. Et quand on avait tout rien ne s’écartelait. Vous n’avez plus connu que cette vilenie, Ô pĂąle aĂŻeule assise entre de pĂąles fleurs. Vous n’avez plus connu que la longue avanie, AĂŻeule dĂ©plorable aux yeux pĂąlis de pleurs. Et moi je vous salue ĂŽ femme entre les femmes, Ô vainement assise aux portes du jardin, Plus bas que la poterne et le dernier gradin, Et que la tubĂ©reuse et que les jusquiames. Et moi je vous salue ĂŽ la plus prĂ©cieuse Et la plus prosternĂ©e aux genoux du destin. Et la plus enchaĂźnĂ©e aux maĂźtres du festin. Et la plus anxieuse et la plus soucieuse. Et moi je vous connais seule silencieuse Et seule naufragĂ©e aux rives de mĂ©moire. Et seule prĂ©posĂ©e aux rayons de l’armoire. Et seule diligente et seule officieuse. Et je vous aime tant ĂŽ la plus sĂ©rieuse Et la plus prosternĂ©e aux genoux du travail. Et la plus inconnue et la plus glorieuse Et la plus accouflĂ©e aux portes du bercail. Et la plus accotĂ©e aux montants du portail, AĂŻeule aux maigres doigts, seule laborieuse, Et seule obĂ©issante et seule impĂ©rieuse, Et la plus accointĂ©e au coin du soupirail. Et nul ne vous connaĂźt, seule mystĂ©rieuse, Ni l’homme votre fils, ni l’homme votre frĂšre, Ni l’homme votre Ă©poux, ni l’homme votre pĂšre, Ni l’homme votre maĂźtre ĂŽ seule ambitieuse. Vous n’avez plus menĂ© qu’une vie attentive, Ô seule curieuse et seule incurieuse. Vous n’avez enfantĂ© qu’une horde craintive, Et tantĂŽt dĂ©faillante et tantĂŽt furieuse. Vous n’avez plus connu qu’une race hĂątive. Vous n’avez plus connu qu’un monde qui dit non. Des terres de JudĂ©e aux terres d’Épernon Vous n’avez plus connu qu’une race furtive. Vous n’avez plus connu la race affirmative. Vous n’avez plus connu qu’un peuple qui dit non. Et des bourgs de JudĂ©e au bourg de Maintenon Vous n’avez plus perçu qu’une voix nĂ©gative. Vous n’avez plus connu la race positive. Vous n’avez plus connu qu’un peuple qui dit non. Des chĂąteaux de JudĂ©e au chĂąteau de Chinon Vous n’avez plus perçu qu’une voix nĂ©gative. Vous n’avez plus connu qu’une race inventive. Vous n’avez plus connu qu’un peuple qui dit non. De la voix de Judith Ă  la voix de Manon Vous n’avez plus connu qu’une race fautive. Vous n’avez enfantĂ© qu’une race plaintive, TantĂŽt rivĂ©e au sol, tantĂŽt victorieuse, TantĂŽt martyre et sainte, et sage ou furieuse, Ô mĂšre et c’est ma race et la race captive Constamment accotĂ©e aux murs de sa prison Et vous seule vivace et seule industrieuse, Vous vous dĂ©pensez toute, ĂŽ seule besogneuse, À laver la vaisselle et ranger la maison. Ô vous qui pourchassez jusqu’au fin fond des coins La poussiĂšre et l’ordure et toute impuretĂ©, Toute disconvenance et toute improbitĂ©. MaĂźtresse des labeurs, des veilles et des soins, Vous qui prenez ce bois pour allumer la lampe Et la mettre au milieu de la table servie, Et qui prenez ce lin pour essuyer la rampe, Et qui rangez les fleurs et qui rangez la vie, Ô femme qui rangez les travaux et les jours, Et les alternements et les vicissitudes, Et les gouvernements et les sollicitudes, Et la vieille charrue et les nouveaux labours. Ô femme qui rangez les palais et les tours, Et les retournements et les iniquitĂ©s, Et la jeune dĂ©tresse et les antiquitĂ©s. Et la vieille tendresse et les nouveaux amours, Femmes, je vous le dis, vous rangeriez Dieu mĂȘme, S’il descendait un jour dedans votre maison. Vous rangeriez l’outrage, et l’oubli du blasphĂšme, Si Dieu vous visitait dedans cette prison. Femmes, je vous le dis, vous rangeriez Dieu mĂȘme, S’il venait Ă  passer devant votre maison. Vous rangeriez l’offense, et le pouvoir suprĂȘme, S’il venait Ă  passer devant votre raison. Que n’avez-vous rangĂ© la colĂšre divine. Que n’avez-vous lavĂ© la grande iniquitĂ©. Il Ă©tait temps alors. Que n’avez-vous quittĂ©, Quand il en Ă©tait temps le creux de la ravine. Femmes, je vous le dis, vous rangeriez la foudre. Si Dieu vous l’envoyait dedans votre maison. Vous rangeriez la grĂące, et le pouvoir d’absoudre, Si Dieu vous visitait dedans cette prison. Que n’avez-vous rangĂ© le premier anathĂšme, Cette fois qu’il tomba sur votre solitude. Que ne l’avez-vous mis dedans votre systĂšme De bon gouvernement et de mansuĂ©tude. Femmes vous rangeriez jusqu’à l’eau du baptĂȘme, Si Jean redescendait vers un nouveau Jourdain. Vous rangeriez l’hostie, et l’huile, et le saint-chrĂȘme Si l’homme revenait dans le premier jardin. Femmes vous rangeriez dedans votre cuisine Avec le pain du corps le pain spirituel. Que n’avez-vous rangĂ© jusque dans sa racine, Il Ă©tait temps alors, l’arbre intellectuel. Que n’avez-vous rangĂ© l’arbre perpĂ©tuel Cette fois qu’il jaillit au creux de la ravine. Que n’avez-vous rangĂ© l’arbre contractuel Cette fois qu’il jaillit au flanc de la colline. Que n’avez-vous rangĂ© la couronne d’épine Quand elle Ă©tait encore un timide bourgeon. Que n’avez-vous rangĂ© cette blanche aubĂ©pine Quand elle Ă©tait encore un candide surgeon. Que n’avez-vous rangĂ© cette rouge Ă©glantine Quand elle Ă©tait encore une naissante rose. Que n’avez-vous rangĂ© la colĂšre latine Quand elle Ă©tait encore une naissante cause. Que n’avez-vous rangĂ© le sceptre dĂ©risoire Quand il Ă©tait encore un fragile roseau. Que n’avez vous rangĂ© la couronne illusoire Quand elle Ă©tait encore un fragile rĂ©seau. Que n’avez-vous rangĂ© pour la premiĂšre fois Quand il Ă©tait encore un fragile arbrisseau L’arbre au double destin, l’arbitre au double sceau, L’arbre de la science et l’arbre de la croix. Que n’avez-vous rangĂ© dans un Ăąge absolu Quand il Ă©tait encore un arbre jouvenceau, L’arbre au double destin, l’arbitre au double sceau, L’arbre de la potence et l’arbre du salut. Que n’avez-vous rangĂ© dans un ordre absolu Avant qu’il fĂ»t entrĂ© sous la seconde loi, L’arbre au double destin, l’arbitre de la foi, L’arbre de la crĂ©ance et l’arbre du salut. Que n’avez-vous lavĂ©, diligente laveuse, Mon front ensanglantĂ© devant qu’il fĂ»t sanglant. Que n’avez-vous alors, ĂŽ grande lessiveuse. LavĂ© ma pĂąle face et mon auguste flanc. Que n’avez-vous alors, ĂŽ femme de lessive. LavĂ© ma barbe rousse et mes cheveux sanglants. Que n’avez-vous alors, maternelle et pensive, Soutenu ma faiblesse et mes pas chancelants. Que n’avez-vous alors, aĂŻeule au chef branlant, Quand j’étais plein d’injure et couvert d’avanie, Que n’avez-vous alors, aĂŻeule au chef tremblant, EssuyĂ© cette ordure et cette ignominie. Que n’avez-vous alors, ĂŽ femme de journĂ©e, PrĂ©parĂ© la maison pour la derniĂšre fĂȘte. Que n’avez-vous alors, ĂŽ laveuse acharnĂ©e, LavĂ© mes cheveux roux et ma barbe dĂ©faite. Que n’avez-vous alors, aĂŻeule et chĂątelaine. BalayĂ© le chĂąteau pour mon dernier repas, Et balayĂ© les fleurs pour mon dernier trĂ©pas, Et balayĂ© la mort pour ma derniĂšre CĂšne. Que n’avez-vous aussi balayĂ© les soldats, Et l’injustice assise au cƓur du tribunal. Et le treiziĂšme apĂŽtre et le baiser vĂ©nal, Et le consentement aux lĂšvres de Judas. Que n’avez-vous alors, ĂŽ femme de mĂ©nage, EssuyĂ© le pĂ©chĂ© devant qu’il fĂ»t commis. Que n’avez-vous enfin dans votre voisinage Accueilli le sauveur avant qu’il fĂ»t promis. Que n’avez-vous alors, ĂŽ mon Ăąme, ĂŽ ma mĂšre. EssuyĂ© les deux pleurs jaillis des mĂȘmes yeux. Que n’avez-vous alors, ĂŽ cent fois centenaire, Recueilli le seul cri poussĂ© vers d’autres cieux. Vous savez aujourd’hui gouverner votre race, Vous savez distinguer et le tien et le mien. Vous savez dĂ©compter le geste et la menace. Mais quand on avait tout, on ne dĂ©comptait rien. Vous savez aujourd’hui gouverner l’amour mĂȘme, Et l’amour filial d’avec le maternel. Et le fils dernier-nĂ© d’avec le pĂ©nultiĂšme, Mais quand on avait tout, tout Ă©tait Ă©ternel. Vous savez aujourd’hui gouverner l’honneur mĂȘme, Et l’honneur trivial d’avec l’originel. Et le jour de la mort d’avec le jour suprĂȘme, Mais quand on avait tout, tout Ă©tait solennel. Vous savez aujourd’hui gouverner votre bien, Distinguer l’intĂ©rĂȘt d’avec le capital ; Et la communautĂ©, du rĂ©gime dotal. Mais quand on avait tout, on ne rajoutait rien. Vous savez aujourd’hui ce que chacun rapporte, Et ce que chacun coĂ»te, et comment, et combien. ĂŽ vainement assise en dehors de la porte Mais quand on avait tout on ne retranchait rien. Vous savez aujourd’hui ce que chacun rapporte, Et le meuble et l’immeuble et la chĂšvre et le chien, Ô vainement assise au seuil de l’autre porte Mais quand on avait tout, on ne rapportait rien. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©robe, Le maĂźtre et le valet, le fils et le gardien. Ô pauvrement assise en cette pauvre robe Mais quand on avait tout, on ne dĂ©robait rien. Vous savez aujourd’hui ce que chacun supporte, Et l’esclave et le maĂźtre, et la femme et le chien. Ô vainement assise au coin de l’autre porte Mais quand on avait tout, on ne supportait rien. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©tourne, Mais quand on avait tout on ne dĂ©tournait rien. Et vous savez surtout ce que tout homme ajourne Car c’est son sauvetage et son souverain bien. Vous savez aujourd’hui dans quel four on enfourne Et le pain pour hier, et le pain pour demain. Et par lĂ  vous savez ce que tout homme ajourne Car c’est sa pĂ©nitence et c’est son lendemain. Vous savez aujourd’hui dans quel temple on enfourne Et l’oubli pour hier, et l’oubli pour demain. Et par lĂ  vous savez ce que tout homme ajourne Et c’est sa pĂ©nitence et c’est son examen. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©tourne, Le fisc et le larron et le voleur de nuit. Et par lĂ  vous savez ce que tout homme suit Et par lĂ  vous savez oĂč tout homme retourne Et c’est au vieux pĂ©chĂ© couvĂ© dans le vieux cƓur. Et c’est au vieux palais d’antique turpitude. Et c’est aux vieux genoux de l’antique habitude. Et c’est aux vieux lacets du plus ancien traqueur. Et c’est au vieux chenil de l’antique piqueur. Et c’est au vieux fournil du plus vieux boulanger. Et c’est au vieux courtil du plus mauvais berger. Et c’est au pli fanĂ© des lĂšvres du moqueur. Et c’est Ă  ce tourment d’un vieil accent du chƓur. Et c’est au vieux chĂąteau de longue lassitude. Et c’est aux vieux trĂ©teaux de fausse certitude. Et c’est au pli grossier des lĂšvres du vainqueur. Et c’est aux liaisons d’antique servitude. Et c’est aux vieux falots de ses casernements. Et c’est aux vieux cachots de ses internements. Et c’est aux courbements de sa dĂ©crĂ©pitude. Et c’est aux vieux genoux de ses prosternements. Et c’est aux vieux palais de sa sollicitude. Et c’est aux vieux relais de sa vicissitude. Et c’est au carrefour de ses gouvernements. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©tourne, Le roi, le gouverneur, le Christ et le larron, Le bourgeois, le vilain, le clerc et le baron, Et par lĂ  vous savez ce que l’homme contourne C’est le cap de la mort et c’est l’oubli de Dieu. Et de la haute mer et du dernier naufrage. Et du phare et du port et du dernier barrage. Et de prendre la foi juste par le milieu. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©tourne, L’intendant, le notaire et le mĂȘme gardien. Et par lĂ  vous savez comment tout homme tourne Mais quand on avait tout, on ne dĂ©tournait rien. Vous savez aujourd’hui ce que tout homme plaide. Car c’est son indigence et son infirmitĂ©. Mais par lĂ  vous savez Ă  quoi tout homme cĂšde C’est Ă  sa complaisance et sa difformitĂ©. Vous savez aujourd’hui comme on creuse une tombe. Et ce qu’il faut de terre au corps le plus aimĂ©. Mais par lĂ  vous savez Ă  quoi l’homme retombe. Et c’est toujours au saint qu’il a le plus chĂŽmĂ©. Vous savez comme on ferme une chaste paupiĂšre. Et ce qu’il faut d’espace aux deux yeux les plus beaux. Vous avez tant baisĂ© jusque dans leurs tombeaux Les fils de votre amour et de votre misĂšre. Vous savez aujourd’hui dans quoi l’homme se prend. Et c’est dans les rĂ©seaux du plus ancien trappeur. Mais par lĂ  vous savez oĂč tout homme se rend. Et c’est sous les arceaux de la plus vieille peur. Vous savez aujourd’hui ce que tout homme paye Pour demeurer fidĂšle aux rĂšgles de l’honneur. Mais par lĂ  vous savez ce que tout homme raye De la liste des biens qu’il demande au bonheur. Vous savez aujourd’hui ce que tout homme pĂšse. Et c’est un peu de cendre au creux de votre main. Mais par lĂ  vous savez ce que c’est que demain. Et c’est la mĂȘme argile et c’est la mĂȘme glaise. Vous savez aujourd’hui ce que tout homme achĂšte Et ce qu’il veut trouver aux marchĂ©s du bonheur. Mais par lĂ  vous savez de quel sceau se cachĂšte L’antique obĂ©issance aux rĂšgles de l’honneur. Vous savez aujourd’hui de quoi l’homme se garde. Et c’est de se tourner vers le Seigneur son Dieu. Mais par lĂ  vous savez ce que l’homme regarde. C’est la plus pauvre cendre et le plus maigre feu. Vous savez aujourd’hui de quoi l’homme se garde. Et c’est de se tourner vers le Seigneur son pĂšre. Mais par lĂ  vous savez ce que l’homme regarde. C’est la plus tremblotante et caduque lumiĂšre. Vous savez aujourd’hui de quoi l’homme se garde. Et c’est de se tourner vers notre unique Dame. Mais par lĂ  vous savez ce que l’homme regarde. C’est la plus dĂ©cevante et vacillante flamme. Le peu qu’il fait de bon, ce n’est que par mĂ©garde. Mais ce qu’il fait de faux et de dĂ©lictueux, Et ce qu’il fait de trouble et de dĂ©fectueux, C’est par sa vigilance et par sa prude garde. Le peu qu’il fait de bon, c’est pure nĂ©gligence, Et c’est qu’il n’a pas su comment faire autrement. Mais ce qu’il fait de sot et de dĂ©rĂšglement, VoilĂ  le propre effet de son intelligence. Le peu qu’il fait de bon, ce n’est que par hasard Et par le double jeu de sa double fortune. Mais ce qu’il fait tout seul c’est sa basse rancune, Sa tĂȘte de carton et son cƓur de bazar. Vous savez aujourd’hui de quoi l’homme se garde. Et c’est de se tourner vers le seuil du tombeau. Mais par lĂ  vous savez ce que l’homme regarde. C’est la plus pĂąle flamme et le maigre flambeau. Vous savez aujourd’hui ce que chacun prĂ©fĂšre, Et c’est de se ranger dans un illustre port. Mais par lĂ  vous savez ce que chacun diffĂšre Et c’est de se tourner vers le jour de sa mort. Vous savez aujourd’hui ce que chacun prĂ©fĂšre. Et c’est de se ranger sous un illustre sort. Mais par lĂ  vous savez ce que chacun diffĂšre Et c’est de se pencher sur le jour de sa mort. Vous savez aujourd’hui de quoi l’homme se garde. Et c’est de se tourner vers son maĂźtre et son Dieu. Mais par lĂ  vous savez ce que l’homme regarde C’est la plus pauvre flamme et le plus maigre feu. Vous savez aujourd’hui de quoi l’homme se garde. Et c’est de se tourner vers son maĂźtre et son pĂšre. Mais aussi vous savez ce qui le dĂ©sespĂšre. Ce qui fait ses yeux creux et sa face hagarde. Vous savez aujourd’hui de quoi l’homme se garde. Et c’est de se tourner vers notre unique Dame. Mais aussi vous savez ce qu’il fait de son Ăąme. Et comme il a troquĂ© l’antique sauvegarde. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©tourne, Et par lĂ  vous savez ce que chacun poursuit. Et par lĂ  vous savez en quoi tout homme nuit. Et par lĂ  vous savez oĂč tout homme sĂ©journe Et c’est dans un sĂ©jour d’antique pestilence. Dans la dĂ©crĂ©pitude et le dĂ©labrement. Dans la dĂ©suĂ©tude et le dĂ©sƓuvrement. Dans le mĂ©pris du chaste et solennel silence. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©porte Vers le dĂ©portement d’un Ă©ternel exil. Et par lĂ  vous savez ce que chacun transporte Dans le transportement d’un Ă©ternel pĂ©ril. Vous savez aujourd’hui ce que chacun reporte Vers le reportement d’un exil Ă©ternel. Ô vainement assise au seuil de l’autre porte. Vainement relĂ©guĂ©e en ce monde charnel. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©pense, L’honnĂȘte homme et le sot, le fat et le vaurien. Vous savez ce que vaut la haute rĂ©compense. Mais quand on avait tout, on ne compensait rien. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©tourne, Et par lĂ  vous savez ce que tout homme suit. Et par lĂ  vous savez oĂč tout homme conduit Ce regret qu’il oppose au remords qu’il retourne. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©tourne, Et par lĂ  vous savez ce que tout homme fuit. Et par lĂ  vous savez que tout homme retourne Dans le dĂ©solement d’une Ă©ternelle nuit. Vous savez aujourd’hui que tout homme retourne Dans le dĂ©solement de sa sollicitude. Et par lĂ  vous savez ce que chacun dĂ©tourne Du trĂ©sor de regret et de vicissitude. Vous savez aujourd’hui ce que chacun dĂ©tourne Du seul trĂ©sor ouvert Ă  nos cupiditĂ©s. Et par lĂ  vous savez comment l’homme retourne Le champ de ses remords et ses aviditĂ©s. Vous savez aujourd’hui comment l’homme retourne Ce regret qu’il recreuse au fin fond de son cƓur. Et par lĂ  vous savez dans quel antre sĂ©journe La lamentation de ce pauvre vainqueur. Et vous savez aussi ce que tout homme coĂ»te Et que l’homme a coĂ»tĂ© le sang mĂȘme d’un Dieu. Et vous savez ainsi par quelle affreuse route Un condamnĂ© monta jusqu’au dernier haut lieu. Vous savez aujourd’hui ce que chacun rapporte. Vous avez Ă©tabli ce compte redoutĂ©. Ô vainement assise au seuil de l’autre porte L’homme rapporte peu pour ce qu’il a coĂ»tĂ©. Vous qui savez ranger, diligente lingĂšre, Et compter les trousseaux aux rayons de l’armoire ; Vous qui savez ranger, docile messagĂšre, Et compter les arceaux au temple de mĂ©moire ; Vous qui savez ranger, diligente lingĂšre, Et compter les bonheurs aux temples de l’armoire ; Vous qui savez ranger, docile messagĂšre, Et compter les honneurs aux rayons de mĂ©moire ; Vous qui savez ranger, diligente lingĂšre, Et compter le beau linge aux rayons de l’armoire ; Vous qui savez ranger, docile messagĂšre, Et compter les beaux jours aux rayons de mĂ©moire ; Vous qui savez ranger, aĂŻeule passagĂšre, Et compter les beaux jours partis au fil de l’eau ; Vous qui savez ranger, aĂŻeule viagĂšre, Et compter le bois d’orme et le bois de bouleau ; Vous qui savez ranger, vigilante bergĂšre, Et compter les brebis et les jeunes agneaux ; Vous qui savez ranger, savante boulangĂšre, Le pain de chaque jour et les jeunes gĂąteaux ; Vous qui savez ranger les graines fourragĂšres, Et compter le sainfoin et le trĂšfle incarnat ; Vous qui savez ranger les herbes potagĂšres, Et les rubans ponceau sur la robe grenat ; Vous qui savez ranger, vainement horlogĂšre, Les heures de la nuit et les heures du jour ; Vous qui savez inscrire en un mĂȘme pourtour Le robuste poirier et la pĂąle fougĂšre ; Vous qui savez ranger sur la frĂȘle Ă©tagĂšre Les fleurs du souvenir et les fleurs du regret ; Vous qui savez ranger dans le creux d’un coffret La cendre et le dĂ©bris d’une peine Ă©trangĂšre. Vous qui savez ranger dans le creux d’un secret Une amour Ă©ternelle encor que viagĂšre ; Vous qui savez plier sous le pli d’un dĂ©cret Une haine immortelle encor que passagĂšre. Vous qui savez plier un auguste remords Comme on plie un linceul aux rayons de l’armoire. Vous qui savez compter les vivants et les morts Et ranger tout un peuple aux rayons de mĂ©moire. Vous qui savez connaĂźtre une herbe mensongĂšre Et qui la bannissez du savant pot-au-feu ; Ô femmes qui pouvez dans le plus cruel jeu Tricher d’un cƓur tranquille et d’une main lĂ©gĂšre. Vous qui savez ranger les herbes bocagĂšres Et mettre sous vos lois la bruyĂšre et l’ajonc. Vous qui savez tresser et la paille et le jonc Pour le recueillement des plantes maraĂźchĂšres. Vous qui savez compter comme un bien pĂ©rissable La grappe suspendue au fronton de la treille. Vous qui perdez de vue et le fleuve et le sable Et ne connaissez plus qu’une pauvre corbeille. Vous qui savez compter dans le nombre des fleurs La rose suspendue au cerceau du rosier. Vous qui savez compter dans le nombre des pleurs Une enfant suspendue en un berceau d’osier. Vous qui mĂ©connaissez les vaisseaux sur la plage, Mais classez et comptez les sacs jusqu’au dernier. Vous qui mĂ©connaissez les arceaux et l’ombrage Et ne voyez plus rien qu’un malheureux panier. Vous avez pu compter, ĂŽ bonne mĂ©nagĂšre, À combien revenait le sang que j’ai versĂ©. Vous avez pu noter, exacte messagĂšre, À combien revenait ce flanc qu’ils ont percĂ©. Vous avez pu compter, vigilante bergĂšre, Combien de mes agneaux sont sous la dent des loups. Vous avez pu noter, aĂŻeule passagĂšre, Combien de mes martyrs sont dans les mains des fous. Vous avez pu noter, savante boulangĂšre, Si le pain que j’ai cuit Ă©tait cuit pour toujours. Et si j’ai pu pĂ©trir une pĂąte Ă©trangĂšre Dans le raccordement des travaux et des jours. Vous avez pu compter, inlassable horlogĂšre, Les heures et les jours d’une lente agonie. Et si j’ai pu tisser pour une nouvelle Ăšre Le chanvre et l’écheveau de mon ignominie. Vous avez pu laver, inlassable lingĂšre, Le linge ensanglantĂ© du plus pur de mon sang. Mais pourra-t-on blanchir pour un autre mystĂšre Ce lambeau qui pendait de mon auguste flanc. Le pain que je rompis Ă©tait mon propre corps. Le vin que je fis boire Ă©tait mon propre sang. La mort que je subis Ă©tait vos propres morts. La foi que je fis croire Ă©tait mon propre flanc. Le pain que j’ai rompu pour mon illustre CĂšne Était le pain d’amour et de communion. Et le vin qui coula d’une illustre fontaine Était le vin d’offrande et de libation. Vous avez pu compter, inlassable Ă©conome, Combien m’a rapportĂ© le meilleur de mon sang. Vous savez Ă  prĂ©sent Ă  combien revient l’homme Et si c’est du quarante ou du quatre pour cent. Vous avez pu compter, inlassable intendante, Si je suis descendu de mon illustre rang. Vous avez pu noter, aĂŻeule prĂ©cĂ©dente, Si je me suis assis sur un infĂąme banc. Vous avez pu compter, aĂŻeule confidente, À quel taux j’ai placĂ© la couronne d’épines. Vous avez pu noter, aĂŻeule trĂšs prudente, Ce que m’ont rapportĂ© mes strictes disciplines. Vous avez pu compter, maĂźtresse de maison, À quel taux j’ai placĂ© le repas de ma table. Vous avez pu compter en ma jeune saison À quel taux j’ai louĂ© ma place dans l’étable. Vous avez pu compter, maĂźtresse de raison, À quel taux j’ai louĂ© la pierre pour ma tĂȘte. Vous avez pu compter, maĂźtresse d’oraison, À quel taux j’ai placĂ© la priĂšre et la fĂȘte, Et ce dernier repas dans un dernier hĂŽtel. Vous avez pu compter, aĂŻeule respectable, À quel taux j’ai placĂ© ma mort inĂ©luctable, Et combien j’ai payĂ© sur un dernier autel. Ô femmes qui pouvez dans le secret du cƓur Classer la liaison dĂ©sormais Ă©trangĂšre, Et classer la victoire et classer le vainqueur, Et classer une foi dĂ©sormais mensongĂšre. Et classer une paix comme on classe une guerre, Et classer une amour dĂ©sormais pĂ©rissable. Et tirer la mĂȘme eau du puits intarissable. Et tirer l’Homme enfin d’une race vulgaire. Ô femmes qui rangez dans le creux d’un secret Une dĂ©liaison dĂ©sormais infidĂšle. AĂŻeule qui guettez la derniĂšre hirondelle Pour enfermer l’hiver en un dernier coffret. Ô femmes qui rangez dans le creux d’un regret Une dĂ©liaison dĂ©sormais inutile Et qui savez classer sur un pauvre livret À toute heure du jour l’épargne mercantile Vous avez pu ranger la race des prophĂštes Et la race des saints et le sang du martyr. Vous avez pu ranger tous les trĂ©sors de Tyr. Et tout l’or amassĂ© pour ces uniques fĂȘtes. Et tout le sang versĂ© par la gueule des bĂȘtes. Et le sang du martyr et le sang du bourreau. Vous avez pu ranger l’infĂąme tombereau Et la barque Ă©chappĂ©e aux gueules des tempĂȘtes. Vous rangez la victoire autant que la dĂ©faite, Et tout vous est Ă©gal dans un mĂȘme labeur. Vous rangez l’énergie autant que la stupeur, Et tout vous est Ă©gal dans une paix mal faite. Vous ne connaissez rien qu’une fortune hostile Guettant Ă  votre porte et levant le rideau. Vous ne connaissez rien qu’une main versatile Et cet Ă©crasement d’un immense fardeau. Et votre front cernĂ© d’un stupide bandeau. Et l’immobilitĂ© de la nuit et des ombres. Et les vagues croulant en Ă©normes dĂ©combres. Et vos enfants partis sur un frĂȘle radeau. Et tout vous est Ă©gal et tout vous est Ă©troit. Vous redoutez autant les bons que les pervers. Tout bonheur qui vous vient vous arrive Ă  l’envers. Mais tout mal qui vous vient vous arrive Ă  l’endroit. Les eaux ne coulent pas, les bois ne sont pas verts, Les cieux ne sont pas purs pour votre anxiĂ©tĂ©. Vous ne connaissez rien dans l’immense univers Qui ne soit l’instrument d’une infĂ©licitĂ©. Tout vous demeure Ă©gal sous une Ă©gale peur. Vous n’attendez jamais de vos secrets effrois, Vous n’attendez jamais des peuples et des rois Que le dĂ©roulement d’une immense torpeur. Vous avez pu ranger et la faiblesse humaine Et le tĂ©trarque HĂ©rode aprĂšs qu’il m’eut haĂŻ. Vous avez pu ranger et la lance romaine Et Pilate et Judas, mais quand il m’eut trahi. Vous avez pu ranger CaĂŻphe le grand-prĂȘtre Et le soldat Malchus aprĂšs qu’il eut servi. Vous rangez toute forme et vous rangez tout ĂȘtre Et vous rivez les fers, quand l’homme est asservi. Vous avez pu ranger le mont nommĂ© Calvaire Ou le mont Golgotha, mais quand je l’eus gravi. Vous rangez l’or, l’airain, le cristal et le verre, Et la clef du trĂ©sor, aprĂšs qu’il est ravi. Vous avez pu ranger la couronne d’épine, La verge et le roseau, mais quand il eut servi. Vous avez pu ranger la stricte discipline, La honte et la fureur aprĂšs qu’elle eut sĂ©vi. Vous avez pu ranger et la sainte colline, Autrement dit Sion, aprĂšs qu’elle eut pĂ©ri. Vous avez pu ranger et la creuse ravine OĂč coulait le CĂ©dron, aprĂšs qu’il fut tari. Vous avez pu ranger la chaise du prĂ©teur Et le prĂ©teur lui-mĂȘme aprĂšs qu’il eut servi. Et les bancs du public et le blasphĂ©mateur Et la tourbe et la foule aprĂšs qu’elle eut suivi. Vous avez pu ranger l’auguste tribunal. Vous Ă©coutez parler les interlocuteurs. Vous Ă©coutez marcher tout le code pĂ©nal. Vous Ă©coutez chanter tous les persĂ©cuteurs. Vous avez su ranger les bois du sacrifice. Les clous et le marteau, mais quand il eut frappĂ©. Vous rangez la priĂšre et vous rangez l’office. Et vous rangez le temps, quand il est Ă©chappĂ©. Vous rangez l’épouvante et le dernier supplice. Vous Ă©coutez marcher le jugement de Dieu. Vous allumez la lampe et regardez le feu. Vous rangez l’ostensoir et le dernier calice. Éternelle Ă©conome, Ă©ternelle ouvriĂšre, Vous rangez le salut, quand il est Ă©coulĂ©. Ô femme mĂ©dicale et femme infirmiĂšre, Vous Ă©pongez le sang, aprĂšs qu’il a coulĂ©. Femmes, je vous le dis, vous rangeriez l’autel. Vous rangeriez l’hostie, et l’huile, et le saint ChrĂȘme. Vous rangeriez le pape et le pouvoir suprĂȘme. Vous rangeriez l’offense et le pĂ©chĂ© mortel. Femmes, je vous le dis, vous rangeriez Dieu mĂȘme, Et vous l’avez rangĂ© la fois qu’il est venu. Vous l’avez saluĂ©, vous l’avez reconnu, Vous avez recueilli le nouveau diadĂšme, La couronne coupĂ©e au long de la colline. Vous avez recueilli le sceptre dĂ©risoire. Vous avez regardĂ© le meurtre provisoire, Et les trois longs gibets jaillis de la ravine, Et le jeune roseau nĂ© pour un autre sort. Vous avez pu ranger la muette agonie Et toute forfaiture et toute ignominie. Vous rangez le cilice et le jour de la mort. Vous avez pu ranger le meurtre expiatoire, — Ô femmes qui pleuriez, — mais quand il fut fini. Vous avez pu ranger et l’interrogatoire Et l’homme interrogĂ©, mais quand on l’eut honni. Vous regardez passer le meurtre expiatoire. Dans le bannissement vous classez le banni. Vous regardez trĂŽner et l’interrogatoire Et l’interrogateur, avant qu’il fĂ»t puni. Vous regardez monter l’offrande et l’offertoire. Vous classez la dĂ©fense et le contradicteur. Ô vainement assise aux marches du prĂ©toire, Vous regardez monter la hache du licteur. Vous classez la bataille et classez la victoire. Et vous classez l’offense avec l’accusateur. Ô vainement assise aux marches de l’histoire, Vous regardez monter l’oubli consolateur. Vous classez le nĂ©ant et vous classez le monde. Ô vainement assise aux marches de l’autel, Vous regardez monter cette vague profonde, Vous regardez grandir le grand pĂ©chĂ© mortel. Vous regardez monter la vague de luxure, Ô vainement assise au seuil de puretĂ©. Vous regardez monter ce flot de duretĂ© Du cƓur et tant de honte et tant de flĂ©trissure. Vous regardez monter cette immense mer Morte, Ce flot de pestilence et d’opiniĂątretĂ©, Ô vainement assise au seuil de duretĂ©, Ô vainement assise Ă  votre propre porte. Vous regardez monter ce flot de turpitude. Vous pensez Ă  vos fils assis dans le jardin. Vous regardez monter jusqu’au dernier gradin La vague d’indĂ©cence et de dĂ©crĂ©pitude. Vous pensez Ă  vos fils nĂ©s pour un autre sort, SecrĂštement armĂ©s contre la multitude. Ô vainement assise aux marches de la mort, Vous pensez Ă  vos fils nĂ©s pour la solitude. Vous regardez monter l’ocĂ©an d’avarice, Tout un monde noyĂ© dans la honte d’argent. Et le dĂ©bordement du plus hideux caprice. Et l’astuce et la ruse et l’immonde entregent. Vous regardez monter la lourde ingratitude. Et ce dĂ©vĂȘtement de la vĂ©nalitĂ©. Vous voyez s’étaler l’immense platitude. Et cet Ă©crasement sous la banalitĂ©. Vous voyez s’étaler la lourde turpitude, Ô vainement assise au seuil de pauvretĂ©. Vous voyez s’en aller cette longue habitude, Les mƓurs de la justice et de la libertĂ©. Vous regardez monter cette double luxure, La luxure d’hier sous celle de demain. Vous regardez saigner cette double blessure, Au creux de ma main gauche et de ma droite main. Vous regardez monter cette double luxure, La luxure d’argent sous la luxure d’or. Vous voyez se gonfler cet immonde trĂ©sor. Vous voyez puruler la double pourriture. Vous regardez monter cette double aventure, La luxure du cƓur, la luxure du sang. Vous regardez monter la double forfaiture Gomme une double lance Ă  mon malheureux flanc. Vous regardez monter cette lourde mainmorte, L’avarice du cƓur sous l’ancienne avarice, Ô vainement assise Ă  votre pauvre porte Vous regardez saigner la double cicatrice. Vous regardez monter cette double insolence, La luxure du cƓur sous les stupres anciens. Vous regardez monter dans l’antique silence Le long dĂ©laissement de Dieu parmi les siens. Vainement rĂ©chauffĂ©e aux tisons de ce feu, Vainement acouflĂ©e Ă  cette vieille dalle, Vous pleurez longuement sur ce nouveau scandale L’argent devenu maĂźtre Ă  la place de Dieu. Tout se vend et s’achĂšte et se livre et s’emporte. Rien ne se donne plus et moi j’ai tout donnĂ©. Ô vainement assise Ă  votre chĂšre porte, C’est donc lĂ  le salut que nous avons sonnĂ©. Tout se voit et se vaut et se vend Ă  la porte. Tout s’étale et triomphe et se vend au marchĂ©. Tout se montre et se dit et se place et rapporte Est-ce lĂ  le salut que nous avons cherchĂ©. Tout se vante et s’exhibe et se porte Ă  la halle. Vous pensez Ă  vos fils nĂ©s d’un autre destin. Vous regardez monter vers un dernier matin Le long dĂ©roulement du plus grossier scandale. Vous avez pu ranger le reniement de Pierre. Vous rangez le sommeil, et la veille, et les larmes. Vous rangez la vaillance et le mĂ©tier des armes. Vous rangez le regard sous la lourde paupiĂšre. Et vous rangez la voix jusqu’au fond de la gorge. Et vous rangez les pleurs jusqu’au fin fond des yeux. Vous rangez le Seigneur jusqu’au fin fond des cieux. Vous rangez la brĂ»lure au fin fond de la forge. Et vous rangez la paix jusqu’au fin fond des guerres. Et vous rangez le fer laissĂ© dans la blessure. Vous regardez monter cette double luxure, La luxure du sang et des ruses vulgaires. Vous avez pu ranger le reniement de Pierre. Mais pourrez-vous ranger le nouveau reniement. Vous avez pu ranger les monuments de pierre. Mais pourrez-vous ranger le nouveau monument. Vous avez pu ranger le sĂ©pulcre de pierre. Mais pourrez-vous ranger d’un Ă©gal rangement, Et par le seul effet d’un long mĂ©nagement, Le deuil enseveli sous la lourde paupiĂšre. Vous avez pu ranger la charrue et le glaive. Rangerez-vous jamais nos nouveaux armements. Pourrez-vous refouler dans les casernements Le monstrueux effort du monde qui se lĂšve. Vous regardez monter cette double avarice, Le manquement de cƓur et le manque de sang. Vous regardez saigner la double cicatrice, L’atteinte vers le cƓur, l’atteinte vers le flanc. Vous regardez saigner la double flĂ©trissure. Vous poursuivez l’orgueil jusqu’au fond de la plaie. Vous regardez monter cette double luxure, La sanie et l’envie et le saint sur la claie. Vous regardez monter cette double impuissance, L’impuissance d’aimer et celle de haĂŻr. Vous regardez monter cette double licence, La licence d’aimer et celle de trahir. Vous voyez s’en aller cette double puissance, La puissance d’aimer et celle d’obĂ©ir. Vous voyez succomber cette double dĂ©cence, La dĂ©cence d’aimer et celle de faillir. Vous regardez sombrer cette double clĂ©mence, La clĂ©mence d’amour et de fraternitĂ©. Vous regardez monter cette double dĂ©mence, La dĂ©mence de haine et d’inhumanitĂ©. Et moi je vous salue, ĂŽ reine de dĂ©cence. Vous rangez le fumier dans le fond du jardin. Vous balayez le seuil et le premier gradin. Et vous vous avancez, merveille d’innocence. Et vous vous tenez lĂ , reine de rĂ©ticence. Et l’homme n’est qu’un sot devant votre balai. Des ordures du jour vous faites un remblai, Un tas devant la porte, et par obĂ©issance Vous ramassez la fleur aprĂšs qu’elle est fanĂ©e. Aux justices de Dieu vous faites un dĂ©lai. Des injures du jour vous faites le dĂ©blai. Vous ramassez l’avoine aprĂšs qu’elle est vannĂ©e. AprĂšs le dernier pas de la procession, Quand l’évĂȘque est passĂ© vous ramassez la rose Et le lis et l’Ɠillet et la robe dĂ©close AprĂšs le dernier pas de l’intercession. Quand le pape est passĂ© vous ramassez la prose. Vous ramassez la gerbe, aprĂšs qu’elle est glanĂ©e. Vous ramassez la messe, aprĂšs qu’elle est sonnĂ©e. Vous ramassez le buis avec le laurier-rose. Quand l’effet est passĂ©, vous ramassez la cause. Vous ramassez l’honneur, aprĂšs qu’il est flĂ©tri. Vous rangez le bonheur, aprĂšs qu’il a pĂ©ri. Vous mettez le tilleul avec la passe-rose. Vous ramassez la grĂące, aprĂšs qu’elle est donnĂ©e. Vous ramassez la source aprĂšs qu’elle est tarie. Vous rangez la douleur quand elle est dĂ©fleurie. Vous rangez la moisson quand elle est moissonnĂ©e. Vous avez ramassĂ© les cailloux et les pierres Quand on les eut jetĂ©s sur le premier martyr. Vous ramassez l’horreur et l’effroi de partir Quand ils sont descendus sous l’arceau des paupiĂšres. Vous avez pu ranger le mont nommĂ© Calvaire Et recueilli mon corps quand on l’eut descendu. Vous rangez le remords, le regret plus sĂ©vĂšre. Vous recueillez mon corps quand on l’a dĂ©pendu. Femme je vous le dis, mais rangerez-vous Dieu, Quand il viendra s’asseoir au dernier tribunal. Rangerez-vous l’archange et le code pĂ©nal. Et l’espace et le nombre et le temps et le lieu. Rangerez-vous alors d’un dernier rangement Le vaisseau tout chargĂ© du pĂ©chĂ© d’IsraĂ«l. Rangerez-vous Achab Ă  cĂŽtĂ© d’IsmaĂ«l. Rangerez-vous le jour du dernier jugement. Rangerez-vous alors l’énorme chargement. Balaierez-vous alors les marches de l’autel. Rangerez-vous l’offense et le pĂ©chĂ© mortel. AmĂ©nagerez-vous cet amĂ©nagement De tout le temporel dans son dernier mĂ©nage. Et cette Ă©normitĂ© du dĂ©mĂ©nagement De tout le temporel hors de son apanage. Et cette Ă©normitĂ© de l’emmĂ©nagement De tout le temporel dans son nouveau partage. Rangerez-vous alors le dĂ©couragement Du vieux cƓur temporel hors de son vieux courage. Rangerez-vous alors tout le dĂ©rangement De l’homme temporel hors de son vieux village. Rangerez-vous alors tout le dĂ©gagement De la foi temporelle hors de son premier gage. Rangerez-vous la liste avec l’émargement. Rangerez-vous la honte et l’épouvantement De l’homme enseveli dans un suprĂȘme orage. Rangerez-vous l’horreur et le saisissement De l’homme suspendu sur un dernier barrage. Rangerez-vous la barque et le gouvernement. Et vos fils emportĂ©s sur un frĂȘle radeau. Rangerez-vous la lampe et le dernier rideau. Rangerez-vous le port et le dĂ©barquement. Femme, vous m’entendez quand les Ăąmes des morts S’en reviendront chercher dans les vieilles paroisses, AprĂšs tant de bataille et parmi tant d’angoisses, Le peu qui restera de leurs malheureux corps ; Et quand se lĂšveront dans les champs de carnage Tant de soldats pĂ©ris pour des citĂ©s mortelles, Et quand s’éveilleront du haut des citadelles Tant de veilleurs sortis d’un terrible hivernage ; Et quand s’éveilleront, d’un terrible rĂ©veil, Tant de guetteurs assis au faĂźte de la tour, Et quand les chambellans et les dames d’atour S’arracheront des bras de l’antique sommeil ; Quand tout ne sera plus que poussiĂšre et que cendre, Quand se rĂ©veillera la belle au bois dormant, Quand le page et la reine et le prince charmant Diront C’est le grand jour ; ĂŽ maĂźtre il faut descendre ; Et quand tous trembleront, et de la mĂȘme transe, Disant L’heure est sonnĂ©e, il est temps de paraĂźtre ; Et quand le roi Louis et quand le roi de France Ne sera plus qu’un pauvre et qu’un malheureux ĂȘtre ; Quand ne sonnera plus la cloche du baptĂȘme, Et l’entrĂ©e Ă  la messe et le saint sacrement, Et la jeune promesse et le grave serment, Et l’automne fleuri de grave chrysanthĂšme ; Quand ne sonneront plus les temporelles vĂȘpres Et l’entrĂ©e Ă  la messe et l’auguste salut, Et quand apparaĂźtra dans un Ăąge absolu L’éternelle hideur des temporelles lĂšpres ; Quand on n’entendra plus au cƓur des grandes fĂȘtes Monter l’in excelsis et le Magnificat, Quand on ne verra plus sur l’ocĂ©an des tĂȘtes Tomber le Dominus et le Benedicat Vos omnipotens Deus dans les siĂšcles des SiĂšcles, quand ne monteront plus les Hosanna, Et le dur Sabaoth et les Alleluia, Et le tragique Agnus ; femme, vous m’entendez Quand on ne verra plus vers les jours de NoĂ«l Dans la paille et l’espace et l’étable et le temps NaĂźtre le dernier-nĂ© des enfants d’IsraĂ«l, Et Joseph le couver de regards importants ; Quand on ne verra plus dans une pauvre auberge NaĂźtre le plus secret et le plus grand des rois, Quand on ne verra plus saint Joseph et la Vierge Veiller sur un poupon qui joue avec sa croix ; Quand on ne verra plus dans une pauvre crĂšche Sommeiller un bambin devant l’ñne et le bƓuf, Et trois pauvres bergers lui mettre un manteau neuf Pour le sauver du vent qui souffle par la brĂšche ; Quand on ne verra plus couchĂ© dans de la paille Le fils du plus grand roi qui soit dans l’univers, Quand on ne verra plus cette auguste marmaille Tenir son firmament et sa croix de travers ; Quand on ne verra plus dans le secret des temples Rayonner le secret d’une amour Ă©ternelle, Et lestement troussĂ© dans la main maternelle Ce seul petit JĂ©sus, femme, que tu contemples, Parce qu’il fut nourri du lait d’une autre femme, Et bercĂ© d’une main mĂȘmement maternelle. Parce qu’il fut baignĂ© dans une onde charnelle, Et parce qu’il riait aux yeux de Notre Dame ; Et qu’il fut caressĂ© d’une main fraternelle Par le petit saint Jean doublĂ© de son agneau, Et qu’il fut saluĂ© de façon solennelle Par les rois d’Orient doublĂ©s de leur chameau ; Et moi je vous le dis quand cette antique cloche Ne fera plus monter les grands alleluias, Quand la meute et le vol des chastes hosannas Ne s’élancera plus gagnant de proche en proche ; Quand ne descendra plus du haut des grandes orgues La cĂ©lĂ©bration des beaux jours de la vie, Mais quand s’écroulera du haut des grandes morgues Et le pĂ©chĂ© d’orgueil et le pĂ©chĂ© d’envie ; Quand du haut du clocher la cloche catholique Ne fera plus tomber les Ave Maria, Quand sur le coffret d’or et la sainte relique Ne s’avancera plus le triple Gloria ; Quand ne sonnera plus la cloche paroissiale Pour le glas de ce jour qui sera le dernier Et l’angĂ©lus du jour qui sera le premier, Et la marche funĂšbre avant la nuptiale ; Mais quand retentiront de bien autres buccins, Quand tout se courbera sous le fracas des cuivres, Quand l’antique Satan, ses larves et ses guivres Reculeront glacĂ©s devant le saint des saints ; Quand on n’entendra plus que le sourd craquement D’un monde qui s’abat comme un Ă©chafaudage, Quand le globe sera comme un baraquement Plein de dĂ©suĂ©tude et de dĂ©vergondage ; Quand l’immense maison des vivants et des morts Ne pourra plus montrer que sa dĂ©crĂ©pitude, Quand l’antique dĂ©bat des faibles et des forts Ne pourra plus montrer que son exactitude ; Quand on n’entendra plus que le dĂ©traquement D’un monde qui chancelle et qui se met par terre, Et quand apparaĂźtra l’immense manquement D’un sol toujours solide et toujours sĂ©dentaire ; Et quand se lĂšveront dans les champs d’épandage Tant de martyrs jetĂ©s dans les Ă©gouts de Rome, Et quand se lĂšvera dans le cƓur de tout homme Le long ressouvenir de son vagabondage ; Et quand sur le parvis des hautes cathĂ©drales Les peuples libĂ©rĂ©s des vastes nĂ©cropoles, Dans Paris et dans Reims et dans les mĂ©tropoles Transporteront l’horreur des chambres sĂ©pulcrales ; Quand ils s’assembleront sur les places publiques, Quand ils s’entasseront sous un dernier portail, Quand ils repasseront par les ormes du mail, Quand ils resalueront les grandes rĂ©publiques ; Quand ils traverseront la place du Martroi, Quand ils s’amasseront sur le pavĂ© des villes, Quand ils resalueront les batailles civiles, Et le royaume assis dans le giron du roi ; Quand l’homme relevĂ© du plus ancien tombeau Écartera la pierre et le vase d’oubli, Quand le plus vieil aveugle et l’homme enseveli Rallumera l’éclair du plus ancien flambeau ; Quand l’homme relevĂ© de la plus vieille tombe Écartera la ronce et les fleurs du hallier, Quand il remontera le vĂ©tuste escalier OĂč le pied du silence Ă  chaque pas retombe ; Quand l’homme reviendra dans son premier village Chercher son ancien corps parmi ses compagnons Dans ce modeste enclos oĂč nous accompagnons Les morts de la paroisse et ceux du voisinage ; Quand il reconnaĂźtra ceux de son parentage Modestement couchĂ©s Ă  l’ombre de l’église, Quand il retrouvera sous le jaune cytise Les dix-huit pieds carrĂ©s qui faisaient son partage ; Quand il retrouvera ceux de son hĂ©ritage, Et les fils de ses fils et tous ceux de son sang, Et les cousins germains et tous ceux de son rang, Comme ils venaient en bande aux jours de mariage ; Quand il retrouvera dans la maison d’école Et tous ceux de son Ăąge et tous ceux de son banc, Et la chaire et le maĂźtre et l’auguste parole, Et la carte et le stĂšre et le gramme et le franc ; Quand tout se lĂšvera pour un appareillage Qui sera le dernier des appareillements, Quand tout se lĂšvera pour un dernier naufrage Qui sera le premier des Ă©tablissements ; Quand tout retrouvera sa maison et sa race, Au moment de les perdre, ou de les conserver, Quand tout reconnaĂźtra la raison et la grĂące, Au moment de la perdre, ou de la retrouver ; Quand tout s’éclairera des flammes de mĂ©moire, Quand tout homme sera comme un grand spectateur, Quand la crĂ©ation devant le crĂ©ateur Sera comme un linceul aux rayons de l’armoire ; Quand les ressuscitĂ©s s’en iront par les bourgs, Encor tout Ă©baubis et cherchant leur chemin, Et les yeux Ă©blouis et se tenant la main, Et reconnaissant mal ces tours et ces dĂ©tours Des sentiers qui menaient leur candide jeunesse, Encor tout Ă©bahis que ce jour soit venu, Encor tout assaillis du regret revenu, Et reconnaissant mal, avant que l’aube naisse, Ces sentiers qui menaient leur enfance premiĂšre, Encor tout dĂ©molis d’ĂȘtre ainsi revenus, Et reconnaissant mal ces corps pauvres et nus, Et reconnaissant mal cette vieille chaumiĂšre Et ces sentiers fleuris qui menaient leur tendresse, Et les anciens lilas dans les vieilles venelles, Et la rose et l’Ɠillet et tant de fleurs charnelles, Avant que de monter jusqu’aux fleurs de hautesse ; Quand ils avanceront dans la nuit Ă©ternelle, TĂątant des mains les murs et cherchant leur chemin, Quand ils se lĂšveront pour le seul examen Qui vienne aprĂšs la mort et se repose en elle ; Quand l’homme s’en ira dans la nuit solennelle, Encor tout Ă©tourdi d’ĂȘtre ainsi revenu, Encor tout interdit d’ĂȘtre ainsi pauvre et nu, Encor tout engoncĂ© dans sa gaine charnelle ; Encor tout ahuri que ce jour soit venu. Mal rĂ©accoutumĂ© de se servir de soi, DĂ©jĂ  tout envahi du regret revenu, De ne plus ĂȘtre un homme et ne plus ĂȘtre un roi ; Quand il retrouvera sa force originelle, Mais pour ĂȘtre abolie et ne servir qu’un jour, Quand il retrouvera dans son premier sĂ©jour La lumiĂšre et la paix qui baignaient sa prunelle ; Quand ils s’avanceront dans cette cĂ©citĂ©, Tout dĂ©saccoutumĂ©s des chemins de la terre, Tout dĂ©shabituĂ©s de l’antique citĂ© Qui posait sur les fronts un masque statutaire ; Quand ils s’avanceront dans cette solitude, Mal rĂ©accoutumĂ©s Ă  marcher pas Ă  pas, Quand ils s’avanceront vers un dernier trĂ©pas, Ou vers le premier jour d’une bĂ©atitude PrĂšs de qui tout bonheur est de commandement. Et vers le premier jour de cette quiĂ©tude PrĂšs de qui toute grĂące est de gouvernement, Et vers le premier jour de cette certitude PrĂšs de qui tout savoir est un entassement, Et vers le premier jour de cette exactitude PrĂšs de qui toute rĂšgle est de consentement, Et vers le premier jour de cette plĂ©nitude PrĂšs de qui toute joie est une insuffisance, Et vers le premier jour de ce contentement, Et vers le dernier terme et la seule prĂ©sence, Et vers le premier bord du seul dĂ©bordement ; Quand ils s’avanceront dans cette adversitĂ©, Tout dĂ©saccoutumĂ©s des chemins de la terre, Tout dĂ©shabituĂ©s de l’antique citĂ© Qui posait sur les fronts un ordre salutaire ; Quand on n’entendra plus que le dĂ©membrement D’un monde qui s’en va comme un Ă©cartelĂ©, Quand on ne verra plus que le dĂ©labrement D’un monde qui s’abat comme un mur craquelĂ© ; Quand vos enfants perdus, aĂŻeule volontaire, Chemineront le long de leurs anciens labours, Et quand ils passeront le long des anciens jours, Et sur le beau chemin devant le presbytĂšre ; Quand ils s’avanceront dans la nuit Ă©ternelle, Encor tout Ă©tonnĂ©s d’ĂȘtre ainsi dans leur corps, Et dans l’ancien scrupule et dans l’ancien remords, Et d’ĂȘtre retournĂ©s dans la raideur charnelle ; Et d’ĂȘtre maladroits et perdus dans ces membres, Et tout embarrassĂ©s dans ces remembrements, Comme un roi qui revient et se perd dans ses chambres, Et ne reconnaĂźt plus ses beaux appartements ; Comme un roi qui retourne en son premier palais Et ne retrouve plus ni son grand chambellan, Ni son grand majordome et demande le plan De sa propre demeure et cherche des valets Qui pourraient ranimer tout ce grand appareil, Et la salle du trĂŽne et la salle du sacre, Et son glaive d’or pur et son sceptre de nacre, Et pourraient balayer la chambre du conseil ; Et pourraient lui montrer sa garde militaire, Et la porte centrale et le parvis de marbre, Et la vasque d’eau pure et le pourpris et l’arbre, Et pourraient lui sauver sa race hĂ©rĂ©ditaire ; Quand l’homme s’en ira dans la nuit Ă©toilĂ©e, Encor tout Ă©perdu de ce remembrement, Quand l’homme s’en ira dans la nuit dĂ©voilĂ©e, Encor tout confondu de ce transfĂšrement ; Quand l’homme s’en ira dans une nuit tacite, Encor tout engourdi d’ĂȘtre ainsi remembrĂ©, Quand il regardera vers un suprĂȘme site, Encor abasourdi d’ĂȘtre ainsi transfĂ©rĂ© ; Quand l’homme s’en ira dans une nuit profonde, Encor tout alourdi d’ĂȘtre rĂ©intĂ©grĂ©. Et d’ĂȘtre rĂ©inscrit et rĂ©incarcĂ©rĂ©, Encor tout assourdi dans ce fracas d’un monde Quand vos enfants perdus, aĂŻeule utilitaire, Chemineront le long de leurs anciens amours, Et le long des soucis qui ramenaient toujours En un centre de peine en un point de la terre Les longs Ă©garements d’un cƓur dĂ©libĂ©rĂ©, Quand ils reconnaĂźtront les antiques serments, Quand ils retrouveront les antiques tourments, La poudre et le dĂ©bris d’un cƓur dilacĂ©rĂ© ; Quand ils chemineront tout le long des dĂ©tours Qui ramenaient toujours vers la mĂȘme blessure, Quand ils chemineront tout le long de ces jours Qui ramenaient toujours la mĂȘme meurtrissure ; Quand ils reconnaĂźtront les jours de leur dĂ©tresse, Plus profonds et plus beaux que les jours de bonheur, Quand ils retrouveront les jours de leur honneur, Plus durs et plus aimĂ©s que les jours de liesse ; Quand ils verront l’autel et les premiers degrĂ©s, Quand ils verront le temple et les premiĂšres marches, Quand ils verront le seuil et les marbres sacrĂ©s, Et la brique romaine et la voĂ»te et les arches Du vieux pont qui menait leur caduque allĂ©gresse, Quand ils chemineront tout le long du fossĂ©, Quand ils retrouveront dans les jours du passĂ© Les jours de leur candeur et de leur maladresse, Quand ils s’avanceront tout le long du rempart, Quand ils regarderont les hautes cheminĂ©es, Tout gauches, tout perdus, percĂ©s de part en part Par le ressouvenir des anciennes annĂ©es ; Quand se rĂ©veilleront dans les champs de glanage Tant de glaneurs pĂ©ris pour des pĂ©chĂ©s mortels, Mais quand se dressera le plus haut patronage Pour les reversements les plus sacramentels, Quand dans le mĂȘme lieu les plus hauts personnages Ne seront pas plus grands que les derniers venus, Quand les dais les plus lourds, et les plus saugrenus, Ne vaudront pas plus cher que de pauvres mĂ©nages, Quand vos enfants perdus, ĂŽ reine de misĂšre, S’avanceront ainsi le long des anciens bois, Quand ils s’enfonceront pour la derniĂšre fois Dans la route commune et pourtant solitaire ; Quand ils s’avanceront le long des anciens prĂ©s, Dans la mansuĂ©tude et le recueillement, Quand ils s’enfonceront tout le long des regrets Dans la dĂ©suĂ©tude et le dĂ©feuillement ; Quand ils s’avanceront dans leur dernier chemin, Comme le jeune HĂ©mon et la belle Antigone, Quand le dernier bleuet et le dernier jasmin Et la douce pervenche et la chaste anĂ©mone Étendront sous les pas de ces derniers passants Le dernier Ă©tendu des tapis de la terre, Et quand la sagittaire et quand le fumeterre, Vainement Ă©tendus vainement florissants, Étendront sous les pas de cette immense armĂ©e Le dernier Ă©tendu des linceuls de la terre, Et quand la cicutaire et quand la serpentaire, Vainement vigilante et vainement armĂ©e, Et vainement poignante et vainement vivace, Étendront sous les pas de vos derniers enfants, Vainement accablĂ©s, vainement triomphants, Le dernier drap du lit pour la derniĂšre race Et le dernier passage et la derniĂšre trace, Et les pas sur les fleurs et les pas sur le sable, Quand vos enfants perdus, aĂŻeule pĂ©rissable, S’avanceront ainsi sur la basse terrasse, Pour la derniĂšre empreinte et la derniĂšre marque, Et quand ils fouleront la lavande et le thym, Quand ils s’avanceront dans leur dernier matin Vers le dernier prĂ©toire et le dernier monarque, Quand ils iront en bande et les curĂ©s en tĂȘte, Quand ils contempleront le dernier tribunal, Quand ils chemineront tout le long du canal, Comme ils allaient en bande aux jours de grande fĂȘle, Quand ils s’avanceront dans l’éternelle nuit, Quand ils auront passĂ© devant le four banal, Et le moulin Ă  vent et le prĂ© communal, Comme ils allaient en bande aux messes de minuit, Quand ils auront passĂ© devant le marĂ©chal, Et la forge et l’enclume et le bras sĂ©culier, Quand ils se heurteront au coin d’un espalier, Encor tout endormis et reconnaissant mal Ces sentiers qui menaient leur naĂŻve rudesse, Et quand ils trembleront dans ce dernier trĂ©pas, Pourrez-vous allumer pour Ă©clairer leurs pas, Dans cette incertitude et dans cette faiblesse, AĂŻeule du lĂ©preux et du grand sĂ©nĂ©chal, Saurez-vous retrouver dans cet encombrement, Pourrez-vous allumer dans cet Ă©garement Pour Ă©clairer leurs pas quelque pauvre fanal, Et quand ils passeront sous la vieille poterne, Aurez-vous retrouvĂ© pour ces gamins des rues, Et pour ces vĂ©tĂ©rans et ces jeunes recrues, Pour Ă©clairer leurs pas quelque vieille lanterne ; Aurez-vous retrouvĂ© dans vos forces dĂ©crues Le peu qu’il en fallait pour mener cette troupe Et pour mener ce deuil et pour mener ce groupe Dans le recordement des routes disparues. Nous nous sommes rangĂ©s sous une loi si dure, AĂŻeule de l’esclave et du lĂ©gislateur. Nous nous sommes rangĂ©s sous une foi si pure, AĂŻeule du despote et du conspirateur. Vous avez pu ranger la brebis et l’agneau Et le berger lui-mĂȘme aprĂšs qu’il eut pĂ©ri. Vous rangez le bercail, vous rangez le chevreau. Et vous rangez le loup quand il est assouvi. Vous rangez l’eau bĂ©nite et le lit mortuaire Et le lit nuptial de l’homme enseveli, Vous rangez le crĂ©dit et la loi somptuaire Et l’amour filial quand le fils est parti. Vous rangez l’escabeau, vous rangez le suaire, Vous rangez l’appareil des appareillements. Vous rangez le caveau, vous rangez l’ossuaire, Vous rangez le recueil et les recueillements. Vous rangez le silence et le drap funĂ©raire Et vous fermez ces yeux quand l’homme en est parti. Vous rangez la prĂ©sence et l’urne cinĂ©raire Et vous baisez ce front, quand l’homme en est sorti. Ô femme qui fermez les regards bleus et noirs Et les regards profonds des yeux les plus aimĂ©s, Épouse qui fermez pour le dernier des soirs Le reconnaissement des yeux accoutumĂ©s. Ô femme qui fermez les regards des mourants Sur le dernier aspect qu’ils auront eu du monde, Et qui les refermez sur cette nuit profonde, Ô femme qui cueillez des souffles expirants, Vous rangez le Seigneur au fond du sanctuaire, Vous rangez le calice aprĂšs qu’il est empli. Vous rangez le cantique avec l’obituaire. Et vous rangez le sort quand il est accompli. Et vous rangez le mort aprĂšs qu’il est bien mort. Et vous rangez les temps quand ils sont rĂ©volus. Et vous rangez les jours quand ils sont absolus. Vous rangez le vaisseau quand il est dans le port. Vous rangez les enfants quand ils sont rĂ©solus. Vous rangez le sĂ©pulcre et la croix de par Dieu. Vous rangez les trois croix sur le dernier haut lieu. Et vous rangez le cƓur aprĂšs qu’il ne bat plus. Vous rangez le martyr au fond du tombereau. Et vous rangez la foule aprĂšs qu’elle a suivi. Vous avez pu ranger le glaive et le fourreau Et le soldat lui-mĂȘme aprĂšs qu’il eut servi. Vous rangez la tenaille et rangez le barreau. Vous rangez le Calvaire aprĂšs qu’il est gravi. Vous rangez le carcan, vous rangez le bourreau. Vous rangez la victime aprĂšs qu’elle a servi. Vous rangez cette tourbe aprĂšs qu’elle a suivi. Et vous rangez la messe et vous rangez l’absoute. Vous rangez le dĂ©part et vous rangez la route. Vous rangez le Sauveur aprĂšs qu’il a servi. Femme qui connaissez et les palais des rois, Et le chaume et la grange et le maĂźtre d’école, Et qui savez par cƓur votre rĂšgle de trois, Et la reconnaissez jusqu’en ma parabole ; Vous avez pu compter, Ă©ternelle comptable, À quel prix j’ai sauvĂ© ce peuple abandonnĂ©. Vous pouvez calculer, voici l’encre et la table, À quel taux j’ai prĂȘtĂ© le sang que j’ai donnĂ©. Vous avez pu compter, inlassable servante. Combien se sont nourris du pain que j’ai rompu. Vous avez pu compter, implacable suivante, Combien j’en ai sauvĂ© de ceux que j’ai voulu. Vous avez pu compter, inlassable gĂ©rante, Si du pain de mon corps tout homme s’est repu. Vous avez pu compter, implacable rĂ©gente, Ce que j’avais tentĂ© d’avec ce que j’ai pu. Vous avez pu compter ce que coĂ»te le nombre, Quand il faut le payer avec le sang d’un seul. Vous avez pu compter ce que coĂ»te un linceul Quand tout un univers descend dans la pĂ©nombre. Vous avez pu compter, inlassable Ă©conome, Ce que coĂ»te l’espace, et le temps, et le lieu. Vous avez pu compter Ă  combien revient l’homme, Et qu’il fallut payer du sang mĂȘme d’un Dieu. Vous qui savez compter, comptable inĂ©vitable, MaĂźtresse du cassis et du jaune nerprun, Vous qui les avez vus douze autour de ma table, MaĂźtresse de la dette et du tragique emprunt ; Vous qui savez par cƓur ce que coĂ»te chacun, MaĂźtresse du jardin et des eaux et forĂȘts. Vous qui savez par cƓur vos rĂšgles d’intĂ©rĂȘts. Et les frais gĂ©nĂ©raux et le compte commun. Vous le savez assez, ĂŽ mon Ăąme, ĂŽ ma mĂšre, MaĂźtresse de mesure et d’un sort opportun, MaĂźtresse du dĂ©compte et du large sommaire Que nous n’avons que Dieu qui rende cent pour un. Et vous mettrez ceci dans vos livres de compte, Puisque vous Ă©crivez ce que coĂ»te chacun, Et vous mettrez ceci dans nos livres de honte, Que nous n’avons qu’à Dieu qu’on prĂȘte Ă  cent pour un. Et vous mettrez ceci sur le large sommaire, Et sur le bordereau de ce que vaut chacun, Éternelle Ă©conome, Ă©conome Ă©phĂ©mĂšre, Que nous n’avons que Dieu qui vaille cent pour un. Et vous mettrez ceci sur le large sommaire, Et sur le bordereau de ce que fait chacun, Éternelle Ă©conome, Ă©ternelle Ă©phĂ©mĂšre, Que nous n’avons que Dieu qui fasse cent pour un. Et par lĂ  vous savez combien l’homme exagĂšre Quand il dit qu’il dĂ©teste et quand il dit qu’il aime. Et qu’il n’est point de lieu sur la terre Ă©trangĂšre Ni pour un grand amour ni pour un grand blasphĂšme. Et par lĂ  vous savez combien l’homme exagĂšre Quand il dit qu’il atteste et quand il dit qu’il ment ; Et qu’il n’est point de place en sa tĂȘte lĂ©gĂšre Ni pour un grand respect ni pour un grand serment. Vous qui savez si bien doubler un capital, Et le redemander quand on vous l’a rendu, Faites l’addition et posez ce total Que nous n’avons que moi qui prĂȘte Ă  fonds perdu. Et par lĂ  vous savez combien l’homme exagĂšre Quand il dit qu’il achĂšte et quand il dit qu’il vend. C’est toujours moi qui paye et toujours lui qui prend. Et c’est Dieu qui possĂšde et c’est l’homme qui gĂšre. Et par lĂ  vous savez combien l’homme exagĂšre Quand il dit qu’il se bat et quand il dit qu’il vainc. C’est Dieu seul qui dĂ©bat et Dieu seul qui convainc D’imposture et de faux la lĂšvre mensongĂšre. Et par lĂ  vous savez combien l’homme exagĂšre Quand il dit qu’il conteste et quand il dit qu’il ment. Et qu’il n’est point de seuil sous sa porte Ă©trangĂšre Ni pour un grand bonheur ni pour un grand tourment. Et par lĂ  vous savez combien l’homme se flatte Quand il dit qu’il descend et quand il dit qu’il monte. Il a mal mesurĂ© combien sa vie est plate Entre le point d’honneur et le niveau de honte. Et vous savez aussi ce que tout homme tente C’est de se rĂ©chapper des mains du Tout-Puissant. C’est de tenter sa veine et de suivre sa pente. Et c’est de gaspiller le meilleur de mon sang. Et vous savez aussi ce que tout homme tente C’est de se rĂ©chapper des mains de l’Éternel. C’est de cuver sa peine et de planter sa tente Dans le recordement de son rĂȘve charnel. Et vous savez aussi ce que tout homme tente C’est de se rĂ©chapper des mains de son Sauveur. C’est de se libĂ©rer de la vieille Ă©pouvante Afin de retomber dans la turpide peur. Et vous savez aussi ce que tout homme tente C’est de se rĂ©chapper des mains de son bonheur. Et c’est de s’évader des jours de son honneur. Et de le mettre en gage et de le mettre en vente. Et vous savez aussi ce que tout homme tente C’est de se rĂ©chapper des chemins du salut. Et c’est de s’évader d’un bonheur absolu. Et de se consumer dans une vaine attente. Et par lĂ  vous savez ce que tout homme tente C’est de garer son bien des atteintes de Dieu. C’est de garer son or et le mettre en un lieu Qu’il n’ait plus qu’à dormir pour en toucher la rente. Et par lĂ  vous savez ce que tout homme tente C’est de garer son bien des reprises de Dieu. C’est de garer son or et le mettre en un lieu Qu’il n’ait plus qu’à dormir pour en toucher la rente. Et par lĂ  vous savez ce que tout homme tente C’est de garer son bien des reproches de Dieu. C’est de garer son or et le mettre en un lieu Qu’il n’ait plus qu’à dormir pour en toucher la rente. Et par lĂ  vous savez ce que tout homme tente C’est de garer son bien des tempĂȘtes de Dieu. C’est de garer son or et le mettre en un lieu Qu’il n’ait plus qu’à dormir pour en toucher la rente. Et par lĂ  vous savez ce que tout homme tente C’est de garer son cƓur des reprises de Dieu. C’est de garer son Ăąme et la mettre en un lieu Qu’il n’ait plus qu’à dormir pour en toucher la rente. Vous qui juxtaposez sur la double colonne Ce que chacun rapporte et ce que chacun doit, Vous savez que Dieu seul est le seul qui se donne, Et que l’ĂȘtre de l’homme incessamment dĂ©croĂźt Et que l’ĂȘtre de Dieu remonte incessamment À son niveau de force Ă  la mĂȘme altitude, Et qu’il fait de lui-mĂȘme et son redoublement Et sa force Ă©ternelle et son exactitude. Et que l’ĂȘtre de Dieu recroĂźt incessamment À son niveau de vie Ă  la mĂȘme altitude, Et qu’il fait de lui-mĂȘme et son retriplement Et la vie Ă©ternelle et la bĂ©atitude. Et que l’ĂȘtre de Dieu retourne incessamment Dans sa source Ă©ternelle et dans sa plĂ©nitude, Et qu’il fait de lui-mĂȘme et son accroissement Et sa force Ă©ternelle et sa mansuĂ©tude. Et que l’ĂȘtre de Dieu repuise incessamment Dans sa source Ă©ternelle et dans sa nuit profonde, Et qu’il fait de lui-mĂȘme et son accroissement Et le salut de l’homme et la force du monde. Et par lĂ  vous savez, gouvernante et patronne, Que l’homme ne vaut pas le quart de ce qu’il croit, Et qu’il ne comprend pas le quart de ce qu’il voit, Et qu’il joue et qu’il ment quand il dit qu’il se donne. Et par lĂ  vous savez que tout homme dĂ©pense, Et que le plus avare est le plus dĂ©pensier. Et que le charitable est le seul bon boursier, Le seul qui sache un peu gouverner sa finance. Et que le charitable est le seul usurier À deux mille fois plus que le denier commun. Il est le seul prĂȘteur qui prĂȘte Ă  cent pour un. Et c’est un vieil avare et un procĂ©durier. Car il est cent fois sĂ»r de toucher ce pour cent. Et je suis Ă©tonnĂ© qu’on en fasse mystĂšre. Quand il exposerait quelques arpents de terre Il remet sa crĂ©ance aux mains du Tout-Puissant. C’est un spĂ©culateur, un maĂźtre en fait d’emprunt, Et de prĂȘt et d’usure et de bon placement, Car c’est le seul banquier qui prĂȘte Ă  cent pour un Et qui soit toujours sĂ»r de son gouvernement. C’est un calculateur en fait de certitude. Il mets sur le seul fonds qui ne pĂ©rira pas. Et sa rĂšgle Ă  calcul et son double compas, C’est un seul mot tombĂ© sur cette multitude. C’est un seul mot de moi tombĂ© sur cette foule, Le jour que je pleurai sur cette multitude. VoilĂ  son gouvernail dans cette immense houle, Sa boussole et son or et toute son Ă©tude. VoilĂ  son appareil et sa sollicitude. VoilĂ  son banc de rame et son couronnement. VoilĂ  son attirail et sa pauvre habitude. VoilĂ  le seul manteau de son revĂȘtement. Un seul mot remontĂ© d’une similitude, C’est son centre et son axe et son alignement. Un seul mot remontĂ© de mon enseignement, VoilĂ  son Ă©quilibre et son exactitude. C’est lĂ  sa latitude avec sa longitude. C’est lĂ  son parallĂšle et son mĂ©ridien. C’est son cadran solaire et c’est son amplitude. Et c’est le seul recours d’un cƓur patricien. Et c’est le temps qu’il fait et c’est l’ñge qu’il a. Et c’est sa quiĂ©tude et son contentement. Et c’est l’heure qu’il est Ă  ma montre et voilĂ  Tout ce qu’il a gardĂ© de tout enseignement. Les autres sont perdus parmi tant de richesses Qu’ils ont le cƓur plus creux qu’un cƓur pharisien. Mais seule vous traĂźnez parmi tant de largesses Le long ressouvenir du temps qu’on n’avait rien. Les autres sont perdus parmi tant de kermesses Qu’ils ont le cƓur plus faux qu’un cƓur musicien. Et seule vous traĂźnez parmi tant de liesses Le long ressouvenir du temps qu’on n’avait rien. Les autres sont perdus parmi tant de sagesses Qu’ils ont le cƓur plus sot qu’un cƓur historien. Et seule vous traĂźnez parmi tant de souplesses Le long ressouvenir du tant qu’on n’avait rien. Les autres sont perdus parmi tant de bassesses qu’ils ont le cƓur plus las qu’un cƓur quotidien. Et seule vous traĂźnez parmi ces gentillesses le noble souvenir du temps qu’on avait rien. Quelques-uns sont rangĂ©s parmi tant de noblesse Qu’ils ont le cƓur plus haut qu’un cƓur cornĂ©lien. Avec eux vous traĂźnez parmi cette hautesse Le simple souvenir du temps qu’on n’avait rien. Les autres sont perdus parmi tant de faiblesses Qu’ils ont le cƓur plus fat qu’un cƓur magicien. Et seule vous traĂźnez parmi ces joliesses Le secret souvenir du temps qu’on n’avait rien. Quelques-uns sont rangĂ©s parmi tant de tendresse Qu’ils ont le cƓur plus doux qu’un cƓur virgilien. Avec eux vous traĂźnez parmi cette justesse L’antique souvenir du temps qu’on n’avait rien. Les autres sont perdus parmi tant de rudesses Qu’ils ont le cƓur plus dur qu’un cƓur prĂ©torien. Et seule vous traĂźnez parmi ces forteresses Le morne souvenir du temps qu’on n’avait rien. Celui-lĂ  seul qui met son front sur mes genoux Est seul maĂźtre du temps et seul maĂźtre du lieu. Et seul il sait garder ses misĂ©rables sous, Celui qui donne au pauvre et redemande Ă  Dieu. Vous voici dĂ©sormais parmi tant de dĂ©pouilles, Entre le mauvais juif et le mauvais chrĂ©tien. Ils sont tous deux vos fils et se font des embrouilles. Mais quand on avait tout, personne n’avait rien. Vous voici dĂ©sormais entre tant de fripouilles, Entre le mauvais juif et le mauvais chrĂ©tien. Ils sont tous deux pareils et se cherchent des brouilles. Mais quand on avait tout, personne n’avait rien. Vous voici dĂ©sormais dans toute cette tourbe, Entre le mauvais riche et le mauvais larron, Entre le mauvais fils et le mauvais baron, Vous voici dĂ©sormais dans toute cette bourbe. Vous voici dĂ©sormais dans toute cette fange. Vous voici dĂ©sormais dans l’oblique et le courbe. Vous voici dĂ©sormais dans le faux et le fourbe. Vous voici dĂ©sormais dans la bourse et le change. Ils se querelleront pour des mines de houilles. Ils se querelleront les quatre fers d’un chien. Ils se querelleront de caves et des fouilles. Mais quand on avait tout, nul ne querellait rien. Et par lĂ  vous savez de quoi l’homme se mĂȘle, Et que ce n’est jamais de son pauvre devoir, Et que ce n’est jamais de son maigre pouvoir, Et que ce n’est jamais que de quelque cautĂšle. Et vous savez aussi sur quoi l’homme se fonde Pour dire qu’il est fort et pour dire qu’il est beau. Il ne veux voir que lui dans cet immense monde. Et ne jamais fermer la porte d’un tombeau. Et par lĂ  vous savez le peu que l’homme pĂšse, Et le peu qu’il figure entre les mains de Dieu, Et le peu qu’il dĂ©tient dans le temps et le lieu, Depuis qu’il fut pĂ©tri de la premiĂšre glaise. Et par la vous savez le peu que l’homme pĂšse, Quatre onces de poussier dans le creux de la main. Quatre pieds de terreau dans le creux du chemin. Et le retournement dans la premiĂšre glaise. Mais vous savez aussi de quoi l’homme dĂ©roge. C’est de son origine et c’est de sa noblesse. Et de sa hauteur d’homme et c’est de sa hautesse. Et par lĂ  vous savez ce que l’homme s’arroge C’est le droit d’ĂȘtre bas quand la rĂšgle est trop haute. Et le droit d’ĂȘtre haut quand la rĂšgle est trop basse. Et le droit de pĂ©cher sans commettre de faute. Et le droit de passer quand la rĂšgle se lasse. Et le droit de broncher quand la rĂšgle se tasse. Et le droit d’ĂȘtre absent quand Dieu mĂȘme est son hĂŽte. Et le droit de sombrer sans se mettre Ă  la cĂŽte. Et le droit de casser quand la rĂšgle se casse. Et par lĂ  vous savez par quoi l’homme se perd. Il veut se dire grand et ne pas voir qu’il baisse. Il veut se dire fort quand il cĂšde et s’affaisse. Il veut se dire libre, et ne pas dire qu’il sert. Et par lĂ  vous savez combien l’homme se trompe Quand il dit qu’il offense et quand il dit qu’il plaide. Il a mal mesurĂ© combien sa vie est laide Et qu’il faut qu’elle plie et qu’il faut qu’elle rompe. Et par lĂ  vous savez Ă  quoi l’homme se prend. C’est Ă  quelque fantĂŽme issu de sa cervelle. À quelque pas dansĂ© sur une herbe nouvelle. Et par lĂ  vous savez le peu que l’homme rend. Et par lĂ  vous savez le peu que l’homme pĂšse, Et qu’il est fĂ©tu dans les doigts de la main, Et qu’il est un passant sur le bord du chemin, Tout prĂšs de retourner dans sa premiĂšre glaise. Et par lĂ  vous savez ce que l’homme dĂ©couvre. C’est que tout souvenir est un point de douleur. Et que tout avenir est un puits de malheur. Et que toute blessure est prĂ©sente et se rouvre. Et par lĂ  vous savez de quoi l’homme se doute. C’est qu’il est un pauvre ĂȘtre et que tout finit mal. Et par lĂ  vous savez ce que l’homme redoute. C’est d’ĂȘtre malheureux comme un morne animal Qui se traĂźne et pĂ©rit dans sa captivitĂ©. C’est d’ĂȘtre enfin cernĂ© parmi tant de bassesse. Et bloquĂ© dans sa geĂŽle et dans sa forteresse. Et dans son innocence et dans sa gravitĂ©. Par ainsi vous savez Ă  quoi tout homme pense. Et cet arriĂšre-goĂ»t pour le pĂ©chĂ© mortel. Et ce prosternement aux marches de l’autel. Et cet arriĂšre-goĂ»t pour une rĂ©compense Qui du moins ne serait qu’un malheur dĂ©tendu Et dans le souvenir d’une peine moins dure Le recommencement d’une vie aussi pure Et le couronnement d’un bonheur attendu. Et vous savez surtout de quoi l’homme se venge. C’est du bien qu’on lui fait et du bien qu’on lui veut. Et cet arriĂšre-goĂ»t pour l’ordure et la fange. Et de faire le mal par les moyens qu’il peut. Et vous savez pourquoi tout homme se lamente. Il veut jouer deux jeux dans le jeu temporel. Il veut reprendre son aise, il veut suivre sa pente, Et cependant gagner son salut Ă©ternel. Il veut gagner deux fois dans le jeu qui je joue. Et gagner l’éphĂ©mĂšre avecque l’éternel. Et la dĂ©rision du soufflet sur ma joue, Il veut la retourner vers un jeu temporel. Il veut gagner deux fois en ne misant qu’un jeu. Il veut gagner son Ăąme avec son corporel. Et gagner le miracle avec son naturel. Et gagner ces deux fois ne mettant qu’un enjeu. Et par lĂ  vous savez pourquoi l’homme s’observe. C’est qu’il a toujours peur de trop donner Ă  Dieu. Il bĂątirait mon temple en boĂźte de conserve Et du bois de la croix allumerait son feu. Et par lĂ  vous savez combien l’homme exagĂšre Quand il dit qu’il recule et qu’il dit qu’il avance, Et qu’il n’est point de place en sa tĂȘte lĂ©gĂšre Ni pour un grand refus ni pour une observance. Mais vous savez aussi qu’il n’exagĂšre pas Quand il dit qu’il est nud et quand il dit qu’il tremble. Et qu’il est malheureux et qu’il est tout ensemble Sous le coup de la mort et le coup des frimas. Mais vous savez aussi qu’il n’exagĂšre pas Quand il dit qu’il est sot et quand il dit qu’il tremble. Et qu’il est saugrenu de vouloir tout ensemble Mener la mĂȘme vie en de nouveaux climats. Mais vous savez aussi qu’il n’exagĂšre pas Quand il dit qu’il est double et quand il dit qu’il tremble, Et qu’il cherche sa voie et qu’il veut tout ensemble Avancer sans Ă -coups et faire des faux pas. Et par lĂ  vous savez qu’il n’exagĂšre pas Quand il dit qu’il est faux et quand il dit qu’il tremble. Et qu’il cherche sa route et qu’il veut tout ensemble, En piĂ©tinant sur place acheminer ses pas. Mais vous savez aussi qu’il n’exagĂšre pas Quand il dit qu’il est faible et quand il dit qu’il tremble. Et qu’il fait peine Ă  voir et qu’il est tout ensemble Sous le coup de la vie et le coup du trĂ©pas. Quand il dit qu’il grelotte et quand il dit qu’il tremble, Et qu’il est vagabond sans asile et sans feu, Et qu’il est Ă  la porte et qu’il est tout ensemble Et sous les coup de l’homme et sous les coups de Dieu. Vous savez aujourd’hui ce que chacun supporte Et c’est un pauvre sort lentement poursuivi. Et par lĂ  vous savez ce que chacun rapporte. C’est l’ombre du butin que le maĂźtre a ravi. Vous savez aujourd’hui ce que tout homme escompte. C’est une grosse gloire Ă  la hĂąte entassĂ©e. Mais vous savez aussi ce que tout homme compte. C’est une chĂšre peine Ă  la longue amassĂ©e. Nous voici dĂ©sormais parmi tant de partage. Chacun veut battre l’autre et veut faire l’important. Mais vous qui les voyez au seuil de l’hĂ©ritage Quand on possĂ©dait tout, on ne comptait pas tant. Voici nos valeureux qui font tant de batailles. Ne se battent jamais pour le souverain bien. Voici nos malheureux qui font tant de ripailles. Mais quand on avait tout, on ne gaspillait rien. Voici nos sages fous qui font tant de rĂ©serves. Voici le pĂ©ager, voici le publicain. Voici nos grands savants qui nous font des conserves. Mais quand on avait tout, on ne conservait rien. On ne nourrissait pas pour les sept vaches maigres Vers le Nil donateur les belles vaches grasses. On ne mĂ©nageait pas les sources et les grĂąces. Toutes coulaient toujours et demeuraient intĂšgres. On ne nourrissait pas pour les sept vertus maigres Le beau bĂ©tail produit dans les plaines d’Égypte. On ne bĂątissait pas pour les sept vaches maigres L’ombre du baptistĂšre et l’ombre de la crypte. On ne nourrissait pas pour les sept vertus maigres Le beau troupeau produit sur les rives du Nil. On ne nourrissait pas pour les sept vaches maigres Le flambeau du salut et l’ombre du pĂ©ril. On ne nourrissait pas pour les sept vertus maigres Le beau troupeau produit dans les plaines du Nil. On ne nourrissait pas pour les sept vaches maigres L’ombre de la puissance et du sceptre viril. On ne nourrissait pas les sources et les grĂąces Comme un garde-manger pour les sept vaches maigres. Et l’Égypte et le Nil et les sept vaches grasses Comme un garde-manger pour les sept vertus maigres. On ne nourrissait pas les sources et les grĂąces Comme un rĂ©servement pour les sept vaches maigres. Et l’Égypte et le Nil et les sept vaches grasses Comme un engraissement pour les sept vertus maigres. On ne nourrissait pas pour les sept fiĂšvres aigres La santĂ©, la jeunesse et le consentement. On ne nourrissait pas tout un enfantement, Le long du pĂšre Nil pour les sept vaches maigres. Et pour des repentirs plus Ăącres que des fautes. Et des contritions plus sales qu’un pĂ©chĂ©. Et des attritions plus sottes et moins hautes. Et des consomptions que l’on trouve au marchĂ©. Des rĂ©tractations plus lĂąches que des crimes. Des faux Ă©clats plus laids que des aveuglements. Des circonspections qui ne sont que des frimes. Des barrages moins beaux que des dĂ©bordements. Des rĂ©parations plus viles qu’une offense. Et de confessions moins nobles que l’aveu. Et des confusions chez quelque bas neveu. Pleines de ridicule et pleines d’indĂ©cence. Et des ablutions pleines de rĂ©ticence. Et des prĂ©cautions pleine de procĂ©dure. Et des prĂ©sentations plus vides que l’absence. Et des attentions plus mornes que l’ordure. Et des retournements qui reviennent au mĂȘme. Et des effacements qui n’effacent que l’homme. Et des empressements sous un faux majordome. Et des solutions pires que le problĂšme. Des vĂ©nĂ©rations pleines de turpitude. Et des rois moins sacrĂ©s que des soulĂšvements. Des ordres moins divins que des dĂ©rĂšglements. Des adorations pleines de lassitude. Des rĂ©volutions plus mortes que des trĂŽnes. Des progrĂšs plus cassĂ©s que la vieille habitude. Des secrets plus connus que Louis XI et Latude. Des Ă©volutions plus sages que des prĂŽnes. Et moi je vous salue ĂŽ pleine de disgrĂące. Vous avez tant menĂ© la charrue et les bƓufs. Vous avez tant versĂ© sur votre pauvre race Le vain dĂ©versement de vos stĂ©riles vƓux. Et moi je vous salue ĂŽ reine de disgrĂące. Vous avez tant liĂ© ces pĂ©rissables nƓuds. Vous avez tant versĂ© sur votre auguste race. Le long dĂ©sarmement de vos paisibles vƓux. Et moi je vous salue ĂŽ temple de disgrĂące. Vous avez tant lavĂ© vos pĂ©rissables yeux. Vous avez tant versĂ© sur votre noble race Le long dĂ©membrement de vos fragiles vƓux. Et moi je vous salue au nom de votre race, AĂŻeule des vaincus et des retriomphants. Vous avez tant versĂ© sur vos pauvres enfants Le long ressouvenir des morceaux de la grĂące. Et moi je vous salue ĂŽ premiĂšre ouvriĂšre. PremiĂšre assujettie Ă  la loi du travail. Vous avez tant levĂ© vers le premier portail Des yeux tout alourdis d’une morne priĂšre. Et moi je vous salue ĂŽ la plus misĂ©rable. PremiĂšre assujettie Ă  la loi de la peine. Et la premiĂšre exposĂ©e Ă  la loi de la haine. Ô victime et tĂ©moin d’un sort inexorable. Et moi je vous salue ĂŽ premiĂšre mortelle. Vous avez tant baisĂ© les fronts silencieux, Et la lĂšvre et la barbe et les dents et les yeux De vos fils descendus dans cette citadelle. Vous en avez tant mis dans le chĂȘne et l’érable, Et la pierre et la terre et les marbres plus beaux. Vous en avez tant mis sur le seuil des tombeaux. Vous voici la derniĂšre et la plus misĂ©rable. Vous en avez tant mis dans de pauvres linceuls, CouchĂ©s sur vos genoux comme aux jours de l’enfance. On vous en a tant pris qui marchaient nus et seuls Pour votre sauvegarde et pour votre dĂ©fense. Vous en avez tant mis dans d’augustes linceuls, PliĂ©s sur vos genoux comme des nourrissons. On vous en a tant pris de ces grĂȘles garçons Qui marchaient Ă  la mort tĂ©mĂ©raires et seuls. Vous en avez tant mis dans ces lourdes entraves, Les seules qui jamais ne seront dĂ©liĂ©es, De ces pauvres enfants qui marchaient nus et graves Vers d’éternelles morts aussitĂŽt oubliĂ©es. Vous en avez tant mis dans ce lourd appareil, Le seul qui de jamais ne sera rĂ©solu, De ce jeune troupeau qui s’avançait pareil À des agneaux chargĂ©s d’un courage absolu. Vous en avez tant mis dans le secret des tombes, Le seul qui jamais plus ne sera dĂ©voilĂ©, Le seul qui de jamais ne sera relevĂ©, De ces enfants tombĂ©s comme des hĂ©catombes, Offerts Ă  quelque dieu qui n’est pas le vrai Dieu, FrappĂ©s sur quelque autel qui n’est pas holocauste, Perdus dans la bataille ou dans quelque avant-poste, TombĂ©s dans quelque lieu qui n’est pas le vrai Lieu. Vous en avez tant mis au fond des catacombes, De ces enfants pĂ©ris pour sauver quelque honneur. Vous en avez tant mis dans le secret des tombes, De ces enfants sombrĂ©s aux portes du bonheur. Vous en avez tant mis dans les plis d’un long deuil, D’entre ceux qui marchaient taciturnes et braves. On vous en a tant pris jusque sur votre seuil, D’entre ceux qui marchaient invincibles et graves. Vous en avez tant mis le long des nĂ©cropoles, Vous en avez tant pris sur vos sacrĂ©s genoux, De ces fils qui venaient le long des mĂ©tropoles, Et marchaient et tombaient et qui mouraient pour vous. Et moi je vous salue ĂŽ premiĂšre fermiĂšre. Vous avez tant comptĂ© les poules et les Ɠufs. Vous avez tant versĂ© sur la race premiĂšre Le vain dĂ©bordement de vos futiles vƓux. Et je vous aime tant ĂŽ premiĂšre pauvresse, PremiĂšre assujettie Ă  la loi de la mort, Et premiĂšre exposĂ©e Ă  la loi de dĂ©tresse, Et premiĂšre exposĂ©e aux coups d’un nouveau sort. Et je vous aime tant ĂŽ mon Ăąme, ĂŽ ma mĂšre, PremiĂšre assujettie aux lois de pauvretĂ©, PremiĂšre assujettie Ă  la loi de misĂšre, PremiĂšre assujettie aux lois de libertĂ©. Et je vous aime tant, aĂŻeule inaltĂ©rable, PremiĂšre assujettie Ă  la loi de tendresse, Qui dans cet abandon et dans cette dĂ©tresse PĂ©rissez la derniĂšre et la plus misĂ©rable. Et je vous aime tant, aĂŻeule invulnĂ©rable, PremiĂšre assujettie aux lois de servitude, Qui parmi tant d’offense et tant d’inquiĂ©tude, Demeurez la derniĂšre et la plus misĂ©rable. Et moi je vous salue ĂŽ premiĂšre fermiĂšre. Vous avez tant veillĂ© devant de maigres feux. Vous avez tant versĂ© sur la race premiĂšre L’ardent dĂ©bordement de vos fĂ©briles vƓux. Et moi je vous salue, aĂŻeule vĂ©nĂ©rable, PremiĂšre assujettie Ă  la loi d’habitude, Qui parmi tant d’outrage et tant d’incertitude, NaquĂźtes la premiĂšre et la plus misĂ©rable. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre malheureux. Mais vous avez connu d’innover le malheur. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre douloureux. Mais vous avez connu d’innover la douleur. Les autres n’ont connu que leur indignitĂ©. Mais vous avez connu ce que c’est que descendre. Les autres ont connu le tison et la cendre. Mais vous avez connu la flamme et la clartĂ©. Les autres ont connu d’ĂȘtre sans hĂ©ritage. Mais vous avez connu d’ĂȘtre dĂ©shĂ©ritĂ©e. Les autres n’ont connu que leur nouveau partage. Mais vous avez connu d’ĂȘtre dĂ©partagĂ©e. Les autres n’ont connu que cette plaine rase. Mais vous avez connu cette pente dĂ©clive. Les autres ont connu le marais et la vase. Mais vous avez connu la fontaine et l’eau vive. Les autres n’ont connu que leur commune race. Mais vous avez connu d’avoir dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©. Les autres n’ont connu que de suivre Ă  la trace. Mais vous avez connu d’avoir dĂ©libĂ©rĂ©. Le autres ont connu d’ĂȘtre dans ce royaume. Mais vous avez connu de descendre en ce lieu. Les autres n’ont connu que la paille et le chaume. Et vous avez connu de descendre de Dieu. Les autres ont connu les murs de la prison. Mais vous avez connu d’entrer dans cette geĂŽle. Et le froid dans la nuque et la main sur l’épaule. Et le refermement d’un immense horizon. Les autres n’ont connu que la basse maison. Mais vous avez connu d’entrer dans cette tombe. Les autres n’ont connu que la basse raison. Mais vous avez connu la premiĂšre palombe Volant Ă  tire d’aile au-dessus d’un jardin Plus jeune qu’un jeune homme et plus sage qu’un soir. Seule vous avez vu le premier reposoir, Et le premier soleil sur le premier matin. Les autres n’ont connu que la porte fermĂ©e. Mais vous avez connu la mĂȘme fermeture. Et vous seule avez vu la clef dans la serrure, Et l’archange devant ĂŽ mĂšre bien aimĂ©e. Les autres n’ont connu que leurs basses fenĂȘtres, Et leur vue encerclĂ©e aux murs de l’horizon. Mais vous avez connu la jeunesse des ĂȘtres Et les bondissements du renne et du bison. Seule vous le savez, nos vertus d’aujourd’hui Ne valent pas le quart de l’antique innocence. Et les moralitĂ©s de notre morne ennui Ne valent pas le quart de l’antique puissance. Seule vous le savez nos travaux d’aujourd’hui Ne valent pas le quart de l’antique paresse. Et les brutalitĂ©s de notre Ă©norne ennui Ne valent pas le quart de l’antique tendresse. Seule vous le savez nos raideurs d’aujourd’hui Ne valent pas le quart de l’antique rudesse. Et les sĂ©vĂ©ritĂ©s de notre dur ennui Ne valent pas le quart de l’antique mollesse. Seule vous le savez nos Ɠuvres d’aujourd’hui Ne valent pas le quart de l’antique noblesse. Et les mortalitĂ©s de notre pauvre ennui Ne valent pas le quart de l’antique sagesse. Seule vous le savez nos forces d’aujourd’hui Ne valent pas le quart de l’antique faiblesse. Et les vellĂ©itĂ©s de notre vague ennui Ne valent pas le quart de l’antique largesse. Seule vous le savez nos clartĂ©s d’aujourd’hui Ne valent pas le quart des antiques tĂ©nĂšbres. Et les Ă©clairements de notre terne ennui Ne sont que des flambeaux et des torches funĂšbres. Seule vous le savez nos sceptres d’aujourd’hui Ne valent pas le quart de l’antique hautesse. Et les redressements du cadavre d’ennui Ne valent pas le quart de l’antique bassesse. Seule vous le savez nos Ă©clats d’aujourd’hui Ne valent pas le quart de l’antique silence. Et les ravivements de notre pĂąle ennui Ne sont que les tĂ©moins d’une morne indolence. Seule vous le savez nos gaĂźtĂ©s d’aujourd’hui Ne valent pas le quart de l’antique tristesse. Et les amusements de ce mortel ennui Ne valent pas le quart de l’antique allĂ©gresse. Seule vous le savez nos pudeurs d’aujourd’hui Ne valent pas le quart de l’antique ignorance. Et les rĂ©servements de notre prude ennui Ne sont que les tĂ©moins d’une morne insolence. Seule vous le savez nos occupations Ne valent pas le quart de l’ancienne vacance. Et nos rĂšgles de mƓurs et nos privations Ne valent pas le quart de l’antique frĂ©quence. Seule vous le savez nos filtres d’aujourd’hui Ne valent pas le quart du vieux dĂ©sourcement. Les dĂ©cantations de notre trouble ennui Ne valent pas le quart du vieil Ă©panchement. Seule vous le savez nos pĂ©rissables vƓux Et nos activitĂ©s des travaux d’aujourd’hui Et nos fragilitĂ©s ne valent pas les jeux Qui descendaient d’un monde et remontaient en lui. Et nos tours de morale et nos Ă©purements Ne valent pas le quart de la licence antique. Et nos coups de fatigue et nos Ă©puisements Ne valent pas le quart de la puissance antique. Seule vous le savez nos travaux et nos jours Ne valent pas ces jeux qui baignaient dans le temps. Seule vous le savez nos travaux importants Ne valent pas ces jeux qui jaillissaient toujours. Et nos tours de vertus et nos efforcements Ne sont devant les bords du plus ancien cantique Pas plus que les lambris de vos appartements Ne sont devant les bords de la mer Atlantique. Seule vous le savez nos travaux et nos jours Ne valent pas ces jeux qui baignaient dans l’espace. Et nos soucis armĂ©s d’une griffe rapace Ne valent pas ces jeux qui bondissaient toujours. Vous pouvez vous montrer, vertus d’appartements. Carafes d’eau filtrĂ©e Ă  travers des faĂŻences. Nous nous avons connu les arches d’alliances Naviguant aux deux bords des premiers OcĂ©ans. Seule vous le savez, nos cĂ©lĂ©brations Ne valent pas le quart de votre ancien silence. Seule vous le savez, nos adorations Ne valent pas le quart de votre ancienne absence. Vous pouvez vous montrer, ĂŽ vertus d’aujourd’hui. Nous nous avons connu l’antique rĂ©ticence. Et les finassements de notre fourbe ennui Ne valent pas le quart de l’antique dĂ©cence. Seule vous le savez nos cĂ©lĂ©brations Ne valent pas le quart de votre ancienne messe. Seule vous le savez, notre unique promesse N’est qu’un pĂąle reflet de vos libations. Seule vous le savez nos mĂ©morations Ne valent pas le quart de votre ancien oubli. Et l’absoute et la messe et l’homme enseveli Ne valent pas le quart de vos ovations. Seule vous le savez nos rĂ©parations Ne valent pas le quart de votre ancienne offense. Seule vous le savez, notre maigre dĂ©fense Ne ferait pas le quart de vos donations. Seule vous le savez, nos contemplations Sont troubles du dedans, ĂŽ mon Ăąme ĂŽ ma mĂšre. Seule vous le savez, nos mĂ©ditations Sont vides du dedans, aĂŻeule de misĂšre. Seule vous le savez, nos Ă©lĂ©vations Sont basses par le pied, aĂŻeule inaltĂ©rable. Seule vous le savez, nos dĂ©pravations Sont noueuses du pied, aĂŻeule invulnĂ©rable. Seule vous le savez nos expiations Ne lavent pas le sang sur le dos de la main. Seule vous le savez, nos indignations Laissent trĂŽner la honte au milieu du chemin. Et nous ne valons pas dans nos meilleurs moments Ce que l’homme valait Ă  toute heure du jour. Et nous ne valons pas dans nos plus beaux tourments Et nous ne valons pas dans notre pauvre amour, Et nous ne valons pas dans nos embrassements Ce que l’homme valait dans la simple lumiĂšre. Et nous ne valons pas dans nos transvasements Ce que l’homme valait dans une urne premiĂšre. Et nous ne valons pas dans nos abrasements Ce que l’homme valait dans son inhabitude. Et nous ne valons pas dans nos Ă©crasements Ce que l’homme valait dans son exactitude. Et nous ne valons pas dans nos renoncements Ce que l’homme valait dans son inaptitude. Et nous ne valons pas dans nos retranchements Ce que l’homme valait dans cette plĂ©nitude. Et nous ne valons pas dans le sang des martyrs, Et nous ne valons pas dans le sang des bourreaux, Et nous ne valons pas au fond des tombereaux, Et nous ne valons pas dans nos beaux repentirs Ce que l’homme valait dans son recueillement. Et nous ne valons pas dans nos processions Et dans nos reposoirs et nos accessions Ce que l’homme valait dans un effeuillement. Et nous en faisons moins dans nos Ɠuvres de jour Que l’homme n’en faisait rien dans son reposement. Et nous sommes perdus tout en haut de la tour Et ne voyons venir qu’un vaste Ă©puisement. Et nous en faisions moins dans nos fiĂšvres de nuit Que l’homme n’en faisait dans un calme sommeil. Et nous en faisons moins dans notre ardent rĂ©veil Que l’homme n’en faisait aux messes de minuit. Et nous en faisons moins dans nos guerres civiles Que l’homme n’en faisait dans son apaisement. Et nous en faisons moins dans nos travaux serviles Que l’homme n’en faisait dans son amusement. Et moi je vous salue ĂŽ premiĂšre pauvresse. Vous savez ce que c’est que d’avoir innovĂ©. Les autres n’ont connu qu’un plateau de dĂ©tresse. Vous savez ce que c’est que d’avoir inventĂ©. Seule vous avez pu faire la diffĂ©rence, Mesurer l’OcĂ©an d’avec un pauvre port. Il fallut demander Ă  la jeune espĂ©rance Ce qui jusqu’à ce jour Ă©tait donnĂ© d’abord. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre malheureux. Vous avez innovĂ© d’entrer dans le malheur. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre douloureux. Vous avez inventĂ© d’entrer dans la douleur. Les autres n’ont connu que le commun niveau. Mais vous connu le dĂ©nivellement. Les autres n’ont connu qu’un pauvre caniveau. Mais vous avez connu le grand ruissellement. Les autres n’ont connu qu’un pĂ©rissable sort. Vous avez innovĂ© l’autel et l’hĂ©catombe. Les autres n’ont connu qu’une commune mort. Vous avez inventĂ© d’entrer dans cette tombe. Les autres n’ont connu que le miel dans des ruches. Les autres n’ont connu qu’un miel hexagonal. Et les autres n’ont vu le ciel que dans des cruches. Et l’énorme OcĂ©an dans un pauvre canal. Les autres n’ont connu que l’étable et la grange. Vous avez innovĂ© la charrue et la houe. Les autres n’ont connu que la commune fange. Vous avez inventĂ© d’entrer dans cette boue. Les autres n’ont connu qu’un plane misĂšre. Mais vous avez connu cette descension. Et vous avez connu cette dissension. Vous avez vu semer les roses du rosaire. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre malheureux. Vous avez innovĂ© d’entrer dans ces dĂ©goĂ»ts. Vous avez innovĂ© d’entrer au chemin creux. Dans la honte et l’ordure et la ronce et le houx. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre dispersĂ©s. Mais vous avez connu cette dispersion. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre dĂ©versĂ©s. Mais vous avez connu cette dĂ©version. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre divisĂ©s. Mais vous avez connu cette division. Les autres n’ont connu que la dĂ©rision. Mais vous avez connu d’ĂȘtre dĂ©baptisĂ©e. Les autres n’ont connu que leur propre bassesse. Mais vous avez connu le mĂȘme abaissement. Les autres n’ont connu que cette petitesse. Mais vous avez connu le rapetissement. Les autre n’ont connu que le manteau de peine. Mais vous avez appris d’en ĂȘtre revĂȘtue. Les autres n’ont connu que cette immense plaine. Mais vous avez appris d’y ĂȘtre descendue. Les autres n’ont connu que la plaine d’absence. Mais vous avez appris d’y ĂȘtre descendue. Les autres n’ont connu que ce morne silence. Mais vous avez appris d’en ĂȘtre revĂȘtue. Les autres n’ont connu que leur humilitĂ©. Vous avez innovĂ© d’ĂȘtre une pauvre femme. Vous avez inventĂ© de gouverner votre Ăąme Selon la turpitude et la docilitĂ©. Les autres n’ont connu que le manteau de haine. Mais vous avez appris d’en ĂȘtre revĂȘtue. Les autres n’ont connu que leur immense peine. Mais vous avez appris d’y ĂȘtre descendue. Les autres n’ont connu que la fable et le conte. Vous seule vous savez la vĂ©ritable histoire. Vous seule vous savez, ĂŽ temple de mĂ©moire, Comment on inventa d’entrer dans cette honte. Et moi je vous salue ĂŽ la premiĂšre nĂ©e. Les autres ont connu de manquer de naissance. Les autres ont connu de manquer de puissance. Mais vous avez connu d’ĂȘtre dĂ©racinĂ©e. Les autres n’ont connu que de planter leur tente Au milieu du dĂ©sert d’un immense plateau. Mais vous avez connu la descente et la pente, Et les pampres pendus tout le long du coteau. Et je vous aime tant, premiĂšre exterminĂ©e. Vous seule avez passĂ© par-dessous cette porte. Vous seule avez frĂŽlĂ© le long de la mer Morte Les ailes de la mort et de la destinĂ©e. Les autres n’ont connu que cette platitude. Mais vous avez connu cette dĂ©clivitĂ©. Les autres n’ont connu qu’une longue habitude. Les autres n’ont connu que la captivitĂ©. Mais vous avez connu d’entrer dans cette geĂŽle. PremiĂšre vous avez passĂ© sous cette voĂ»te. PremiĂšre vous avez mis le pied sur la route Et cheminĂ© le long des bouleaux et du saule. PremiĂšre vous avez passĂ© sous cette porte. PremiĂšre vous avez d’un pas abandonnĂ© FoulĂ© d’un pas caduc et tout Ă©chelonnĂ© Le sentier de l’exil semĂ© de feuille morte. PremiĂšre vous avez devers la cheminĂ©e Tendu vos pĂąles mains transparentes de vieille Et devant le foyer et dans la longue veille RĂ©chauffĂ© votre peau toute parcheminĂ©e. Les autres n’ont connu que la commune honte. Mais vous avez connu cette ruelle oblique Qui descend sur la foire et la place publique, Et d’oĂč nul ne revient et que nul ne remonte. Les autres n’ont connu que cette Ă©galitĂ©. Les autres n’ont connu que la place publique. Mais vous avez connu que cette venelle oblique Qui descend dans la fosse et la docilitĂ©. Les autres n’ont connu que de planter leur tente Au milieu du dĂ©sert d’un immense plateau. Mais vous avez connu la suspense et l’attente, Et le dĂ©versement tout le long du coteau. Les autres n’ont connu que de planter leur tente Au milieu du dĂ©sert d’un immense plateau. Mais vous avez connu cette brusque dĂ©tente, Et le renversement tout le long du coteau. Les autres n’ont connu que de planter leur tente Au milieu d’un dĂ©sert d’un immense plateau. Mais vous avez connu cette premiĂšre entente Et les pampres grimpant tout le long du coteau. Les autres n’ont connu que de planter leur tente Au milieu du dĂ©sert d’un immense plateau. Mais vous avez connu le ravin et la sente Et l’horizon jailli du faĂźte du coteau. Et moi je vous salue, aĂŻeule insoupçonnĂ©e. Les autres sont sans grĂące et sans fleuronnement Et sans procession et sans couronnement. Mais vous avez connu d’ĂȘtre dĂ©couronnĂ©e. Les autres n’ont connu qu’un immense plateau, Les autres n’ont connu que la plaine d’absence. Mais vous avez connu cette auguste prĂ©sence Qui seule emplissait tout ainsi qu’un beau coteau Emplit tout l’horizon de l’un Ă  l’autre bord, Et se prolonge et rĂšgne et va de part en part, Ainsi qu’un beau sourire et qu’un pauvre regard Emplit tout un destin de l’une Ă  l’autre mort. Les autres n’ont connu que le torve et le courbe. Mais vous avez connu la premiĂšre droiture. Les autres n’ont connu que la lie et l’ordure. Vous avez inventĂ© d’entrer dans cette tourbe. Les autres n’ont connu que la morne imposture. Mais vous avez connu l’auguste vĂ©ritĂ©. Les autres n’ont connu que la morne luxure. Mais vous avez connu la jeune austĂ©ritĂ©. Et je vous aime tant, premiĂšre infortunĂ©e. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre sans fortune. Et nous voici debout sur la plus haute hune Et nous ne voyons rien qu’une mer dĂ©montĂ©e. Et nous avons sombrĂ© devers quelque lagune, Dans la vase et le sable et dans les goĂ©mons. Et nous sommes rentrĂ©s dans les premiers limons, Dans les algues de mer et dans la loi commune. Et nous sommes montĂ©s sur la plus haute dune. Et nous n’avons rien vu que le travers du sort. Et vous avez conduit, premiĂšre inopportune, Votre barque debout par le travers du port. Et vous avez touchĂ© sur le bord d’un autre Ăąge. Comme un enfant qui touche au bord d’un autre temps. Et vous avez touchĂ© dans le commun naufrage Au bord d’une autre cĂŽte et sur des mĂąts flottants. Et vous avez jouĂ© sur le bord d’un autre Ăąge, Comme un enfant qui joue au bord d’un autre temps. Vous avez abordĂ© dans le commun naufrage Au bord d’une autre cĂŽte et sur des mĂąts flottants. Comme les naufragĂ©s abordaient dans des Ăźles, Vous ĂȘtes abordĂ©e au bord d’un autre temps. Vous ĂȘtes abordĂ©e Ă  des guerres civiles Et sur un appareil et vers des habitants. Comme les naufragĂ©s abordaient dans des villes, Vous ĂȘtes abordĂ©e au bord d’un autre temps. Vous ĂȘtes abordĂ©e aux batailles serviles Entre nos plats commis et leurs plats commettants. Comme des naufragĂ©s qui demandaient asile, Vous avez abordĂ© dans cet Ăąge nouveau. Vous avez abordĂ© sur un ponton fragile NouĂ© de quelque corde Ă  quelque soliveau. Comme les naufragĂ©s abordaient dans des ports, Vous avez abordĂ© dans de nouveaux climats. Vous voici dĂ©sormais reine parmi les morts, PassagĂšre Ă©chappĂ©e au long de quelques mĂąts. Et vous avez touchĂ© vers un autre courage, Comme un homme d’honneur qui tremble sous l’injure. Et vous avez touchĂ© vers un autre rivage Avant de retomber dans un monde parjure. Et vous avez touchĂ© vers un ancien village Avant de retourner dans nos pauvres hameaux. Et vous avez baisĂ© le premier sarcophage Avant de revenir sur nos pauvres tombeaux. Et vous avez touchĂ© vers un ancien barrage, Du temps qu’il Ă©tait plein des eaux tumultueuses. C’est un vieil Ă©tang tout plein de scabieuses, Un manteau tout drapĂ© des fleurs du premier Ăąge. Et les ondes coulaient dessus le dĂ©versoir Et par-dessus l’écluse et par-dessus la bonde. Et l’ocĂ©an sans terme et l’ocĂ©an du monde Passait dessus la darse et dessus le musoir. C’était un vieil Ă©tang retirĂ© du village Dans une solitude et un recueillement. Et vous avez touchĂ© vers un ancien parage Avant les jours d’étude et de dĂ©feuillement. Et vous avez passĂ© par un ancien passage Tout plein d’incertitude et de cheminement. Et vous avez reçu le foudroyant message, Tout plein de promptitude et d’épouvantement. Et c’est depuis ce jour que vous avez montĂ© Un escalier plus dur qu’un escalier de marbre. Et c’est depuis ce jour que vous avez chantĂ© Une chanson plus dure Ă  l’ombre d’un autre arbre. Et c’est depuis ce temps que vous avez montĂ© Un escalier plus dur au pied d’un autre amour. Et c’est depuis ce jour que vous avez chantĂ© Une chanson plus dure au pied d’un autre jour. Et c’est depuis ce jour que vous avez montĂ© Des degrĂ©s plus ardu que des degrĂ©s de marbre. Et c’est depuis ce jour que vous avez comptĂ© Vos comptes Ă©ternels Ă  l’ombre d’un autre arbre. Et c’est depuis ce jour que vous avez montĂ© Un escalier plus dur qu’un escalier d’exil. Et c’est depuis ce jour que vous avez chantĂ© Un adieu plus poignant qu’une chanson d’avril. Et c’est depuis ce jour que vous avez traĂźnĂ© Un regret prosternĂ© jusque sur votre seuil. Et c’est depuis ce jour que vous avez menĂ© Un secret dĂ©robĂ© dans les plis d’un long deuil. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre malheureux. Mais vous avez connu d’inventer le secret. Et vous avez connu d’inventer le regret. Et de les enfermer dans un cƓur douloureux. Et vous avez connu premiĂšre de monter Des degrĂ©s sans grandeur et sans processions. Et vous avez connu de ceindre et de porter Des regrets plus amers que des possessions. Et c’est depuis ce jour que vous avez traĂźnĂ© Des secrets plus fermĂ©s que des fleuronnements. Et c’est depuis ce jour que vous avez menĂ© Des regrets plus profonds que des couronnements. Et c’est depuis ce jour que vous avez portĂ© Un coffret plus fermĂ© que la galĂšre antique. Et c’est depuis ce jour que vous avez chantĂ© Un regret plus poignant que le premier cantique. Et c’est depuis ce jour que vous avez suivi Un progrĂšs sans allure et sans procession. Et c’est depuis ce jour que vous avez gravi Un regret sans parjure et sans dĂ©pression. Et c’est depuis ce jour que vous avez perdu Un secret plus fermĂ© que la citĂ© mystique. Et depuis cettui jour vous avez descendu Un regret plus recreux que la vague nautique. Et les ressouvenirs plus prĂ©sents que des tombes. Et des cyprĂšs plus beaux que la rose d’avril. Des avenirs pliĂ©s au fond des catacombes. Et des regrets plus beaux que la robe d’exil. Et c’est depuis ce jour que vous avez montĂ© Des degrĂ©s plus usĂ©s que des marches de pierre. Et c’est depuis ce jour que vous avez passĂ© Sous le cintre de plĂątre et les arches de lierre. Et c’est depuis ce jour que vous avez couvĂ© Un secret fomentĂ© dans le profond du cƓur. Et c’est depuis ce jour que vous avez trouvĂ© Un regret prolongĂ© jusqu’au confins du chƓur. Et c’est depuis ce jour que vous avez portĂ© Un secret plus fermĂ© que l’acropole antique. Et c’est depuis ce jour que vous avez chantĂ© Un regret plus secret que le premier cantique. Et c’est depuis ce jour que vous avez portĂ© Un coffret plus fermĂ© que l’ancien tabernacle. Et c’est depuis ce jour que vous avez jetĂ© Des fleurs sur le parvis du premier habitacle ; Et que vous le savez, nos adorations Ne se courbent jamais qu’aux autels des faux dieux. Et que nous n’apportons sur les derniers hauts lieux Que des genoux raidis parmi les nations. Et que vous le savez, nos adorations Ne se courbent jamais que devant le veau d’or. C’est lĂ  notre appareil et lĂ  notre trĂ©sor, Et le dernier objet de nos libations. Seule vous le savez, que le vol des colombes Ne retournera pas dans ses orbes premiers. Seule vous le savez, que le vol des palombes Ne se mĂȘlera plus dans le vol des ramiers. Seule vous le savez, que la crĂ©ation Ne connaĂźt plus son pĂšre, et son maĂźtre, et son Dieu. Et nous n’apportons plus sur le dernier haut lieu Que des cƓur ulcĂ©rĂ©s de macĂ©ration. Seule vous le savez, que l’argent seul est maĂźtre Et qu’il Ă  mis son trĂŽne Ă  la place de Dieu. Et son autel d’argent sur le dernier haut lieu. Et son prĂȘtre d’argent Ă  la place du prĂȘtre. Et son trĂŽne d’argent installĂ© sur le TrĂŽne. Et son ventre d’argent sur le dernier autel. Et sa bave d’argent sur le pĂ©chĂ© mortel. Et son verbe d’argent installĂ© dans le prĂŽne. Les autres n’ont connu que d’ĂȘtre dĂ©gradĂ©s. Mais vous avez connu la dĂ©gradation. Les autres n’ont connu que la prostration. Mais vous avez connu d’ĂȘtre contremandĂ©s. Les autres ont connu d’ĂȘtre dĂ©possĂ©dĂ©s. Mais vous avez connu la dĂ©possession. Les autres n’ont connu que l’exĂ©cration. Mais vous avez connu d’ĂȘtre dĂ©commandĂ©s. Et nos tours de morale et nos intentions Ne valent pas le quart de cette ancienne danse. Et nos tours de malice et nos contentions Ne valent pas le quart de l’ancienne abondance. Et nos tours de sagesse et nos rĂ©tentions Ne valent pas le quart de l’antique imprudence. Et nos tours de bĂąton et nos inventions Ne valent pas le quart de l’antique Ă©vidence. Et nos tours de rudesse et nos contorsions Ne valent pas le quart de cette contredanse. Et nos retournements et nos conversions Ne valent pas le quart de l’antique impudence. Ainsi vous le savez, nos expiations Ne lavent pas le pus jusqu’au fond de l’abcĂšs. Et nos tours de fortune et nos heureux succĂšs Ne lavent pas le quart de nos extorsions. Seule vous le savez, nos plus beaux sentiments Ne durent jamais plus que l’espace d’un jour. Et l’amour le plus ferme et le plus dur amour Ne dure jamais plus que de quelques moments. Et nos tours de souplesse et nos rĂ©torsions Ne valent pas le quart de l’ancienne cadence. Et nos tours de dĂ©tresse et nos rĂ©versions Ne valent pas le quart de votre confidence. Ainsi vous le savez, nos expiations Ne lavent pas la honte aux confins de la mort. Nos coups de rĂ©ussite et le plus heureux sort Ne lavent pas le quart de nos inactions. Seule vous le savez, nos indignations Ne se meuvent jamais que quand il est trop tard. Quand le meurtre est passĂ© tout le long du rempart, Alors nous soulevons nos exĂ©crations. Ainsi vous le savez, nos expiations Ne lavent pas l’ordure aux portes de la mort. Et nos tours de finesse et le plus heureux sort Ne lavent pas le quart de nos exactions. Seule vous le savez, nos imprĂ©cations Ne se lĂšvent jamais que quand il est trop tard. Quand le crime est passĂ© le long du boulevard, Alors nous soulevons nos proclamations. Seule vous le savez, nos rĂ©volutions Ne se mettent debout que quand le crime est fait. Quand le meurtre est acquis et quand il est parfait, Alors nous soulevons nos dĂ©clamations. Tant que le crime est lĂ , tant que le meurtre est maĂźtre, Nous couchons Ă  ses pieds nos rĂ©signations. Tant que Satan est dieu, tant que Satan est prĂȘtre, Nous plions Ă  ses pieds nos gĂ©nuflexions. Aussi vous le savez, nos rĂ©probations Ne se lĂšvent jamais que quand il est trop tard. Quand le char est passĂ© qui voiturait CĂ©sar, Alors nous soulevons nos conspirations. Seule vous le savez, nos rĂ©signations Ne se couchent jamais qu’aux autels des faux dieux. Nous n’apportons jamais sur les derniers hauts lieux Que des cƓurs dĂ©lavĂ©s de consolations. Seule vous le savez, nos imprĂ©cations N’assaillent que le pauvre et le plus malheureux. Nous n’apportons jamais Ă  des cƓurs douloureux Que des cƓurs contractĂ©s de tribulations. Seule vous le savez, nos supplications Ne se courbent jamais qu’aux autels des faux dieux. Nous n’apportons jamais sur les derniers hauts lieux Que des cƓurs Ă©crasĂ©s de consternations. Seule vous le savez, que nos fondations Ne fondent jamais rien que la citĂ© d’injure. Nous n’apportons jamais sur un autel parjure Que des vƓux perforĂ©s de dubitations. Seule vous le savez, nos dĂ©prĂ©cations Ne dĂ©tournent jamais un sort inexorable. Nous n’apportons jamais sur un autel d’érable Que des vƓux pleins de doute et d’hĂ©sitations. Seule vous le savez, nos consolations Laissent un goĂ»t de pleur au fond de la mĂ©moire. Nous n’apportons jamais aux rayons de l’armoire Que des vƓux tout moisis de vĂ©gĂ©tations. Seule vous le savez, que nos dĂ©lations Ne dĂ©nonce jamais que le pauvre et le nu. Nous n’apportons jamais sur un autel connu Que des cƓurs couturĂ©s de lacĂ©rations. Seule vous le savez, nos consolation Laisse un goĂ»t de fiel au fond de la mĂ©moire. Nous n’apportons jamais au rayon de l’armoire Que des cƓurs dĂ©lavĂ©s de profanations. Seule vous le savez, nos tribulations Sont petites de mode et petite de jeu. Nous n’apportons jamais sur un autel de feu Que des cƓurs pleins de cendre et de confusions. Seule vous le savez, nos rĂ©parations Laissent un goĂ»t de mort au fond de la mĂ©moire. Nous n’apportons jamais aux rayons de l’armoire Que des cƓurs pleins de trouble et de dĂ©risions. Seule vous le savez, nos dĂ©solations, Assise parmi nous ne sont pas mĂȘme grandes. Nous n’apportons jamais sur la table d’offrande Que des cƓurs pleins de boue et de corruptions. Seule vous le savez, seule vous le compter Nos tribulations ne sont pas mĂȘme grandes. Nous n’apportons jamais sur la table d’offrandes Que les restes des cƓurs que nous avons prĂȘtĂ©s. Nous n’apportons jamais au temple de mĂ©moire Que des cƓurs pleins de mort et d’ostentations. Nous n’apportons jamais aux portes de l’armoire Que des cƓurs pleins de fange et pleins d’alluvions. Seule vous le savez, pourquoi nous sommes nĂ©s. Nos tribulations ne sont pas mĂȘme grandes. Nous n’apportons jamais sur la table d’offrandes Que les restes des cƓurs que nous avons donnĂ©s. Nous n’apportons jamais Ă  nos temples de gloires Que des cƓurs pleins de creux et pleins d’intrusions. Nous ne mettons jamais dans nos conservatoires Que des cƓurs pleins de vide et de prĂ©cisions. Seule vous le savez, nos adulations Ne se courbent jamais que sur des pieds d’argile. Nous n’apportons jamais sur un autel fragile Que des cƓurs dĂ©vorĂ©s de malversations. Et vous savez quel air nos modulations Conduisent sur la corde et sur de maigres flĂ»tes, Et que nous n’apportons dans nos plus Ăącres luttes Que des cƓurs dĂ©tendus par les vexations. Et vous savez quel air nos ondulations Font flotter sous le plectre et sur de vagues lyres. Et que nous ne mettons dans nos pauvres dĂ©lires Que des cƓurs affolĂ©s de palpitations. Seule vous le savez, nos Ă©mulations Ne rivalisent pas pour le juste et le beau. Nous n’apportons jamais aux portes du tombeau Que des cƓurs dĂ©vorĂ©s de contestations. Seule vous le savez, nos contemplations Sont troubles du dedans, ĂŽ mon Ăąme, ĂŽ ma mĂšre. Nous n’apportons jamais dans un temple Ă©phĂ©mĂšre Que des cƓurs et des vƓux et des dĂ©votions. Seule vous le savez, nos contemplations Ne contemple jamais qu’un ciel dĂ©possĂ©dĂ©. Nous n’apportons jamais dans nos libations Qu’une lĂšvre contrainte et un cƓur obsĂ©dĂ©. Seule vous le savez, nos contemplations Sont lourdes du dedans, ĂŽ mon Ăąme, ĂŽ ma mĂšre. Nous n’apportons jamais sur un autel sommaire Que des vƓux pleins d’ordure et d’explications. Seule vous le savez, nos acclamations Ne s’élĂšvent jamais devers le roi du ciel. Nous n’apportons jamais au roi des nations Que des cƓurs plein d’écume et des cƓurs pleins de fiel. Seule vous le savez, nos acclamations Ne s’élĂšvent jamais que vers le temporel. Nous n’apportons jamais qu’au temple corporel Notre cƓur et nos vƓux et nos donations. Seule vous le savez, nos acclamations Ne s’élĂšvent jamais que vers les rois charnels. Nous n’apportons jamais aux temples Ă©ternels Notre cƓur et nos vƓux et nos vocations. Seule vous le savez, nos dĂ©clamations Et nos tours de rhĂ©teur sont la honte du verbe. Et la haute Ă©loquence et toute sa superbe Ne sont pleins que de creux et de vibrations. Seule vous le savez, nos rĂ©clamations Ne rĂ©clament jamais que des biens temporels. Nous ne rĂ©clamons pas ces biens surnaturels, De pauvretĂ©, de peine et de privations. Seule vous le savez, nos rĂ©clamations Ne rĂ©clament jamais pour le pauvre et le juste. Nous n’apportons jamais sur une table auguste Que des cƓurs et des vƓux creusĂ©s d’ambitions. Seule vous le savez, nos rĂ©clamations Ne rĂ©clament jamais que pour des biens charnels. Nous ne rĂ©clamons pas ces objets Ă©ternels, D’humilitĂ©, d’amour et de contritions. Seule vous le savez, nos rĂ©clamations Ne rĂ©clament jamais que des biens pĂ©rissables. Nous n’apportons jamais dans des temples de sables Que des cƓurs et de vƓux pleins de dĂ©ceptions. Seule vous le savez, nos proclamations Ne proclament Ă©lus que les rois de la chair. Nous ne portons que lĂ  notre bien le plus cher, Nos cƓurs pourris d’orgueil et de prĂ©tentions. Seule vous le savez, nos acclamations Ne s’élĂšvent jamais vers le chef de l’armĂ©e. Nous n’apportons jamais au roi des nations Que des morceaux restant d’une amour entamĂ©e. Seule vous le savez, nos exclamations Ne soulignent jamais que des feux d’artifice. Nous n’apportons jamais aux barres de justice Que le faux tĂ©moignage et les inventions. Seule vous le savez, nos acclamations Ne dĂ©ferlent jamais vers le chef de l’armĂ©e. Nous n’apportons jamais au roi des nations Que le dernier morceau d’une amour entamĂ©e. Seule vous le savez, nos exclamations Ne soulignent jamais que des tours d’acrobate. Nous n’apportons jamais au roi des nations Que les retournements d’une Ăąme renĂ©gate. Seule vous le savez, nos acclamations Ne dĂ©ferlent jamais aux pieds du roi des rois. Nous n’apportons jamais au roi des nations Que des cƓurs de faĂŻence et des sabres de bois. Seule vous le savez, que nos sommations Ne s’adressent jamais qu’à des places rendues. Nous n’emportons d’assaut que des ville vendues. VoilĂ  notre courage et nos profusions. Seule vous le savez, les consommations Des siĂšcles passeront plus brĂšves qu’un matin. Et les jours quitteront leur manteau de satin Pour l’appareil de deuil et de contritions. La face de la terre Ă©tait alors si blonde Que les blĂ©s dĂ©roulĂ©s faisaient de longs cheveux. Et la beautĂ© de l’ñme et la beautĂ© du monde FĂ»t descendue ainsi jusque chez nos neveux. La face de la terre Ă©tait alors si lourde Que les blĂ©s dĂ©roulĂ©s s’écroulaient en torsades. Et la bontĂ© de l’ñme Ă©tait alors si sourde Que tous les animaux partaient en ambassades Vers l’homme prĂȘtre et roi par les mains du seul roi. Et les blĂ©s dĂ©roulĂ©s faisaient des Ă©cheveaux. Et les Ăąnes parmi les superbes chevaux Menaient le mĂȘme train parmi le mĂȘme arroi. Seule vous le savez, nos affirmations Sont creuses par le pied, ĂŽ mĂšre des docteurs. Nous n’apportons jamais qu’à des contradicteurs Sur des tables de bois des propositions. Seule vous le savez, nos infirmations Ne dĂ©mentent jamais que le pur et le juste. Nous n’apportons jamais sur un autel auguste Que des cƓurs taraudĂ©s de contradictions. Seule vous le savez, nos confirmations Ne confirment jamais que la fausse nouvelle. Nous n’emplissons jamais notre pauvre cervelle Que d’un fatras de texte et de discussions. Seule vous le savez, que nos formations Sont creuses du dedans, ĂŽ mĂšre des soldats. Nous n’apportons jamais aux terrestres combats Que des carrĂ©s crevĂ©s de fluctuations. Seule vous le savez, nos dĂ©formations Ne dĂ©forment jamais que vers les formes laides. Nous n’apportons jamais que de grossiers remĂšdes Aux manques de dĂ©cence et de prescriptions. Seule vous le savez, nos rĂ©formations Sont pires que le mal qu’on prĂ©tend rĂ©former. Et nos rĂšgles de mƓurs et nos collusions Sont pires que l’abcĂšs qu’on prĂ©tend refermer. Seules vous le savez, nos informations Ne remontent jamais vers les formes premiĂšres. Nous n’apportons jamais aux cĂ©lestes lumiĂšres Que des yeux de tĂ©nĂšbre et de confusions. Seule vous le savez, nos conformations Ne remontent jamais vers les formes antiques. Nous n’apportons jamais aux cĂ©lestes cantiques Que des Ăąmes d’ordure et d’explications. Seule vous le savez, nos transformations Ne transforment jamais que vers les formes basses. Nous n’apportons jamais dans nos crĂ©ations Que des cƓurs dĂ©tendus et que des Ăąmes lasses. Car tout ce qui s’acquiert peut toujours se reperdre. Mais tout ce qui se perd est Ă  jamais perdu. Et tout ce qui se gagne on peut toujours le perdre. Mais tout ce qui se perd est vraiment dĂ©pendu. Et tout ce que l’on prend il faut toujours le rendre. Mais tout ce que l’on rend est Ă  jamais rendu. Et tout ce que l’on monte il faut le redescendre. Mais ce que l’on descend est vraiment descendu. Tout ce que l’on achĂšte il faut qu’on le revende. Mais tout ce que l’on vend est Ă  jamais vendu. Et tout ce que l’on tend il faut qu’on le dĂ©tende. Mais ce que l’on dĂ©tend est vraiment dĂ©tendu. Vous nous voyez debout parmi les nations. Nous battrons-nous toujours pour la terre charnelle. Ne dĂ©poserons-nous sur la table Ă©ternelle Que des cƓurs pleins de guerre et de sĂ©ditions. Vous nous voyez marcher parmi les nations. Nous battrons-nous toujours pour quatre coins de terre. Ne mettrons-nous jamais sur la table de guerre Que des cƓurs pleins de morgue et de rĂ©bellions. ? Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle, Mais pourvu que ce fĂ»t dans une juste guerre. Heureux ceux qui sont morts pour quatre coins de terre. Heureux ceux qui sont morts d’une mort solennelle. Heureux ceux qui sont morts dans les grandes batailles, CouchĂ©s dessus le sol Ă  la face de Dieu. Heureux ceux qui sont morts sur un dernier haut lieu, Parmi tout l’appareil des grandes funĂ©railles. Heureux ceux qui sont morts pour des citĂ©s charnelles. Car elles sont le corps de la citĂ© de Dieu. Heureux ceux qui sont morts pour leur Ăątre et leur feu, Et les pauvres honneurs des maisons paternelles. Car elles sont l’image et le commencement Et le corps et l’essai de la maison de Dieu. Heureux ceux qui sont morts dans cet embrassement, Dans l’étreinte d’honneur et le terrestre aveu. Car cet aveu d’honneur est le commencement Et le premier essai d’un Ă©ternel aveu. Heureux ceux qui sont morts dans cet Ă©crasement, Dans l’accomplissement de ce terrestre vƓu. Car ce vƓu de la terre est le commencement Et le premier essai d’une fidĂ©litĂ©. Heureux ceux qui sont morts dans ce couronnement Et cette obĂ©issance et cette humilitĂ©. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans la premiĂšre argile et la premiĂšre terre. Heureux ceux qui sont morts dans une juste guerre. Heureux les Ă©pis murs et les blĂ©s moissonnĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans la premiĂšre terre et l’argile plastique. Heureux ceux qui sont morts dans une guerre antique. Heureux les vases purs, et les rois couronnĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans la premiĂšre terre et dans la discipline. Ils sont redevenus la pauvre figuline. Ils sont redevenus des vases façonnĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans leur premiĂšre forme et fidĂšle figure. Ils sont redevenus ces objets de nature Que le pouce d’un Dieu lui-mĂȘme a façonnĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans la premiĂšre terre et la premiĂšre argile. Ils se sont remoulĂ©s dans le moule fragile D’oĂč le pouce d’un Dieu les avait dĂ©moulĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans la premiĂšre terre et le premier limon. Ils sont redescendus dans le premier sillon D’oĂč le pouce de Dieu les avait dĂ©fournĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans ce mĂȘme limon d’oĂč Dieu les rĂ©veilla. Ils se sont rendormis dans cet allĂ©luia Qu’ils avaient dĂ©sappris devant que d’ĂȘtre nĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont revenus Dans la demeure antique et la vieille maison. Ils sont redescendus dans la jeune saison D’oĂč Dieu les suscita misĂ©rables et nus. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans cette grasse argile oĂč Dieu les modela, Et dans ce rĂ©servoir d’oĂč Dieu les appela. Heureux les grands vaincus, les rois dĂ©couronnĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans ce premier terroir d’oĂč Dieu les rĂ©voqua, Et dans ce reposoir d’oĂč Dieu les convoqua. Heureux les grands vaincus, les rois dĂ©possĂ©dĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans cette grasse terre oĂč Dieu les façonna. Ils se sont recouchĂ©s dedans ce hosanna Qu’ils avaient dĂ©sappris devant que d’ĂȘtre nĂ©s. Heureux ceux qui sont morts, car ils sont retournĂ©s Dans ce premier terreau nourri de leur dĂ©pouille, Dans ce premier caveau, dans la tourbe et la houille. Heureux les grands vaincus, les rois dĂ©sabusĂ©s. — Heureux les grands vainqueurs. Paix aux hommes de guerre. Qu’ils soient ensevelis dans un dernier silence. Que Dieu mette avec eux dans la juste balance Un peu de ce terreau d’ordure et de poussiĂšre. Que Dieu mette avec eux dans le juste plateau Ce qu’ils ont tant aimĂ©, quelques grammes de terre. Un peu de cette vigne, un peu de ce coteau, Un peu de ce ravin sauvage et solitaire. MĂšre voici vos fils qui se sont tant battus. Vous les voyez couchĂ©s parmi les nations. Que Dieu mĂ©nage un peu ces ĂȘtres dĂ©battus, Ces cƓurs pleins de tristesse et d’hĂ©sitations. Et voici le gibier traquĂ© dans les battues, Les aigles abattus et les liĂšvres levĂ©s. Que Dieu mĂ©nage un peu ces cƓurs tant Ă©prouvĂ©s, Ces torses dĂ©viĂ©s, ces nuques rebattues. Que Dieu mĂ©nage un peu ces ĂȘtres combattus, Qu’il rappelle sa grĂące et sa misĂ©ricorde. Qu’il considĂšre un peu ce sac et cette corde Et ces poignets liĂ©s et ces reins courbatus. MĂšre voici vos fils qui ce sont tant battus. Qu’ils ne soient pas pesĂ©s comme Dieu pĂšse un ange. Que Dieu mette avec eux un peu de cette fange Qu’ils Ă©taient en principe et sont redevenus. MĂšre voici vos fils qui se sont tant battus. Qu’ils ne soient pas pesĂ©s comme on pĂšse un dĂ©mon. Que Dieu mette avec eux un peu de ce limon Qu’ils Ă©taient en principe et sont redevenus. MĂšre voici vos fils qui se sont tant battus. Qu’ils ne soient pas pesĂ©s comme on pĂšse un esprit. Qu’ils soient plutĂŽt jugĂ©s comme on juge un proscrit Qui rentre en se cachant par des chemins perdus. MĂšre voici vos fils et leur immense armĂ©e. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s sur leur seule misĂšre. Que Dieu mette avec eux un peu de cette terre Qui les a tant perdus et qu’ils ont tant aimĂ©e. MĂšre voici vos fils qui se sont tant perdus. Qu’ils ne soient pas jugĂ© sur une basse intrigue. Qu’ils soient rĂ©intĂ©grĂ©s comme l’enfant prodigue. Qu’ils viennent s’écrouler entre deux bras tendus. Qu’ils ne soient pas jugĂ© comme un pauvre commis À qui Dieu redemande un compte capital. Qu’ils ne soient pas taxĂ©s comme un peuple soumis À qui CĂ©sar demande un rĂšglement total. Qu’ils soient rĂ©honorĂ©s comme de nobles fils. Qu’ils soient rĂ©installĂ©s dans la noble maison. Et dans les champs de blĂ©s et les champs de maĂŻs. Et qu’ils soient replacĂ©s dans la droite raison. Et qu’ils soient reposĂ©s dans leur jeune saison. Et qu’ils soient rĂ©tablis dans leur jeune printemps. Et que sur leur Ă©paule une blanche toison Les refasse pasteurs de troupeaux importants. Et qu’ils soient replacĂ©s dans le premier village. Et qu’ils soient reposĂ©s dans l’antique chaumiĂšre. Et qu’ils soient restaurĂ©s dans la splendeur premiĂšre. Et qu’ils soient remontĂ©s dans leur premier jeune Ăąge. Car ce qui se remet n’est jamais bien remis, Et tout se compromet par un ajournement. Mais ce qui se dĂ©met est toujours bien dĂ©mis, Et rien ne se refait par un retournement. Et ce qui se promet n’est jamais bien promis, Mais ce qui se refuse est vraiment rĂ©volu. Et ce qui se permet n’est jamais bien permis, Mais ce qui se dĂ©fend est vraiment dĂ©fendu. Ce qui se compromet est toujours compromis. Mais ce qui reste pur n’est jamais assurĂ©. Car ce qui se commet n’est jamais bien commis. Mais ce qui se trahit est toujours bien livrĂ©. Car ce qui se soumet n’est jamais bien soumis. Mais ce qui se rĂ©volte est vraiment rĂ©voltĂ©. Car ce que l’on admet n’est jamais bien admis. Mais ce que l’on rejette est vraiment rejetĂ©. Car tout se dilapide et rien ne se recouvre. Tout se dĂ©considĂšre et rien ne se reprend. Et la vie et la mort et le chaume et le Louvre. Et rien ne se remonte et tout se redescend. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s comme des esprits purs. Qu’ils ne soient pas pesĂ©s dans le spirituel. Qu’ils ne soient pas comptĂ©s dans le perpĂ©tuel. Que Dieu mette avec eux la rocaille et les murs Et ce maigre buisson qui bornait leur destin. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s dans la rigueur premiĂšre. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s dans la dure lumiĂšre. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s dans le premier matin. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s comme des esprits purs. Qu’ils ne soient pas pesĂ©s dans un juste plateau. Qu’ils soient comme la treille et comme les blĂ©s murs Qui ne sont pas pesĂ©s sur le flanc du coteau. Qu’il ne soient pas jugĂ©s comme des esprits purs. Qu’ils soient ensevelis dans l’ombre et le silence. Qu’ils ne soient pas jetĂ©s misĂ©rables et durs Dans le creux du plateau d’une juste balance. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s comme des esprits purs. Qu’ils ne soient pas pesĂ©s dans l’immatĂ©riel. Qu’il soit comptĂ© qu’ils ont un sang artĂ©riel Et des raisonnements lamentables et sĂ»rs. Qu’ils ne soient pas pesĂ©s par les poids Ă©ternels. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s sur une basse brigue. Qu’ils soient rĂ©embrassĂ©s, comme l’enfant prodigue Rentre, et se prĂ©cipite aux genoux paternels. MĂšre voici vos fils faibles et saugrenus. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s sur leur basse fatigue. Qu’ils soient rĂ©invoquĂ©s comme l’enfant prodigue Rentre et sais se glisser par des chemins connus. Qu’ils ne soient pas jugĂ©s sur une basse ligue. Qu’ils ne soient pas livrĂ©s aux mains de l’ennemi. Qu’ils soient rĂ©entourĂ©s comme l’enfant prodigue ReconnaĂźt la pelouse et le perron ami. Que Dieu leur soit clĂ©ment et que Dieu leur pardonne Pour avoir tant aimĂ© la terre pĂ©rissable. C’est qu’ils en Ă©taient fait. Cette boue et ce sable, C’est lĂ  leur origine et leur pauvre couronne. C’est le sang de l’artĂšre et le sang de la veine. Et le sang de ce cƓur qui ne bat dĂ©jĂ  plus. C’est le sang du dĂ©sir et le sang de la peine. Et le sang du regret des Ăąges rĂ©volus. Que Dieu leur soit clĂ©ment et que Dieu leur pardonne Pour avoir tant aimĂ© la terre pĂ©rissable. Ils en Ă©taient venus. Cette boue et ce sable, C’est lĂ  leurs pieds d’argile et leur pauvre couronne. C’est le sang de l’artĂšre et le sang de la veine Et le sang de ce cƓur qui ne bat que pour vous. C’est le sang du regret et le sang de la peine Et le sang de ce cƓur qui s’amortit en nous. C’est le sang de la honte et le sang de la peine Et le sang de l’aorte et c’est le sang du cƓur. C’est le sang de l’amour et le sang de la haine Et le sang du vaincu sur les mains du vainqueur. C’est le sang de l’orgueil et le sang de la peine Et de la veine porte et c’est le sang du cƓur Et de la veine cave et du sang de la haine Et les taches du sang sur les bras du vainqueur. Et c’est aussi le sang d’une pauvre colĂšre Qui se soulĂšve en vain dans un si pauvre cƓur. Et c’est aussi le sang d’une pauvre misĂšre Qui se rĂ©volte en vain sous le poing du vainqueur. C’est le sang du martyr et le sang de CĂ©sar. C’est le sang du martyr et le sang du bourreau, C’est le sang qui dĂ©goutte au fond du tombereau. Le sang de la victime exposĂ© au bazar. C’est le sang de la messe et le sang du calice Et le sang du martyr sur les bras du bourreau, Et le sang qui s’écaille au fond du tombereau, Et le sang qui jaillit aux pointes du cilice. Et c’est le sang jouĂ© dans les jeux de hasard. Et l’honneur exposĂ© dans les jeux d’aventure. Et la race jouĂ©e aux jeux de forfaiture. Et le bonheur jouĂ© dans ce morne alcazar. Et c’est le forcement de cet homme hagard. Et les bourreaux lĂąchĂ©s dans la plaine et les bois. Et le dĂ©rĂšglement de cette pauvre voix. Et le dĂ©sƓuvrement de ce pauvre regard. Que Dieu mette avec eux un peu de cette terre Qu’ils Ă©taient en principe et sont redevenus. C’est le sang de la veine et le sang de l’artĂšre Et le sang de ces corps misĂ©rables et nus. Et moi-mĂȘme le sang que j’ai versĂ© pour eux, C’était leur propre sang et du sang de la terre. Du sang du mĂȘme cƓur et de la mĂȘme artĂšre. Du sang du mĂȘme peuple et du mĂȘme HĂ©breux. Les pleurs que j’ai versĂ©s sur un mont solitaire, Les pleurs que j’ai pleurĂ©s quand j’ai pleurĂ© sur eux, C’étaient les mĂȘmes pleurs et de la mĂȘme terre, Et de la mĂȘme race et des mĂȘmes HĂ©breux. Le sang que j’ai versĂ© sous la lance romaine, Le sang que j’ai versĂ© sous la ronce et le clou ; Et quand je suis tombĂ© sur ma faiblesse humaine Sur les paumes des deux mains et sur les deux genoux ; Le sang que j’ai versĂ© sous la lance de Rome, Le sang que j’ai versĂ© sous l’ortie et le houx ; Et quand je suis tombĂ© par ma faiblesse d’homme Sur mes mains, sur ma face et sur mes deux genoux ; Le sang que j’ai versĂ© sous la lance de Rome, Le sang artĂ©riel que j’ai versĂ© pour vous Le jour que je tombai sur mes maigres genoux, C’était le sang du juste et c’était du sang d’homme. Le sang que j’ai versĂ© sous la feinte couronne, Les pleurs que j’ai versĂ©s sous cette multitude ; Les mots que j’ai versĂ©s dans ma similitude, Les coups que j’ai reçu sous la double colonne ; Les verbes que j’ai mis en forme de parole Et l’amour que j’ai mis en forme de bontĂ©, La gerbe que j’ai mise en forme d’unitĂ©, Le grain que j’ai semĂ© dans toute parabole ; Le sang que j’ai versĂ© sous la blanche aubĂ©pine, Le sang que j’ai perdu dans mon humanitĂ© ; Les pleurs que j’ai versĂ©s dans la creuse ravine, Le sang que j’ai perdu dans mon Ă©ternitĂ© ; Les pleurs que j’ai perdus dans ma misĂ©ricorde, Les coups que j’ai reçus dans mon humanitĂ© ; L’avanie et l’outrage aux mains de cette horde, Les coups que j’ai reçus dans mon Ă©ternitĂ© ; Le sang que j’ai versĂ© le jour de la promesse, Le sang que j’ai versĂ© sur le premier autel ; Et le sang que je verse aux tables de la messe, Le sang inĂ©puisable et le sacramentel ; Les mots que j’ai semĂ©s dans ma misĂ©ricorde, Le sang que j’ai payĂ© pour le pĂ©chĂ© mortel, Et la rage et la honte et le sceptre et la corde, Le sang intarissable et le sacramentel ; Le sang que je versai le jour que je fus prĂȘtre Et que j’officiai sur le premier autel ; Et celui que je verse et que je fais renaĂźtre, Le sang renouvelable et le sacramentel ; Le sang que je versai le lendemain du jour Que je fus embrassĂ© par un malheureux traĂźtre ; Et ce sang d’un Ă©gal et d’un nouvel amour Que je verse et refais aux mains d’un nouveau prĂȘtre ; Et le pain de mon corps et le vin de mon sang, Et le verbe jailli de mes divines lĂšvres ; Et le salut gagnĂ© par mes divines fiĂšvres, Et l’éponge et le fiel et cette plaie au flanc ; Le sang que je laissais sur un pauvre mouchoir OĂč mes traits sont empreints pour Ă©ternellement ; L’image que reçut ce frĂȘle monument, C’était la mĂȘme glaise et le mĂȘme Ă©bauchoir Et le mĂȘme modĂšle aux mains du statuaire Et la mĂȘme figure et la mĂȘme plastique Et le mĂȘme relief du mĂȘme masque antique ; Et les plis de mon corps sous le drap mortuaire. C’était la mĂȘme glaise aux mains du statuaire, Le mĂȘme modelĂ© sous un pouce plastique, Le mĂȘme figurĂ© sous un masque authentique, Et le mĂȘme tracĂ© sous le drap mortuaire. Le sang qui dĂ©goutta sur ma pauvre tunique, Ma barbe et mes cheveux souillĂ©s de cette bourbe, Mon regard et mon verbe aux mains de cette tourbe, Et ce qu’ils avaient fait de votre Fils unique, Mon nez qui s’écrasait dans l’ordure et la boue, Mes disciples en proie Ă  la terreur panique, Le bourreau qui clouait d’un geste mĂ©canique Et qui plantait la croix dedans cette gadoue Et l’empreinte lĂ©guĂ©e aux mains de VĂ©ronique, Ma barbe et mes cheveux essuyĂ©s dĂ©sormais, Mon plus ancien portrait et le seul authentique, Le seul que nul oubli ne dĂ©fera jamais, Le seul que nul oubli n’a jamais dĂ©passĂ©, Le seul qui soit sauvĂ© de leur ingratitude, Le seul qui soit sauvĂ© de la dĂ©crĂ©pitude, Le seul que nul dessin n’a jamais surpassĂ©, Le seul que nul oubli n’a jamais effacĂ©, Le seul qui soit sauvĂ© des dĂ©gradations, Le seul qui soit posĂ© parmi les nations Comme le seul tĂ©moin d’un Ă©ternel passĂ©, Le seul que nul oubli n’a jamais effacĂ©, Le seul qui soit inscrit dans l’éternitĂ© mĂȘme, Le seul qui soit gravĂ© dans le mouvant systĂšme Du prĂ©sent, du futur, et du tendre passĂ© ; Ce masque mon seul masque et ce moule plastique, Cette empreinte laissĂ©e Ă  cette pauvre femme, Cette unique mĂ©moire et cette forme unique, La mĂȘme qui parut aux yeux de Notre Dame ; Ce masque sans retour, cette forme Ă©ternelle, Cette empreinte laissĂ©e entre de pauvres doigts, C’était le rĂ©sultat de l’applique charnelle D’un mouchoir pĂ©rissable au front du roi des rois. C’était le modelĂ© d’une forme charnelle Sous la fidĂ©litĂ© d’un mouchoir de la terre. C’était la mĂȘme face auguste et solitaire, Telle qu’elle apparut Ă  l’amour maternelle. Cette face laissĂ©e entre de pauvres doigts, Cette face terreuse et ce mouchoir terreux, C’était le mĂȘme aspect qui ne vint qu’une fois, C’était la mĂȘme terre et les mĂȘmes HĂ©breux. Et ce pain et ce vin et ma chair et mon sang, Et ce verbe et ces pleurs sur cette multitude ; Et l’accusĂ© debout le long d’un pauvre banc, Et le dĂ©versement de cette ingratitude ; Et cette foule ardente et qui voulait mon sang, Et qui criait de joie aux mots malencontreux, Et votre fils rĂ©duit en cet infime rang, C’était la mĂȘme terre et les mĂȘmes HĂ©breux. Cette foule houleuse et qui voulait mon sang, Et qui pleurait de joie aux mots cadavĂ©reux, Ces groupes dĂ©chaĂźnĂ©s, ce peuple grimaçant, C’est la mĂȘme terre et les mĂȘmes HĂ©breux. Cette foule hurlante et qui voulait mon sang, Et qui crevait de joie aux mots aventureux, Ces groupes forcenĂ©s, ce peuple repoussant, C’était la mĂȘme terre et les mĂȘmes HĂ©breux. C’étaient les mĂȘmes pleurs et c’est la mĂȘme race. C’était le mĂȘme sang, le sang hĂ©rĂ©ditaire. C’étaient les mĂȘmes pas suivant la mĂȘme trace. C’était le mĂȘme corps fait de la mĂȘme terre. C’étaient les mĂȘmes cris jaillis des mĂȘmes gorges, C’était la mĂȘme houle et le mĂȘme ocĂ©an, C’était le mĂȘme feu jailli des mĂȘmes forges, C’était la mĂȘme foule et le mĂȘme nĂ©ant. C’était le mĂȘme sang, le premier hĂ©ritage Que tout homme ait reçu de sont pĂšre charnel, Comme le don de grĂące est le premier partage Que tout homme ait reçu de son pĂšre Ă©ternel. C’était le mĂȘme peuple et la race pĂ©destre Et le cheminement pour monter au Calvaire. Et le gouvernement sous une race Ă©questre, Antoine, Marc-AurĂšle et Septime-SĂ©vĂšre. Et le gouvernement sous LĂ©pide et Octave, Et les casernements sous le procurateur, Et le prosternement devant le laticlave, Et devant le prĂ©fet et l’administrateur. C’était le mĂȘme peuple et la race pĂ©destre Sous le balancement des cavaliers romains, Sous la lance et la verge et sous les lourdes mains Et sous les lourds chevaux de cette race Ă©questre. Seigneur qui les avez pĂ©tris de cette terre, Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient trouvĂ©s terriens. Vous les avez rivĂ©s sous la lourde galĂšre. Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient galĂ©riens. Seigneur qui les avez nourris de cette terre, Ne vous Ă©tonnez pas que cette nourriture Les ait faits cette race ingrate et solitaire, De petite noblesse et de pauvre nature. Seigneur qui les avez formĂ©s de cette terre, Ne soyez pas surpris qu’ils soient trouvĂ©s informes, Et bossus et bancales et sournois et difformes, Et mauvaise nature et mauvais caractĂšre. Seigneur qui les avez nourris de cette terre, Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient trouvĂ©s parjures, Et que cette origine et que ces nourritures En aient fait cette race obscure et rĂ©fractaire. Seigneur qui les avez pĂ©tris de cette terre, Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient trouvĂ©s terrestres. Vous avez jalonnĂ© la voie hĂ©rĂ©ditaire. Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient trouvĂ©s pĂ©destres. Seigneur qui les avez nourris de cette terre, Ne vous Ă©tonnez pas que cette nourriture En ait fait cette race agreste et solitaire, De petite noblesse et de grande roture. Seigneur qui les avez pĂ©tris de cette terre, Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient trouvĂ©s terreux. Vous les avez pĂ©tris de vase et de poussiĂšre, Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils marchent poussiĂ©reux. Seigneur qui les avez frappĂ©s de votre foudre, Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient trouvĂ©s peureux. Vous qui les avez fait sortir de cette poudre, Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient trouvĂ©s poudreux. Vous les avez pĂ©tris de cette humble matiĂšre, Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient faibles et creux. Vous les avez pĂ©tris de cette humble misĂšre. Ne soyez pas surpris qu’ils soient des misĂ©reux. Vous qui les avez faits d’une argile grossiĂšre, Ne soyez pas surpris qu’ils soient trouvĂ©s lĂ©preux. Et vous qui les avez livrĂ©s aux vers de terre, Ne vous Ă©tonnez pas qu’ils soient trouvĂ©s vĂ©reux. Car le surnaturel est lui-mĂȘme charnel Et l’arbre et la grĂące est racinĂ© profond Et plonge dans le sol et cherche jusqu’au fond Et l’arbre de la race est lui-mĂȘme Ă©ternel. Et l’éternitĂ© mĂȘme est dans le temporel Et l’arbre de la grĂące est racinĂ© profond Et plonge dans le sol et touche jusqu’au fond Et le temps est lui-mĂȘme un temps intemporel. Et l’arbre de la grĂące et l’arbre de nature Ont liĂ© leurs deux troncs de nƓuds si solennels, Ils ont tant confondu leurs destins fraternels Que c’est la mĂȘme essence et la mĂȘme stature. Et c’est le mĂȘme sang qui court dans les deux veines, Et c’est la mĂȘme sĂšve et les mĂȘmes vaisseaux, Et c’est le mĂȘme honneur qui court dans les deux peines, Et c’est le mĂȘme sort scellĂ© des mĂȘmes sceaux. C’est le mĂȘme destin qui court dans les deux chances. Et c’est la mĂȘme mort qui meurt dans les deux morts. Et c’est le mĂȘme effroi qui court dans les deux transes. Et la mĂȘme bonace au sein de ces deux ports. Toute Ăąme qui se sauve aussi sauve son corps. Toute Ăąme qui pĂ©rit entraĂźne son jumeau. Toute Ăąme qui se pose au long des derniers bords Est comme un reposoir dans un dernier hameau. Toute Ăąme qui se sauve ainsi sauve son corps. Toute Ăąme qui se perd entraĂźne son besson. Toute Ăąme qui se pose au fond des derniers ports Est comme un double oiseau sur un dernier buisson. Toute Ăąme qui se pose emporte aussi son corps, Comme une proie heureuse et comme un nourrisson. Et toute Ăąme qui touche aux suprĂȘmes abords Est comme un moissonneur le soir de la moisson. Tout Ăąme qui se sauve ensauve aussi son corps, Comme une sƓur aĂźnĂ©e emporte un nourrisson. Est toute Ăąme qui touche aux suprĂȘmes rebords Et comme un moissonneur au bord de la moisson. Et l’arbre de la grĂące et l’arbre de nature Se sont liĂ©s tous deux de nƓuds si fraternels Qu’ils sont tous les deux Ăąme et tous les deux charnels Et tous les deux carĂšne et tous les deux mĂąture. Et tous les deux crĂ©es et tous les deux crĂ©ature, Et tous les deux vaisseaux sur le mĂȘme OcĂ©an. Et tous les deux armĂ©s de la mĂȘme armature, Et tous les deux berceaux sur le mĂȘme nĂ©ant. Et tous les deux leçons de la mĂȘme lecture, Et comme deux tuteurs dans un double arbrisseau, Et tous deux cavaliers et tous les deux monture, Et comme un double enfant dans un double berceau. Et l’arbre de la grĂące et l’arbre de nature Se sont Ă©treints tous deux comme deux lourdes lianes. Par-dessus les piliers et les temples profanes, Ils ont articulĂ© leur double ligature. Et l’un ne pĂ©rira que l’autre aussi ne meure. Et l’un ne survivra que l’autre aussi ne vive. Et l’un ne restera que l’autre ne demeure. Et l’un ne passera sur la suprĂȘme rive Que l’autre aussi ne fasse un semblable voyage. Et l’un ne partira dans son dernier trousseau Que l’autre aussi ne fasse un tel appareillage Et ne s’embarque aussi sur un dernier vaisseau. Et JĂ©sus est le fruit d’un ventre maternel, Fructus ventris tui, le jeune nourrisson S’endormit dans la paille et la balle et le son, Ses deux genoux pliĂ©s sous son ventre charnel. Et ses beaux yeux fermĂ©s sous l’arceau des paupiĂšres Ne considĂ©raient plus son immense royaume. Et les bergers venus par des chemins de pierres Le regardaient dormir dans la paille et le chaume. Et ses beaux yeux fermĂ©s sur nos ingratitudes Ne considĂ©raient plus qu’un rĂȘve intĂ©rieur. Ses jeunes yeux fermĂ©s sur nos dĂ©crĂ©pitudes Ne considĂ©raient plus qu’un Ăąge antĂ©rieur. Et la lourde toison de ses cheveux bouclĂ©s Retombait sur sa nuque en dĂ©cuple cascade. Et son poing volontaire et ses bras potelĂ©s Supportaient tout le poids de cette colonnade. Ses beaux cheveux tombaient en mouvante torsade Et faisaient sur sa nuque une ombre creuse et blonde. Les rois de l’Orient, venus en ambassade, Le regardaient dormir comme le roi du monde. Et sa tĂȘte portait dans le creux de son coude Comme un beau bĂątiment porte dans son berceau. Il n’était pas froncĂ© comme un enfant qui boude. Il Ă©tait dĂ©tendu comme un jeune roseau. Et sa tempe battait d’un sang si gĂ©nĂ©reux Que sa tĂȘte sonnait comme un jeune tambour. Et son cƓur se gonflait d’un sang si chaleureux Que tout son corps tremblait de ce nouvelle amour. Un pli du bras portait l’impĂ©rissable tĂȘte. Et c’est ce pli du bras qu’on nomme la saignĂ©e. Il admirait tout bas quelque invisible fĂȘte. Il Ă©tait comme une aube Ă©clatante et baignĂ©e. Juste le pli du bras portait la tĂȘte blonde. Les membres dĂ©tendus formaient comme un recueil. Tout Ă©tait jeune alors, et le sauveur du monde Était un jeune enfant qui jouait sur un seuil. Dans le creux de ce pli roulait la tĂȘte ronde. La mĂȘme qui fut mise en un pauvre cercueil. Tout s’appesantissait dans cette nuit profonde, La mĂȘme qui tomba sur un suprĂȘme deuil. Tout en lui reposait et ses lĂšvres lactĂ©es Riaient et s’entr’ouvraient comme une fleur Ă©close. Et le sang nouveau-nĂ© sur ses lĂšvres de rose Courait dans le rĂ©seau des veines ajourĂ©es. Tout en lui reposait. Sur ses lĂšvres lactĂ©es Quelques gouttes tremblaient vaguement nĂ©gligentes. Quelques gouttes perlaient vainement engageantes, Comme la sĂšve perle au bord des fleurs coupĂ©es. Le rĂ©seau qui tremblait sous la lĂšvre lactĂ©e Battait comme les nƓuds d’une souple dentelle. Car la vie Ă©ternelle et la sacramentelle N’est point une entreprise aride et contractĂ©e. Le rĂ©seau qui battait sous la lĂšvre lactĂ©e Laissait comme les jours d’une souple dentelle. Car la vie Ă©ternelle et la sacramentelle N’est point une entreprise Ă©paisse et contractĂ©e. Le rĂ©seau qui battait sous la lĂšvre lactĂ©e Laissait comme les pleins d’une souple dentelle. La vie intĂ©rieure et la sacramentelle N’est point une entreprise ingrate et contractĂ©e. Le rĂ©seau qui battait sous la lĂšvre lactĂ©e Laissait comme le jeu d’une souple dentelle. La vie intĂ©rieure et la sacramentelle N’est point une entreprise Ă  bloc et contractĂ©e. Le rĂ©seau qui jouait sous la lĂšvre lactĂ©e Faisait tout le travail d’une souple dentelle. Car la vie Ă©ternelle et la sacramentelle N’est point une entreprise Ă©norme et contractĂ©e. Le rĂ©seau qui tremblait sous la lĂšvre lactĂ©e Laissait la libertĂ© d’une souple dentelle. La vie intĂ©rieure et la sacramentelle N’est point une entreprise esclave et contractĂ©e. Le rĂ©seau qui tremblait sous la lĂšvre lactĂ©e Respirait la santĂ© d’une souple dentelle. Car la vie Ă©ternelle et la sacramentelle N’est point une entreprise infirme et contractĂ©e. Les solives du toit faisaient comme un arceau. Les rayons du soleil baignaient la tĂȘte blonde. Tout Ă©tait pur alors et le maĂźtre du monde Était un jeune enfant dans un pauvre berceau. Chaque poutre du toit Ă©tait comme un vousseau. Les ombres de la nuit baignaient la tĂȘte ronde. Tout Ă©tait juste alors et le maĂźtre du monde Était un jeune enfant sous un maigre cerceau. Et ce sang qui devait un jour sur le Calvaire Tomber comme une ardente et tragique rosĂ©e N’était dans cette heureuse et paisible misĂšre Qu’un filet transparent sous la lĂšvre rosĂ©e. Et ce sang qui devait un jour sur le Calvaire Tomber comme une tiĂšde et fĂ©conde rosĂ©e N’était dans cette auberge et dans cette chaumiĂšre Qu’un rĂ©seau rose et bleu sous une peau rosĂ©e. Et ce sang qui devait un jour sur le Calvaire Tomber comme une chaude et virile rosĂ©e N’était dans sa tendresse et sa douceur premiĂšre Qu’un souple rĂ©seau fin sous une peau rosĂ©e. Et ce sang qui devait par un destin sĂ©vĂšre Couler comme une rouge et vivante rosĂ©e, Le sang du sacrifice et le sang du Calvaire N’était qu’un tremblement sous la lĂšvre arrosĂ©e. Et ce sang qui devait un jour sur le Calvaire Couler comme une Ă©paisse et fumante rosĂ©e N’était sous le regard d’une prudente mĂšre Qu’un souple gonflement sous la peau reposĂ©e. Et le jour qui passait par une Ă©norme brĂšche, Le soleil descendu dans la pauvre maison, N’éclairait dans l’étable et dans cette humble crĂšche Qu’un jeune enfant gonflĂ© de sa jeune saison. Et ce sang qui devait par un dur ministĂšre Couler comme une pure et sanglante rosĂ©e, Le sang du sacrifice et le sang du Calvaire N’était qu’un beau rĂ©seau de veine entrelacĂ©e. Et ce sang qui devait par un sacrĂ© mystĂšre Couler comme une source et comme une rosĂ©e, Le sang de l’offertoire et le sang du Calvaire N’était qu’un beau rĂ©seau de veine entrecroisĂ©e. Et le sang de la veine et le sang de l’artĂšre, Le mĂȘme d’oĂč devait jaillir cette rosĂ©e, Et le sang du rachat des pĂ©chĂ©s de la terre N’était qu’un beau rĂ©seau de veine entreposĂ©e. Et le sang de l’aorte et le sang de ce cƓur Qui devait tant saigner pour les pĂ©chĂ©s du monde N’était dans ces deux bras et dans la tĂȘte ronde Que le beau tremblement d’un timide vainqueur. Et ce sang qui devait sur le dernier Calvaire Couler tout plein d’écume et comme une rosĂ©e, Le sang de l’amertume et du dernier mystĂšre N’était qu’un beau rĂ©seau sous la lĂšvre amusĂ©e. C’était un beau rĂ©seau comme un filet marin Qu’on relĂšve lavĂ© de la plus basse Ă©cume. C’était un beau filet comme un rĂ©seau salin Qu’on relĂšve lavĂ© de la mĂȘme amertume. C’était un tremblement comme un filet marin Qui se coud et dĂ©coud dans une eau transparente. C’était un gonflement comme un rĂ©seau salin Qui se gonfle et rĂ©sout dans une onde apparente. C’était un gonflement comme un rĂ©seau de mer Qui se noue et dĂ©noue au sein des grandes ondes. C’était un tremblement comme un filet amer Qui se joue et dĂ©joue aux plis des vastes mondes. C’était un gonflement comme un rĂ©seau de mer Que l’on a retirĂ© de la vague marine. C’était un tremblement comme un filet amer Que l’on a mis sĂ©cher sur la barque latine. C’était un battement comme un rĂ©seau de mer Qui se roule et dĂ©roule au creux des vagues rondes. C’était un flottement comme un filet amer Que l’on a recoulĂ© dans les vagues profondes. Et ce sang qui devait un jour sur le Calvaire Couler comme une offrande et comme une rosĂ©e, Le dur sang du martyr et le sang funĂ©raire Était comme le lin d’une voile d’épousĂ©e. Et ce sang qui devait couler sur le Calvaire D’une quadruple plaie et d’une plaie au flanc N’était dans la pĂ©nombre et la douce lumiĂšre Que le rĂ©seau d’amour d’un enfant rose et blanc. Sous une peau plus douce et frĂȘle et transparente Que la peau du raisin quand il devient dorĂ©, Sous une peau plus fine et grĂȘle et dĂ©fĂ©rente Que la peau d’un raisin humide et mordorĂ©. Et ce sang qui devint une Ă©paisse liqueur N’était qu’une fluide et transparente sĂšve. Et ce cƓur qui devint l’inĂ©puisable cƓur Ne poursuivait qu’un jeune et dĂ©lectable rĂȘve. Ces veines qui devaient hors des poignets liĂ©s Jaillir et se gonfler comme des nƓuds de cordes, Ces veines de clĂ©mence et de misĂ©ricordes N’étaient dans l’appareil des membres dĂ©liĂ©s Qu’un beau rĂ©seau plus fin que de fils de la Vierge, Un filet mieux venu qu’un filet de pĂȘcheur, Et dans la paix et l’ombre au fond de cette auberge Un rĂ©seau rose et bleu tremblotant de blancheur. Sous une peau plus lisse et plus souple et plus douce Que la peau du raisin qui mĂ»rit sur la treille, Sous une peau dorĂ©e et lĂ©gĂšrement rousse Et lĂ©gĂšrement blonde et vivace et pareille À la peau du raisin qui blondit sur la treille, À l’heure oĂč le soleil mĂ»rit la lourde grappe, À l’heure ou le frelon et la mouvante abeille Viennent se reflĂ©ter sur le blanc de la nappe. Et ce sang qui devait un jour sur le Calvaire Tomber comme une pluie au sable de la grĂšve N’était dans cette auberge et dans ce jeune rĂȘve Que l’irrigation d’une rose paupiĂšre. L’impĂ©rial dĂ©bat du jour et de la nuit Marquait dans ce silence une invisible trĂȘve. Et le temps suspendu, dans cet humble rĂ©duit DĂ©coupait les contours d’une heure chaste et brĂšve. Le dĂ©partagement de la nuit et du jour Sur le tracĂ© commun marquait une heure brĂšve. Le dĂ©harnachement de tendresse et d’amour Sur le parvis commun posait une humble trĂȘve. Le solennel dĂ©bat du jour et de la nuit Marquait dans ce silence une invisible trĂȘve. Et le temps suspendu, dans cet humble rĂ©duit DĂ©coupait les contours d’une heure unique et brĂšve. Le dĂ©partagement de la nuit et du jour Sur le double tracĂ© posait comme une trĂȘve. Le dĂ©harnachement de rudesse et d’amour Sur le double parvis posait une heure brĂšve. Le solennel dĂ©bat de la nuit et du jour Au-dessus de ces fronts suspendait comme un glaive. Le dĂ©harnachement d’allĂ©gresse et d’amour Sur le double parvis posait une heure brĂšve. Le dĂ©mantĂšlement de la nuit et du jour Sur le double fossĂ© jetait comme une trĂȘve. Et le dĂ©sarmement de jeunesse et d’amour Sur l’éternel dĂ©bat jetait une heure brĂšve. Et ce sang qui devait sous la lance romaine Couler comme la source aux sables du dĂ©sert N’était dans un berceau soigneusement couvert Qu’un peu de vigilance et de tendresse humaine. Et ce sang qui devait sur le dernier haut lieu Pleuvoir comme la manne aux dĂ©serts de l’exode N’était dans cette heureuse et molle pĂ©riode Que l’entrelacement d’un rĂ©seau rose et bleu. Et ce poil qui devait balayer le chemin N’était pas mĂȘme encor un peu de poil follet. Cette barbe souillĂ©e au tribunal romain N’était pas mĂȘme une ombre et pas mĂȘme un duvet. Et cette peau tannĂ©e autant qu’un parchemin Était comme la peau d’un raisin sur la treille, À l’heure oĂč le frelon et la mouvante abeille Reviennent se poser sur le pampre romain. Ainsi l’homme n’était qu’un petit Benjamin, Un nouveau Benjamin sous un nouveau Joseph. Et tout l’honneur de l’homme et tout l’espoir humain Tenaient dans le vaisseau de cette unique nef. Et tout l’homme n’était qu’un nouveau Benjamin, Un nouveau Benjamin sous un nouveau Joseph. Et tout l’avoir de l’homme et tout l’espoir humain Tenaient en cet instant implacablement bref. Et tout l’homme n’était qu’un dernier Benjamin, Un dernier Benjamin sous un dernier Joseph. Et le salut de l’homme et tout l’espoir humain Tenaient dans le berceau de cet unique chef. Le pĂšre nourricier Ă©tait comme un grand frĂšre. Et ce nouveau Joseph Ă©tait un frĂšre aĂźnĂ©. Mais cette autre Rachel Ă©tait vraiment la mĂšre Et se penchait vraiment sur un fils nouveau-nĂ©. Et ce fut lĂ  vraiment dans un double hĂ©ritage Un instant fugitif et presque insaisissable. Et ce fut lĂ  vraiment dans un double partage Un fils deux fois aimĂ© deux fois impĂ©rissable. Et tout ce sang n’était encor qu’un sang de lait Fleuri de jeune grĂące et riant de bonheur. Et tous ces jours n’étaient encor qu’un chapelet De bonheurs enfilĂ©s sur le fil de l’honneur. Et tout ce sang n’était encore qu’un sang de lait Fleuri de bonne grĂące et semĂ© de bonheur. Et tous ces jours n’étaient encor qu’un chapelet De beaux jours enfilĂ©s au rĂ©seau de l’honneur. Sous le regard de l’ñne et le regard du bƓuf Cet enfant reposait dans la pure lumiĂšre. Et dans le jour dorĂ© de la vieille chaumiĂšre S’éclairait son regard incroyablement neuf. L’enfant levait les yeux vers les deux grosses tĂȘtes, Promenant son regard sur ces deux monuments. Ces voisins lui donnaient d’inconcevables fĂȘtes, Balançant du chĂąteau comme deux bĂątiments. Balançant du fronton comme deux grands navires Balancent des haubans et des courbes chĂąteaux, Quand la mer est bonace et quand les doux zĂ©phires S’amusent Ă  jouer dans les porte-manteaux. L’enfant levait les yeux vers les Ă©normes yeux Plus profonds et plus doux que l’énorme OcĂ©an. Novice il contemplait dans ce miroir gĂ©ant La profondeur des mers et le reflet des cieux. L’enfant levait les yeux vers ce miroir bĂ©ant OĂč se rĂ©flĂ©chissait la bontĂ© de ce monde. Un amour se peignait sur la face profonde, NoyĂ© dans le reflet d’un palpable nĂ©ant. Le soleil qui passait par les Ă©normes brĂšches Éclairait un enfant gardĂ© par du bĂ©tail. Le soleil qui passait par un pauvre portail Éclairait une crĂšche entre les autres crĂšches. Mais le vent qui soufflait par les Ă©normes brĂšches EĂ»t glacĂ© cet enfant qui c’était dĂ©couvert. Et le vent qui soufflait par le portail ouvert EĂ»t glacĂ© dans sa crĂšche entre les autres crĂšches Cet enfant qui dormait en fermant les deux poings Si ces deux chambellans et ces museaux velus Et ces gardes du corps et ces deux gros tĂ©moins Pour le garer du froid n’eussent soufflĂ© dessus. Sous le regard du bƓuf et le regard de l’ñne Cet enfant respirait dans son premier sommeil. Les bĂȘtes calculant dedans leur double crĂąne Attendaient le signal de son premier rĂ©veil. Et ces deux gros barbus et ces deux gros bisons Regardaient s’éclairer la lĂšvre humide et ronde. Et ces deux gros poilus et ces deux gros barbons Regardaient sommeiller le premier roi du monde. Et ces deux mal tondus et ces sortes d’oursons Regardaient s’éclairer la face rose et blonde. Et ces museaux pointus et ces deux gros garçons Regardaient respirer le premier roi du monde. Et ces deux tard-venus et ces deux vieux garçons Regardaient s’éclairer la face humide et fraĂźche. Et tous deux s’avançant au-dessus de la crĂšche Regardaient reposer le roi des nations. Et ces deux vieux bourrus et ces parfait notaires Regardait cette face Ă©ternelle et profonde. Et ces deux gros joufflus et ces protonotaires Regardait sommeiller le plus beau roi du monde. Et ces pattes pelues et ces ambassadeurs ConsidĂ©raient la bouche ouverte et toute ronde. Et ces deux gros zĂ©bus et ces deux commandeurs ConsidĂ©raient cet ĂȘtre oĂč tout ĂȘtre se fonde. Ainsi ces deux tortus, ainsi ces deux gros pĂšres ConsidĂ©raient la face Ă©blouissante et blonde. Ainsi ces deux bossus, ainsi ces deux compĂšres Regardaient ce premier que tout ĂȘtre seconde. Ainsi ces deux ventrus, ainsi ces beaux garçons Contemplaient cette face Ă©panouie et ronde. Ainsi ces deux repus et ces deux nourrissons Le regardaient dormir pour le salut du monde. Et ces avantageux et ces deux vieux grognons Opinaient du museau vers un jeune bambin. Et ces deux partageux et ces deux compagnons Laissaient tomber leur nez sur ce pauvre gamin. Et ces chapeau pointus et ces deux esprits forts Dominaient de trĂšs haut cet enfant ingĂ©nu. Et ces deux yeux ouverts comme deux grand sabords ConsidĂ©raient de haut cet enfant pauvre et nu. Et ces deux gros mafflus et ces croquemitaines Regardaient cet enfant comme un superbe fils. Et ces deux gros pansus et ces plein de maĂŻs Regardaient le vainqueur des plus gros capitaines. Et ces mufles savants et ces intelligences DĂ©ploraient cet Ă©tat oĂč nous l’avons laissĂ©. Et ces deux pleins d’esprit et ce couple empressĂ© En soi-mĂȘme blĂąmaient de telles nĂ©gligences. Et ces deux grands docteurs et ces deux bonnets d’ñnes DĂ©ploraient l’abandon oĂč nous l’avons laissĂ©. Et ces deux pleins de cƓur et ce couple enchĂąssĂ© Ruminaient des pensers qui fuyaient sous ces crĂąnes. Ainsi ces deux experts et ces fins connaisseurs, D’un mufle balancĂ© pesaient le divin fils. Et ces deux courbatus et ces pleins de maĂŻs Faisaient les entendus et les intercesseurs. Ainsi ces deux grison et ces deux amateurs D’un mufle audacieux jugeaient le fils de l’homme. Et ces deux rebondis et ces consommateurs Mesuraient cet enfant qui poursuivaient son sommes. Ainsi ces beaux tendrons, ainsi ces fins diseurs D’un mufle prĂ©cieux jaugeaient le fils unique. Par-devant ces messieurs commissaires-priseurs L’enfant comparaissait dans sa pauvre tunique. Et ces deux paysans et ces deux potentats D’un mufle officieux pesaient le roi mon maĂźtre. Et ces deux prĂ©sidents et ces hommes d’États ConsidĂ©raient cet ĂȘtre oĂč se fonde tout ĂȘtre. Et ces gouvernements et ces deux majordomes Du haut de leur museau pesaient le Grand Dauphin. Et ces deux renchĂ©ris et ces deux museau fin Contemplaient l’hĂ©ritier des rois et des royaumes. Et ces deux prĂ©bendĂ©s et ces deux gros chanoines Contemplaient le seigneur du siĂšcle et de la rĂšgle. Et ces deux dĂ©bridĂ©s et ces deux premiers moines Contemplaient le seigneur de l’avoine et du seigle. Et ces hommes du peuple et ces reprĂ©sentants Du haut de leur grandeur pesaient ce petit frĂšre. Et ces hommes de tĂȘte et ces deux compĂ©tents Du haut de leur grosseur narguaient ce petit pĂšre. Et ces deux prĂ©voyants et ces deux Ă©conomes Veillaient de tout leur poids sur le roi notre sire. Et ces deux surveillants et ces deux gros bonshommes Pensaient de tout leur poids et cherchaient Ă  s’instruire. Et ces deux bienveillants et ces chevau lĂ©gers Pensaient de tout leur poids et cherchaient Ă  dĂ©duire. Et ces hommes de biens et ces galants bergers Dansaient de tout leur poids et cherchaient Ă  sĂ©duire Et ces deux plein de paille et ces deux prĂ©sidents D’un mufle gracieux pesaient le roi mon frĂšre. Et ces deux pleins d’avoine et ces deux rĂ©sidents D’un mufle astucieux interrogeaient la mĂšre. Et ces deux pleins d’astuce et ces deux gros sergents D’un mufle soucieux pesaient le roi mon frĂšre. Et ces pleins de tendresse et ces pleins de misĂšre Faisaient les radieux et les intelligents. Et ces deux amoureux et ces deux beaux athlĂštes Jouaient leur double jeu pour ce maigre public. Et ces deux langoureux et ces rudes ascĂštes S’adoucissaient un peu pour ce jeune laĂŻc. Et ces hommes de poids, ces administrateurs Dans leur double cerveau calculaient la dĂ©pense. Et ces lĂ©gislateurs et ces conservateurs Balançaient leurs beaux flancs parmi leur double panse. Et ces hallebardiers montaient leur double garde. Et ce pertuisaniers faisaient la double haie. Et ces gonfalonniers arboraient leur cocarde Deux pennons de poils blancs coupĂ©s par une raie. Et ces prĂ©tentieux et ces estimateurs Voyaient de prĂšs celui que nous n’avons pas vu. Et ces deux donateurs et ces adorateurs Gardaient ce fils de Dieu que nous avons perdu. Et ces laborieux et ces deux gros fidĂšles PossĂ©daient cette enfant que nous n’avons pas eu. Et ces industrieux et ces deux haridelles Gardaient ce fils de Dieu que nous avons vendu. Et ces maĂźtre de l’homme et ces gouvernateurs Gouvernaient cet enfant que nous n’avons pas su. Et ces prĂ©fets de Rome et ces procurateurs Gardaient ce fils de Dieu que nous n’avons pas pu. Et ces deux gros bedons, ces hommes d’importance Laissaient leur bel esprit courir la pretentaine. Et Ă  notre dĂ©faut et par notre inconstance Ils veillaient cet enfant dans sa maigre futaine. Et notre incohĂ©rence et notre inconsistance Abandonnaient l’enfant Ă  ces deux beaux danseurs. Et notre suffisance et notre inadvertance Abandonnaient l’enfant Ă  ces deux grands penseurs. Et notre ingratitude et notre incompĂ©tence Abandonnaient l’enfant Ă  ces pauvres censeurs. Et notre turpitude et notre impĂ©nitence Abandonnaient l’enfant Ă  ses vrais dĂ©fenseurs. Et notre platitude et notre inexistence Abandonnaient l’enfant Ă  ces deux connĂ©tables. Et notre quiĂ©tude et notre intermittence Abandonnaient l’enfant Ă  ces deux gros comptables. Et ces deux estafiers et ces deux gros gendarmes Autour du bel enfant montaient leur double garde. Or cet enfant venu pour notre sauvegarde, OĂč l’avons-nous laissĂ© dans le fracas des armes. Et les pauvres moutons eussent donnĂ© leur laine Avant que nous n’eussions donnĂ© notre tunique. Et ces deux gros pandours donnaient vraiment leur peine. Et nous qu’avons-nous mis aux pieds du fils unique. Avons nous rĂ©pandu les cendres de nos haines Comme un manteau d’argent sous des pieds adorĂ©s. Avons-nous rĂ©pandu le sable de nos peines Comme un tapis d’argent aux reflets mordorĂ©s. Avons-nous rĂ©pandu par les champs de la plaine Notre fumier d’orgueil et d’ostentation. Avons-nous recueilli dans l’urne grave et pleine Les grĂące de dĂ©tresse et de contrition. Avons-nous dĂ©roulĂ© le tissu de nos jours Sur le parvis de marbre et dans le beau jardin. Avons-nous dĂ©roulĂ© l’ombre de nos amours Entre l’ombre de l’arbre et le premier gradin. Avons-nous dĂ©roulĂ© le fil de nos discours Entre la porte d’or et la porte de corne. Avons-nous dĂ©roulĂ© l’écheveau de nos jours Entre le premier terme et la derniĂšre borne. Avons-nous dĂ©roulĂ© tout le long des sentiers Le long dĂ©filement des soins de chaque jour. Avons-nous apportĂ© vers un unique amour Des cƓurs incirconcis et des ĂȘtres entiers. Avons-nous dĂ©roulĂ© dans les grandes allĂ©es Le large dĂ©ploiement des vƓux de chaque jour. Avons-nous concentrĂ© sur un unique amour Le long recensement des peines revĂ©lĂ©es. Avons-nous apportĂ© dans un noble sĂ©jour Le long recordements des amours et des haines. Avons-nous fait monter sur la plus haute tour Le vaste isolement des oublis et des peines. Avons-nous dĂ©posĂ© sous les pieds les plus chers L’écheveau dĂ©mĂȘlĂ© d’un immense concours. Avons-nous apportĂ© notre faible secours Et notre aide dĂ©bile Ă  des plus pauvres clercs. Sommes-nous revenus par un noble dĂ©tour Vers le retournement de nos jeunes annĂ©es. Pourrons-nous remonter par un dernier retour Jusqu’au recouvrement de nos jeunes journĂ©es. Avons-nous apportĂ© vers un dernier sĂ©jour Le long recolement de nos jours de jeunesse. Avons-nous fait monter sur la plus haute tour Le vaste isolement de nos jours de dĂ©tresse. Avons-nous dĂ©roulĂ© le fil de nos terreurs Entre le tribunal et le pied de la croix. Avons-nous repliĂ© le fil de nos erreurs Pour en dĂ©sentraver les pieds du roi des rois. Avons-nous dĂ©roulĂ© le fil de nos amours Entre le Voici l’homme et l’interrogatoire. Avons-nous dĂ©roulĂ© sur le seuil du prĂ©toire Comme un manteau d’argent le manteau de nos jours. Avons-nous dĂ©roulĂ© le fil de nos discours Entre le fils de l’homme et le procurateur. Avons-nous Ă©tendu le manteau de nos jours Des pieds du blasphĂ©mĂ© jusqu’au blasphĂ©mateur. Avons-nous dĂ©roulĂ© le fil de nos amours Comme un Ă©cheveau d’or aux pieds du fils de l’homme. Avons-nous dĂ©roulĂ© le manteau de nos jours Entre le roi des Juifs et le prĂ©fet de Rome. Avons-nous dĂ©roulĂ© le manteau de nos peines, Plus profond, plus Ă©pais qu’un Ă©cheveau d’amour. Avons-nous dĂ©livrĂ© du rĂ©seau de nos haines Les pieds immaculĂ©s du roi du dernier jour. Avons-nous dĂ©roulĂ© ces toisons et ces laines, Plus moite de regrets qu’un Ă©cheveau d’amour. Avons-nous libĂ©rĂ© du fatras de nos haines Les pieds silencieux du roi du dernier jour. Avons-nous dĂ©posĂ© l’escabeau de nos fronts Sous les pieds les plus chers et les plus malheureux. Avons-nous Ă©tendu le manteau de nos vƓux Entre une face auguste et les derniers affronts. Avons-nous Ă©tendu le manteau de nos peines Sur l’usure et les trous d’une pauvre tunique. Avons-nous repliĂ© le tissu de nos haines Pour en dĂ©sentraver les pieds du fils unique. Avons-nous inclinĂ© le fronton de nos tĂȘtes Pour servir d’escabeau sous les pieds les plus chers. Avons-nous dĂ©roulĂ© le manteau de nos fĂȘtes Pour en vĂȘtir le pauvre en plein cƓur des hivers. Avons-nous dĂ©posĂ© l’escabeau de nos fronts Sous les pieds les plus chers et les plus malheureux. Avons-nous essuyĂ© des larmes de nos yeux La poussiĂšre et la boue et les derniers affronts. Avons-nous inclinĂ© l’escabeau de nos tĂȘtes Sous les pieds les plus chers et les plus rĂ©vĂ©rĂ©s. Avons-nous revĂȘtu du manteau de nos fĂȘtes Le pauvre le plus pauvre entre le plus sacrĂ©s. Avons-nous dĂ©posĂ© l’escabeau de nos fronts Sous les pieds les plus chers et sous les plus sanglants. Avons-nous essuyĂ© des linges les plus blancs La marque du baiser et des derniers affronts. Avons-nous soutenu des genoux chancelants. Les avons-nous baisĂ©s jusqu’au seuil des tombeaux. Avons-nous soutenu les pas les plus tremblants Et les pas les plus chers et les pas les plus beaux. Avons-nous Ă©tendu sous des pas chancelants Les paumes de nos mains comme des escabeaux. Avons-nous essuyĂ© des linges les plus blancs Les pieds les plus souillĂ©s et les pieds les plus beaux. Avons-nous Ă©tendu la manteau de tendresse Sous les pieds les plus purs et sous les plus meurtris. Avons-nous repliĂ© le tissu de paresse Pour en dĂ©sentraver les pieds de ces proscrits. Avons-nous Ă©tendu le manteau de noblesse Sous les pieds les plus neufs et sous les plus flĂ©tris. Avons-nous repliĂ© le tissu de sagesse Pour en dĂ©sentraver ces pieds endoloris. Avons-nous effeuillĂ© la lavande et le thym Sous les pieds les plus purs et sous les plus aimĂ©s. Avons-nous dĂ©ployĂ© le silence latin Sous les pieds les pus doux et les plus embaumĂ©. Avons-nous Ă©tendu comme un manteau de fleurs Nos oraisons, nos vƓux et nos recueillements. Avons-nous Ă©tendu le rideau de nos pleurs Entre le fils de l’homme et nos dĂ©laissements. Avons-nous dĂ©lavĂ© du ruisseau de nos larmes Ces pieds percĂ©s de clous et ces membres sanglants. Avons-nous exposĂ© nos reins, nos dos, nos flancs Entre le fils de l’homme et ses quatre gendarmes. Avons-nous essuyĂ© de nos mouchoirs de poche Ces yeux perdus de larme et ce front ruisselant. Avons-nous essuyĂ© du linge le plus blanc Notre plus proche frĂšre et notre ami plus proche. Avons-nous essuyĂ© des nappes de nos tables Ce corps incorruptible et ce corps pantelant. Avons-nous essuyĂ© du linge le plus blanc Le maĂźtre de nos rois et de nos connĂ©tables. Avons-nous recueilli dans un dernier linceul Ce corps incorrompu, ces membres dĂ©liĂ©s. Avons-nous pas laissĂ© mĂ©lancolique et seul Ce grand corps dĂ©tendu, ces jarrets dĂ©pliĂ©s. Avons-nous recueilli dans un dernier suaire Ce long corps dĂ©pendu, ces membres oubliĂ©s. Avons-nous recueilli dans un drap mortuaire Ces membres confondus, ces secrets publiĂ©s. Avons-nous introduit la force de nos bras Entre le dos saignant et la lourde matraque. Valons-nous ces valets, ces valets gros et gras Qui gardaient leur seigneur au fond d’une baraque. Ces deux beaux animaux retenaient leur haleine, Tremblant de rĂ©veillĂ© l’enfant expiatoire. Et les touffes de buis semĂ© de marjolaine Achevaient d’embaumer ce premier oratoire. Et ces deux hommes d’arme et ces vrais Bourguignons Autour du fils de Dieu montaient une humble garde. Et notre intermittence aidant notre mĂ©garde, Nous laissĂąmes l’enfant Ă  ces deux gros Gascons. Et ces deux gros dodus et ces deux bons apĂŽtres AuprĂšs du divin maĂźtre avaient pris leur service. Et ces bourgeois cossus et ces mangeurs d’épeautres AuprĂšs du Grand Dauphin poursuivaient leur office. Ainsi l’enfant dormais sous ce double museau, Comme un prince du sang gardĂ© par des nourrices. Et ses amusements et ses jeunes caprices Reposaient dans le creux de ce pauvre berceau. L’ñne ne savait pas par quel chemin de palmes Un jour il porterait jusqu’en JĂ©rusalem Dans la foule Ă  genoux et dans des matins calmes L’enfant alors Ă©clos aux murs de BethlĂ©em. Ainsi l’enfant dormait dans son premier matin. Il allait commencer quelle immense journĂ©e. La robe du soleil, un instant dĂ©tournĂ©e, Lui versait le reflet d’un manteau de satin. Ainsi l’enfant dormait dans son premier matin. Il allait commencer Dieu sait quelle journĂ©e. Il allait commencer une Ă©ternelle annĂ©e. Il allait commencer quel immense destin. Ainsi l’enfant dormait dans son premier destin. Il allait commencer quelle immense fortune. Ainsi l’enfant dormait dans sa blonde infortune. Il allait commencer quel immense festin. Ainsi l’enfant dormait dans cette pĂ©nurie. Il allait commencer quelle immense fortune. Ainsi l’enfant dormait Ă  cĂŽtĂ© de Marie. Elle avait commencĂ© quelle immense infortune. Ainsi l’enfant dormait dans sa premiĂšre aurore. Il allait commencer quelle immense saison. Ainsi l’enfant dormait et reposait encore Avant de commencer quelle immense maison. Ainsi l’enfant dormait dans son jour et son aube. Il allait commencer le cercle de quel temps. Il allait commencer quel immense printemps. Comme un torrent gonflĂ© qui pĂšse sur une aube, La grĂące allait peser sur le monde romain. Et l’enfant endormi dans son jour et son aube, Comme un prĂȘtre vĂȘtu de l’étole et de l’aube, Allait appareiller pour quel nouveau chemin. La grĂące allait peser sur l’appareil humain. Et l’enfant qui dormait aux prĂ©misses de l’aube, Comme un prĂȘtre vĂȘtu de l’étole et de l’aube, Allait inaugurer quel appareil romain. Ainsi l’enfant dormait aux roses de l’aurore. Il allait commencer quelle innombrable annĂ©e. Il allait commencer quelle Ă©norme journĂ©e. Il allait commencer quel appareil encore. Ainsi l’enfant dormait dans le rĂšgne herbivore. Et la belle et la bĂȘte autour de lui veillaient. Ainsi l’enfant dormait dans la faune et la flore Et la belle et la bĂȘte autour de lui priaient. Ainsi l’enfant dormait au royaume herbivore Avant de commencer quelle immense pĂąture. Ainsi l’enfant dormait dans la faune et la flore. Avant de commencer quelle immense nature. Ainsi l’enfant dormait dans le rĂšgne herbivore. Et la fleur et la bĂȘte autour de lui veillaient. Et l’enfant reposait dans la faune et la flore. Et la fleur et la bĂȘte autour de lui priaient. Et ces deux bienveillants autour de lui veillaient. Il allait commencer quelle immense veillĂ©e. Et ces deux surveillant autour de lui priaient. Il allait acquitter quelle dette impayĂ©e. Il allait acquitter quelle innombrable dette. Il allait enrayer l’effroyable dĂ©pense. Il allait apporter quelle Ă©norme recette Dans le plateau perdu de la double balance. Il allait regagner l’énorme rĂ©compense. Il allait commencer l’énorme sauvetage. Il allait nous ravoir notre Ă©norme hĂ©ritage. Et nous faire lever l’éternelle suspense. Il allait nous sauver dans ce commun pĂ©ril. Il allait commencer quel immense partage. Il allait nous gagner quel immense avantage. Il allait commencer quel Ă©ternel avril. Ainsi l’enfant dormait comme un ĂȘtre créé. Il allait commencer quelle crĂ©ation. Il plaisait, il Ă©tait comme un fils agréé. Venus nous proposer quelle imitation. Cette nacelle Ă©tait comme un bateau gréé. Nous embarquerons-nous sur cette frĂȘle barque. Accompagnerons-nous notre premier monarque, Notre amiral des mers sur son bateau parĂ©. Ainsi l’enfant dormait dans son premier sommeil. Il allait commencer quelle sollicitude. Ainsi l’enfant dormait dans sa bĂ©atitude. Il allait commencer quel immense rĂ©veil. Ainsi l’enfant dormait dans son premier silence. Il allait commencer quelle immense parole. Ainsi l’enfant dormait dans sa jeune indolence. Il allait commencer quelle Ă©ternelle Ă©cole. Ainsi l’enfant dormait dans son premier berceau. Il allait commencer quelle vicissitude. Ainsi l’enfant dormait dans cette solitude Avant de gouverner quel immense troupeau. Ainsi l’enfant dormait sous ce premier cerceau. Il allait commencer quelle arche d’alliance. Ainsi l’enfant dormait sous ce premier arceau. Il allait commencer quelle Ă©norme audience. Et quelle servitude et quelle obĂ©dience, La seule qui soit libre et qui soit gracieuse. La seule qui soit serve et qui soit prĂ©cieuse. La seule qui soit ferme et fasse obĂ©issance. Et quelle exactitude et quelle obĂ©issance, La seule qui soit libre et parle Ă  cƓur ouvert ; La seule qui soit serve et parle Ă  dĂ©couvert ; La seule qui soit ferme et fasse obĂ©dience. Ainsi l’enfant dormait dans ce premier vaisseau. Il allait commencer quelle innombrable nef. Il allait devenir l’impĂ©rissable chef. Il allait apposer l’impĂ©rissable sceau. Ainsi l’enfant dormait dans son premier repos. Il allait commencer quel immense travail. Ainsi l’enfant dormait dans son premier bercail. Il allait commencer quel immense propos. Ainsi l’enfant dormait au fond du premier somme. Il allait commencer l’immense Ă©vĂ©nement. Il allait commencer l’immense avĂšnement. L’avĂšnement de l’ordre et du salut dans l’homme. Perdu, l’enfant dormait dans le fond de son somme. Il allait commencer le grand gouvernement. Il allait commencer le grand avĂšnement, L’avĂšnement de Dieu dans le cƓur de tout homme. Perdu, l’enfant dormait au fond du premier somme. Il allait commencer le grand Ă©branlement. Il allait commencer le nouveau rĂšglement. Il allait commencer le cƓur du nouvel homme. Perdu, l’enfant dormait au fin fond de son somme. Il allait commencer le renouvellement, CrĂ©er le nouveau Dieu dans ce redoublement, CrĂ©er le Fils de l’Homme au cƓur du nouvel homme. Il allait commencer quelle innovation CrĂ©er le nouveau siĂšcle et la nouvelle rĂšgle. Il allait commencer quelle importation Dans les anciens labours crĂ©er le nouveau seigle. Perdu, l’enfant dormait dans ce frĂȘle vaisseau. Il allait commencer le grand embarquement. Car il allait lancer sur l’énorme OcĂ©an L’impĂ©rissable nef, ce fragile berceau. Perdu, l’enfant dormait dans son pauvre trousseau. Il allait commencer le grand revĂȘtement. L’habillement du cƓur et le contentement. Et le dĂ©vĂȘtement d’un siĂšcle jouvenceau. Perdu, l’enfant dormait dans se vaisseau de charge. Il allait commencer le grand rechargement. Le chargement de peine et le dĂ©chargement De cette cargaison quand nous serons au large. Comme dormait MoĂŻse au bord du pĂšre Nil, Ainsi l’enfant dormait dans son pauvre berceau. Mais la fille du roi, dans ce commun pĂ©ril, N’était point accourue en jouant au cerceau. Comme dormait MoĂŻse au long du fleuve Nil, Ainsi l’enfant perdu dormait dans son berceau. Mais la fille du roi, qui jouait au cerceau, N’était point accourue en ce commun pĂ©ril. Comme dormait MoĂŻse au bord du premier Nil, Ainsi l’enfant dormait sous ces pauvre arceaux. Mais la fille du roi, qui jouait aux ciseaux, N’était point accourue en ce premier pĂ©ril. Comme dormait MoĂŻse au bord du large Nil, Ainsi l’enfant dormait dans son pauvre trousseau. Mais la fille du roi, qui jouait au boisseau, N’était point accourue en ce vaste pĂ©ril. Comme dormait MoĂŻse au grĂ© du chaste Nil, Ainsi l’enfant perdu dormait sous ces museaux. Mais la fille du roi, qui jouait aux rĂ©seaux, N’était point accourue en ce nouveau pĂ©ril. Comme dormait MoĂŻse au fil de l’eau du Nil, Ainsi l’enfant dormait sous ces deux damoiseaux. Mais la fille du roi, qui chantait aux oiseaux, N’était point accourue au bord de ce pĂ©ril. Comme dormait MoĂŻse aux bercements du Nil, Ainsi l’enfant dormait dans son lit de roseaux. Mais la fille du roi, qui jouait aux fuseaux, N’était point accourue en ce matin d’avril. Comme l’enfant MoĂŻse au bord du pĂšre Nil, Ainsi l’enfant perdu dormait sous ces naseaux. Mais la fille du roi, qui jouait aux pinceaux, Ne saisit point l’enfant d’un geste puĂ©ril. Comme l’enfant MoĂŻse aux confluents du Nil, Ainsi l’enfant dormait sous cet Ăąne rousseau. Mais la jeune princesse en ce lointain exil N’était point accourue au fil de son cerceau. Ainsi l’enfant dormait dans son premier berceau. Mais la jeune princesse au bord d’un nouveau Nil N’était point accourue Ă  ce jeune babil avec sa robe blanche et ses rubans ponceau. Comme dormait MoĂŻse au giron du vieux Nil, Ainsi l’enfant dormait sous ce deux jouvenceaux. Leurs tĂȘtes balançaient ainsi que panonceaux. Leurs beaux yeux poursuivaient quelque rĂȘve subtil. Comme l’enfant MoĂŻse aux sables de l’Égypte, Comme l’enfant MoĂŻse au milieu des roseaux. Ainsi l’enfant dormait dans cette basse crypte, Sous ces pauvres festons et ces pauvres rinceaux. Ainsi le gouverneur et le fils premier nĂ©, Ainsi l’enfant perdu dormait dans sa nacelle. Mais la jeune princesse avec sa demoiselle D’honneur ne veilla point sur l’enfant nouveau-nĂ©. Ainsi le gouverneur, ainsi le fils aĂźnĂ©, Ainsi le pauvre enfant dormait dans sa nacelle. Mais la jeune princesse avec sa demoiselle D’honneur ne veilla point sur l’enfant destinĂ©. Et le nouveau bambin et le nouveau MoĂŻse Dormait dans le recueil des grĂąces dispensĂ©es. Mais la fille du roi, la princesse HĂ©loĂŻse, N’était point survenue au fil de ses pensĂ©es. Comme dormait MoĂŻse au rives de Memphis, Ainsi l’enfant dormait aux rives d’IsraĂ«l. Ainsi le pauvre enfant, ainsi le divin fils Dormait dans son berceau pour son premier NoĂ«l. Comme dormait MoĂŻse aux confins de Memphis, Ainsi l’enfant dormait aux confins d’IsraĂ«l. Et du mĂȘme sommeil dormait un nouveau fils Dans un mĂȘme berceau pour un nouveau NoĂ«l. Comme dormait MoĂŻse au bord de Memphis, Ainsi l’enfant dormait au pays d’IsraĂ«l. Et cet autre MoĂŻse et cet Emmanuel Était comme un fragile et pĂ©rissable fils. Comme dormait MoĂŻse au temple de l’Égypte, Ainsi l’enfant dormait au temple d’IsraĂ«l. Et ce sauveur venu dans un dernier NoĂ«l Dormait dans cette basse et pĂ©rissable crypte. Comme dormait MoĂŻse au secret de Memphis, Ainsi l’enfant dormait au secret d’IsraĂ«l. Comme un nouveau MoĂŻse ainsi ce jeune fils Dormait dans le berceau de son jeune NoĂ«l. Comme dormait MoĂŻse en un frĂȘle coffret, Ainsi l’enfant dormait en un frĂȘle NoĂ«l. Il allait commencer quel immense regret. Il allait commencer le regret d’IsraĂ«l. Ainsi l’enfant dormait dans sa premiĂšre paix. Il allait commencer quelle immense bataille. Ainsi l’enfant dormait sous cette valetaille. Il allait commencer quel immense procĂšs. Il allait commencer quelle magistrature. Devant quel tribunal et sous quel magistrat. Il allait commencer quelle raison d’État. Il allait commencer quelle immense aventure. Il allait commencer quelle mĂ©saventure. Il allait commencer quelle immense prudence. Il allait commencer quelle jurisprudence. Il allait inventer quelle bonaventure. Il allait commencer quelle immense gageure. Il allait commencer quel immense dĂ©bat. Il allait engager quel Ă©ternel combat. Il allait endosser quel immense parjure. Il allait encaisser quelle innombrable injure. Il allait encaisser quels mauvais compliments. Il allait essuyer les mauvais boniments Et les effets de bras de l’homme qui conjure. Il allait essuyer l’immense reniement De l’homme qui blasphĂšme et de l’homme qui jure. Il allait Ă©couter le sot balbutiement Et le sot bĂ©gaiement par qui tout homme abjure. Ainsi l’enfant dormait dans son premier oubli. Il allait commencer quelle immense mĂ©moire. Il allait commencer quelle Ă©ternelle histoire, L’histoire de tout homme en terre enseveli. Comme dormait MoĂŻse au bord du fil de l’eau, Ainsi l’enfant dormait dans l’ombre enseveli. Et dĂ©jĂ  le bois d’orme et le bois du bouleau Et le bois du sapin formaient son premier lit. Ainsi l’enfant dormait sans un mot, sans un pli. Il allait commencer l’énorme inscription. Il allait essayer l’énorme exception, Le long resurgement de l’homme enseveli. Il allait supporter quelle innombrable mort. Il allait demander quelle rĂ©mission. Il allait opĂ©rer quelle rĂ©demption. Il allait affronter quel innombrable sort. Il allait dĂ©fier l’impĂ©rissable mort. Il allait exiger quelle soumission. Il allait demander quelle contrition. Il allait embrasser l’insaisissable sort. Il allait aborder l’inabordable port. Il allait commencer l’éternelle prĂ©sence. Il allait s’évader d’une Ă©ternelle absence. Il allait emporter l’inĂ©branlable fort. Il allait refonder l’impĂ©rissable Rome. Il allait refouler quelle perdition. Il allait demander quelle dĂ©mission, Et quel dĂ©sistement dans la terre et dans l’homme. Il allait assurer l’inĂ©branlable Rome. Il allait gouverner l’énorme nation. Il allait provoquer quelle dĂ©mission, Et quel gouvernement dans le cƓur de tout homme. Il allait assumer l’hĂ©ritage de Rome. Il allait couronner quelle incarnation. Il allait dĂ©crĂ©ter quelle dĂ©mission, Et quel dĂ©sistement dans le cƓur de tout homme. Il allait hĂ©riter des provinces de Rome. Il allait affirmer sa domination. Il allait confirmer quelle dĂ©mission, Et quel retranchement dans le cƓur de tout homme. Il allait hĂ©riter de la ville de Rome. Il allait diluer quelle obstination. Il allait postuler quelle dĂ©mission, Et quel arrachement dans le cƓur de tout homme. Il allait hĂ©riter de la terre et de Rome Et de la mer violette et de l’ñpre Sion. Il allait invoquer quelle dĂ©mission, Et quel arrachement dans le cƓur de tout homme. Il allait hĂ©riter de l’empire et de Rome. Il allait endurer quel mauvais traitement. Il allait revĂȘtir quel pauvre vĂȘtement Il allait hĂ©riter de la terre et de l’homme. Il allait hĂ©riter de l’antique trirĂšme Et des blĂ©s de Sicile et du droit de citĂ©. Et du Tibre latin et du pouvoir suprĂȘme. Et des peuples couchĂ©s sous la nĂ©cessitĂ©. Il allait hĂ©riter de Rome capitale Et de la mer latine et des longues erreurs. Il allait hĂ©riter des antiques terreurs Et des retournements dans la terre natale. Il allait hĂ©riter du monde occidental, De celui qui se lĂšve aux colonnes d’Hercule. Il allait hĂ©riter d’un foudre ridicule, Et des dĂ©barquements d’un monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, De celui qui commence oĂč finissait le monde. Il allait hĂ©riter de la vague profonde Et des refoulements du monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, Des cheveux de varechs et des verts goĂ©mons. Il allait aveugler par ces nouveaux limons Les infiltrations du monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, Et des pulsations de l’énorme ocĂ©an. Il allait annuler par cet autre nĂ©ant L’anĂ©antissement du monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, D’une vague plus lourde et d’une mer verdĂątre. Il allait consigner dans ses temples d’albĂątre, L’évanouissement du monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, D’une mer transparente ensemble que profonde. Il allait enfoncer sous les plis de cette onde Et sous cet ocĂ©an le monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, D’une mer frauduleuse ensemble que profonde. Il allait submerger sous le plis de cette onde Et de cet ocĂ©an le monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, Et des cheveux de l’algue et des longs cheveux verts, Et des plis de la vague et des chemins ouverts Loin du gouvernement du monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, Des cheveux submergĂ©s et de longs cheveux blonds. Et des bateaux poussĂ©s par d’autres aquilons Hors du gouvernement du monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, Et des plis de la vague et des plis du destin. Et des peuples jaillis pour un nouveau festin Loin des prostrations du monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, D’un homme moins nerveux et d’OcĂ©ans plus mornes, D’un homme moins heureux inventĂ© hors des bornes Et des amusements du monde oriental. Il allait hĂ©riter du monde occidental, De abĂźmes creusĂ©s au pied des promontoires, Des peuples nouveau-nĂ©s jaillis loin des histoires Et des Ă©ternitĂ© du monde oriental. Il allait hĂ©riter d’une vague profonde Et des Ă©croulements et d’une mer plus glauque Et des Ă©crasements et d’une voix plus rauque Et des effondrements d’un gigantesque monde. Il allait hĂ©riter du monde occidental, Et des barque de pĂȘche et des vaisseaux de charge. Il allait engloutir sous une mer plus large Les circonspections du monde oriental. Il allait hĂ©riter d’un royaume tendu Comme un ballon gonflĂ© de l’un Ă  l’autre pĂŽles. Il allait hĂ©riter du palais et des geĂŽles Et d’un gouvernement actif et dĂ©tendu. Il allait hĂ©riter du monde occidental, Des horizons perdu au loin des promontoires, Et des peuples perdus au large des histoires Et des antiquitĂ©s du monde oriental. Il allait hĂ©riter d’un royaume nouveau Tendu de bout en bout comme une vaste tente. Il allait hĂ©riter d’une Ă©ternelle attente. Il allait rejaillir de l’antique caveau. Il allait hĂ©riter d’un royaume gĂ©ant. Il allait hĂ©riter d’un monde gigantesque. Il allait hĂ©riter de cette autre nĂ©ant GardĂ© par des bourreaux et de la soldatesque. Il allait hĂ©riter de ce gouffre bĂ©ant, La destination de la terre et de l’homme. Il allait hĂ©riter de ce couple gĂ©ant, La domination du barbare et de Rome. Il allait hĂ©riter du monde temporel, D’une crĂ©ation Ă©paisse et gouvernĂ©e. Il allait hĂ©riter du monde corporel, D’une crĂ©ation pauvresse et prosternĂ©e. Il allait hĂ©riter des rondes basiliques Et du palais des rois et de pauvres cabanes. Il allait hĂ©riter des grandes rĂ©publiques Et des peuples sacrĂ©s et des peuples profanes. Il allait hĂ©riter de ce monde charnel, D’une crĂ©ation Ă©paisse et condensĂ©e. Il allait hĂ©riter du monde originel, D’une crĂ©ation antique et entassĂ©e. Il allait hĂ©riter des plus vastes royaumes Et des prĂ©fets perdus dans les gouvernements. Il allait hĂ©riter des plus modestes chaumes Et des peuples courbĂ©s dans les prosternements. Il allait hĂ©riter des couronnes murales, Des fossĂ©s, des crĂ©neaux et des retranchements. Il allait Ă©riger les hautes cathĂ©drales Sur le mouvant dĂ©bris de nos arrachements. Il allait hĂ©riter des chambres sĂ©pulcrales. Il allait hĂ©riter de la herse et des tours. Il allait Ă©riger les hautes cathĂ©drales Sur le mouvant dĂ©bris des plus fermes amours. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales. Il allait hĂ©riter des plus fermes amours. Il allait Ă©riger les hautes cathĂ©drales Sur le mouvant dĂ©bris du dĂ©clin de nos jours. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De la borne et du champs que nous tenons toujours. Et des propriĂ©tĂ©s qui rĂšgnent dans les bourgs Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des champs que nous coupon et que nous recoupons, Des prĂšs que nous taillons et que nous retaillons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des bois que nous payons et que nous dĂ©coupons, Des lots que nous marquons et que nous dĂ©marquons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des murs que nous dressons et que nous abattons, Des parts que nous taillons et que nous retaillons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des droits que nous coupons et que nous dĂ©coupons, Et des propriĂ©tĂ©s qu’à force nous poussons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des lois que nous coupons et que nous recoupons, Et des pĂ©nalitĂ©s qu’à force nous poussons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De rois que nous marquons et que nous dĂ©marquons, Et des hĂ©rĂ©ditĂ©s qu’à force nous poussons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter du duchĂ© d’Aquitaine. Il allait hĂ©riter de notre pauvre amour. Il allait devenir le plus grand capitaine. Et le plus besogneux des barons d’alentour. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De rois que nous posons et que nous dĂ©posons, Des lĂ©gitimitĂ©s que nous acheminons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des saints que nous chĂŽmons et que nous oublions, Et des crĂ©dulitĂ©s qu’à force nous poussons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des morts que nous aimons et que nous enterrons, Et des fidĂ©litĂ©s qu’à force nous poussons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des chƓurs que nous chantons et que nous dĂ©chantons, Et des docilitĂ©s qu’à force nous poussons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des mƓurs que nous gardons et que nous dĂ©sertons, Et des moralitĂ©s qu’à force nous poussons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des cƓurs les plus aimĂ©s que nous avons perdus, Des ĂȘtres les plus chers, que nous avons rendus Au maĂźtre incontestĂ© des hautes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De mƓurs que nous rĂ©glons et que nous dĂ©rĂ©glons. Et des infirmitĂ©s que nous acheminons Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De limitations qui font tant de dĂ©tours, Et des cheminements de nos pauvres amours Jusque sur le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Et des discernements de nos maigres labours, Et des recreusements de nos pauvres amours Jusque sous le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Et des recoupements de nos maigres labours, Et des recensements de nos pauvres amours Jusque sous le parvis des saintes cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Et du dĂ©labrement de nos pauvres dieux termes. Il allait hĂ©riter des amours les plus fermes Et les plus prosternĂ©s au seuil des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos pauvres chemins qui font tant de dĂ©tours Et qui se perdent tant dans leur tours et retours Avant de revenir au seuil des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales Des fils de nos sentiers qui font tant de dĂ©tours Et qui s’égarent tant parmi les alentours Avant de remonter au seuil des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos sentiers perdus qui s’en vont dans les vignes Et dans ses beaux vallons dont nous sommes indignes Avant de retomber au seuil des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos maigres chemins qui s’en vont dans les pierres Et qui flĂąnent le long des roseaux des riviĂšres Avant de retourner au seuil des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des sentiers de Saint-Marc et de Saint-Jean-de-Braye, Qui s’en vont dans la ronce et parmi l’oseraie Avant de retomber au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos chemins vĂ©reux qui se perdent toujours Et qui vont se nouer sur les places des bourgs Avant de s’effiler au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos chemins pierreux qui se perdent toujours, Et qui vont s’égarer au fond des vieux faubourgs Avant de disparaĂźtre au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Qui nous font rois d’un jour dans un pauvre village. Et maĂźtres d’un sentier dans un pauvre bailliage. Et maĂźtres d’une chaise aux chƓurs des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Qui nous font rois d’un jour dans un quartier de terre, Et maĂźtres de marcher dans un sentier de pierre, Et maĂźtres de dormir au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des enregistrements de nos quartiers de terre, Des dĂ©linĂ©aments de nos sentiers de pierre, De nos prosternements au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Et des abornements de nos pauvres vertus, Des destitutions de nos pauvres statuts, De nos processions au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des grands que nous craignons et que nous harcelons, Des biens que nous gagnons et que nous morcelons, Des morts que nous couchons au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des dĂ©partagements de nos parts de misĂšre Et des lotissements de nos lots de poussiĂšre Et de nos lots d’orgueil au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Des enregistrements de nos propriĂ©tĂ©s, Des consĂ©crations de nos humilitĂ©s, De nos retournements au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales Qui nous font rois d’un jour dans un pauvre canton Et maĂźtres d’avancer un double phaĂ©ton Et maĂźtres d’une tombe au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales Qui nous font rois d’un jour dans un dernier naufrage Et maĂźtres d’un cocher et d’un pauvre Ă©quipage, Et maĂźtres d’une croix au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales Qui nous font redouter dans un pauvre canton, Et maĂźtres de l’honneur et du qu’en dira-t-on, Et maĂźtres de pourrir au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos sentiers perdus qui vont dans les lilas Et que nous parcourrons solitaires et las Avant de retomber au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos chemins perdus parmi les routes neuves Et qui flĂąnent perdus dans les osiers des fleuves Avant de remonter au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos chemins perdus qui vont le long des treilles Dans le bourdonnement des mouvantes abeilles Avant de retourner au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos chemins perdus qui vont dans les venelles Et parmi les jets d’eau et parmi les tonnelles Avant de retomber au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Et du rĂ©partement du peu que nous avons, Et de l’encombrement du peu que nous savons, Et des alignements des chambres sĂ©pulcrales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, De nos chemins perdus qui vont dans les fraisiers Et parmi la glycine et le long des rosiers Avant de comparaĂźtre au pied des cathĂ©drales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales, Et du gouvernement de ce rien que nous sommes Et des biens de la terre et de nous autres hommes, Et du vieux baptistĂšre et des ondes lustrales. Il allait hĂ©riter des listes cadastrales Qui nous font les premiers dans un pauvre village Et qui nous font seigneurs sur tout le voisinage Et mĂȘme sur les bancs des chƓurs des cathĂ©drales. Il allait dĂ©mĂȘler aux souches cadastrales L’écheveau des contours de nos propriĂ©tĂ©s, Le rĂ©seau des retours de nos hĂ©rĂ©ditĂ©s, Les droits que nous avons aux chambres sĂ©pulcrales. Il allait retrouver aux souches cadastrales Nos titres d’origine et de propriĂ©tĂ©s, Nos titres de naissance et notre hĂ©rĂ©ditĂ©, Les parts que nous avons aux chambres sĂ©pulcrales. Il allait retrouver aux souches cadastrales Nos titres de crĂ©ance et de fidĂ©litĂ©, Nos titres de finance et de finalitĂ©, Les lots que nous avons aux chambres sĂ©pulcrales. Il allait retrouver aux souches cadastrales Nos titres de roture et de lĂ©galitĂ©, Nos titres de noblesse et de fatalitĂ©, Le droit que nous avons aux chambres sĂ©pulcrales. Les pas des lĂ©gions allaient marcher pour lui. Les voiles des bateaux pour lui s’étaient gonflĂ©es. Pour lui les grands soleils d’automnes avaient lui. Les voiles des bateaux pour lui avaient pliĂ©es. Rome avait fait marcher les lourds lĂ©gionnaires Et le lourd bouclier et le glaive pour lui, Et la lourde tortue. Et les durs mercenaires Devant Rome et CĂ©sar et le glaive avaient fui. C’est lui qui marchait derriĂšre le Romain, DerriĂšre le prĂ©fet, derriĂšre la cohorte. C’est lui qui passait par cette haute porte. Il Ă©tait le seigneur d’hier et de demain. Et le pas d’Annibal avaient marchĂ© pour lui Des fins fonds des dĂ©serts vers la porte Colline. Jusqu’au fond des frimas les Parthes avaient fui Sous le redoublement de la force latine. Les Ă©lĂ©phants d’Afrique avaient marchĂ© pour lui Du fin fonds des dĂ©serts jusqu’aux portes de Rome. Et pour lui les soleils d’IsraĂ«l avaient lui, Du haut du SinaĂŻ jusqu’au fin fond de l’homme. Il allait hĂ©riter des naufrages de Rome, Du monde divisĂ© dans des morcellements. Il allait hĂ©riter des naufrages de l’homme, Du cƓur subdivisĂ© par amoncellements. Il allait hĂ©riter des partages de Rome, D’un empire brisĂ© par des morcellements. Il allait hĂ©riter des partages de l’homme, D’un royaume Ă©puisĂ© par des ruissellements. Les Ă©lĂ©phants massus avaient marchĂ© pour lui, Et les princes captifs et les peuples liĂ©s. Et pour lui les soleils d’IsraĂ«l avaient lui Le long du fil du temps sur des jours oubliĂ©s. Il allait hĂ©riter de lourds lĂ©gionnaires, Tout harnachĂ©s de fer des cuirassiers. Il allait hĂ©riter des maigres mercenaires, Tout harnachĂ©s de cuir comme des carnassiers. Il allait hĂ©riter des lourds lĂ©gionnaires, Tout en muscles de fer comme des cuirassiers. Il allait hĂ©riter des maigres mercenaires, Tout en paquets de nerfs comme des carnassiers. Il allait hĂ©riter des lourds lĂ©gionnaires, GainĂ©s comme des Ă©tuis comme des scarabĂ©es. Il allait hĂ©riter des martyrs MacchabĂ©es, Il allait hĂ©riter des maigres mercenaires. Il allait hĂ©riter des peuples dĂ©bonnaires, Et des peuples cruels et du peuple romain. Il allait hĂ©riter des antiques tonnerres, Des foudres oubliĂ©s sur le bord du chemin. Il allait hĂ©riter des peuples centenaires, Des peuples nouveau-nĂ©s et du peuple romain. Il allait hĂ©riter des foudres sĂ©culaires, Et des Ă©tonnements laissĂ©s sur le chemin. Il allait hĂ©riter des princes dĂ©bonnaires Et des princes cruels et du peuple monarque. Il allait hĂ©riter des princes sanguinaires Et des peuples humains et d’HĂ©rode tĂ©trarque. Il allait hĂ©riter des peuples diplomates. Et des consternements d’un peuple sĂ©nateur. Il allait hĂ©riter des peuples dĂ©mocrates. Et des prosternements d’un peuple donateur. Il allait hĂ©riter des forĂȘts sĂ©culaires Et des dĂ©boisements laissĂ©s sur le chemin. Il allait hĂ©riter des chĂȘnes centenaires Et des abattements et du peuple romain. Il allait hĂ©riter des lourds lĂ©gionnaires Tout lamellĂ©s de fer comme des scarabĂ©es. Il allait hĂ©riter des gĂ©ants MacchabĂ©es. Il allait hĂ©riter des maigres mercenaires. Il allait hĂ©riter des lourds lĂ©gionnaires BardĂ©s, plaquĂ©s, lamĂ©s comme des cuirassiers. Il allait hĂ©riter des maigres mercenaires Battus, creusĂ©s, tendus comme des carnassiers. Il allait hĂ©riter des lourds lĂ©gionnaires Tout bardĂ©s de mĂ©tal comme de grands carabes, Il allait hĂ©riter des cavaliers arabes. Il allait hĂ©riter des maigres mercenaires. Il allait hĂ©riter des lourds lĂ©gionnaires Trapus, musclĂ©s, barbus comme des cuirassiers. Il allait hĂ©riter des maigres mercenaires Tout tendus de tendons comme des carnassiers. Il allait hĂ©riter des lourds lĂ©gionnaires SanglĂ©s dans la rudesse et la force romaine. Il allait hĂ©riter des maigres mercenaires Noueux et ravinĂ©s comme une Ă©corce humaine. Et les peuples de Rome et les lĂ©gionnaires Étaient comme des chiens rompus Ă  toute garde. Et la horde d’Afrique Ă  la face hagarde Étaient comme des loups maigres et mercenaires. Et les peuples de Rome et les lĂ©gionnaires Sous les centurions Ă©taient d’énormes dogues. Et les loups de Carthage impĂ©rieux et rogues Sous les nĂ©gociants demeuraient mercenaires. Et le hordes d’Afrique et les durs mercenaires Se payaient d’or, d’argent, de sang et de fureur. Et les peuples de Rome et les lĂ©gionnaires Se payaient d’avoir fait un immense empereur. Et ces peuples brĂ»lĂ©s et tous ces marchands d’homme Se payaient d’avoir fait un monde mercenaire. Mais les peuples civils et les hommes de Rome Se payaient d’avoir fait un monde centenaire. Et ces peuples payĂ©s, ces maigres mercenaires Se payaient d’or, d’argent, de sang et de luxure. Mais ces peuples profonds, les lourds lĂ©gionnaires Se payaient d’avoir fait une immense nature. Et ces peuples vĂ©reux, les maigres mercenaires Se payaient d’or, d’argent, de luxe et de bavure. Mais ces peuples terreux, les lourds lĂ©gionnaires Se payaient d’avoir fait une immense armature. Ces peuples ramassĂ©s, ces brĂ»lants mercenaires Étaient comme des loups maigres et dĂ©charnĂ©s. Ces peuples assemblĂ©s, ces lourds lĂ©gionnaires Étaient des chiens de garde ardents et acharnĂ©s. Et ces peuples crevĂ©s, ces acres mercenaires Se payaient d’or, d’argent, de crimes et d’ordure. Mais ces peuples sevrĂ©s, les grands lĂ©gionnaires Se payaient d’avoir fait une magistrature. Les Romains prĂ©posĂ©s Ă  la garde du monde Étaient assis en rond devant les triples portes. Et l’univers Ă©tait une immense rotonde Sous le gouvernement de deux mille cohortes. Et les peuples payĂ©s en outre se frayaient Une route de sang effroyable et profonde. Mais les soldats romains en outre se payaient Par le gouvernement de tout l’ordre du monde. Et les peuples payĂ©s en outre se frayaient Une route d’horreur solennelle et profonde. Mais les soldats romains en outre se payaient Par le gouvernement de tout l’orbe du monde. Il allait hĂ©riter des peuples mercantiles Et du peuple nomade et des peuples marchands. Il allait hĂ©riter des comptoirs et des champs Et des peuples dĂ©serts et des races fertiles. Il allait hĂ©riter des peuples inactifs Et des peuples bourreaux et du peuple martyr. Il allait hĂ©riter de Sidon et de Tyr. Il allait hĂ©riter des Romains et des Juifs. Il allait hĂ©riter des frondeurs balĂ©ares, Du bouclier gaulois et du glaive romain. Il allait hĂ©riter des hĂ©ritiers barbares. Il allait hĂ©riter de l’hĂ©ritier latin. Il allait hĂ©riter des cavaliers numides Et d’Assourbanipal et de Masinissa. Il allait hĂ©riter du rude Micipsa. Il allait hĂ©riter des hautes Pyramides. Et les pas d’Alexandre avaient marchĂ© pour lui De son jeune berceau jusqu’à sa jeune mort. Il Ă©tait le seigneur de l’un et l’autre port. Il Ă©tait le seigneur d’hier et d’aujourd’hui. Et les pas d’HĂ©rodote avaient marchĂ© pour lui. Il Ă©tait le seigneur de l’un et l’autre sort. Il Ă©tait le seigneur de l’une et l’autre mort. Il Ă©tait le seigneur d’hier et d’aujourd’hui. Les pas mĂȘme d’Hercule avaient marchĂ© pour lui. Il Ă©tait le seigneur de l’Averne et de Lerne, Et de la monstrueuse et sanglante caverne, Il Ă©tait le seigneur d’hier et d’aujourd’hui. Et les pas de ThĂ©sĂ©e avaient marchĂ© pour lui. C’est lui qu’on attendait dans les pĂąles enfers. C’est lui qu’on attendait dans l’immense univers. Il Ă©tait le seigneur d’hier et d’aujourd’hui. Les pas de Darius avaient marchĂ© pour lui. C’est lui qu’on attendait au fin fond de la Perse. C’est lui qu’on attendait dans une Ăąme disperse. Il Ă©tait le seigneur d’hier et d’aujourd’hui. Et l’Asie et l’Europe avaient marchĂ© pour lui. Il Ă©tait le seigneur de l’un et l’autre bord. Il Ă©tait le preneur de l’un et l’autre fort Et seul PoliorcĂšte hier et aujourd’hui. Les pas de la phalange avaient marchĂ© pour lui, Du fin fond de la Thrace aux portes de la Chine. Pour lui les vieux sapins avaient courbĂ© l’échine. Pour lui les vents d’hiver et d’automne avaient fui. Et les pas de CĂ©sar avaient marchĂ© pour lui, Du fin fond de la Gaule aux rives de Memphis. Tout hommes aboutissaient aux pieds du divin fils. Et il Ă©tait venu comme un voleur de nuit. Et les pas d’Alexandre avaient marchĂ© pour lui Du palais paternel aux rives de l’Euphrate. Et le dernier soleil pour lui seul avait lui Sur la mort d’Aristote et la mort de Socrate. Et les voleurs de jour et les voleurs de nuit Ensemble aboutissaient Ă  ce pauvre berceau. Et les gloires d’hier et celles d’aujourd’hui Ensemble aboutissaient Ă  ce frĂȘle vaisseau. Et les voleurs de jour et les voleurs de nuit Ensemble aboutissaient Ă  ce pauvre trousseau. Et les routes d’hier et celles d’aujourd’hui Ensemble aboutissaient Ă  ce pauvre hameau. Et les voleurs de jour et les voleurs de nuit Ensemble aboutissaient Ă  cet humble trĂ©teau. Et les villes d’hier et celles d’aujourd’hui Ensemble aboutissaient Ă  ce pauvre chĂąteau. Il allait hĂ©riter du chĂȘne de Dodone Et des sapins d’Ithaque et des cĂšdres bibliques, Il allait hĂ©riter des grandes RĂ©publiques Et des prosternements prĂšs du bourg de Colone. Et les pas de la GrĂšce avaient marchĂ© pour lui, Des bords de l’Eurotas aux rives du Scamandre, Et pour lui les soleils de la GrĂšce avaient lui Des sources d’ArĂ©thuse aux dĂ©tours du MĂ©andre. Et l’antique Hellade avait marchĂ© pour lui Des quais de Syracuse aux bords du SimoĂŻs. Et les derniers soleils pour lui seul avaient lui Du haut de TaygĂšte aux dĂ©troits de Chalcis. L’antique Agamemnon avait marchĂ© pour lui Du palais de son pĂšre au camp devant Aulis. Les soleils du retour pour lui seul avaient lui Des bords de la Troade au temple d’Eleusis. Les rĂȘves de Platon avaient marchĂ© pour lui Du cachot de Socrate aux prisons de Sicile. Les soleils idĂ©aux pour lui seul avaient lui. Et pour lui seul chantĂ© le gigantesque Eschyle. Les rĂšgles d’Aristote avaient marchĂ© pour lui Du cheval d’Alexandre aux rĂšgles scholastiques. Et pour lui l’ascĂ©tisme et la rĂšgle avaient lui Des rĂšgles d’Épicure aux rĂšgles monastiques. Les rĂšgles de ZĂ©non avaient marchĂ© pour lui, Des siĂšcles dĂ©tendus aux siĂšcles ascĂ©tiques. Et pour lui Pythagore et la rĂšgle avaient lui Des rĂšgles de calcul jusqu’aux rĂšgles mystiques. Il allait hĂ©riter de l’école stoĂŻque. Il allait hĂ©riter de l’hĂ©ritier romain. Il allait hĂ©riter du laurier hĂ©roĂŻque. Il allait hĂ©riter de tout l’effort humain. Il allait hĂ©riter d’un effort sĂ©culaire. Il allait hĂ©riter du cavalier latin. Il allait hĂ©riter dans son premier matin Du peuple bucolique et du peuple insulaire. Il allait hĂ©riter d’un monde dĂ©jĂ  fait. Et pourtant il allait tout entier le refaire. Il allait dĂ©border de la cause Ă  l’effet Comme un fleuve dĂ©borde et gagne une autre terre. Il allait hĂ©riter d’un monde dĂ©jĂ  fait. Et pourtant il allait tout nouveau le refaire. Il allait dĂ©fluer de la cause Ă  l’effet Comme un monde dĂ©flue et gagne une autre sphĂšre. Il allait hĂ©riter d’un monde dĂ©jĂ  fait. Et pourtant il allait tout jeune le refaire. Il allait procĂ©der de la cause Ă  l’effet Comme le Fils procĂšde en descendant du PĂšre. Il allait hĂ©riter d’un monde circonscrit Et pourtant il allait du dedans le refaire. Comme un nĂ©gociant gouverne son affaire, Il allait gouverner les Ɠuvres de l’esprit. Il allait hĂ©riter d’un monde dĂ©jĂ  vieux. Et pourtant il allait tout enfant le refondre. Comme un vieux paysan, avant que de rĂ©pondre, Consulte l’appareil de la terre et des cieux. Il allait hĂ©riter d’un univers tout fait. Et pourtant il allait tout entier le rĂ©soudre. Comme une vieille aĂŻeule, avant que de recoudre, Regarde les morceaux d’un pantalon dĂ©fait. Il allait hĂ©riter dans un pauvre canton De l’affaiblissement des plus vieux municipes. Il allait hĂ©riter d’Aristote et de Platon Par le dĂ©sistement des plus fermes principes. Il allait hĂ©riter dans son pauvre canton De l’annulation des plus grands municipes. Il allait hĂ©riter de Socrate et Platon Par l’affaiblissement des plus fermes principes. Il allait hĂ©riter dans son pauvre canton De la sĂ©nilitĂ© des plus grands municipes. Il allait hĂ©riter d’Aristote et Platon Par la prostration des plus fermes principes. Dieu qui nous jugerez sur un autre cadastre Par notre ingratitude et nos morcellements, Dieu qui nous peserez dans ce commun dĂ©sastre Par notre platitude et nos nivellements ; Ô Dieu qui rangerez sur un dernier cadastre Nos titres d’origine et de propriĂ©tĂ©, Ô Dieu qui classerez dans ce commun dĂ©sastre Nos titres de rĂ©gime et de caducitĂ© ; Ô Dieu qui dresserez un bien autre cadastre Pour nos parts de fortune et nos lotissements Dieu qui gouvernerez un bien autre dĂ©sastre Que nos coups d’infortune et nos terrassements ; Seigneur qui classerez pour un dernier cadastre Nos titres de fortune et de vulgaritĂ©, Seigneur qui rangerez dans ce commun dĂ©sastre Nos titre de rancune et de prĂ©caritĂ©. Veuillez nous rechercher pour ce dernier cadastre Des biens moins temporels, des titres moins vulgaires. Veuillez nous rechercher dans ce commun dĂ©sastre Dans le surnaturel des titres moins prĂ©caires. Veuillez nous rechercher pour ce dernier cadastre Et pour le rĂšglement des comptes de misĂšres, Veuillez nous rechercher dans ce commun dĂ©sastre Des biens qui ne soient pas nos chĂąteaux et nos terres. Veuillez nous rechercher de bien autres fortunes. Veuillez nous rechercher un autre Ă©vĂ©nement. Veuillez nous retrouver des sources moins communes. Veuillez nous retrouver un autre avĂšnement. Veuillez nous recherchez des biens incorporels Qui nous soient gratuits et ne soient pas de nous. Seigneur nous n’avons rien que nos biens naturels Et le prosternement de nos raides genoux. Veuillez nous dĂ©pouiller de nos vieilles rancunes. Veuillez nous revĂȘtir de vos dĂ©sarmements. Veuillez nous mĂ©nager des rades opportunes. Veuillez nous prĂ©parer de grands dĂ©barquements. Veuillez nous recherchez des biens intemporels Qui nous soient gracieux et ne soient pas de nous. Seigneur nous n’avons rien que nos biens naturels Et le flĂ©chissement de nos raides genoux. Veuillez nous dĂ©pouiller de nos vieilles fortunes. Veuillez nous revĂȘtir de votre pauvretĂ©. Veuillez nous prĂ©parer des morts moins importunes. Veuillez nous assurer de votre suretĂ©. Veuillez nous rechercher des biens surnaturels. Seigneur nous n’avons rien que notre humble nature. Veuillez nous dispenser des biens moins naturels. Veuillez nous mĂ©nager votre magistrature. Veuillez nous dĂ©pouiller de nos vieilles ordures. Veuillez nous revĂȘtir de votre puretĂ©. Veuillez nous dĂ©pouillez de nos investitures. Veuillez nous revĂȘtir de votre duretĂ©. Veuillez nous rechercher ce que nous n’avons pas. Nous n’avons que nos cƓurs et nos biens pĂ©rissables. Veuillez nous dĂ©voiler aprĂšs le dernier pas Le long bouillonnement des eaux intarissables. Veuillez nous procurer des biens moins temporels. Nous n’avons que le peu qui procĂšde de nous. Et parmi tant d’outrage et de biens corporels Le sillon du collier dans la peau de nos cous. Veuillez nous rechercher ce que nous n’avons pas, MaĂźtre des biens caducs et des impĂ©rissables. AprĂšs le dernier jour et le dernier trĂ©pas, Veuillez nous rĂ©vĂ©ler les biens infranchissables. Veuillez nous insĂ©rer sur un nouveau registre, Ô Dieu qui dresserez un tout autre cadastre. Ô Dieux qui paraĂźtrez en ce nouveau dĂ©sastre Et ne parlerez plus par la voix d’un ministre. Veuillez nous procurez ce que nous n’avons pas. Veuillez nous rĂ©vĂ©ler, roi des biens pĂ©rissables, AprĂšs le dernier jour et le dernier trĂ©pas, La porte et le perron des biens infranchissables. Veuillez nous retrouver d’impĂ©rissables titres, Dieu qui classerez tout sur un nouveau cadastre. Ô Dieu qui surgirez dans ce commun dĂ©sastre, Veuillez nous reclasser dans de nouveaux chapitres. Veuillez nous dĂ©pouiller de nos raides fortunes, Veuillez nous revĂȘtir de vos contentements. Veuillez nous Ă©viter des morts inopportunes. Veuillez vous contentez de nos dĂ©portements. Il allait hĂ©riter des couronnes murales, Des fossĂ©s, des crĂ©neaux, des encorbellements. Des palais, des chĂąteaux et des morcellements. Il allait hĂ©riter des colonnes rostrales. Il allait hĂ©riter des victoires nautiques, De Candie et de Malte et de la mer Latine. Il allait hĂ©riter des dĂ©sastres antiques, Et de l’écroulement des murs de Palestine. Il allait hĂ©riter de vertes Feuillantines Et du gĂ©nie autant que de la saintetĂ©. Il allait hĂ©riter des frĂȘles brigantines, Et du tonnage autant que de la pauvretĂ©. Il allait hĂ©riter du plus lointain Ă©cho, Du plus ancien tonnerre et du premier ramage. Et de l’écroulement du plus ancien village. Et de l’écroulement des murs de JĂ©richo. Il allait hĂ©riter des suppliants antiques, De Priam et d’HomĂšre et des chƓurs de Sophocle. Il allait hĂ©riter du fronton et du socle Et du vieillard aveugle et des dĂšmes attiques. Il allait hĂ©riter des sables des dĂ©serts Et des ruisseaux de lait et des ruisseaux de miel. Et des vallons ombreux et des chemins couverts, Et des reposements de la terre et du ciel. Il allait hĂ©riter des vainqueurs authentiques. Il allait hĂ©riter plus encor des vaincus. Il allait hĂ©riter des dĂ©sastres d’écus. Il allait hĂ©riter des dĂ©sastres mystiques. Il allait hĂ©riter des victoires nautiques Et de la grĂące autant que de la libertĂ©. Il allait hĂ©riter des licences antiques Et de la race autant que de la voluptĂ©. Il allait hĂ©ritĂ© de a voile latine Et du pays sabin et de l’orbe du monde. Il allait hĂ©riter de la vague profonde Et de l’écrasement d’un temple en Palestine. Il allait hĂ©riter de la courbe nautique Et du navire autant que de la cargaison. Il allait hĂ©riter de la sagesse antique Et du dĂ©lire autant que de droite raison. Il allait hĂ©riter de la prose latine, Et du verbe latin il en ferait ses proses. De l’églantier latin il en ferait des roses. Et de l’écroulement d’un temple en Palestine Il en ferait son temple et son arche Ă©ternelle. Des tentes d’IsraĂ«l ferait son tabernacle. Des crĂšches de NoĂ«l ferait son habitacle Et sa niche de saint et sa couche charnelle. Des reposoirs ferait toute sa rĂ©sidence. Et de notre salut ferait tous ses amours. Et des processions qui s’en vont dans les bourgs Ferait pour nous servir toute sa prĂ©sidence. Des reposoirs ferait sa tribune et son siĂšge Au-dessus de la foule enfant et fraternelle. Et des processions ferait tout son cortĂšge Et sa marche prĂ©sente et sa marche Ă©ternelle. Il allait hĂ©riter de la courbe nautique Et du volume autant que de la pauvretĂ©. Il allait hĂ©riter de la sagesse antique Et de l’écume autant que de la puretĂ©. Il allait hĂ©riter des manquements de Rome Et du dĂ©lire antique il ferait sa raison. Il allait hĂ©riter des manquements de l’homme Et de la lyre attique il ferait oraison. Il allait hĂ©riter de la courbe nautique Et du recul autant que de la flottaison. Il allait hĂ©riter de l’appareil antique Et du calcul autant que de simple raison. Il allait hĂ©riter des manquements de l’homme Et du plein et du vide et du manque et des creux. Il allait hĂ©riter des manquements de Rome Et du plus indigent et du plus malheureux. Il allait hĂ©riter de la prose latine. Il en ferait la messe et le grĂ©gorien. Il allait hĂ©riter de la rouge Ă©glantine. Il en ferait la rose et l’oratorien. Il allait hĂ©riter de ce qui manque Ă  l’homme. Et celui qui n’a rien et qui donne le plus. Il allait hĂ©riter de ce qui manque Ă  Rome. Et celui qui n’a rien fait de dons absolus. Il allait hĂ©riter des plus antiques lĂšpres. Il en ferait l’offense et le pĂ©chĂ© mortel. Il allait hĂ©riter du plus antique autel. Il en ferait l’autel de la messe et des vĂȘpres. Il allait hĂ©riter des manquements de Rome. Et celui qui n’a rien, c’est un bel hĂ©ritage. Il allait hĂ©riter des manquements de l’homme. Et celui qui n’a rien, c’est le plus beau partage. Il allait hĂ©riter des mĂ©triques latines. Il en ferait sa prose et son hymne et ses vĂȘpres. Il allait hĂ©riter des plus antiques lĂšpres. Il en ferait l’horreur des lĂšpres clandestines. Il allait hĂ©riter des manquements de l’homme. Et celui qui n’a rien, il en hĂ©rite plus. Il allait hĂ©riter des manquements de Rome. Et celui qui n’a rien fait des legs absolus. Il allait hĂ©riter des mĂ©triques latines. Il en ferait son nombre et son rythme et ses vĂȘpres. Il allait hĂ©riter des apparentes lĂšpres. Il en ferait l’horreur des lĂšpres intestines. Il allait hĂ©riter de nos charnelles lĂšpres. Il en ferait l’ordure et le pĂ©chĂ© mortel. Il allait hĂ©riter du plus caduc autel. Il en ferait l’autel de la messe et des vĂȘpres. Il allait hĂ©riter du sacrifice antique. Il en ferait sa messe et son propre offertoire. Il allait hĂ©riter de l’aruspice attique. Il en ferait sa dette et son propre oratoire. Il allait hĂ©riter de nos lĂšpres charnelles. Il en ferait l’injure et la contrition, La lĂšpre intĂ©rieure et la rĂ©mission, Et la dĂ©mangeaison des lĂšpres Ă©ternelles. Il allait hĂ©riter de la prose latine. Il en ferait don rite avec sa liturgie. Il allait hĂ©riter de Rome byzantine. Il en ferait son cadre et sa thĂ©ologie. Il allait hĂ©riter de nos lĂšpres charnelles. Il en ferait l’outrage et la corruption. Il allait hĂ©riter du temple de Sion. Il y ferait sonner des vĂȘpres Ă©ternelles. Il allait hĂ©riter de la pourpre latine. Il en ferait sa robe et sa pourpre Ă©largie. Il allait hĂ©riter de la loi byzantine. Il en ferait son code et sa thaumaturgie. Il allait hĂ©riter de l’antique noblesse. Il allait en former une noble priĂšre. Il allait hĂ©riter de l’antique bassesse. Il allait en former notre basse misĂšre. Il allait hĂ©riter de la Rome de brique. Il allait hĂ©riter de la Rome de marbre. Il allait hĂ©riter de la souche et de l’arbre. Il allait hĂ©riter de Carthage d’Afrique. Il allait hĂ©riter de l’antique raison. Il en ferait sa prise, et son humble servante. Il allait hĂ©riter de l’antique maison. Il en ferait sa grise et sa mouvante tente. Et des vieux tympanons il en ferait des cloches. Et des vieux cabanons il en ferait des temples. Des antiques pennons il ferait des exemples. Et des vieux gonfanons il ferait des fantoches. Il allait hĂ©riter des manquement de Rome. Et celui qui n’a rien, c’est un grand colportage. Il allait hĂ©riter des manquements de l’homme. Et celui qui n’a rien, c’est un grand sauvetage. Il allait hĂ©riter de la voile et la rame Et du port de commerce et de dĂ©barquement. Il allait hĂ©riter des rudesses de l’ñme Et du port de dĂ©tresse et de baraquement. Il allait hĂ©riter des manquements humains. Et celui qui n’a rien, c’est lui seul qui se donne. Il allait hĂ©riter des manquements romains. Et celui qui n’a pas, c’est lui seul qui couronne. Il allait hĂ©riter de la rame et la voile Et des pontons liĂ©s aux quais d’embarquement. Il allait hĂ©riter de ce carrĂ© de toile Et du mĂąt qui travaille et craque un craquement. Il allait hĂ©riter des manquements latins. Et celui qui n’a pas, c’est lui seul qui pardonne. Il allait hĂ©riter des antiques destins. Et celui qui n’a pas, c’est lui qui s’abandonne. Il allait hĂ©riter des premiĂšres murailles Et des premiers fossĂ©s et des rois fondateurs. Il allait hĂ©riter des successeurs d’entrailles Et des premiers procĂšs et des usurpateurs. Il allait hĂ©riter des antiques festins. Mais il allait en faire un festin Ă©ternel. Il allait hĂ©riter des temples clandestins. Mais il allait en faire un temple solennel. Il allait hĂ©riter des premiĂšres bĂątisses, Du lyrique Amphion et des rois bĂątisseurs. Il allait hĂ©riter des premiers possesseurs. Il allait hĂ©riter des premiĂšres justices. Il allait hĂ©riter de cette pauvre femme. Et celui qui n’a rien, c’est lui qui donne tout. Il allait hĂ©riter des pauvretĂ©s de l’ñme. Et celui qui n’a rien, c’est lui qui meurt debout. Il allait hĂ©riter de l’antique bordage Et du port militaire et des rĂ©armements. Il allait hĂ©riter du dernier abordage Et de la mise Ă  terre et des effondrements. Il allait hĂ©riter de tout ce qui se donne, Des tendresses de l’ñme et des grĂąces du cƓur. Il allait hĂ©riter d’une pĂąle couronne EffeuillĂ©e aux genoux d’un absurde vainqueur. Il allait hĂ©riter des derniers successeurs. Il allait hĂ©riter des dĂŽmes byzantins. Il allait commencer les grands intercesseurs. Il allait investir les comtes palatins. Il allait hĂ©riter de tout ce qui se lĂšgue Et celui qui n’a rien, JĂ©sus seul en hĂ©rite. Il allait hĂ©riter de tout ce qu’on relĂšgue Et de ce qu’on mĂ©prise aux marchĂ©s du mĂ©rites. Il allait hĂ©riter de nos Ă©tats civils. De ceux qui nous font dire Une vie est Ă  nous. Seigneur nous n’avons rien que ces portiques vils Et le roidissement de nos roides genoux. Il allait hĂ©riter des titres cadastraux, De ceux qui nous font maĂźtre et seigneur de la terre Et qui nous font rĂ©gner dans des cantons ruraux Au nom du droit civil par les mains du notaire. Il allait hĂ©riter de nos maĂźtres avides, De ceux qui nous font dire Une science est Ă  nous. Seigneur nous n’avons rien que nos cartables vides Et l’abdication de nos roides genoux. Il allait hĂ©riter des biens paraphernaux. Il en ferait sa dot et celle de sa mĂšre. Il allait hĂ©riter des palais infernaux. Il en ferait son lot et celui de son pĂšre. Il allait hĂ©riter des tables de mĂ©moire. Mais puissions-nous les perdre au jour du jugement Comme on perd un papier qu’on avait dans l’armoire Et qui commĂ©morait un pauvre Ă©vĂ©nement. Il allait hĂ©riter des titres cadastraux, De ceux qui nous font dire Une terre est Ă  nous. Seigneur nous n’avons rien que nos roides genoux Et le gouvernement de ces cantons ruraux. Ce n’est pas de mĂ©moire et de certificat Que nous aurons besoin dans ce commun dĂ©sastre. Et ce n’est pas d’histoire et de raison d’État Que nous aurons besoin sur cet autre cadastre. Il allait hĂ©riter des cartes de la terre, De celles qui font dire Un royaume est Ă  nous. Seigneur nous n’avons rien qu’une basse misĂšre Et le prosternement de nos raides genoux. Et ce n’est pas de carte et de gĂ©ographie Que nous aurons besoin dans ce commun dĂ©sastre. Et ce n’est pas de plan et de topographie Que nous nous munirons pour ce nouveau cadastre. Et ce n’est pas de carte de gĂ©ographies Que nous emporterons au jour du jugement. Et ce n’est pas des plans et des topographies Que nous emporterons sur notre bĂątiment. Et ce n’est pas des textes d’archĂ©ologies Que nous emporterons sur notre galĂ©asse. Ce n’est pas par des notes de philologies Que nous justifierons notre vieille carcasse. Ce n’est pas des cadrans et de mauvais compas Que nous emporterons le jour de cette chasse. Ce n’est pas de conserve et d’un mauvais repas Que nous aurons empli notre maigre besace. Ce n’est pas un fatras de physiologies Que nous emporterons le jour de la colĂšre. Ce n’est pas un ramas de gĂ©nĂ©alogies Que nous emporterons pour le jour du salaire. Et ce ne sera pas une maigre boussole Que nous consulterons dans son morne habitacle. Et nos pavois seront une autre banderole. Et nos coffres seront un autre tabernacle. Et ce n’est pas des tas de sociologies Que nous emporterons le jour du jugement. Et ce n’est pas des rats de bibliographies Que nous emporterons le jour du rĂšglement. Et ce n’est pas des sots et des sociologues Qui rameront pour nous sur nos pauvres trois-mĂąts. Et ce n’est pas des mots et des archĂ©ologues Qui penseront pour nous dans ces derniers frimas. Et ce n’est pas des planches de bibliothĂšques Qui trembleront pour nous le jour de la colĂšre. Et des recolements et des pinacothĂšques Le jour du rĂšglement et le jour du salaire. Ce n’est pas un chorĂšge avec des mystagogues Qui rĂ©gleront nos chƓurs et conduiront nos pas. Et ce n’est pas des clercs avec des pĂ©dagogues AprĂšs le dernier jour et le dernier trĂ©pas. Et ce n’est pas des bras tout plein de catalogues Qui rameront pour nous sur nos derniers vaisseaux. Et ce n’est pas des cƓurs tout chargĂ©s d’apologues Qui trembleront pour nous sur nos derniers radeaux. Ce n’est pas des savants et des anthropologues Qui rameront pour nous sur une humble galĂšre. Ce n’est pas des talents doublĂ©s de psychologues, Le jour du rĂšglement et le jour du salaire. Et ce n’est pas d’un scribe et de ses rĂ©pertoires Que nous nous pourvoirons le jour du jugement. Et ce n’est pas des vƓux des professeurs d’histoires Que nous nous munirons le jour du rĂšglement. Et ce n’est pas de plumes et de boĂźtes de fiches Que nous nous armerons le jour de la colĂšre. Ce n’est pas de placard et ce n’est pas d’affiches, Le jour du rĂšglement et du dernier salaire. Et ce n’est pas d’archive et de conservatoires Que nous nous armerons le jour du jugement. Et ce n’est pas des jeux des professeurs d’histoires Que nous nous prĂ©vaudrons le jour du rĂšglement. Ce ne sont pas les courbes et les sismographes Que nous invoquerons le jour du tremblement. Et ce n’est pas l’article avec les paragraphes Que nous invoquerons le jour du rĂšglement. Et ce n’est pas non plus ces pompeux cĂ©notaphes Qui nous introduiront dans un monde nouveau. Et ce n’est pas non plus ces faiseurs d’épitaphes Que nous invoquerons pour sortir du tombeau. Et ce n’est pas leurs points et leur alinĂ©as Que nous rĂ©clamerons le jour de la justice. Et ce n’est point aussi leurs tables d’alĂ©as Que nous allĂ©guerons le jour de l’armistice. Et ce n’est point leur lettre avec leurs monogrammes Qui nous introduiront dans un siĂšcle nouveau. Et ce n’est point leur sceptre avec leurs diagrammes Que nous consulterons pour sortir du tombeau. Ce n’est point ces rentiers et ces fonctionnaires Qui garderont la porte au jour du jugement. Ce n’est point ces taupiers et ces factionnaires Qui monteront la garde au jour du rĂšglement. Ce n’est point ces lanciers et ces gardes du corps Qui monteront la garde au seuil du tribunal. Ce n’est pas ces massiers et ces portiers des morts Que nous allumeront notre dernier fanal. Ce n’est point ces caissiers et ces gardes des sceaux Qui nous feront passer de l’un Ă  l’autre bord. Ce n’est point ces huissiers et ces grands panonceaux Qui nous enseigneront Ă  sortir de la mort. Ce n’est pas ces greffiers et ces parfaits notaires Que nous invoquerons sur les bords Ă©ternels. Ce n’est pas les dossiers de ces protonotaires Que nous allĂ©guerons aux bords intemporels. Nous les aurons laissĂ©s parmi leurs glyptothĂšques, Parmi leur cendriers cherchant des poudriers. Un autre lĂšvera nos lourdes hypothĂšques. Un autre affranchira nos absurdes terriers. Un autre purgera nos autres hypothĂšques. Un autre lĂšvera nos stupides Ă©crous. Un autre lavera de la peau de nos cous Le sang et le sillon des colliers extrinsĂšques. Un autre lĂšvera des registres d’écrous Nos prĂ©noms et nos noms et nos Ă©tats civils. Un autre arrachera de la peau de nos cous Le sang et le sillon de nos colliers d’exils. Un autre brisera les registres d’écrous. Un autre brisera les portes de la geĂŽle. Un autre effacera de notre maigre Ă©paule La poussiĂšre et le sang descendus de nos cous. Un autre, un Dieu rompra les registres d’écrous. Un autre, un Dieu rompra les deux portes d’airains. Un autre effacera de la peau de nos reins La poussiĂšre et le sang descendus de nos cous. Un autre arrachera ces absurdes licous. Un autre, un triple Dieu rompra les doubles portes. Un autre arrachera de la peau de nos cous La strangulation de ces laniĂšres mortes. Un autre effacera de la peau de nos cous Un bleuĂątre sillon de nos colliers de force. Un autre effacera de notre vieille Ă©corce L’antique inscription des prĂ©noms les plus doux. Un autre effacera de notre maigre Ă©paule La poussiĂšre et le sang descendus de nos cous. Un autre effacera de l’écorce du saule La poussiĂšre et le sang du prĂ©nom le plus doux. Un autre effacera de nos fĂ©briles reins La poussiĂšre et le sang descendus de nos cous. Un autre effacera de nos tables d’airains La poussiĂšre et le sang du prĂ©nom le plus doux. Un autre effacera de la peau de nos nuques Le bleuĂątre sillon de nos colliers d’écrous. Un autre effacera de nos tables caduques La creuse inscription du prĂ©nom le plus doux. Un autre effacera de la peau de nos reins Le bleuĂątre sillon des vieilles disciplines. Un autre effacera du sommet des collines Les noms jadis creusĂ©s au fil de nos burins. Un autre effacera de la peau de nos cous Le bleuĂątre sillon de nos colliers de force. Un autre effacera de notre vieille Ă©corce La marque du carcan et les traces des clous. Un autre effacera de nos colliers de force La marque des seuls jougs que nous aurons portĂ©s. Un autre effacera de notre dur Ă©corce La marque des seuls clous que nous aurons plantĂ©s. Un autre effacera du revers des coteaux La poussiĂšre et l’honneur du prĂ©nom le plus doux. Un autre effacera de l’écorce du houx Les noms jadis gravĂ©s au fil de nos couteaux. Un autre effacera de nos livres de peine La trace de la ronce et de la fleur de mai. Un autre effacera de l’écorce du chĂȘne La trace du seul nom que nous ayons aimĂ©. Un autre effacera de nos livres de haine La trace du chiendent, le grain de sĂ©nevĂ©. Un autre effacera de l’écorce du frĂȘne La trace du seul nom que nous ayons gravĂ©. Mais nul n’effacera de nos livres de peine La trace d’un Pater ni celle d’un Ave. Car nul n’effacera de l’écorce du chĂȘne La trace du tourment qui nous fut rĂ©servĂ©. Un autre effacera du profond de notre ĂȘtre La trace du tourment que nous avons bĂ©ni. Un autre effacera de l’écorce du hĂȘtre La morsure du bec et la paille et le nid. Un autre effacera du secret de notre ĂȘtre La trace du seul nom qui ne soit pas banni. Un autre effacera de l’écorce du hĂȘtre La griffure de l’ongle et la tiĂ©deur du nid. Un autre Ă©cartera des sept degrĂ©s du trĂŽne L’ñpre invocation du bras le plus tendu. L’autre effacera de l’écorce de l’aune La creuse inscription du nom le plus perdu. Un autre alignera ces deux qui vont ensemble. Et c’est l’homme et la femme et l’amour et la peine. Un autre effacera de l’écorce du tremble Ces chiffres que liait une Ă©ternelle chaĂźne. Un autre fixera dans sa premiĂšre forme Le seul ĂȘtre idĂ©al qu’un Ăąge ait dĂ©formĂ©. Un autre effacera de l’écorce de l’orme La trace du seul nom que nous ayons aimĂ©. Et ce n’est pas les yeux de nos maĂźtres charnels, Et ce n’est pas les yeux des professeurs d’histoire Que nous regarderont Ă  l’interrogatoire Quand nous serons assis sur les bancs Ă©ternels. Et ce n’est pas le poids qu’ils ont dans leurs balances Qui diront notre poids quand nous serons pesĂ©s. Et ce n’est pas leurs lois et leurs Ă©quipollences Qui feront encore loi quand nous serons jugĂ©s. Et ce n’est pas leur poids et leurs Ă©quivalences Qui diront notre poids quand nous serons pesĂ©s. Et ce n’est pas leurs lois et leurs doubles balances Qui fixeront le sort quand nous serons dosĂ©s. Et ce n’est pas leur poids et leurs contre-balances Qui pĂšseront alors l’ombre que nous serons. Et ce n’est pas leurs lois et leurs prix d’excellences Qui classeront alors le peu que nous ferons. Ce n’est pas dans leur tente et leur salle des prix Que tant de malheureux seront rĂ©compensĂ©s. Ce n’est pas leurs discours savamment balancĂ©s Qui nous ranimeront quand nous serons pĂ©ris. Ce n’est pas dans leur tente et leurs salles des prix Que le bien et le mal seront rĂ©compensĂ©s. Ce n’est pas leur musique et leurs pas cadencĂ©s Qui nous rĂ©voqueront quand nous serons pĂ©ris. Ce n’est pas dans leur tente et leurs salles des prix Que nous autres pĂ©cheurs prendrons nos rĂ©compenses. Ce n’est point vers leur face et vers leurs maigres panses Que nous apporterons notre pauvre dĂ©bris Ce n’est pas dans leur tente et leurs salles des prix Que nous autres faillis rĂ©glerons nos dĂ©penses. Ce n’est point vers leur face et leurs augustes panses Que nous apporterons notre pauvre mĂ©pris. Et ce n’est pas non plus Ă  monsieur le prĂ©fet Que nous apporterons le peu que nous ferons. C’est vers une autre cause et vers un autre effet Que nous apporterons le rien que nous serons. Et ce n’est pas leurs poids posĂ©s dans leurs balances Qui pĂšseront la poudre et la cendre et les vers. Et ce n’est pas leurs lois et leurs Ă©quipollences Qui doseront le sort de l’immense univers. Ce ne sont pas des bras tout chargĂ©s de Digestes Qui rameront pour nous sur nos derniers vaisseaux. Ce ne sont pas ces preux et ces porte-boisseaux Qui nous rattraperont avec leurs manifestes. Ce ne sont pas des bras tout chargĂ©s de Pandectes Qui rameront pour nous sur nos derniers trois-mĂąts. Ce ne sont pas ces gueux et ces porte-hamacs Qui nous rattraperont avec leurs analectes. Ce ne sont pas des bras tout chargĂ©s de glossaires Qui rameront pour nous sur nos derniers radeaux. Ce ne sont pas ces bleus et ces porte-badauds Qui nous rattraperont des mains garnisaires. Ce ne sont pas des bras tout chargĂ©s de lexiques Qui rameront pour nous sur une frĂȘle barque. Ce n’est pas leurs discours, fussent-ils syntaxiques, Qui plaideront pour nous prĂšs du plus grand monarque. Et ce n’est pas des bras pleins de dictionnaires Qui rameront pour nous sur nos derniers trois-mĂąts. Et ce n’est pas des jeux pleins de fonctionnaires Qui nous rĂ©chaufferont dans ces derniers frimas. Et ce n’est pas leurs poids dans leurs cages de verre Qui pĂšseront le sang qui fut versĂ© pour nous. Ce n’est pas leur balance avec des caoutchoucs Qui pĂšsera le sang versĂ© sur le Calvaire. Et ce n’est pas leurs poids chez les pharmaciens Qui pĂšseront l’offense et le pĂ©chĂ© mortel. Et ce n’est pas leurs lois chez les praticiens Qui laveront le sang sur le dernier autel. Et ce n’est pas leurs poids dans les laboratoires Qui pĂšseront la chute et leur rĂ©demption. Et ce n’est pas leurs lois dans les conservatoires Qui fermeront la lutte et la contrition. Et ce n’est pas leurs poids dans leurs laboratoires Qui pĂšseront l’orgueil et la contention. Et ce n’est pas leurs lois dans leurs conservatoires Qui fermeront le seuil sur la prescription. Ce n’est pas leurs bocaux chez les pharmaciens Qui recevront le sang qui fut versĂ© pour nous. Ce n’est pas leur locaux chez les praticiens Qui recevront le pli de nos humbles genoux. Ce n’est pas leurs balances de pharmaciens Qui diront notre poids quand nous serons pesĂ©s. Ce n’est pas leurs sentences de praticiens Qui diront notre sort quand nous serons dosĂ©s. Ce n’est pas leurs balances de prĂ©cision Qui diront notre poids quand nous serons pesĂ©s. Ce n’est pas leur sentence et leur dĂ©cision Qui diront notre sort quand nous serons dosĂ©s. Ce n’est pas l’apophtegme et les concisions Qui diront le seul mot quand nous serons pesĂ©s. Ce n’est point des calculs que nous invoquerons Le jour que nous serons offerts et adjugĂ©s. Ce n’est pas les articles du Code civil Que nous invoquerons dedans cette dĂ©tresse. Nos regards connaĂźtront un bien autre pĂ©ril. Nos regards chercheront une autre forteresse. Ce n’est pas les articles du Code pĂ©nal Que nous invoquerons dans ce dernier combat. Nos regards connaĂźtront un autre Tribunal. Nos regards chercheront un bien autre Avocat. Et ce n’est pas de toge et de robe et de toques Que nous nous couvrirons dans cet abaissement. Et ce ne sera pas ces porteurs de breloques Que nous invoquerons pour ce redressement. Et ce n’est pas du Code et de ses accessoires Que nous nous recouvrirons dans ce recueillement. Et non plus du Codex et de ses balançoires Que nous aurons couvert notre dĂ©pouillement. Et nos yeux chercheront pour l’ñme scĂ©lĂ©rate Une autre couverture, un autre couvrement. Et nos yeux chercheront pour ce recouvrement Le maternel manteau d’une illustre Avocate. Et nos yeux chercheront pour l’ñme candidate Une autre couverture, un autre couvrement. Et nos yeux chercheront pour ce recouvrement L’éblouissant manteau d’une jeune Avocate. Et nos yeux chercheront pour l’ñme renĂ©gate Une autre couverture, un autre couvrement. Et nos yeux chercheront pour ce recouvrement Le manteau de vertu d’une grande Avocate. Et nos yeux chercheront pour l’ñme laurĂ©ate Une autre couverture, un autre couvrement. Et nos yeux chercheront pour ce recouvrement Le manteau de candeur d’une belle Avocate. Advocata nostra, ce que nous chercherons, C’est le recouvrement d’un illustre manteau. Et spes nostra, salve, ce que nous trouverons, C’est la porte et l’accĂšs d’un illustre chĂąteau. Ce n’est pas dans leur tente et leurs lits d’ambulance Que nous nous coucherons pour notre Ă©ternitĂ©. Ce n’est pas dans leur poudre et leur pulvĂ©rulence Que nous retournerons dans notre inanitĂ©. Ce n’est pas leurs dĂ©lais et leurs atermoiements Qui nous ajournerons le jour du dernier jour. Ce n’est pas les relais de leurs apitoiements Le jour du dernier terme et du dernier amour. Et ce n’est pas leurs drogues de pharmaciens Qui guĂ©riront le mal dont nous sommes perclus. Et ce n’est pas leurs morgues de praticiens Qui fermeront le seuil dont nous sommes exclus. Un autre Ă©cartera des sept degrĂ©s du trĂŽne L’ñpre adjuration des bras les plus tendus. Un autre effacera de l’écorce de l’aune Jusqu’au tracĂ© des noms que nous avons perdus. Ce n’est pas dans leur tente et leurs lits d’ambulances Qu’on recoudra les bords d’une affreuse morsure. Ce n’est pas leur chloral coupĂ© de somnolence Qui nous endormira cette affreuse blessure. Ce n’est pas dans leur tente et leurs lits d’ambulance Le jour du dernier jour, que nous serons laissĂ©s. Ce n’est point par leur drogue et dans leur somnolence Que nous achĂšverons nos rĂȘves de blessĂ©s. Ce n’est pas des degrĂ©s de leur amphithéùtre Que descendra le verbe et la pĂ©roraison. La piĂšce se jouera pour un autre théùtre. Le rideau tombera pour une autre saison. Ce n’est pas des degrĂ©s de leur amphithéùtre Que montera l’hommage et la triple oraison. La piĂšce se jouera pour un autre théùtre. Le rideau tombera sur une autre maison. Ce n’est pas dans leur tente et leurs lits d’ambulance Et dans leur appareil que nous serons pansĂ©s. Ce n’est pas par leurs soins que seront dispensĂ©s Les sceaux du dernier jour et du dernier silence. Ce n’est pas leurs danseurs et leurs porte-sellettes Qui nous apporteront une aide fraternelle. Ce n’est pas leurs valseurs et leurs porte-palettes Qui nous dessineront une image Ă©ternelle. Ce n’est pas leurs masseurs et leurs porte-amulettes Qui passeront pour nous devant le divin juge. Ce n’est pas leurs brosseurs et leurs porte-Ă©paulettes Qui seront ce jour-lĂ  notre unique refuge. Ce n’est pas leurs caissiers et leurs porte-cassettes Qui passeront pour nous devant le divin juge. Ce n’est point leurs lanciers et leurs porte-musettes Qui seront notre garde et notre beau refuge. Ce n’est pas leurs moyens et leur jurisprudence Que nous invoquerons dans l’éternel dĂ©bat. Ce n’est pas leur sagesse et mĂȘme leur prudence Que nous Ă©voquons dans l’éternel combat. Ce n’est pas leurs massiers et leurs porte-serviettes Qui passeront pour nous devant le divin juge. Ce n’est pas leurs huissiers et leurs porte-mazettes Qui seront notre asile et notre beau refuge. Ce n’est point leurs museaux, fussent-ils symboliques, Qui se seront penchĂ©s sur le divin enfant. Ce n’est point leurs naseaux, fussent-ils bucoliques, Qui se seront penchĂ©s sur un roi triomphant. Ce n’est pas leurs dossiers, fussent de procĂ©dure, Que nous emporterons sur nos maigres Ă©paules. Ce n’est pas leurs aciers, fussent-ils de soudure, Qui nous gouverneront de l’un Ă  l’autre pĂŽles. Ce n’est pas leurs dossiers, fĂ»t-ce de procĂ©dure, Que nous emporterons sur notre maigre dos. Ce n’est pas leurs aciers, fussent-ils de soudure, Qui nous gouverneront sur nos derniers radeaux. Ce n’est pas leurs dossiers, fussent de procĂ©dures Que nous emporterons sur nos dĂ©biles reins. Ce n’est pas leurs aciers, fussent-ils de soudures Qui nous feront des lois et nos tables d’airains. Ce n’est pas leurs dossiers, fussent de procĂ©dure, Qui nous conserveront nos premiers parchemins. Ce n’est pas leurs aciers, fussent-ils de soudure, Que nous Ă©lĂšverons sur nos fragiles mains. Ce n’est pas leurs dossiers et leurs vases d’ordure Que nous emporterons dans nos derniers demains. Ce n’est pas leurs aciers, fussent de procĂ©dure, Qui nous gouverneront dans nos derniers chemins. Ce n’est pas leurs dossiers, fussent de procĂ©dure, Que nous emporterons aux rives Ă©ternelles. Ce n’est pas leurs aciers, fussent-ils de soudure, Qui nous cuirasseront nos barques solennelles. Ce n’est pas leurs dossiers, fussent de procĂ©dure, Que nous emporterons aux rives Ă©ternelles. Ce n’est pas leurs aciers, fussent-ils de soudure, Qui nous cuirasseront nos Ă©paves charnelles. Ce n’est pas leurs dossiers, fussent de procĂ©dure, Qui nous Ă©pargneront les derniers chĂątiments. Ce n’est pas leurs aciers, fussent-ils de soudure, Qui nous cuirasseront nos derniers bĂątiments. Ce n’est pas leurs tableaux, fussent de concordance, Qui nous accorderont quand nous serons discords. Ce n’est pas leur bedeaux et leurs maĂźtres de danse Qui nous feront vivants quand nous seront des morts. Ce n’est pas leurs tableaux, fussent de concordance, Qui nous Ă©tabliront nos suprĂȘmes accords. Ce n’est pas leurs badauds et leurs maĂźtres de danse Qui nous feront danser quand nous serons des morts. Ce n’est pas leurs greniers, fussent-ils d’abondance, Qui nous conserveront les septuples froments. Ce n’est pas leurs paniers et leurs maĂźtres de danse Qui nous feront danser dans nos derniers moments. Ce n’est pas leurs archets et leurs maigres cadences Qui nous emporteront, au pied du dernier fort. Ce n’est pas les dĂ©chets de leurs maĂźtres de danses Qui nous enlĂšveront, au seuil du dernier port. Ce n’est pas leurs cachets et leur antipyrine Qui nous auront nourri notre pauvre carcasse. Ce n’est pas les dĂ©chets de leur maigre farine Qui nous feront ramer sur notre galĂ©asse. Ce n’est pas ces cadets et leur salles d’attente Qui nous accrocheront au creux du dernier fort. Ce n’est pas ces baudets chacun portant sa tente Qui nous apporteront aux quais du dernier port. Ce n’est pas ces cadets en soufflant dans leur voile Qui nous accrocheront sur le dernier rebord. Ce n’est pas ces baudets et leurs tentes de toile Qui nous emporteront dans un dernier effort. Ce n’est pas leurs godets et leurs poudres de plĂątre Qui nous feront grimper le long du dernier fort. Ce n’est pas leurs genoux et leurs coudes d’albĂątre Qui nous feront ramer au seuil du dernier port. Ce n’est pas leur gondole et leurs joueurs de flĂ»tes Qui sauront nous poser sur un fragile bord. Ce n’est pas leur boussole et leurs porte-volutes Qui sauront nous trouver le lieu du dernier Nord. Et ce n’est pas leurs poids et leurs doubles pesĂ©es Qui diront notre poids dans une autre balance. Et ce n’est pas leurs lois et leurs billevesĂ©es Qui briseront le sceau des lĂšvres du silence. Et nous ne fierons riens qu’aux voiles de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a tissĂ©es. Et nous fierons rien qu’aux voiles de misĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a hissĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux voiles de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les tendues. Et nous ne fierons rien qu’aux voiles de misĂšre Par ce que c’est JĂ©sus qui nous les a pendues. Et nous ne fierons rien qu’aux voiles de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a rendues. Et nous ne fierons rien qu’aux voiles de misĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui les a dĂ©tendues. Et nous ne fierons rien qu’aux voiles de priĂšre Parce que JĂ©sus-Christ nous les avait prĂȘtĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux voiles de misĂšre Par ce que JĂ©sus-Christ les avait arrĂȘtĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux verbes de priĂšre Parce que JĂ©sus-Christ les avait entendus. Et nous ne fierons rien qu’aux verbes de misĂšre Parce que JĂ©sus-Christ les avait dĂ©pendus. Et nous ne fierons rien qu’aux vergues de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a clouĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux vergues de misĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a nouĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux vergues de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a croisĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux vergues de misĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a toisĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux voiles de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a carguĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux cordes de misĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a raguĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux voiles de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a lĂ©guĂ©es. Et nous n’enfilerons que de basses riviĂšres Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a draguĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux palmes de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a fleuries. Et nous ne fierons rien qu’aux palmes de misĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui les a dĂ©fleuries. Et nous ne fierons rien qu’aux palmes de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a donnĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux palmes de misĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui les a couronnĂ©es. Et nous ne fierons rien qu’aux grĂąces de priĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a tendues. Et nous ne fierons rien qu’aux grĂąces de misĂšre Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a rendues. Et nous ne nous fierons qu’aux grĂąces de priĂšre Parce qu’elle est du maĂźtre et du seigneur JĂ©sus. Et nous ne nous fierons qu’aux grĂąces de misĂšre Parce qu’elle est du PĂšre et du Fils absolus. Et ce n’est pas les voix des professeurs d’histoires, Il ne s’agira plus de voter, mes enfants, Et ce n’est pas les voix des professeurs de gloires Que nous allĂ©guerons dans nos accablements. Et ce n’est pas les voix des maĂźtres de mĂ©moires Qui classeront les purs avec les triomphants. Et ce n’est pas les poids des maĂźtres de grimoires Que nous invoquerons dans ces Ă©vĂšnements. Et ce n’est pas les voix des professeurs d’histoires Qui classeront le juste avec les triomphants. Et ce n’est pas les poids des maĂźtres de grimoires Que nous invoquerons pour nos avĂšnements. Et nous ne fierons rien qu’aux voiles Ă©ternelles Parce que c’est JĂ©sus qui nous les a tendues. Et nous ne fierons rien qu’aux attaches charnelles Parce que JĂ©sus-Christ nous les a dĂ©tendues. Et nous ne nous fierons qu’aux vergues Ă©ternelles Parce que c’est JĂ©sus qui noues les a pendues. Et nous ne fierons rien aux manƓuvres charnelles Parce que JĂ©sus-Christ nous les a dĂ©pendues. Et nous sommes tombĂ©s dans les filets de Pierre Parce que c’est JĂ©sus qui nous l’avait tendu. Et nous avons gardĂ© d’avoir un cƓur de pierre Parce que c’est JĂ©sus qui nous l’a dĂ©fendu. Et nous avons brĂ»lĂ© la bĂ»che de NoĂ«l Parce que c’est JĂ©sus qui nous l’avait fendue. Et nous avons aimĂ© ce peuple d’IsraĂ«l Parce qu’Anne et Marie en Ă©tait descendue. Et nous sommes tombĂ©s dans le filet de Pierre Parce que c’est JĂ©sus qui nous l’avait tendu. Et nous n’avons pas pu garder un cƓur de pierre Parce que c’est JĂ©sus qui nous l’avait fondu. Et ce ne sera pas ces frĂȘles greluchons Qui nous adorneront le jour du jugement. Et ce ne sera pas leurs pauvres baluchons Qui nous Ă©quiperont le jour du tremblement. Et ce ne sera pas ces frĂȘles greluchons Qui nous adorneront le jour du jugement. Et ce ne sera pas leur pauvres baluchons Qui nous transporteront notre humble chargement. Et ce ne sera pas ces frĂȘles greluchons Qui nous adorneront le jour du jugement. Et ce ne sera pas leurs pauvres balluchons Qui nous transporteront notre emmĂ©nagement. Et ce ne sera pas ces savants petits-maĂźtres Qui nous adorneront le jour du jugement. Et ce ne sera pas ces lamentables ĂȘtres Qui nous Ă©quiperont le jour du tremblement. Et ce n’est pas ces fils et ces jeunes gandins Qui nous adorneront le jour de la colĂšre. Et ce ne sera pas ces genets et ces daims, Le jour du rĂšglement et le jour du salaire. Et ce ne sera pas leurs illustres travaux Qui nous adorneront le jour de la colĂšre. Et ce ne sera pas ces poneys et ces veaux, Le jour du dernier prix et du dernier salaire. Et ce ne sera pas leur double ventricule Qui nous fera bondir le sang de notre cƓur. Et ce ne sera pas leur double clavicule Qui mettra notre Ă©paule au genou du vainqueur. Et ce ne sera pas leurs doubles oreillettes Qui nous feront bondir le sang de notre cƓur. Et ce ne sera pas leurs savantes layettes Qui mettront un enfant dans les stalles du chƓur. Et ce ne sera pas ces chefs du protocole Qui nous introduiront dans un siĂšcle plus beau. Ce n’est pas ces barbons et ces maĂźtres d’école Qui nous aligneront au sortir du tombeau. Ce n’est pas ces huissiers et ces introducteurs Qui nous introduiront dans un siĂšcle plus beau. Ce n’est pas ces massiers et ces ordonnateurs Qui nous aligneront au sortir du tombeaux. Ce n’est pas ces boursiers et ces grands amateurs Qui nous introduiront dans un monde nouveaux. Ce n’est pas ces peaussiers et ces profanateurs Qui nous aligneront dans un dernier caveau. Ce n’est pas ces glaciers et ces amateurs d’art Qui nous introduiront dans un siĂšcle plus beau. Ce n’est pas ces placiers et ces vendeurs de lard Qui prendront notre graisse au sortir du tombeau. Ce n’est pas ces merciers et ces vendeurs de nard Qui nous embaumeront notre vieille carcasse. Ce n’est pas ces taupiers et ces vendeurs de fard Qui nous ravaleront la peau de notre face. Ce n’est pas ces sorciers et ces appariteurs Qui nous feront entrer par la centrale porte. Ce n’est pas ces sourciers et ces solliciteurs Qui nous ranimeront notre carcasse morte. Et ce ne sera pas ces maĂźtres corroyeurs Qui feront un tapis des laines du troupeau. Ce n’est pas ces brossiers et ces maĂźtres tanneurs Qui sauront nous tanner le cuir avec la peau. Et ce ne sera pas ces maigres donateurs Qui seront Ă  genoux dans le coin du tableau. Et ce ne sera pas ces pauvres armateurs Qui lanceront la barque errante au fil de l’eau. Ce n’est pas ces lanciers et ces parfaits notables Qui veilleront sur nous le jour de cette veille. Ce n’est pas ces caissiers et ces parfaits comptables Qui payeront pour nous le jour de cette paye. Et nous sommes tombĂ©s dans le filet de Pierre Parce que c’est JĂ©sus qui nous l’avait lancĂ©. Et nous n’avons pas pu garder ce cƓur de pierre Parce que JĂ©sus-Christ nous l’avait dĂ©pensĂ©. Ce n’est pas leurs longs doigts et leurs ongles limĂ©s Qui nous arracheront des griffes du destin. Ce n’est pas les reliefs de leur maigre festin Qui ravitailleront des soldats dĂ©cimĂ©s. Ce n’est pas leurs beaux doigts et leurs ongles limĂ©s Qui nous arracheront des griffes du destin. Ce n’est pas les reliefs de leur maigre festin Qui nous rassasieront nos ventres abĂźmĂ©s. Ce n’est pas leurs doigts fins et leur ongles limĂ©s Qui nous arracheront des griffes du destin. Ce n’est pas les reliefs de leur maigre festin Qui nous redresseront nos corps inanimĂ©s. Ce n’est pas leur doigt mince et leurs ongles limĂ©s Qui nous arracheront des griffes du destin. Ce n’est pas les reliefs de leur maigre festin Qui nous ranimeront nos corps dĂ©sanimĂ©s. Ce n’est pas leurs moiteurs qui chercheront nos fiĂšvres Parmi les orangers et les myrtes Ă©pais. Ce n’est pas leur museaux que chercheront nos lĂšvres Pour venir y poser notre baiser de paix. Ce n’est pas leur tiĂ©deur qui chercheront nos fiĂšvres Parmi les nĂ©fliers et les myrtes Ă©pais. Ce n’est pas leurs museaux qui chercheront nos lĂšvres Pour venir nous donner notre baiser de paix. Ce n’est pas leur candeur qui trouveront nos lĂšpres À l’ombre des pommiers et du pĂ©chĂ© mortel. Ce n’est pas leurs museaux qui chanteront nos vĂȘpres Dans le dernier jardin sur le dernier autel. Ce n’est pas leur fadeurs qui trouveront nos fiĂšvres Parmi les cognassiers et le myrtes Ă©pais. Ce n’est pas leur museaux qui trouveront nos lĂšvres Pour y placer enfin notre baiser de paix. Ce n’est pas ces galants et ces parfaits gandins Qui viendront nous chercher dans notre pourriture. Ce n’est pas ces chalands et ces beaux muscadins Qui viendront nous chercher dans la boue et l’ordure. Ce n’est pas ces flamants et ces manche Ă  balais Qui nous balayeront notre vieille demeure. Et ce ne sera pas ces grotesques valets, Le jour du dernier terme et de la derniĂšre heure. Et ce ne sera pas ces maigres Ă©chassiers Qui viendront nous porter notre pauvre besace. Et ce ne sera pas ces pauvres carnassiers Qui viendront nous manger notre maigre carcasse. Et ce ne sera pas ces maigres besaciers Qui porteront pour nous nos sacs de pĂ©nitence. Et ce ne sera pas ces pauvres grimaciers, Le jour de la dĂ©tresse et de l’omnipotence. Et ce ne sera pas ces pauvres plumassiers Qui referont le lit de notre inadvertance. Et ce ne sera pas ces maigres terrassiers, Le jour de la justice et de la compĂ©tence. Ce n’est pas ces plumeaux et ces manche Ă  balais Qui nous balayeront le seuil de notre porte. Ce n’est pas ces grimauds et ces parfaits valets Qui nous repouilleront notre dĂ©pouille morte. Ce n’est pas ces marmots et ces manche Ă  balais Qui nous balayeront le devant de notre Ăąme. Et ces diseurs de mots et ces parfaits valets Qui nous inclineront aux pieds de Notre Dame. Et ce ne sera pas ces maĂźtres de relais Qui nous feront courir notre derniĂšre poste. Et ce ne sera pas ces maĂźtres des dĂ©lais Qui feront consumer le dernier holocauste. Ce n’est pas ces faquins et ces nobles varlets Qui nous introduiront dans la vieille demeure. Ce n’est pas ces coquins et ces maĂźtres de l’heure Qui nous introduiront dans le dernier palais. Et ce ne sera pas ces maĂźtres enquesteurs Qui viendront nous chercher dans la tombe oĂč nous sommes. Et ce ne sera pas ces maĂźtres requesteurs, Quand nous ne serons plus que de la cendre d’hommes. Et ce ne sera pas ces nobles terrassiers Qui viendront nous chercher dans la terre oĂč nous sommes. Et ce ne sera pas ces nobles poudriers, Quand nous ne serons plus que de la poudre d’hommes. Et ce ne sera pas ces maĂźtres des requĂȘtes Qui nous requĂȘteront combien nous sommes vils. Et ce ne sera pas ces maĂźtres des enquĂȘtes Qui nous enquĂȘteront dans nos Ă©tats-civils. Et ce ne sera pas ces maĂźtres des requĂȘtes Qui nous requĂȘteront dans les blĂ©s et les vignes. Et ce ne sera pas ces maĂźtres des enquĂȘtes Qui nous remontreront que nous sommes indignes. Et ce ne sera pas ces maĂźtres d’éloquence Qui parleront pour nous dans les derniers tournois. Et ce ne sera pas ces gens de consĂ©quence Qui nous harnacheront notre dernier harnois. Et ce ne sera pas ces maĂźtres d’éloquence Qui plaideront pour nous dans un dernier dĂ©bat. Et ce ne sera pas ces guerriers en vacance Qui se battront pour nous dans un dernier combat. Et ce ne sera pas ces maĂźtres du barreau Qui plaideront pour nous dans un dernier procĂšs. Et ce ne sera pas ces valets de bourreau Qui viendront nous crever notre dernier abcĂšs. Ce n’est pas leurs courants et leurs hautes frĂ©quences Qui nous fera jaillir le sang de nos artĂšres. Ce n’est pas leur bavette et leur grandiloquence Qui viendra nous chercher dans nos tacites terres. Ce n’est pas ces portiers et ces grands-chambellans Qui nous feront passer par la derniĂšre porte. Ce n’est pas ces courtiers avec leurs bras ballants Qui nous ramasseront notre dĂ©pouille morte. Ce n’est pas ces courtauds et ces portiers-consignes Qui nous feront passer dans nos appartements. Ce n’est pas ces rustauds et ces gardes-insignes Qui viendront nous chercher dans les dĂ©partements. Ce n’est pas ces badauds et ces messieurs trĂšs dignes Qui viendront nous chercher dans notre pourriture. Ce n’est pas ces bedeaux et ces porte-bouture Qui viendront nous chercher dans nos blĂ©s et nos vignes. Et ce ne sera pas ce maĂźtres des requĂȘtes Qui nous aligneront dans la derniĂšre ligne. Et ce ne sera pas ces maĂźtres des enquĂȘtes, Sous nos derniers drapeaux et sous un divin signe. Ce n’est pas ces portiers et ces grands-chambellans Qui nous feront passer dans la derniĂšre chambre. Ce n’est pas ces courtiers avec leur bras ballants, Par la porte de corne et par la porte d’ambre. Ce n’est pas ces portiers et ces grands-chambellans Par la porte d’ivoire et la porte de corne. Ce n’est pas ces courtiers avec leurs bras ballants, Par la porte de chĂȘne et par la porte d’orne. Ce n’est pas ces portiers et ces grands-chambellans Qui nous feront tourner le coin de cette borne. Ce n’est pas ces courtiers avec leurs bras ballants, Par la porte de hĂȘtre et la porte d’orne. Ce n’est pas ces portiers et leurs clefs dans le dos Qui nous feront sauter la derniĂšre serrure. Ce n’est pas ces courtiers et ces porte-ferrures Qui nous ramasseront les cendres de nos os. Une autre, une autre clef nous ouvrira la porte. Un autre porte-clefs en a tout un trousseau. Un autre garde-chef sous le dernier vousseau Regarde, et pense encore au lac de la Mer Morte. Une autre, une autre clef, faite d’une autre sorte, Nous rĂ©intĂ©grera dans le premier berceau. Un vieux avec sa barbe, assis sous un arceau, Regarde, et pense encore aux bords de la Mer Morte. Une autre, une autre clef, ouvrant une autre porte, Nous laissera passer. Un maĂźtre de pĂ©niche, Un vieux Ă  barbe blanche assis dans une niche Regarde, et pense encore au lit de la Mer Morte. Ce n’est pas leurs onguents et leurs pots de tisanes Qui nous ravaleront une carcasse usĂ©e. Ce n’est pas leurs ferments et leurs amours profanes Qui rĂ©animeront l’ñme dĂ©sabusĂ©e. Ce n’est pas ces drapiers et ces porte-rideaux Qui viendront nous border dans notre dernier lit. Ce n’est pas ces fripiers et ces porte-cadeaux Qui rĂ©animeront un corps enseveli. Ce n’est pas ces tripiers et ces porte-boyaux Qui viendront dĂ©mĂȘler le fil de nos entrailles. Ce n’est pas ces pompiers et ces porte-tuyaux Qui viendront nous chercher parmi nos funĂ©railles. Ce n’est pas ces tripiers et ces porte-boyaux Qui viendront dĂ©vider le fil de nos entrailles. Ce n’est pas ces taupiers et ces porte-boyaux Qui viendront nous chercher parmi nos funĂ©railles. Ce n’est pas ces croupiers et ces porte-rĂąteaux Qui nous ramasseront sur un dernier tapis. Ce n’est pas ces troupiers et ces derniers kĂ©pis Que l’on verra passer sur les derniers plateaux. Ce n’est pas ces lanciers et ces porte-couronnes Qui viendront nous chercher dans notre monument. Ce n’est pas ces messieurs et ces porte-colonnes Qui viendront nous chercher dans notre bĂątiment. De plus chastes vertus et non pas moins luronnes Viendront nous rĂ©veiller dans notre monument. De plus augustes mains et non pas moins patronnes Viendront nous relever dans notre bĂątiment. De plus hautes vertus et un peu moins baronnes Viendront nous rĂ©veiller dans notre monument. Des saintes bien en cour et non pas moins patronnes Viendront nous relever dans notre bĂątiment. Ce n’est pas ces drapiers et ces porte-rideaux Qui viendront nous fermer notre derniĂšre alcĂŽve. Mais la foi qui nous garde et la foi qui nous sauve Saura nous ramasser sur nos derniers radeaux. De plus chastes vertus un peu moins mijaurĂ©es Viendront nous ramasser dans notre pourriture. De plus augustes mains un peu moins dĂ©dorĂ©es Viendront nous ramasser dans la lĂšpre et l’ordure. Ce n’est pas ces gabiers et ces porte-lanternes Qui viendront nous veiller dans notre dernier lit. Ce n’est pas ces troupiers et ces portes-gibernes Qui rĂ©animeront un ĂȘtre enseveli. Ce n’est pas leurs barbiers et leur savon moderne Qui nous feront le poil, et le cuir et la peau. Et ce ne sera pas leurs pavillons en berne Qui nous remplaceront notre unique drapeau. Et ce ne sera pas ces portiers de caserne Qui nous installeront dans nos casernements. Et ce ne sera pas ces portiers de taverne Qui nous installeront dans nos gouvernements. Et ce ne sera pas ces buveurs de falernes Qui nous remplaceront le vin du dernier jour. Et ce ne sera pas ces buveurs de sauternes, Le vin du dernier sang et du dernier amour. Et ce ne sera pas ces buveurs d’ambroisies Qui nous remplaceront le vin du dernier jour. Et ce ne sera pas leurs bouteilles moisies, Le vin du sacrifice et du dernier amour. Et ce ne sera pas ces buveurs d’ambroisies Qui nous remplaceront le vin du dernier jour. Et ce ne sera pas leurs bouteilles choisies, Le sang du sacrifice et du dernier amour. Et ce ne sera pas ces garçons d’abattoir Qui nous ramasseront le sang du dernier jour. Et ce ne sera pas ces valets de comptoir Qui nous ramasseront notre dernier amour. Et ce ne sera pas ces maĂźtres de lavoir Qui sauront nous laver notre vieille guenille. Et ce ne sera pas ces fils d’une illustre famille Qui descendront pour nous la pente du guĂ©voir. Et ce ne sera pas ces maĂźtres de dortoir Qui viendront nous border dans des lits de prison. Et ce n’est pas ces fils d’une illustre maison Qui viendront nous chercher dans notre dĂ©potoir. Et ce ne sera pas ces princes du grattoir Qui nous remplaceront une autre signature. Et ce ne sera pas leurs cordons en sautoir Qui nous rattacheront notre double nature. Et ce ne sera pas ces fils d’apothicaires Qui nous ramasseront sur le bord d’un trottoir. Et ce ne sera pas ces mornes antiquaires Qui nous ramasseront au bas d’un accotoir. Et ce ne sera pas ces hauts fonctionnaires Qui nous ramasseront le long d’un dĂ©crottoir. Et ce ne sera pas ces sots factionnaires Qui heurteront la porte en levant le heurtoir. Et ce ne sera as leur traitement externe Qui nous fera sortir de notre pourriture. Et la foi qui nous sauve et seule nous discerne Saura nous retrouver dans la poudre et l’ordure. Et ce ne sera pas par leur usage externe Que nous nous lĂšverons de notre pourriture. Mais la foi qui nous sauve et seule nous discerne Saura nous retrouver dans la fange et l’ordure. Et ce ne sera pas leurs boĂźtes de conserve Qui feront notre espoir et notre nourriture. Mais la foi qui nous sauve et seule nous conserve Saura nous retrouver dans cette pourriture. Et ce ne sera pas leur extrĂȘme rĂ©serve Qui fera notre rĂšgle et notre nourriture. Mais la foi qui nous sauve et seule nous conserve Saura nous retrouver dans cette pourriture. Et ce ne sera pas leur suprĂȘme Ă©lĂ©gance Qui nous fera laisser le peu que nous savons. Et ce ne sera pas leur extrĂȘme arrogance Qui nous fera baisser les yeux que nous avons. Ce n’est pas leur tutelle et leurs augustes bourdes Qui nous dĂ©placeront la borne du chemin. Ce n’est pas leur chandelle et leurs lanternes sourdes Qui nous remplaceront le soleil de demain. Et ce n’est pas leur bore et leurs vapeurs de soufre Qui viendront nous blanchir de nos abjections. Et ce n’est pas leur chlore et leurs objections Qui viendront nous tirer du fond du dernier gouffre. Et ce n’est pas leur bore et leurs vapeurs de soufre Qui viendront nous blanchir nos derniers ossements. Et ce n’est pas leur chlore et leurs exhaussements Qui viendront nous tirer du fond du dernier gouffre. Ce n’est pas leurs talus et leurs adossements Qui feront un rempart Ă  notre humble poussiĂšre. Et ce ne sera pas ces porte-gibeciĂšre Qui nous ramasseront nos derniers ossements. Ce n’est pas leurs saluts et leurs endossements Qui payeront pour nous le jour de la contrainte. Et ce ne sera pas ces professeurs de crainte Qui nous ramasseront nos derniers ossements. Et ce ne sera pas ces porteurs de contraintes Qui payeront pour nous le jour de la saisie. Et ce ne sera pas ces professeurs d’étreintes, Le jour de la quittance et de l’apostasie. Et ce ne sera pas parmi leur labyrinthes Que nous Ă©garerons les pas que nous ferons. Et ce ne sera pas en suivant leurs empreintes Que nous disperserons le peu que nous serons. Et ce ne sera pas dans leurs maigres enceintes Que nous rassemblerons notre dernier dĂ©bris. Et ce ne sera pas ces professeurs d’astreintes Qui viendront nous chercher dans notre grand Paris. Et ce ne sera pas leurs pauvres fantaisies Qui nous feront entrer dans un siĂšcle plus beau. Et ce ne sera pas leurs plates frĂ©nĂ©sies Qui nous feront marcher au sortir du tombeau. Et ce ne sera pas leurs plates poĂ©sies Qui nous introduiront dans un siĂšcle nouveau. Et ce ne sera pas leurs pauvres hĂ©rĂ©sies Qui viendront nous chercher dans le dernier caveau. Et ce ne sera pas leurs maigres fantaisies Qui guideront nos pas vers un siĂšcle nouveau. Et ce ne sera pas leurs plates frĂ©nĂ©sies Qui viendront nous chercher dans un dernier caveau. Et ce ne sera pas parmi leurs aphasies Que nous rechercherons le Verbe nouveau-nĂ©. Et ce ne sera pas leurs paronomasies Qui nous baptiseront notre Verbe incarnĂ©. Et ce ne sera pas parmi leurs aphasies Que nous rechercherons le Verbe couronnĂ©. Et ce ne sera pas leurs paronomasies Qui nous baptiseront le Verbe unique-nĂ©. Et ce ne sera pas parmi leurs aphasies Que nous rechercherons le nom du mois de mai. Et ce ne sera pas leurs paronomasies Qui nous indiqueront le nom du bien-aimĂ©. Et ce ne sera pas leurs tonneaux d’ambroisie Qui nous remplaceront le vin du dernier jour. Et ce ne sera pas leur fleur de malvoisie, Le vin du dernier sang et du dernier amour. Et ce ne sera pas leurs analgĂ©sies Que nous demanderons l’oubli de la douleur. Et ce ne sera pas leurs anesthĂ©sies, L’oubli de la souffrance et l’oubli du malheur. Et ce ne sera pas leurs palingĂ©nĂ©sies Qui nous rĂ©veilleront d’entre les pĂąles morts. Et ce ne sera pas leurs hyperesthĂ©sies Qui nous feront sentir le plus horrible mors. Et ce ne sera pas parmi leurs amnĂ©sies Que nous rechercherons la plus haute mĂ©moire. Et ce ne sera pas dans leurs PolynĂ©sies Que nous rechercherons le temple de la gloire. Et ce ne sera pas dans leurs paralysies Que nous irons chercher le jeu de notre coude. Et ce ne sera pas dans leur cendre de soude Que nous irons laver nos pĂąles jalousies. Et ce ne sera pas dans leurs paralysies Que nous rechercherons le jeu de notre nuque. Et ce ne sera pas dans leurs hydropisies Que nous retrouverons une force caduque. Et ce ne sera pas dans leurs hydropisies Que nous retrouverons le sang de notre ventre. Et ce ne sera pas dans leurs hypocrisies Que nous retrouverons notre axe et notre centre. Et ce ne sera pas dans leurs paralysies Que nous rechercherons le jeu de nos genoux. Et nous ne mettrons pas dans leurs apostasies L’appareil de ce cƓur qui ne bat que pour vous. Et ce ne sera pas dans leur Aphrodisies Que nous irons veiller un misĂ©rable feu. Et ce ne sera pas dans leurs Dionysies Que nous demanderons ce que c’est que d’un Dieu. Et ce ne sera pas dans leur Papouasie Que nous rechercherons ce que c’est qu’un haut lieu. Mais c’est sur un haut lieu de l’éternelle Asie Que nous avons connu ce que c’est que d’un Dieu. Et ce n’est pas parmi leur Caucasie Que nous irons chercher un temple de la gloire. Mais c’est beaucoup plus prĂšs et dans notre Austrasie Que nous avons connu nos temples de mĂ©moire. Et ce ne sera pas parmi leur Malaisie Que nous irons chercher une Ăąme plus profonde. Et ce ne sera pas parmi leur SilĂ©sie Que nous irons placer la flĂšche unique au monde. Mais c’est beaucoup plus prĂšs, dans notre plate Beauce, Que nous avons dressĂ© la flĂšche inimitable. Et c’est ici tout prĂšs, dans une Ă©troite fosse, Que viendra nous chercher notre grand connĂ©table. Et ce ne sera pas parmi leurs hĂ©rĂ©sies Que nous rechercherons notre dernier destin. Et ce ne sera pas dans leurs MĂ©lanaisies Que nous verrons lever notre dernier matin. Et ce ne sera pas dans leur MicronĂ©sie Qu’on nous convoquera pour un dernier festin. Mais c’est beaucoup plus prĂšs, dans notre Tunisie, Que nous avons connu le grand saint Augustin. Et ce ne sera pas dans une Ăźle lointaine Qu’on sonnera pour nous notre suprĂȘme glas. Mais c’est beaucoup plus prĂšs, et dans notre Lorraine, Que nous avons connu le grand saint Nicolas. Et ce ne sera pas ces faussement paternes Qui nous remplaceront un pĂšre paternel Et ce ne sera pas leurs antiques lanternes Qui nous remplaceront le soleil Ă©ternel. Et ce ne sera pas leurs lampadaires ternes Qui nous remplaceront un soleil solennel. Et ce ne sera pas leurs grimaces paternes Qui nous remplaceront notre pĂšre Ă©ternel. Et ce ne sera pas ces simili faux frĂšres Qui nous remplaceront un frĂšre fraternel. Et ce ne sera pas leurs simili misĂšres Qui nous remplaceront un ventre maternel. Et ce ne sera pas leurs simili misĂšres Qui nous introduiront aux siĂšcles absolus. Et ce ne sera pas ces simili faux frĂšres Qui nous remplaceront notre frĂšre JĂ©sus. Et ce ne sera pas ces simili baigneurs Qui nous introduiront aux climats absolus. Et ce ne sera pas ces simili seigneurs Qui nous remplaceront notre seigneur JĂ©sus. Et ce ne sont pas ces simili fraudeurs Qui nous introduiront aux sources rĂ©solues. Et ce ne seront pas ces simili grandeurs Qui nous introduiront aux grandeurs absolues. Et ce ne sera pas leurs simili tendresses Qui nous remplaceront un mot de notre mĂšre. Et ce ne sera pas leurs simili dĂ©tresses Qui nous remplaceront une auguste misĂšre. Et ce ne sera pas leurs simili caresses Qui nous remplaceront les yeux de notre mĂšre. Et ce ne sera pas leurs simili dĂ©tresses Qui nous remplaceront une juste misĂšre. Et ce ne sera pas leurs savants aqueducs Qui nous remplaceront une source tarie. Et ce ne sera pas leurs miracles caducs Qui nous remplaceront notre mĂšre Marie. Et ce ne sera pas dans leurs bateaux-lavoirs Qu’on nous effacera la tache originelle. Et ce ne sera pas parmi leurs abreuvoirs Que nous Ă©tancherons notre fiĂšvre charnelle. Seule vous le savez nos soirs du mois de mai Ne valent pas le quart de vos plus durs dĂ©cembres. Et notre plus beau soir et le plus embaumĂ© N’est qu’un pĂąle reflet de vos mornes novembres. Et ce ne sera pas ces suprĂȘmes gandins Qui viendront nous chercher sous nos couches d’humus. Et ce ne sera pas ces genets et ces daims Qui viendront nous chanter un dernier orĂ©mus. Et ce ne sera pas ces maĂźtres de dĂ©dains Qui viendront nous chercher sous nos couches d’humus. Et ce ne sera pas ces professeurs soudains Qui viendront nous sonner un dernier angĂ©lus. Et ce ne sera pas ces allumeurs de gaz Qui viendront nous chercher dans nos pĂąles tĂ©nĂšbres. Ce n’est pas Joachaz et ce n’est pas Achaz Qui viendront nous chercher sur nos couches funĂšbres. Et ce ne sera pas ces pĂąles allumeurs Qui nous Ă©blouiront de l’éclat de leurs becs. Et ce ne sera pas sur le banc des rameurs Que nous nous chaufferons au feu de ces cƓurs secs. Et ce ne sera pas ces pĂąles rĂ©tameurs Qui nous radouberont notre dernier vaisseau. Et ce ne sera pas ces pĂąles embaumeurs Qui nous restitueront notre premier berceau. Et ce ne sera pas leurs pĂąles rĂ©verbĂšres Qui nous jalonneront notre dernier chemin. Et ce ne sera pas leurs vertus exemplaires Qui nous embaumeront notre dernier demain. Et ce ne sera pas Ă  leurs sens des affaires Que nous auront recours dans notre Ă©conomat. Et ce ne sera pas Ă  leurs calorifĂšres Que nous demanderons de nous faire un climat. Ce n’est pas leur entente et leurs sans des affaires Qui rameront pour nous sur nos derniers trois-mĂąts. Et ce ne sera pas Ă  leurs calorifĂšres Que nous nous chaufferons dans ces derniers frimas. Et ce ne sera pas Ă  leur goĂ»t des affaires Que nous fierons nos cƓurs et notre Ă©conomie. Et ce ne sera pas Ă  leurs calorifĂšres Que nous rĂ©chaufferons une peine endormie. et ce ne sera pas ces maigres donateurs qui viendront nous chercher dans nos pĂąles tĂ©nĂšbres. Et ce ne sera pas ces lourds ordonnateurs Qui nous encadreront dans leurs pompes funĂšbres. Et ce ne sera pas ces beaux archĂ©ologues Qui viendront nous chercher dans nos pĂąles dĂ©combres. Et ce ne sera pas ces savants mystagogues Qui viendront nous tirer du royaume des ombres. Et ce ne sera pas ces parfais nettoyeurs Qui viendront nous chercher parmi les dĂ©tritus. Et ce ne sera pas ces maĂźtres fossoyeurs Qui nous rĂ©citeront notre dernier Agnus. Et ce ne sera pas ces auteurs dĂ©licats Qui viendront nous chercher dans nos derniers humus. Et ce ne sera pas ces savants candidats Qui nous rĂ©citeront notre dernier Deus. Et ce ne sera pas ces robes d’avocats Qui viendront nous chercher dans nos derniers humus. Et ce ne sera pas ces parfaits renĂ©gats Qui forceront pour nous les portes du blocus. Ce n’est pas ces penseurs et ces hommes d’États Qui viendront nous chercher dans notre insuffisance. Et ce ne sera pas ces hardis potentats Qui nous mettront jamais au chemin de plaisance. Et ce ne sera pas ces courtauds de boutiques Qui viendront nous chercher dans notre nĂ©gligence. Et ce ne sera pas ces marquis authentiques Qui nous mettront jamais au chemin d’allĂ©geance. Et ce ne sera pas ces maĂźtres parfumeurs Qui viendront nous trier d’entre nos immondices. Et ce ne sera pas ces chercheurs de blandices Qui viendront nous tirer de nos mauvaises mƓurs. Et ce ne sera pas ces maigres chiffonniers Qui viendront nous trier les dĂ©chets de nos corps. Et ce ne sera pas ces grĂȘles nautonniers Qui viendront nous tirer d’entre les pĂąles morts. Et ce ne sera pas ces hommes d’importance Qui viendront ramasser notre dernier dĂ©bris. Ce n’est pas leur jactance et leur intermittence Qui viendra nous chercher dans notre vieux Paris. Et ce ne sera pas ces gens de consĂ©quence Qui viendront ramasser notre corps et notre Ăąme. Et ce ne sera pas ces maĂźtres d’éloquence Qui viendront nous chercher aux pieds de Notre Dame. Et ce ne sera pas ces gens d’extrĂȘmes goĂ»ts Qui viendront nous chercher dans notre inconsistance. Ce n’est pas leur jactance et leur belle prestance Qui viendra nous chercher dans le fond des Ă©gouts. Et ce ne sera pas leurs vieux fonds de citerne Qui nous remplaceront une source profonde. Et ce ne sera pas ces premiers rois du monde Qui nous feront passer la derniĂšre poterne. Et ce ne sera pas ces restants de citerne Qui nous remplaceront une source d’eau vive. Et ce ne sera pas leur pĂąle dĂ©fensive Qui nous fera passer la derniĂšre poterne. Et ce ne sera pas ces Ă©gouts de citerne Qui nous remplaceront une source profonde. Et ce ne sera pas ces illustres du monde Qui nous feront passer la derniĂšre poterne. Seule, nous le savons, une dure offensive Nous livrera la porte, et le pont, et la herse. Seule, nous le savons, une rude lessive Lavera les effets de ce double commerce. Seule, nous le savons, une dure offensive Nous livrera la porte et le pont du fossĂ©. Seule, nous le savons, une rude lessive Lavera le restant de ce double passĂ©. Seule, nous le savons, une dure offensive Nous livrer la porte et le pont du fossĂ©. Seule, nous le savons, une rude lessive Effacera les pas de l’ombre du passĂ©. Et ce ne sera pas ces chasseurs de casquettes Qui nous emporteront dans leurs maigres carniers. Et ce ne sera pas ces maĂźtres des requĂȘtes Qui viendront nous chercher dans nos pauvres charniers. Et ce ne sera pas ces chasseurs de casquettes Qui nous emporteront parmi leurs gibeciĂšres. Et ce ne sera pas ces maĂźtres des enquĂȘtes Qui nous feront lever de nos mornes glaciĂšres. Et ce ne sera pas ces colleurs d’étiquettes Qui se poseront sur nous la derniĂšre formule. Et ce ne sera pas ces chasseurs de conquĂȘtes Qui pĂšseront sur nous le gramme et le scrupule. Et ce ne sera pas ces courtiers de basoches Qui rĂ©gleront pour nous l’ordre de la procĂ©dure. Et ce ne sera pas ces chercheurs d’anicroches Qui viendront nous chercher dans le trouble et l’ordure. Et ce ne sera pas ces chasseurs de casquettes Qui nous emporteront parmi leurs gibeciĂšres Et ce ne sera pas ces joueurs de raquettes Qui viendront nous chercher dans nos humbles poussiĂšres. Et ce ne sera pas ces Ă©lĂ©gants bancroches Qui nous enseigneront ce que c’est que marcher. Et ce ne sera pas ces candides fantoches Qui nous enseigneront ce que c’est que pĂ©cher. Et ce ne sera pas ces essayeurs de roches Qui nous enseigneront l’ordre de la matiĂšre. Et ce ne sera pas leurs cinquantuples croches Qui nous rĂ©veilleront dans notre cimetiĂšre. Et ce ne sera pas ces dĂ©coupeurs de roches Qui nous rĂ©vĂ©leront le secret de matiĂšre. Et ce ne sera pas ces essayeurs de croches Qui nous rĂ©veilleront dans notre cimetiĂšre. Et ce ne sera pas tous ces vide-goussets Qui payeront pour nous de l’argent de nos poches. Et ce ne sera pas tous ces tourneurs de broches Qui nous enseigneront un ordre que je sais. Et ce ne sera pas tous ces passe-lacets Qui payeront pour nous le jour du dernier terme. Et ce ne sera pas ces frotteurs d’épiderme Qui nous enseigneront un terme que je sais. Et ce ne sera pas tous ces lace-corsets Qui nous arracherons de la derniĂšre Ă©treinte. Et ce ne sera pas ces porteurs de contrainte Qui nous enseigneront un terme que je sais. Et ce ne sera pas tous ces cache-corsets Qui nous arracheront d’un autre embrassement, Ce n’est pas leurs cordons et leur enlacement Qui nous enseigneront le seul nƓud que je sais. Et ce ne sera tous ces petits poucets Qui nous arracheront d’un autre enlacement. Et ce n’est pas leur botte et leur entassement Qui nous enseigneront le seul pas que je sais. Et ce ne sera pas tous ces petits poucets Qui nous apporteront des bottes de sept lieues Et ce ne sera pas ces nouveaux Barbe-Bleues Qui nous enseigneront un meurtre que je sais. Et ce ne sera pas tous ces petits poucets Qui nous arracheront de la maison de l’ogre. Ce n’est pas leur boussole et ce n’est pas leur dogre Qui nous enseignera le seul nord que je sais. Et ce ne sera pas tous ces petits poucets Qui nous installeront dans une autre chaumiĂšre. Ce n’est pas leurs cailloux et leur pauvre lumiĂšre Qui nous enseigneront un chĂąteau que je sais. Et ce ne sera pas tous ces petits poucets Qui nous installeront dans la candeur premiĂšre. Ce n’est pas leurs cailloux et leur pauvre lumiĂšre Qui nous enseigneront un jardin que je sais. Et ce ne sera pas tous ces petits poucets Qui nous transporteront dans de plus nobles cieux. Ce n’est pas leur lumiĂšre et leur main sur les yeux Qui nous enseigneront notre dernier palais. Et ce ne sera pas ces portiers d’anicroches Qui nous transporteront dans un unique lieu. Et ce ne sera pas tous ces courtiers bancroches Qui nous enseigneront Ă  marcher devant Dieu. Et ce ne sera pas tous ces dĂ©mĂ©nageurs Qui nous installeront notre dernier mĂ©nage. Et ce ne sera pas ces maĂźtres mĂ©nageurs Qui feront notre firme et notre patronage. Et ce ne sera pas ces porteurs de sacoches Qui nous introduiront par la porte d’érable. Et ce ne sera pas ces amateurs de croches Qui nous enseigneront un chƓur inaltĂ©rable. Et ce ne sera pas ces gros dĂ©mĂ©nageurs Qui nous emporteront notre pauvre mĂ©nage. Et ce ne sera pas tous ces maĂźtres nageurs Qui rameront pour nous dans le dernier naufrage. Et ce ne sera pas ces montants de guichets Qui nous encaisseront notre pauvre recette. Et ce ne sera pas ces fraudeurs de pĂ©chĂ©s Qui nous dĂ©caisseront l’argent de notre dette. Et ce ne sera pas dans leurs Ă©tuis-musettes Qu’ils nous transporteront le pain de chaque jour. Et ce ne sera pas dans leurs sacs d’amusettes Que nous transposerons notre dernier amour. Et ce ne sera pas dans leurs Ă©tuis-musettes Que nous transporterons le pain du dernier jour. Et ce ne sera pas dans leurs sacs d’amusettes Que nous transposerons notre premier amour. Et ce ne sera pas tous ces Petits Poucets Qui nous arracheront d’un grave enchaĂźnement. Et ce n’est pas leur trĂŽne et leur avĂšnement Qui nous arrachera la chaĂźne que je sais. Et ce ne sera pas ces hĂ©ros d’antichambres Qui nous introduiront dans un dernier rĂ©duit. Et ce ne sera pas ces simili Sicambres Qui nous feront passer dans le dernier dĂ©duit. Et ce ne sera pas ces hĂ©ros de bastilles Qui nous feront passer la Moselle et la Sambre. Et ce ne sera pas ces marchands de pastilles Qui nous ferons passer dans un dernier dĂ©cembre. Ce n’est pas ces cutters et ces chasse-marĂ©es Qui viendront nous chercher dans un sauvage port. Et ce ne sera pas leurs troupes chamarrĂ©es Qui viendront nous lever d’une sordide mort. Et ce ne sera pas tous ces caquets bons becs Qui nous remplaceront le triple Gloria. Et ce ne sera pas tous leur salamalecs Qui nous remplaceront un Ave, Maria. Et ce ne sera pas ces illustres blancs-becs Qui nous remplaceront le triple Hosanna. Et ce ne sera pas tous leurs salamalecs Qui nous remplaceront un Salve, regina. Et ce ne sera pas leurs illustres bons mots Qui nous remplaceront une auguste parole. Et ce ne sera pas ces beaux maĂźtres d’école Qui viendront nous chercher dans nos derniers hameaux. Et ce ne sera pas ces diseurs de bons mots Qui nous remplaceront une illustre parole. Et ce ne sera pas dans leurs maisons d’école Que nous apporterons l’oubli de tous les maux. Et ce ne sera pas ces faiseurs de bons mots Qui nous remplaceront une antique parole. Et ce ne sera pas ces beaux maĂźtres d’école Qui viendront nous chercher au fin fond des hameaux. Et ce ne sera pas leurs vagues hyperboles Qui nous remplaceront un authentique Verbe. Et ce ne sera pas leurs outils agricoles Qui nous auront liĂ© notre Ă©ternelle gerbe. Et ce ne sera pas ces amateurs de mots Qui nous remplaceront l’auguste parabole. Et ce ne sera pas leur comice agricole Qui nous remplacera notre jour des Rameaux Et ce ne sera pas ces inventeurs de gestes Qui viendront nous chercher nos corps involontaires. Et ce ne sera pas tous ces complĂ©mentaires Qui viendront nous chercher nos dĂ©plorables restes. Et ce ne sera pas ces dĂ©biteurs de gestes Qui viendront nous chercher nos corps Ă©lĂ©mentaires. Et ce ne sera pas tous ces supplĂ©mentaires Qui viendront nous chercher nos lamentables restes. Et ce ne sera pas ces professeurs de gestes Qui nous ramasseront nos corps sans commentaires. Et ce ne sera pas tous ces parlementaires Qui nous recueilleront nos misĂ©rables restes. Et ce ne sera pas ces raisonneurs de gestes Qui nous ramasseront nos corps hĂ©rĂ©ditaires. Et ce ne sera pas tous ces rĂ©glementaires Qui viendront nous chercher nos pĂ©rissables restes. Et ce ne sera pas ces connaisseurs de gestes Qui viendront nous chercher dans nos plus pauvres terres. Et ce ne sera pas tous ces propriĂ©taires Qui viendront nous chercher nos dĂ©testables restes. Et ce n’est pas leur chlore et leurs bains sulfureux Qui viendront nous blanchir notre pauvre carcasse. Et ce ne sera pas ces faiseurs de grimace Qui viendront nous chercher quand nous serons affreux. Et ce ne sera pas ces fĂącheux prĂ©tendants Qui banderont un arc dans le palais d’Ulysse. Et ce ne sera pas ces fameux intendants Qui boiront la lumiĂšre et le vin du calice. Et ce ne sera pas ces fĂącheux prĂ©tendants Qui banderont un arc dans le palais d’Ulysse. Et ce ne sera pas ces fameux intendants Qui boiront l’amertume et le sang du calice. Et ce ne sera pas ces fĂącheux prĂ©tendants Qui banderont un arc dans le palais d’Ulysse. Et ce ne sera pas ces fameux intendants Qui boiront la poussiĂšre et le sang du calice. Et ce ne sera pas ces grĂȘles soupirants Qui feront le pourchas de cette illustre veuve. Et ce ne sera pas ces frĂȘles aspirants Qui s’en iront lutter dans les roseaux du fleuve. Et ce ne sera pas ces grĂȘles soupirants Qui feront le pourchas d’une faussement veuve. Et ce ne sera pas ces frĂȘles aspirants Qui pourront triompher dans la derniĂšre Ă©preuve. Et ce ne sera pas ces grĂȘles aspirants Qui feront le pourchas d’une censĂ©ment veuve. Et ce ne sera pas ces frĂȘles aspirants Qui seront revĂȘtus de la tunique neuve. Et ce ne sera pas ces grĂȘles soupirants Qui feront le pourchas d’une prudente veuve. Et ce ne sera pas ces frĂȘles aspirants Qui seront revĂȘtus d’une naissance neuve. Et ce ne sera pas ces grossiers soupirants Qui verront le pourchas de la plus fine toile. Et ce ne sera pas ces grossiers aspirants Qui verront se lever la plus candide Ă©toile. Et ce ne sera pas ces grossiers prĂ©tendants Qui verront le pourchas d’une faussement toile. Et ce ne sera pas ces grossiers intendants Qui rangeront le mĂąt d’avec la toile Ă  voile. Et ce ne sera pas ces grossiers soupirants Qui verront le pourchas d’une prudente toile. Et ce ne sera pas ces grossiers aspirants Qui verront se lever le plus candide voile. Et ce ne sera pas ces brumeux prĂ©tendants Qui feront le pourchas d’une autre PĂ©nĂ©lope. Et ce ne sera pas ces fameux intendants Qui sauront se sortir de l’antre du Cyclope. Ce n’est pas ces prĂ©teurs et ces inaccessibles Qui nous introduiront dans un dernier État. Ce n’est pas ces questeurs et ces inamovibles Qui nous feront entrer dans le dernier sĂ©nat. Ce n’est pas ces galants et ces beaux tĂ©nĂ©breux Qui viendront nous chercher dans notre turpitude. Ce n’est pas ces savants et ces maĂźtres d’étude Qui viendront nous chercher quand nous seront affreux. Ce n’est pas leur peau mate et leur face polie Qui viendra nous chercher dans notre enterrement. Ce n’est pas leur peau plate et leur effarement Qui viendra nous lever notre mĂ©lancolie. Ce n’est pas leur peau grasse et leur lĂšvre jolie Qui viendra nous chercher dans notre enterrement. C’est n’est pas leur peau basse et leur effleurement Qui viendra nous lever notre mĂ©lancolie. Ce n’est pas un poignard dans une panoplie Qui combattra pour nous un suprĂȘme combat. Et ce ne sera pas leur Ă©ternel dĂ©bat Qui viendra nous lever notre mĂ©lancolie. Ce n’est pas ces nerveux et ces beaux soupirants Qui viendront nous chercher dans nos dĂ©positoires. Et ce ne sera pas nos professeurs d’histoires Qui feront le cortĂšge et dĂ©feront les rangs. Ce n’est pas ces verveux et tous ces museaux secs Qui viendront nous chercher dans nos anciens espaces. Et ce ne sera pas nos professeurs de grecs Qui rĂ©gleront la pompe et marqueront les places. Et ce ne sera pas tous ces tĂ©lĂ©pathiques Qui viendront nous chercher dans notre isolement. Et ce ne sera pas tout leur affolement Qui pourra soulever nos membres apathiques. Ce n’est pas ces fameux prestidigitateurs Qui viendront nous chercher dans notre Ă©loignement. Et ce ne sera pas tout leur besognement Qui les empĂȘchera d’ĂȘtre des amateurs. Ce n’est pas ces fiĂ©vreux et ces agitateurs Qui viendront nous chercher dans notre solitude. Et ce ne sera pas leur Ă©ternelle Ă©tude Qui les empĂȘchera d’ĂȘtre des orateurs. Ce n’est pas ces crĂ©meux et ces grands gĂ©ographes Qui viendront nous chercher dans des pays perdus. Ce n’est pas ces spumeux et ces beaux cartographes Qui pourront soulever nos membres dĂ©tendus. Ce n’est pas ces vitreux et ces machinateurs Qui remettront en route un mĂ©canisme usĂ©. Ce n’est pas ces cercleux et ces profanateurs Qui baiseront les mains d’un Dieu dĂ©sabusĂ©. Ce n’est pas ces gommeux et ces beaux topographes Qui sauront nous trouver l’impĂ©rissable lieu. Ce n’est pas ces messieurs et ces lexicographes Qui sauront nous trouver l’inaltĂ©rable Dieu. Et ce ne sera pas ces historiographes Qui viendront nous chercher par des chemins rompus. Et ce ne sera pas ces tourneurs de carafes Qui viendront soulever nos membres corrompus. Et ce ne sera pas ces graveurs d’épitaphes Qui nous feront passer les ponts interrompus. Et ce ne sera pas ces auteurs d’autographes Qui viendront soulever nos membres corrompus. Et ce ne sera pas ces maĂźtres d’orthographes Qui nous feront passer par les ponts suspendus. Et ce ne sera pas ces auteurs de paraphes Qui pourront soulever nos membres dĂ©tendus. Et ce ne sera pas ces faiseurs d’épigraphes Qui nous introduiront Ă  la source de l’ĂȘtre. Et ce ne sera pas ces stĂ©nobiographes Qui viendront nous chercher dans la ronce et le hĂȘtre. Et ce ne sera pas ces tĂ©lĂ©phonographes Qui nous introduiront aux racine de l’ĂȘtre. Et ce ne sera pas ces stĂ©nologographes Qui viendront nous chercher dans la ronce et le hĂȘtre. Et ce ne sera pas leurs jeux interrompus. Qui nous feront gagner la partie Ă©ternelle. Et ce ne sera pas leur vigueur solennelle Qui pourra nous lever nos membres corrompus. Et ce ne sera pas leurs mots interrompus Qui nous feront gagner la centrale partie. Et ce ne sera pas leur vigueur dĂ©partie Qui pourra soulever nos membres corrompus. Et ce ne sera pas leurs savants pronostic Qui nous rĂ©vĂ©leront notre dernier demain. Et ce ne sera pas leurs gestes et leurs tics Qui nous relĂšveront de la main Ă  la main. Et ce ne sera pas leurs savants pronostics Qui nous dĂ©voilerons notre dernier demain. Et ce ne sera pas leurs gestes et leurs tics Qui nous mettront l’obole au creux de notre main. Et ce ne sera pas leurs fĂącheux pronostics Qui nous feront lever notre dernier demain. Et ce ne sera pas leurs gestes et leurs tics Qui viendront nous chercher et nous prendre la main. Et ce ne sera pas leurs douteux pronostics Qui nous Ă©claireront notre dernier demain. Et ce ne sera pas leurs gestes et leurs tics Qui viendront nous laver le sang de notre main. Et ce ne sera pas leurs savantes tactiques Qui nous emporteront dans un dernier dĂ©bat. Et ce ne sera pas leurs creuses balistiques Qui nous feront gagner dans un dernier combat. Et ce ne sera pas leurs basses politiques Qui nous emporteront dans un dernier fossĂ©. Et ce ne sera pas leurs simili mystiques Qui nous emporteront dans un dernier passĂ©. Et ce ne sera pas leurs honteuses tactiques Qui nous emporteront dans un dernier assaut. Et ce ne sera pas leurs vaines balistiques Qui nous feront sauter dans un dernier ressaut. Et ce ne sera pas leurs douteuses pratiques Qui nous emporteront dans un dernier Ă©lan. Ce n’est pas leur programme et ce n’est pas leur plan Qui nous remplaceront nos dures dogmatiques. Et ce ne sera pas leurs molles pragmatiques Qui nous emporteront dans un dernier assaut. Et ce ne sera pas leurs gestes hiĂ©ratiques Qui nous feront sauter le pas du dernier saut. Et ce ne sera pas leurs airs diplomatiques Qui nous emporteront dans un dernier assaut. Et ce ne sera pas leurs tons Ă©nigmatiques Qui nous distingueront l’honnĂȘte homme et le sot. Et ce ne sera pas ces portants de théùtre Qui nous transporteront dans le dernier dĂ©cor. Et ce n’est pas leurs trucs et leurs gestes d’albĂątre Qui nous remplaceront notre dernier trĂ©sor. Et ce ne sera pas ces distinguĂ©s cloportes Qui viendront nous chercher dans notre enterrement. Ce n’est pas leur dĂ©tresse et leur dĂ©labrement Qui nous fera passer le seuil des doubles portes. Et ce ne sera pas ces distinguĂ©s cloportes Qui viendront nous chercher dans notre enterrement. Ce n’est pas leur dĂ©tresse et leur Ă©garement Qui nous fera quitter nos lits de feuilles mortes. Et ce ne sera pas ces distinguĂ©s cloportes Qui viendront nous chercher dans notre enterrement. Ce n’est pas leur dĂ©tresse et leur effarement Qui nous rassembleront en de pĂąles cohortes. Et ce ne sera pas ce distinguĂ©s cloportes Qui viendront nous chercher dans notre enterrement. Ce n’est pas leur dĂ©tresse et leur effondrement Qui nous assembleront en furtives cohortes Et ce ne sera pas ces distinguĂ©s cloportes Qui viendront nous chercher dans notre enterrement. Ce n’est pas leur dĂ©tresse et leur dĂ©sƓuvrement Qui se promĂšnera sur nos dĂ©pouilles mortes. Et ce ne sera pas ces puissants mille-pieds Qui se promĂšneront parmi nos pĂąles faces. Et ce ne sera pas ces illustres troupiers Qui nous ramasseront nos sordides carcasses. Et ce ne sera pas ces troublants mille-pieds Qui se promĂšneront sur nos augustes faces. Et ce ne sera pas ces candides troupiers Qui viendront nous lever nos dĂ©biles carcasses. Et ce ne sera pas ces puissants mille-pattes Qui viendront nous chercher dans notre enterrement. Et ce ne sera pas ces troublants acrobates Qui nous dĂ©mĂȘleront notre enchevĂȘtrement. Ce n’est pas ces peau glabre et ces faces rasĂ©es Qui viendront nous chercher sous les myrtes Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres Ă©crasĂ©es Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Ce n’est pas ces peau moite et ces lĂšvres brasĂ©es Qui viendront nous chercher sous les lauriers Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs faces abrasĂ©es Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces chambellans Ă©pais Qui viendront nous chercher dans les maisons rĂ©gnantes. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres rĂ©pugnantes Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces buveurs de tisanes Qui viendront nous chercher sous les hĂȘtres Ă©pais. Et ce ne sera pas Ă  des baisers profanes Que nous demanderons notre baiser de paix. Et ce ne sera pas cette bande charnelle Qui viendra nous chercher sous les beaux orangers. Et ce ne sera pas ces pauvres horlogers Qui nous remonteront une horloge Ă©ternelle. Et ce ne sera pas ces nobles Ă©trangers Qui nous boulangeront le pain de chaques jours. Et ce ne sera pas ces pauvres boulangers Qui nous cuiront le pain des terrestres amours. Et ce ne sera pas ces nobles Ă©trangers Qui nous boulangerons le pain de chaques jours. Et ce ne sera pas ces pauvres boulangers Qui nous cuiront le pain des charnelles amours. Et ce ne sera pas ces nobles Ă©trangers Qui nous boulangeront des pains insaisissables. Et ce ne sera pas ces pauvres boulangers Qui nous cuiront le pain des amours pĂ©rissables. Et ce ne sera pas ces nobles Ă©trangers Qui nous boulangerons le pain des autres jours. Et ce ne sera pas ces pauvres boulangers Qui nous cuiront le pain des cĂ©lestes amours. Et ce ne sera pas ces nobles Ă©trangers Qui nous boulangeront le pain des derniers jours. Et ce ne sera pas ces pauvres boulangers Qui verseront le vin des divines amours. Et ce ne sera pas ces nobles Ă©trangers Qui nous effaceront la tache originelle. Et ce ne sera pas ces pauvres boulangers Qui nous cuiront le pain d’une amour Ă©ternelle. Et ce ne sera pas ces pauvres solennels Qui viendront nous chercher sous les beaux orangers. Et ce ne sera pas ces pauvres horlogers Qui feront tourner l’heure aux cadrans Ă©ternels. Et ce ne sera pas ces demi-criminels Qui viendront nous chercher dans une entiĂšre mort. Et ce ne sera pas ces demi-colonels Qui sauront emporter l’indivisible fort. Et ce ne sera pas ces faux passionnels Qui sauront emporter le cƓur de la maison. Et ce ne sera pas ces faux rationnels Qui sauront emporter le cƓur de la raison. Et ce ne sera pas ces faux passionnels Qui sauront saluer le cƓur de leur saison. Et ce ne sera pas ces faux rationnels Qui sauront saluer le cƓur de la raison. Et ce ne sera pas ces unipersonnels Qui sauront saluer une triple personne. Et ce ne sera pas ces faussement charnels Qui sauront recevoir une fausse couronne. Et ce ne sera pas ces faux confraternels Qui reviendront jamais dans la maison du pĂšre. Et ce ne sera pas un illustre confrĂšre Qui fera tourner l’heure aux cadrans Ă©ternels. Et ce ne sera pas ces illustres faux frĂšres Qui rentreront jamais aux jardins fraternels. Et ce ne sera pas ces augustes compĂšres Qui feront tourner l’heure aux cadrans Ă©ternels. Et ce ne sera pas leur pauvre ritournelle Qui nous rĂ©veillera sous les beaux orangers Et ce ne sera pas ces pauvres horlogers Qui nous remonteront une horloge Ă©ternelle. Et ce sera la voix d’une autre villanelle Qui nous rĂ©veillera sous les arceaux lĂ©gers. Et ce ne sera pas ces pauvres horlogers Qui nous remonteront une horloge Ă©ternelle. Et ce ne sera pas ces fausses sentinelles Qui garderont la rive et le suprĂȘme bord. Et ce ne sera pas leurs gilets de flanelles Qui sauront les sauver du baiser de la mort. Et ce ne sera pas ces pĂąles sentinelles Qui garderont Ninive et la plus haute porte. Et ce ne sera pas leurs gilets de flanelles Qui sauront les sauver de cette Ă©treinte morte. Et ce ne sera pas ces blĂȘmes sentinelles Qui crieront le Qui-Vive au faĂźte de ce fort. Et ce ne sera pas leurs gilets de flanelles Qui sauront les sauver du frisson de la mort. Et ce ne sera pas ces louches sentinelles Qui garderont l’ogive et les crĂ©neaux du fort. Et ce ne sera pas leurs gilets de flanelles Qui sauront les sauver des lĂšvres de la mort. Et ce ne sera pas ces beaux polichinelles Qui sauteront la rampe et les derniers trĂ©teaux. Et ce ne sera pas leur ailes de pĂ©ronnelles Qui les embarqueront sur les derniers bateaux. Et ce ne sera pas ces hommes de théùtres Qui viendront nous chercher parmi la pimprenelle. Et ce ne sera pas ces faussement folĂątres Qui viendront dĂ©ranger la ronde coccinelle. Et ce ne sera pas ces hommes de morale Qui viendront nous chercher sous les vertes tonnelles. Et ce ne sera pas ces Ăąmes en spirale Qui sauront s’égarer dans les vieilles venelles. Et ce ne sera pas ces hommes de serment Qui viendront nous chercher dans notre dormitoire. Et ce ne sera pas nos professeurs d’histoire Qui viendront nous chercher dans notre enterrement. Ce n’est pas ces monteurs et ces mĂ©caniciens Qui nous remonteront nos vieilles mĂ©caniques. Ce n’est pas ces docteurs et ces statisticiens Qui pourront nous sauver de nos terreurs paniques. Ce n’est pas ces monteurs et ces mĂ©caniciens Qui nous remonteront une vieille machine. Ce n’est pas ces compteurs et ces statisticiens Qui nous assoupliront une grinçante Ă©chine. Ce n’est pas ces compteurs et ces mĂ©caniciens Qui nous remonteront de raides mĂ©canismes. Ce n’est pas ces graisseurs et ces Ă©lectriciens Qui nous assouplirons nos raides rhumatismes. Et ce ne sera pas ces pĂąles faces rases Qui viendront nous chercher sous les charmes Ă©pais. Et ce ne sera pas ces constructeurs de phrases Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces faiseurs d’antiphrases Qui viendront nous chercher sous des ombres Ă©paisses. Et ce ne seront pas leurs molles paraphrases Qui viendront dĂ©couper le genre et les espĂšces. Et ce ne sera pas leurs sottes pĂ©riphrases Qui viendront nous chercher sous les ormes Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs timides emphases Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces hardis mousquetaires Qui viendront nous chercher dans notre enterrement. Et ce ne sera pas tous leur accoutrement Qui viendra nous chercher dans le fond de nos terres. Et ce ne sera pas ces vaillants mousquetaires Qui viendront nous chercher dans notre accoutrement. Et ce ne sera pas leur enchevĂȘtrement Qui viendra nous chercher dans nos derniĂšres terres. Et ce ne sera pas ces apprentis notaires Qui viendront nous chercher dans notre enterrement. Et ce ne sera pas tout l’enregistrement Qui viendra nous chercher dans nos plus basses terres. Et ce ne sera pas ces grands navigateurs Qui nous ramasseront sur une seule barque. Et ce ne sera pas ces beaux instigateurs Qui rĂ©pondront pour nous devant le seul monarque. Et ce ne sera pas ces sonneurs de fanfares Qui viendront nous sonner le rĂ©veil du matin. Et ce ne sera pas tout ces gardiens de squares Qui nous introduiront dans le dernier jardin. Et ce ne sera pas ces sonneurs de fanfares Qui nous rĂ©veilleront dans un dernier matin. Et ce ne sera pas tous ces gardiens de squares Qui nous feront passer la grille du jardin. Et ce ne sera pas ces gardiens de musĂ©es Qui viendront nous chercher sous les hĂȘtres Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres amusĂ©es Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas leurs faces polissonnes Qui viendront nous chercher sous les chastes cyprĂšs. Et ce ne sera pas leur lĂšvres mollassonnes Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces pompiers de services Qui viendront nous chercher dans les derniers portants. Et ce ne sera pas ces hommes importants Qui dĂ©partageront les vertus et les vices. Et ce ne sera pas ces grands metteurs en scĂšnes Qui viendront nous chercher sous les myrtes Ă©pais. Et ce ne sera pas Ă  leurs lĂšvres obscĂšnes Que nous demanderons notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces pompiers de services Qui viendront nous chercher dans les derniers portants. Et ce ne sera pas ces hommes importants Qui viendront dĂ©couper les vertus et les vices. Et ce ne sera pas ces grands metteurs en scĂšne Qui nous convoqueront sur un dernier plateau. Et ce ne sera pas de leur dernier bateau Que Pierre jettera les mailles de la senne. Et ce ne sera pas ces faces glacĂ©es Que nos yeux s’ouvriront sous les myrtes Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres dĂ©lacĂ©es Que viendra nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas leurs faces lassĂ©es Que nos yeux s’ouvriront sous les lauriers Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres passĂ©es Que nous demanderons notre baiser de paix. Et ce ne sera pas Ă  ces faces tassĂ©es Que nos yeux s’ouvriront sous les hĂȘtres Ă©pais. Et ce ne sera pas Ă  leurs lĂšvres cassĂ©es Que nous demanderons notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces revendeurs d’issues Qui viendront nous chercher sous les chastes cyprĂšs. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres dĂ©cousues Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas parmi leurs pĂąles faces Que nos yeux s’ouvriront sous les ormes Ă©pais. Et ce n’est pas leurs dents et leurs lĂšvres molasses Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas devant leurs pĂąles faces Que nos yeux s’ouvriront sous les hĂȘtres Ă©pais. Et ce n’est pas leurs dents et leurs lĂšvres cocasses Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces buveurs de lavasses Qui viendront nous chercher sous les rameaux Ă©pais. Et ce n’est pas leurs dents et leurs lĂšvres bonasses Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces faiseurs de grimaces Qui viendront nous chercher sous les graves cyprĂšs. Et ce ne sera pas Ă  ces lĂšvres trop grasses Que nous demanderons notre baiser de paix. Et ce n’est pas ces faussement tenaces Qui viendront nous chercher sous les charmes Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres de menaces Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces faces harassĂ©es Qui viendront nous chercher dans des repos Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres dĂ©classĂ©es Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Ce n’est pas ces geĂŽliers et ces pisciculteurs Qui viendront nous chercher dans nos tombes encloses. Ce n’est pas ces tĂŽliers et ces aviculteurs Qui viendront nous chercher dans nos fosses reposes. Ce n’est pas ces poĂȘliers et ces apiculteurs Qui viendront nous chercher dans nos tombes dĂ©closes. Ce n’est pas ces toiliers et ces agriculteurs Qui viendront nous chercher sous la ronce et les roses. Ce n’est pas ces gabiers et ces viticulteurs Qui viendront nous chercher parmi les passeroses. Ce n’est pas ces barbiers et ces horticulteurs Qui nous dĂ©laceront des lilas et des roses. Ce n’est pas ces tuiliers et ces sylviculteurs Qui viendront nous chercher parmi les lauriers-roses. Et ce ne sera pas ces mornes inspecteurs Qui nous dĂ©laceront de la ronce et des roses. Et ce ne sera pas ces mornes producteurs Qui nous feront entrer dans un dernier partage. Et ce ne sera pas ces mornes conducteurs Qui nous feront passer par un dernier village. Et ce ne sera pas ces mornes traducteurs Qui nous feront passer par un dernier langage. Et ce ne sera pas ces pauvres sĂ©ducteurs Qui nous disloqueront notre pauvre mĂ©nage. Et ce ne sera pas ces fameux capitaines Qui nous emporterons dans la derniĂšre place. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui viendront essuyer notre derniĂšre face. Et ce ne sera pas ces fameux capitaines Qui nous emporteront la place auguste et forte. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui viendront ramasser notre dĂ©pouilles morte. Et ce ne sera pas ces galants capitaines Qui nous emporteront la place unique et forte. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui nous ramasseront la chair stupide et morte. Et ce ne sera pas ces vaillants capitaines Qui nous emporteront la place chaste et forte. Et ce ne sera pas ces gantĂ© de mitaines Qui viendront essuyer la peau bleuĂątre et morte. Et ce ne sera pas ces grĂȘles capitaines Qui nous emporteront la place grave et forte. Et ce ne sera pas ces gantĂ© de mitaines Qui nous dĂ©fonceront une derniĂšre porte. Et ce ne sera pas ces frĂȘles capitaines Qui nous emporterons la place pauvre et forte. Et ce ne sera pas ces gantĂ© de mitaines Qui sauront rassembler la derniĂšre cohorte. Et ce ne sera pas ces maigres capitaines Qui nous emporteront la place noble et forte. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui viendront nous laver des traces du cloporte. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui nous emporteront la place nue et forte. Et ce ne sera pas des gens de cette sorte Que nous reconnaĂźtrons pour des grands capitaines. Et ce ne sera pas ces hardis capitaines Qui nous emporteront l’auguste forteresse. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui nous arracheront d’une juste dĂ©tresse. Et ce ne sera pas ces hardis capitaines Qui nous emporteront la haute forteresse. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui nous arracheront d’une basse dĂ©tresse. Et ce ne sera pas ces hardis capitaines Qui nous emporteront la chaste forteresse. Et ce ne sera pas ces gantĂ© de mitaines Qui nous arracheront d’une impure dĂ©tresse. Et ce ne sera pas ces hardis capitaines Qui nous emporteront la droite forteresse. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui nous arracheront d’une pauvre dĂ©tresse. Et ce ne sera pas ces hardis capitaines Qui nous emporteront la roide forteresse. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui nous arracheront d’une molle dĂ©tresse Et ce ne sera pas ces hardis capitaines Qui nous emporteront la place unique au monde. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s de mitaines Qui viendront nous chercher dans la vase profonde. Et ce ne sera pas ces hardis capitaines Qui nous emporteront la place unique au monde. Et ce ne sera pas ces plongeurs en mitaines Qui viendront nous chercher sous la vague profonde. Et ce ne sera pas ces hardis capitaines Qui nous emporteront sur leurs musculatures. Et ce ne sera pas ces gantĂ©s en mitaines Qui viendront nous chercher dans nos maculatures. Et ce ne sera pas ces pauvres frĂ©nĂ©tiques Qui viendront nous chercher sous les myrtes Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs faces fanatiques Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces aristotĂ©liques Qui viendront nous chercher sous les lauriers Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres famĂ©liques Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Une autre, une autre lĂšvre un peu plus catholique Mettra sur nos deux yeux notre baiser de paix. Une main moins aveugle et plus apostolique Saura nous retrouver sous les hĂȘtres Ă©pais Et ce n’est pas ces dents et ces lĂšvres flĂ©tries Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces enquĂȘteurs Ă©pais Qui viendront nous chercher jusque dans notre patrie. Et ce n’est pas leurs dents et leur lĂšvre flĂ©trie Qui viendra nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces malfaiteurs Ă©pais Qui viendront nous chercher jusqu’en notre patrie. Et ce ne sera pas leurs faces exĂ©crĂ©es Qui viendront nous chercher sous les trembles Ă©pais. Et ce ne sera pas Ă  leurs lĂšvres sucrĂ©es Que nous demanderons notre baiser de paix. Et ce ne sera pas leurs faces Ă©chancrĂ©es Qui viendront nous chercher sous les ormes Ă©pais. Et ce n’est pas leurs dents et leurs lĂšvres nacrĂ©es Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Une autre, une autre lĂšvre et un peu plus sacrĂ©e Mettra sur nos deux yeux notre baiser de paix. Une main moins aveugle un peu plus consacrĂ©e Saura nous retrouver sous les chastes cyprĂšs. Une mains diligente ensemble que sacrĂ© Saura nous retrouver dans la forĂȘt Ă©paisse. Une peine indulgente et pourtant consacrĂ©e Saura se retrouver dans le genre et l’espĂšce. Et ce ne sera pas ces pĂąles muscadins Qui nous soulĂšverons nos nuques soulagĂ©es. Et ce ne sera pas ces inertes gandins Qui nous dĂ©laveront nos faces ravagĂ©es. Et ce ne sera pas leurs faces abhorrĂ©es Qui viendront nous chercher sous les pommiers Ă©pais. Et ce ne sera pas leurs lĂšvres dĂ©florĂ©es Qui viendront nous donner notre baiser de paix. Et ce ne sera pas ces fades galantins Qui viendront nous chercher dans notre pourriture. Et ce ne sera pas ces maussades pantins Qui nous retourneront dans l’outrage et l’ordure. Et ce ne sera pas ces fades plaisantins Qui viendront nous chercher dans notre turpitude. Et ce ne sera pas ces aimables pantins Qui nous ramasseront notre dĂ©crĂ©pitude. Et ce ne sera pas ces gardiens de prison Qui viendront nous lever les portes de nos geĂŽles. Et ce ne sera pas par dessus leurs Ă©paules Que nous contemplerons un immense horizon. Et ce ne sera pas ces gardiens de prison Qui viendront nous nommer au seuil de nos geĂŽles. Et ce ne sera pas par dessus leur Ă©paule Que nous nous heurterons au mur de l’horizon. Et ce ne sera pas ces gardiens de prison Qui nous appelleront au seuil de notre geĂŽle. Et ce ne sera pas par dessus leur Ă©paule Que nous contemplerons un immense horizon. Et ce ne sera pas ces gardiens de prison Qui viendront nous cueillir au seuil de notre geĂŽle. Et ce ne sera pas par-dessus leur Ă©paule Que nous regardons les bords de l’horizon Et ce ne sera pas ces gardiens de prison Qui viendront nous lever nos registres d’écrous. Et qui feront peser sur la peau de nos cous L’immense Ă©crasement de ce morne horizon. Et ce ne sera pas ces gardiens de prison Qui viendront nous lever de nos pĂąles Ă©crous. Et qui feront peser sur la peau de nos cous Le plat Ă©crasement d’un immense horizon. Et ce ne sera pas ces gardiens de prison Qui nous appelleront par nos noms de baptĂȘme. Et qui rĂ©voqueront l’implacable anathĂšme Suspendu par dessus les bords de l’horizon. Et ce ne sera pas ces gardiens de prison Qui nous appelleront par nos noms de baptĂȘme. Du nom des saints patrons qui font tous notre thĂšme Et qui tiendront le coup aux bords de l’horizon. Et ce ne sera pas ces gardiens de prison Qui nous appelleront par nos noms de famille. Du nom de notre pĂšre et du fil en aiguille Du nom de notre aĂŻeul et jusqu’à l’horizon. Du nom de notre race et de notre paroisse. Du nom de notre Christ et notre rĂ©dempteur. Du nom de votre grĂące et du premier auteur. Du nom de notre peine et notre morne angoisse. Il n’iront pas chercher dans la derniĂšre alcĂŽve Le nom qui nous distingue et le nom qui nous perd. Le nom qui nous assemble et le nom qui nous sert. Le nom qui nous contente et le nom qui nous sauve. Il allait hĂ©riter de l’antique destin. Le mettrait-il jamais sous le joug de la grĂące. Il allait hĂ©riter d’une Ă©ternelle race. La mettrait-il jamais sous le rĂšgne latin. Ce n’est pas ce vieil homme avec ce jeune beau Qui viendront nous chercher dans notre pourriture, Le jour que nous serons viande et nourriture Et rĂ©crĂ©ation pour les vers du tombeau. Et qui feront peser sur la peau de nos nuques Le poids de la potence et le poids du licol. Et qui feront peser sur nos faces caduques La rĂ©probation courant au ras du sol. Et ce ne sera pas ces maĂźtres de tactiques Qui nous emporteront dans un dernier abord. Ce n’est pas ces frileux et ces antipathiques Qui nous feront sauter par un dernier sabord. Ce n’est point leur tableaux, fussent-ils synoptiques, Qui nous assembleront comme un pauvre troupeau. Ce n’est point leurs terreurs, fussent-elles optiques, Qui nous feront trembler la laine sur la peau. Et nous serons conduits par une autre houlette. Et nos bergers seront de bien autres bergĂšres. Et nous nous dĂ©lierons d’une autre bandelette. Et nous serons menĂ©s par des mains plus lĂ©gĂšres. Et nous serons conduits par une autre houlette Et nos bergers seront deux antiques bergĂšres. Et nous serons liĂ©s d’une autre bandelette. Et nous serons liĂ©s par des mains plus lĂ©gĂšres. Et nous autres Français nous en suivrons une autre. Et nous filerons doux nous autres les malins. Et le plus dĂ©lurĂ© fera le bon apĂŽtre. Et nos derniers soleils seront sur leurs dĂ©clins. Et nous Parisiens nous en suivrons une autre. Et nous filerons doux nous autres les malins. Et le plus coquebin fera le bon apĂŽtre. Et les soleils d’hiver seront sur leurs dĂ©clins. Et nous autres Français nous en suivrons la nĂŽtre. Et nous filerons doux nous autres les malins. Et le plus assurĂ© fera le bon apĂŽtre. Et nos derniers soleils seront sur leurs dĂ©clins. Et nous Parisiens nous en suivront la nĂŽtre. Et nous filerons doux nous autres les malins. Et le plus Ă©purĂ© fera le bon apĂŽtre. Et les pĂąles soleils seront sur leurs dĂ©clins. Et nous gens de Paris nous en suivront la nĂŽtre. Et nous filerons doux nous autres les malins. Et le plus mesurĂ© fera le bon apĂŽtre. Et les soleils d’hiver seront sur leurs dĂ©clins. Et nous gens d’ici nous en suivrons la nĂŽtre. Et nous filerons doux nous autres les malins. Et le plus assurĂ© fera le bon apĂŽtre. Et nos derniers soleils seront sur leurs dĂ©clins. Et nos bergers seront deux uniques bergĂšres. Et nous filerons doux par devant ces houlettes. Et nous serons menĂ©s par des mains plus lĂ©gĂšres. Et nous Ă©carterons nos pĂąles bandelette. L’une est morte au milieu des pĂąles citoyens, Pieusement couchĂ©e en un lieu de parade. Soigneusement dressĂ©e en une haute estrade L’autre est morte au milieu des pĂąles citoyens. L’une est morte au milieu de tous les citoyens, Pieusement couchĂ©e en un lit de tendresse. Soigneusement dressĂ©e en un lit de dĂ©tresse, L’autre est morte au milieu de tous les citoyens. Parmi les jeunes clercs et les curĂ©s-doyens L’une est morte au milieu d’un immense concours. Parmi les hommes d’arme et les curĂ©s-doyens L’autre est morte au milieu d’un immense concours. Les yeux sur une croix, sans hĂąte et sans discours, L’une est morte au milieu d’une vieille paroisse. Les yeux sur une croix, aprĂšs quelques discours, L’autre est morte au milieu d’une vieille paroisse. Les yeux sur une croix sans hĂąte et sans faiblesse, L’une est morte au milieu d’un immense appareil. Les yeux sur une croix sans honte et sans faiblesse L’autre est morte au milieu d’un immense appareil. Sous un dais garanti des rayons de soleil, L’une est morte au milieu d’une simple noblesse. À la face de Dieu liĂ©e en plein soleil L’autre est morte au milieu d’une simple noblesse. Pieusement couchĂ©e en un lit d’échafaud, L’une est morte au milieu d’un immense diocĂšse. Soigneusement dressĂ©e en un dur Ă©chafaud L’autre est morte au milieu d’un immense diocĂšse. AĂŻeule sans reproche, aĂŻeule sans dĂ©faut, L’une est morte au milieu d’une foule française. Captive sans reproche et prise par dĂ©faut L’autre est morte au milieu d’une foule française. Les yeux levĂ©s au ciel, sans hĂąte et sans angoisse, L’une est morte au milieu d’un peuple convoquĂ©. Les yeux levĂ©s au ciel, non sans un peu d’angoisse, L’autre est morte au milieu d’un peuple convoquĂ©. Ses beaux doigts joints levĂ©s vers la misĂ©ricorde, L’une est morte au milieu d’un peuple interloquĂ©. Ses deux poignets liĂ©s aux nƓuds d’une Ăąpre corde, L’autre est morte au milieu d’un peuple interloquĂ©. Ses beaux cheveux nouĂ©s le long de son sarrau, L’une est morte au milieu d’un peuple de fidĂšles. Ses beaux cheveux nouĂ©s par la main du bourreau, L’autre est morte au milieu d’un peuple de fidĂšles. Ces yeux qui tant avaient guettĂ© les hirondelles Ne guettĂšrent plus rien que les dons de l’Esprit. Ces yeux qui tant avaient guettĂ© les hirondelles Ne guettĂšrent plus rien que de voir JĂ©sus-Christ. Diligente bergĂšre, inlassable gardienne, L’une est morte au milieu de toute chrĂ©tientĂ©. Diligente bergĂšre, inlassable gardienne, L’autre est morte au milieu de toute chrĂ©tientĂ©. Vigilante bergĂšre, aĂŻeule et paroissienne, L’une est morte au milieu de toute chrĂ©tientĂ©. Vigilante bergĂšre, aĂŻeule et paroissienne L’autre est morte au milieu de toute chrĂ©tientĂ©. D’un cƓur sans dĂ©faillance et d’un cƓur indomptĂ©, L’une est morte au milieu de la race chrĂ©tienne. D’un cƓur sans dĂ©faillance et d’un cƓur indomptĂ©, L’autre est morte au milieu de la race chrĂ©tienne. Et nous autres Français nous en suivrons la nĂŽtre, La plus appareillĂ©e aux dons du Saint-Esprit, La plus appareillĂ©e au livre de l’apĂŽtre, La plus appareillĂ©e au cƓur de JĂ©sus-Christ. Et nous autres Français nous en suivrons la nĂŽtre. C’est la plus attachĂ©e aux dons du Saint-Esprit. Et la plus affichĂ©e au livre de l’apĂŽtre. Et la plus approchĂ©e au cƓur de JĂ©sus-Christ. Et nous autres Français nous en suivrons la nĂŽtre. C’est la plus accointĂ©e aux dons du Saint-Esprit. Et la plus attestĂ©e au livre de l’apĂŽtre. Et la plus imitĂ©e au cƓur de JĂ©sus-Christ. Dans un vallon semĂ© de bouleaux et de hĂȘtres L’une est morte au milieu d’un peuple prosternĂ©. Sur un haut Ă©chafaud de bouleaux et de hĂȘtres L’autre est morte au milieu d’un peuple consternĂ©. Au milieu des bourgeois, des manants et des prĂȘtres, L’une est morte au milieu d’un peuple nouveau-nĂ©. Au milieu des soldats, des bourreaux et des prĂȘtres, L’autre est morte au milieu d’un peuple abandonnĂ©. Dans le propre pays de ses simples ancĂȘtres L’une est morte au milieu d’un peuple couronnĂ©. Au milieu des docteurs, des savants et des traitres L’autre est morte au milieu d’un peuple rançonnĂ©. Dans le propre pays de ses travaux champĂȘtres L’une est morte au milieu d’un peuple façonnĂ©. Sous les regards dardĂ©s de toutes les fenĂȘtres L’autre est morte au milieu d’un peuple pardonnĂ©. Au milieu du troupeau conduit pas ses pasteurs, L’une est morte au milieu d’une sorte de place. Au milieu du troupeau sĂ©duit par les docteurs L’autre est morte au milieu d’une publique place. L’une est morte au milieu d’une sorte d’espace LaissĂ© par le respect et par le recueillement. L’autre est morte au milieu d’un implacable espace GardĂ© par la terreur et le gouvernement. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Car elle a parcourus les degrĂ©s de la vie. Et le pĂ©chĂ© d’orgueil et le pĂ©chĂ© d’envie Se sont longtemps liguĂ©s contre son noble vƓu. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Car elle a parcouru les relais de la vie. Et le pĂ©chĂ© d’orgueil et le pĂ©chĂ© d’envie Se sont longtemps jouĂ©s aux rĂšgles de ce jeu. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Car elle a parcouru les dĂ©lais de la vie. Et le pĂ©chĂ© d’orgueil et le pĂ©chĂ© d’envie Se sont longtemps brĂ»lĂ©s aux flammes de ce feu. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Car elle Ă  parcouru les palais de la vie. Et le pĂ©chĂ© d’orgueil et le pĂ©chĂ© d’envie Se sont longtemps pincĂ©s aux mailles de ce nƓud Sans hĂąte et sans faiblesse et sans nul tremblement, L’une est morte au milieu de la plĂšbe chrĂ©tienne. Sans honte et sans faiblesse et sans nul tremblement, L’autre est morte au milieu de la plĂšbe chrĂ©tienne. Diligente, attentive et candide doyenne, L’une est morte au milieu d’un grand assemblement. Diligente, attentive et jeune citoyenne, L’autre est morte au milieu d’un grand assemblement. Et l’une Ă©tait ridĂ©e et c’était une ancienne. Et tous la regardaient comme une auguste aĂŻeule. Et l’autre, obĂ©issante et pauvre paroissienne, Parmi ce grand concours demeurait pauvre et seule. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Car elle a parcouru les Ăąges de la vie. Voici le long chemin de la route suivie Depuis le premier Ăąge et le premier aveu. Voici son livre d’heure et voici son horaire. Voici tout le parcours de son Ă©vĂ©nement. Voici ses lieux d’étape et son itinĂ©raire. Voici tout le discours de son avĂšnement. Or la terre est chargĂ©e, et c’est la terre seule, De faire le long Ăąge et l’ñge rĂ©volu. Et de faire une enfant et de faire une aĂŻeule, Et de marquer les bords de notre Ăąge absolu. Et de marquer les bords d’un courage rebelle. Et de marquer les bords d’une longueur de temps. Et de faire une laide et de faire une belle. Et de faire un automne et de faire un printemps. Et de marquer les bords d’un Ăąge de merveille Ou d’un Ăąge vieillot frileusement couvert. Et de faire une jeune et de faire une vieille. Et de faire un avril et de faire un hiver. Et la terre est chargĂ©e, et c’est la terre seule, De faire le grand Ăąge et l’ñge rĂ©solu. Et de faire une femme et de faire une aĂŻeule. Et de couper les bords de notre Ăąge absolu. Et la terre est chargĂ©e, et c’est la son office, De dĂ©couper les bords de notre Ăąge rĂ©el, Sans aucun appareil, sans aucun artifice, Du premier jour des Rois jusqu’au dernier NoĂ«l. Et la vie est chargĂ©e, et c’est lĂ  son affaire, De marcher tout le long de notre Ăąge rĂ©el. Et nul ne peut changer, et nul ne peut dĂ©faire La courbe qu’elle inscrit jusqu’au dernier NoĂ«l. Et la vie est chargĂ©e, et c’est lĂ  son affaire D’enregistrer l’ampleur de notre Ăąge rĂ©el. Nul ne peut altĂ©rer, nul ne peut redĂ©faire Le tracĂ© qu’elle inscrit jusqu’au dernier NoĂ«l. C’est la terre qui gagne et la terre qui plaide Et qui fait le procĂšs de nos vieillissements Et qui fait une belle et qui fait une laide Et qui fait le tracĂ© de nos bannissements. C’est la terre qui gagne et la terre qui compte Et qui fait le procĂšs de nos inscriptions Et qui fait le mĂ©moire et qui fait le dĂ©compte Et qui fait le tracĂ© de nos descriptions. C’est la terre qui gagne et la terre qui compte Et qui fait le procĂšs de nos endossements Et qui fait le sommaire et qui rĂšgle le compte Et qui fait le tracĂ© de nos efforcements. C’est la terre qui mord et la terre qui compte Et qui fait le procĂšs de nos consomptions Et qui rĂšgle l’histoire et qui rĂšgle le conte Et qui fait le tracĂ© de nos rĂ©demptions. C’est la terre qui gagne et la terre qui marque Et qui fait le procĂšs de nos morcellements Et qui nous introduit prĂšs du plus grand monarque Et qui fait le tracĂ© de nos nivellements. C’est la terre qui gagne, qui mord, et qui accroĂźt Et qui fait le procĂšs de nos accroissements Et qui nous introduit auprĂšs du plus grand roi Et qui fait le tracĂ© de nos dĂ©passements. Et la terre enregistre et fait le relevĂ©. Elle inscrit pour toujours la creuse inscription. Du pain spirituel, du grain de sĂ©nevĂ© Elle fait l’inventaire et la description. Et la terre enregistre et c’est elle qui toise Et qui fait la grandeur ou l’inepte bassesse Et LutĂšce et Paris et Nanterre et Pontoise Et la dame d’atour et la jeune princesse. Et la terre mesure et c’est elle qui trace La courbe et le graphique et l’enregistrement. Et qui fait un orgueil et qui fait une race Et qui fait une assise et un effondrement. Et la terre mesure et c’est elle qui trace La courbe et le graphique et l’enregistrement. Et qui fait une ligne et qui fait une race Et qui fait un royaume et un dĂ©membrement. C’est la terre qui gagne et c’est elle qui fait Un Ă©tablissement et qui fait un dĂ©bris Et c’est elle en principe et c’est elle en effet Qui fait les cheveux blonds et fait les cheveux gris. C’est la terre qui gagne et c’est elle en effet Avant les cheveux blancs qui fait les cheveux gris Et c’est elle qui marque et c’est elle qui fait Fleurir les cheveux d’or et notre beau Paris. C’est la terre qui note et c’est elle en effet AprĂšs les cheveux blonds qui fait les cheveux gris Et c’est elle qui cote et c’est elle qui fait Neiger les cheveux blancs de notre vieux Paris. C’est elle qui dĂ©coupe un immense parvis Sous les pas de Dieu mĂȘme et devant Notre Dame. C’est elle qui recule aux horizons de l’ñme L’immense espacement de notre grand Paris. C’est elle qui dĂ©roule un immense tapis Sous les pieds de Dieu mĂȘme et devant Notre Dame. C’est elle qui recule aux horizons de l’ñme Les immenses destins du temporel Paris. Rien ne peut supplĂ©er cet enregistrement Et cette inscription et cette expĂ©rience. Rien ne peut remplacer le jour de l’échĂ©ance Et la procession et le dĂ©nombrement. Et l’une en Paradis a l’ñge que Dieu veut. Dieu n’a plus qu’à choisir entre de si beaux Ăąges. Comme un roi qui hĂ©site entre de beaux villages Et ne sait pas lequel recevra son aveu. Et l’une en paradis a l’ñge que Dieu veut. Dieu n’a plus qu’à choisir entre de si beaux jours Comme un roi qui hĂ©site entre de beaux amours, Entre l’amour du peuple, entre l’amour de Dieu. Et l’une en paradis a l’ñge que Dieu veut. Dieu n’a plus qu’à choisir entre de si beaux ans Comme un roi qui s’avance entre ses paysans Et porte la concorde et le rĂšgne de Dieu. Et l’une en paradis a l’ñge que Dieu veut Dieu n’a plus qu’à choisir dans ces belles annĂ©es Comme un roi qui choisit des gerbes moissonnĂ©es Et ne sait pas laquelle est la plus prĂšs de Dieu. Et l’une en paradis a l’ñge que Dieu veut. Il n’a plus qu’à choisir entre de si beaux gages Comme un roi qui hĂ©site entre de beaux parages Et ne sait pas lequel pourrait fixer son vƓu. Et l’une en paradis a l’ñge que Dieu veut. Il n’a plus qu’a choisir entre ces beaux Ă©tages Comme un roi qui choisit entre ses paysages Et ne sait pas lequel ferait le plus beau jeu. Et l’une en paradis a l’ñge que Dieu veut. Il n’a plus qu’à choisir entre ces hĂ©ritages Comme un roi qui hĂ©site entre ses apanages Et ne sait pas lequel fait le plus bel enjeu. Et l’une en paradis a l’ñge que Dieu veut. Il n’a plus qu’à choisir entre ces beaux partages Comme un roi qui hĂ©site entre tant de bailliages Et ne sait pas lequel recevra son aveu. Et comme on ne sait pas dans une belle annĂ©e Ce qu’on aime le mieux, si c’est le doux printemps, Ou si c’est une glĂšbe en son oĂ»t moissonnĂ©e, Et comme on ne sait pas entre tant de beaux temps, Et comme on ne sait pas quand une annĂ©e est bonne Ce qu’on aime le mieux, si c’est le dur Ă©tĂ© Ou le mĂ©lancolique et jaunissant automne, Et comme on ne sait pas quand le sort est jetĂ©, Et comme on ne sait pas quand le choix est ouvert Ce qu’on aime le mieux, si c’est le doux avril Ou l’ardent messidor, si c’est le grave hiver Ou l’éternel Ă©tĂ© pĂšre du pĂšre Nil, Et comme on ne sait pas quand une annĂ©e est belle Ce qu’on aime le mieux, si c’est les giboulĂ©es Ou si c’est le retour de la noire hirondelle Ou si c’est le rĂ©seau des peines dĂ©roulĂ©es, Et comme on ne sait pas quand le choix est ouvert Ce qu’on aime le mieux, si c’est le doux avril Ou le lourd fructidor, si c’est le grave hiver Ou la feuille d’automne ou les rĂȘves d’exil, Et comme on ne sait pas quand une annĂ©e est belle Ce qu’on aime le mieux parmi tant de beautĂ©, Ou du printemps volage, ou de l’étĂ© fidĂšle, Ou des graves hivers ou des graves Ă©tĂ©s, Et comme on ne sait pas dans l’immense univers Ce qu’on aime le mieux, si c’est le dur Ă©tĂ©, Ou le sĂ©vĂšre automne ou les graves hivers, Et comme on ne sait pas dans cette Ă©ternitĂ©, Et comme on ne sait pas parmi tant de bonheurs Ce qu’on aime le mieux, si c’est un bel orage, Ou si c’est la saison du profond labourage, Ou le balancement des vastes moissonneurs, Et comme on ne sait pas entre tous ces honneurs Ce qu’on aime le mieux, si c’est un beau verglas, Ou la neige Ă©tendue au loin des pays plats, Ou le ramassement des dĂ©biles glaneurs. Ainsi Dieu ne sait pas entre tant de beaux jours Ce qu’il aime le mieux, si c’est le doux printemps, Ou la sĂ©vĂ©ritĂ© de plus fermes amours, Ou la dĂ©clivitĂ© de plus obliques temps. Ainsi Dieu ne sait pas entre tant de beaux temps Ce qu’il aime le mieux, si c’est le doux avril Ou la feuille d’automne et le rĂȘve d’exil, Ou le mĂ©lancolique et volage printemps. Ainsi Dieu ne sait pas entre tant de beaux jours Ce qu’il aime le mieux, si c’est la douce enfance Et si c’est la modeste et simple obĂ©issance Ou la gratuitĂ© des parfaites amours. Ainsi Dieu ne sait pas, ainsi Dieu ne sait plus Ce qu’il aime le mieux dans une belle vie, Si c’est cette Ăąpre pente incessamment gravie Ou la gratuitĂ© des amours absolus. Ainsi Dieu ne sait pas entre tant de beaux jours Ce qu’il aime le mieux, si c’est la jeune enfance Et si c’est le travail ou les jeux de la danse Ou la fidĂ©litĂ© des terrestres amours. Ainsi Dieu ne sait pas dans une belle vie Ce qu’il aime le mieux entre tant de beaux jours. Il regarde, il refait la route poursuivie. L’anticipation des cĂ©lestes amours. Dans une belle vie il n’est que de beaux jours. Dans une belle vie il fait toujours beau temps. Dieu la dĂ©roule toute et regarde longtemps Quel amour est plus cher entre tous ces amours. Ainsi Dieu ne sait pas, ainsi le divin maĂźtre Ne sait quel retenir et placer hors du lieu, Et pour lequel tenir et s’il faut vraiment mettre L’amour de la patrie aprĂšs l’amour de Dieu. Ainsi Dieu ne sait pas entre tant de beaux jours, De la plus belle enfant Ă  la plus belle aĂŻeule, Quel il aime le mieux de ces propres amours, Et s’il n’aime pas mieux une Ăąme errante et seule. Et s’il n’aime pas mieux une souple jeunesse. Et s’il n’aime pas mieux les dures fermetĂ©s. Et s’il n’aime pas mieux une belle vieillesse. Et s’il n’aimes pas mieux les dures pauvretĂ©s. Depuis les cheveux blonds jusques aux cheveux blancs. Et depuis l’escabeau jusqu’aux bras du fauteuil. Jusqu’au bord du tombeau, jusqu’au ras du cercueil. Depuis les premiers pas jusqu’aux pas chancelants. Et des premiers genoux jusqu’aux genoux tremblants. Du premier tabouret jusqu’au dernier fauteuil. Du premier pas de porte au ras du dernier seuil. Et des beaux cheveux blonds aux plus beaux chevaux blancs. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Il n’a plus qu’à choisir dans ces belles annĂ©es. Comme un roi qui choisit des gerbes moissonnĂ©es Jaune comme un trĂ©sor, blonde comme un cheveu. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Il n’a plus qu’à choisir dans ces belles annĂ©es. Comme un roi qui choisit des gerbes moissonnĂ©es Pleines comme un trĂ©sor, fines comme un cheveux. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Il n’a plus qu’à choisir dans ces belles annĂ©es. Comme un roi qui choisit des gerbes moissonnĂ©es Lourde comme un tapis, souple comme un cheveu. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Heureux ceux d’entre nous qui la verront paraĂźtre. Dans le vallon semĂ© de bouleaux et de hĂȘtres Heureux ceux qui pourront former un dernier vƓu. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut. Heureux les gens d’ici qui la verront paraĂźtre Comme une fille aimĂ©e aux pieds du divin maĂźtre Et qui formuleront un pĂ©rissable vƓu. Et l’une dans le ciel a l’ñge que Dieu veut, Fillette ou jeune femme ou diligente aĂŻeule. Comme un roi qui choisit dans une immense meule Une gerbe de blĂ© fine comme un cheveu. Mais l’autre dans le ciel ne peut avoir qu’un Ăąge. Et quand Dieu le voudrait il n’y pourrait rien faire. Et quand Dieu le voudrait ce n’est pas son affaire. Elle est montĂ©e au ciel dĂšs son apprentissage. Elle est montĂ©e au ciel ensemble jeune et sage À peine parvenue au bord de son printemps, Au temps de sa tendresse et de son jeune temps, À peine au dĂ©barquĂ© de son premier village. Elle est montĂ©e au ciel aprĂšs un premier stage Plus court que les trois ans du seigneur JĂ©sus-Christ, Mis non moins entendue aux dons du Saint-Esprit Que tant d’autres qui font un long pĂšlerinage. Elle est montĂ©e au ciel aprĂšs un jeune stage Plus court que les trois ans du maĂźtre JĂ©sus-Christ, Mais non moins Ă©clairĂ©e aux dons du Saint-Esprit Que tant d’autres qui font un long appareillage. Elle est montĂ©e au ciel aprĂšs un pauvre stage Plus court que les trois ans publics de JĂ©sus-Christ, Mais non moins entendue au dons du Saint-Esprit Que tant d’autres qui jouent un plus long personnage. Et l’autre dans le ciel n’a que l’ñge qu’elle a. Elle n’en a jamais eu qu’un sur cette terre. Elle a le mĂȘme au ciel dans la gloire et voilĂ  Ce que nous avons fait d’une enfant volontaire. Et d’autre dans le ciel n’est qu’une jeune enfant Telle qu’elle quitta des chemins de la terre. Car cet homme d’État et ce chef militaire Ne fut jamais qu’une humble et courageuse enfant. Et l’autre dans le ciel n’est qu’une jeune enfant Telle qu’elle partit de sa jeune Lorraine. Car cet homme de guerre et ce grand capitaine Ne fut jamais qu’une humble et courageuse enfant. Et l’autre en paradis n’est qu’une jeune enfant. Dieu n’a pas Ă  choisir ou l’un ou l’autre Ă©tage. Car cette enfant candide et ce chef triomphant Est morte au premier bord de son premier partage. Et l’autre en paradis n’est qu’une jeune enfant. Dieu n’a pas Ă  choisir l’un ou l’autre apanage. Car cette enfant fidĂšle et ce chef triomphant Est morte au premier saint de son pĂšlerinage. Et l’autre en paradis n’est qu’une jeune enfant. Dieu n’a pas Ă  choisir ou l’un ou l’autre gage. Car cette enfant docile et ce chef triomphant Est morte Ă  peine entrĂ©e au seuil de l’hĂ©ritage. Et ce grand gĂ©nĂ©ral qui prit tout un royaume, Et ce n’était pas rien, le royaume de France, Dans le dernier climat et sous le dernier dĂŽme N’aura pas plus vieilli que la jeune espĂ©rance. Et ce grand gĂ©nĂ©ral qui saisit un royaume, Et quel saisissement, le royaume de France Dans le dernier climat et sous le dernier dĂŽme Sera du mĂȘme jeu que la jeune espĂ©rance. Et ce grand gĂ©nĂ©ral qui menait des armĂ©es Comme on gagne le ciel et c’est tambour battant, Ainsi ce grand vainqueur et ce grand combattant Balayait en passant les graves renommĂ©es Comme elle eĂ»t balayĂ© le devant de sa porte. Et nous ses serviteurs, nous autres les puissants, Nous l’avons fait pĂ©rir, nous l’avons faite morte Comme HĂ©rode fit morts trois cent mille Innocents. Heureux qui la verra dans cette autre lumiĂšre, Le front plus dĂ©couvert que les saints Innocents, Telle qu’on la voyait au seuil de sa chaumiĂšre, Ou parmi ses troupeaux frĂȘles et bondissants. Car ce grand gĂ©nĂ©ral qui gagna vingt batailles Comme on gagne le ciel et ce chef triomphant Sous le casque battu, sous la cotte de mailles Ne fut jamais qu’une humble et courageuse enfant. Et ce grand gĂ©nĂ©ral qui prenait des bastilles Ainsi qu’on prend le ciel, c’est en sautant dedans N’étais devant la herse et parmi le redans Qu’une enfant Ă©chappĂ©e Ă  de pauvres familles. Et ce grand gĂ©nĂ©ral qui ramassait des bourgs Comme on gaule des noix avec un grand Ă©pieu N’était qu’une humble enfant perdue en deux amours, L’amour de son pays parmi l’amour de Dieu. Et ce grand gĂ©nĂ©ral qui ramassait des villes Comme on gaule des noix avec un grand Ă©pieu N’était dans la rumeur et des guerres civiles Qu’une humble enfant perdue en son amour de Dieu. Et ce grand gĂ©nĂ©ral qui forçait des provinces Comme on gaule des noix avec un grand Ă©pieu N’était dans les honneurs, et dans les jeux des princes, Qu’une humble enfant perdue en son amour de Dieu. Et ce grand gĂ©nĂ©ral qui reprit un royaume Comme on reprend le ciel, et c’est de vive force, Était dans la cuirasse et sous la dure Ă©corce Comme un tendre froment dans la paille et le chaume. Et ce grand gĂ©nĂ©ral qui conquit un royaume, Comme on conquiert le ciel, et c’est de vive force, Était sous la cuirasse, et le masque du heaume, Comme un tendre froment sous une dure Ă©corce. Heureux ceux d’entre nous qui la verront paraĂźtre, Le regard plus ouvert que d’une Ăąme d’enfant Quand ce grand gĂ©nĂ©ral et ce chef triomphant Ressemblera sa troupe aux pieds de notre maĂźtre. Et l’une est morte un soir, et le trois de janvier. Tout un peuple assemblĂ© la regardait mourir. Le bourgeois, le manant, le pĂątre et le bouvier Pleuraient et se taisaient et la voyaient partir. L’éblouissant manteau d’une sĂ©vĂšre neige Couvrait les beaux vallons du pays parisis. L’amour de tout un peuple Ă©tait tout son cortĂšge. Et ce peuple c’était le peuple de Paris. L’éblouissant manteau d’une prudente neige Couvrait les beaux recreux de la naissante France. L’amour de tout un peuple Ă©tait son espĂ©rance. L’amour de tout un peuple Ă©tait tout son cortĂšge. Et par France j’entends le pays parisis. Et la neige Ă©clatait, tunique grave et blanche. On avait fabriquĂ© comme une estrade en planche. Et l’antique LutĂšce Ă©tait dĂ©jĂ  Paris. La neige dĂ©roulait un immense tapis. L’histoire dĂ©roulait un immense discours. La gloire en commençait un immense parcours. DĂ©jĂ  l’humble LutĂšce Ă©tait le grand Paris. La neige dĂ©coupait un immense parvis. L’histoire prĂ©parait un immense destin. La gloire se levait dans un jeune matin. Et la jeune LutĂšce Ă©tait le vieux Paris. L’autre est morte un matin et le trente de mai Dans l’hĂ©sitation et la stupeur publiques. Une forĂȘt d’honneur, de haches et de piques La tenaient circonscrite en un cercle fermĂ©. Et l’une est morte ainsi d’une mort solennelle Sur ces quatre-vingt-dix ou quatre-vingt-douze ans Et les durs villageois et les durs paysans, La regardant vieillir l’avaient crue Ă©ternelle. Et l’autre est morte ainsi d’une mort solennelle. Elle n’avait passĂ© ses humbles dix-neuf ans Que de quatre ou cinq mois et sa cendre charnelle Fut dispersĂ©e aux vents. 3bJoYf. 307 255 231 55 200 86 49 201 234

charles peguy la mort n est rien